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24/04/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000006950178

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Ct0045, 24 avril 2006, JURITEXT000006950178


ARRET RENDU PAR LA COUR D'APPEL DE BORDEAUX -------------------------- Le : CINQUIEME CHAMBRE No de rôle :

04/01830 IT Monsieur X... Y... c/ Madame Z... A... épouse B..., prise en sa qualité d'administratrice légale de son fils Kévin B..., (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2004/009782 du 02/09/2004 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BORDEAUX) Société d'assurances MATMUT, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, S.A. POLYCLINIQUE DU MEDOC, prise en la personne de son liquidateur Monsieur P

ierre C..., Monsieur Pierre C..., pris es qualités de liquidateur de ...

ARRET RENDU PAR LA COUR D'APPEL DE BORDEAUX -------------------------- Le : CINQUIEME CHAMBRE No de rôle :

04/01830 IT Monsieur X... Y... c/ Madame Z... A... épouse B..., prise en sa qualité d'administratrice légale de son fils Kévin B..., (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2004/009782 du 02/09/2004 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BORDEAUX) Société d'assurances MATMUT, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, S.A. POLYCLINIQUE DU MEDOC, prise en la personne de son liquidateur Monsieur Pierre C..., Monsieur Pierre C..., pris es qualités de liquidateur de la SA POLYCLINIQUE DU MEDOC, PAVILLON DE LA MUTUALITE, Union Mutuelles régie par le Code de la Mutualité, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, CLINIQUE MUTUALISTE DU MEDOC, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA GIRONDE, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, S.A. COMPAGNIE GAN, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, Madame Christine D... veuve B... tant en son nom personnel qu'en sa qualité d'administratrice légale des biens de son fils mineur Lucas Nature de la décision : EXPERTISE Grosse délivrée le : aux avoués

Rendu le

Par mise à disposition au Greffe

Par Madame Josiane COLL, Conseiller

en présence de Monsieur Hervé E..., Greffier,

La COUR d'APPEL de BORDEAUX, CINQUIEME CHAMBRE, a, dans l'affaire opposant :

Monsieur X... Y... né le 02 Mars 1946 à TALENCE (33400) de

nationalité française demeurant 64, rue Aristide Briand 33340 LESPARRE MEDOC Représenté par la SCP CASTEJA-CLERMONTEL etamp; JAUBERT, avoués à la Cour assisté de Maître FABRE avocat au barreau de PARIS

Appelant d'un jugement rendu le 25 février 2004 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX suivant déclaration d'appel en date du 31 Mars 2004,

à :

Madame Z... A... épouse B..., prise en sa qualité d'administratrice légale de son fils Kévin B... ... par la SCP LABORY-MOUSSIE etamp; ANDOUARD, avoués à la Cour assistée de Maître Bruno VIDAL avocat au barreau de BORDEAUX

Société d'assurances MATMUT, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social 66, rue Sotteville 76100 ROUEN Représentée par la SCP FOURNIER, avoués à la Cour assistée de Maître Laurence DOUMAS avocat au barreau de BORDEAUX

S.A. POLYCLINIQUE DU MEDOC, prise en la personne de son liquidateur Monsieur Pierre C... Clinique Saint F... allée des Tulipes 33600 PESSAC

Monsieur Pierre C..., pris es qualité de liquidateur de la SA POLYCLINIQUE DU MEDOC 17, rue Levis 75017 PARIS Représenté par la SCP GAUTIER etamp; FONROUGE, avoués à la Cour assisté par Maître Corinne HERVE-JEUSEL avocat à la Cour

PAVILLON DE LA MUTUALITE Union Mutuelle régie par le Code de la Mutualité prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social 45, Cours du Maréchal Galliéni 33000 BORDEAUX défaillante

CLINIQUE MUTUALISTE DU MEDOC prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social 64, rue Aristide

Briand 33340 LESPARRE MEDOC Représentée par la SCP ARSENE-HENRY ET LANCON, avoués à la Cour assistée de Maître Henry BOERNER avocat au barreau de BORDEAUX

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA GIRONDE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social Place de l'Europe 33085 BORDEAUX Représentée par la SCP Luc BOYREAU etamp; Raphael MONROUX, avoués à la Cour assistée de la SCP FAVREAU-CIVILISE avocats au barreau de BORDEAUX

S.A. COMPAGNIE GAN, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social 8-10, rue d'Astorg 75000 PARIS Représentée par la SCP Michel PUYBARAUD, avoués à la Cour assistée de Maître DE BOUSSAC avocat au barreau de BORDEAUX

Madame Christine D... veuve B... tant en son nom personnel qu'en sa qualité d'administratrice légale des biens de son fils mineur Lucas née le 25 Février 1969 à BANGUI de nationalité française demeurant 17 Cours du Perrier de Larsan 33340 LESPARRE MEDOC Représentée par la SCP LABORY-MOUSSIE etamp; ANDOUARD, avoués à la Cour assistée de Maître Bruno VIDAL avocat au barreau de BORDEAUX

Intimés,

Rendu l'arrêt réputé contradictoire suivant après que la cause a été débattue en audience publique, le 13 Décembre 2005 devant :

Monsieur Patrick GABORIAU, Président,

Madame Josiane COLL, Conseiller,

Madame Edith O'YL, Conseiller,

assistés de Monsieur Hervé E..., Greffier,

et qu'il en a été délibéré par les Magistrats du Siège ayant assisté aux débats.

Vu le jugement du Tribunal de Grande Instance de Bordeaux en date du 25 février 2004.

Vu l'acte d'appel de Monsieur Y... X... en date du 31 mars 2004.

Vu les conclusions de Monsieur Y... X... en date du 24 novembre 2005.

Vu les conclusions de la SA Polyclinique du MEDOC en date du 8 février 2005.

Vu les conclusions du Pavillon de la Mutualité en date du 22 novembre 2005.

Vu les conclusions de la Caisse Primaire d'assurance maladie de la GIRONDE en date du 10 juin 2005.

Vu les conclusions de Madame A... Z... tant en son nom propre qu'en sa qualité d'administratrice légale de ses fils mineurs Kévin et Steeve B..., Madame Christine D... veuve B... tant en son nom propre qu'en sa qualité d'administratrice légale de son fils mineur Lucas B... en date du 13 juin 2005.

Vu les conclusions de la compagnie GAN INCENDIE ACCIDENTS en date du 17 novembre 2005.

Vu les conclusions de la compagnie la MATMUT en date du 18 novembre 2005.

La procédure a été clôturée par ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 29 novembre 2005.

Sur quoi :

Le 17 septembre 1989, Madame A... Z... mettait au monde un enfant appelé KÉVIN. Cette naissance se déroulait à la SA polyclinique du MEDOC à LESPARRE, assurée à l'époque des faits par la COMPAGNIE GAN INCENDIE ACCIDENTS.

L'accouchement se déroulait par voie naturelle et était pratiqué par le docteur Y... X..., chirurgien de formation qui assurait le remplacement du docteur G... gynécologue obstétricien absent pendant cette période.

L'accouchement se passait difficilement et la sage-femme appelait Monsieur Y... X... qui décidait d'utiliser les forceps pour extraire l'enfant, qui présentait à la naissance des signes d'anoxie et des traumatismes crâniens et faciaux. Il était presqu'immédiatement transporté à l'hôpital des enfants à Bordeaux.

Il est atteint actuellement de graves handicaps physiques et mentaux. Madame A... Z... et Monsieur B... H..., père de l'enfant, aujourd'hui décédé et aux droits duquel vient sa seconde épouse Madame Christine D... ont assigné Monsieur Y... X..., la polyclinique du MEDOC, et son assureur LA COMPAGNIE GAN INCENDIE ACCIDENTS.

La polyclinique du MEDOC, ayant fait l'objet d'une reprise de son activité par le Pavillon de la mutualité, ce dernier intervenait dans la procédure ainsi que son assureur la MATMUT.

Un premier rapport d'expertise a eu lieu. Les deux experts désignés le Professeur I... et le professeur Jean-Paul J... concluaient que l'état très grave de l'enfant était du à deux causes : un mécanisme anoxo-ischémique, ayant lui même deux origines, l'une prépondérante, étant selon eux la double circulaire du cordon ombilical, qui s'étant noué autour du cou de l'enfant progressivement au cours de l'accouchement, a provoqué une désaturation oxygénée foetale et l'autre étant une bradycardie foetale, conséquence de la souffrance des centres nerveux qui aggrave l'hypodébit cérébral.

La deuxième cause de souffrances étant d'ordre purement mécanique à savoir l'application du forceps de TARNIER ayant entraîné un hématome du cuir chevelu et de la face et surtout une fracture du crane à gauche et celle de la mandibule à droite avec paralysie faciale

périphérique, la fracture du crane, réalisant une embarrure, a exercé sur le cerveau et sur les vaisseaux sanguins un effet compressif.

Les experts indiquent que ce mécanisme a complété ou peut-être favorisé la souffrance anoxo-ischémique d'origine circulatoire.

Les deux experts expliquent qu'à leur avis le caractère traumatique du forceps a sans doute été favorisé par la circulaire du cordon.

Ils concluaient que la responsabilité de Monsieur Y... X... devait être minimisée l'essentiel des lésions étant selon eux du à la double circulaire du cordon qui avait obligé à des tractions plus puissantes sur les branches du forceps avec "forcément décomposition des forces appliquées".

Par jugement en date du 19 mars 2002 une nouvelle expertise était ordonnée et les professeurs PAPIERNICK E et J.P. GALLET étaient désignés.

Ils déposaient leurs rapports le 19 septembre 2002.

Ils constatent, comme d'ailleurs les premiers experts qu'un certain nombre de documents ne sont pas fournis, notamment le cahier de police sur lequel Monsieur Y... X... a enregistré le compte rendu de l'utilisation du forceps, ce cahier ayant disparu et la fermeture de la polyclinique du MEDOC n'ayant pas permis de le retrouver. Il n' a pas été possible de retrouver l'enregistreur papier du monitoring qui ne fonctionnait plus à partir de 4h30 du matin, bien que l'appareil laissait clairement entendre les bruits du coeur de l'enfant et permettait donc une surveillance auditive.

Leurs conclusions sont profondément différentes des premiers experts. Ils indiquent que le choix de la pose du forceps était tout à fait adapté mais estiment que sa mauvaise utilisation est à l'origine du préjudice de l'enfant, préjudice causé selon eux par l'embarrure et non par l'effet de la double circulaire, dont ils contestent

formellement l'existence, indiquant qu'il n'y a aucune preuve objective de cette double circulaire dans le dossier et que l'enfant ne portait aucune trace de strangulation autour du cou.

Le tribunal en se référant à ce rapport d'expertise a, donc, consacré la responsabilité exclusive de Monsieur Y... X...

Il apparaît à la lecture des deux expertises que l'on ne se trouve pas uniquement face à deux appréciations différentes : à savoir que les experts ne seraient pas d'accord sur les responsabilités respectives de la double circulaire et de la pose du forceps, mais bien à une appréciation différente de la réalité même de l'accouchement puisque le professeur PAPIERNICK et le Professeur GALLET nient totalement l'existence de la double circulaire en affirmant que son existence ne ressort d'aucun élément, alors même qu'ils indiquent qu'ils n'ont pas pu obtenir de l'hôpital des enfants de consulter son dossier médical. Ils n'ont donc pas pu savoir exactement quelles ont été les constatations des médecins à l'examen initial, voire ultérieurement surtout, qu'une lettre très importante est jointe ; cette lettre écrite par l'anesthésiste ayant assistée à l'accouchement et ayant réanimé l'enfant fait état de 2 circulaires très serrées du cordon. Ce courrier, écrit le jour même de la naissance de l'enfant, est précisément destiné aux services hospitaliers, afin de leur expliquer ce qui s'est passé. Dès lors, on ne saurait le remettre en cause. Quelque soit l'importance des relations confraternelles, on ne peut envisager que l'anesthésiste fasse un courrier de complaisance, inventant des éléments qui n'existent pas pour sauvegarder la réputation ou les intérêts d'un confrère au cas où sa responsabilité pourrait être engagée alors même que deux heures ou trois heures après la naissance du bébé la gravité de son cas était envisageable mais non certaine.

Qu'ultérieurement, plusieurs années après l'anesthésiste ne se

rappelle plus précisément de ce fait est bien compréhensible, mais pour autant cela ne saurait mettre en doute ses premières constatations.

Dès lors, la Cour doit considérer comme acquis qu'une double circulaire entourait à la naissance le cou de l'enfant. Pour autant, on ignore si ce fait a joué un rôle déterminant. Les deuxièmes experts estimant qu'en tout état de cause Kevin ne présentait pas les caractéristiques d'un enfant ayant subi une grande anoxie foetale et attribuent à la seule embarrure l'état actuel de l'enfant, il apparaît, donc, nécessaire d'obtenir un troisième avis, qui sera demandé à un obstétricien, et à un pédiatre comme cela sera précisé dans le dispositif du présent arrêt.

PAR CES MOTIFS :

Ordonne une nouvelle expertise et commet pour y procéder

Monsieur COLAN Jean-Claude Centre Médico Chirurgical Foch K... de Gynécologie Obstétrique 40, rue worth BP 36 92151 SURESNES

Monsieur BELLETTE DE VILLENEUVE Thierry L... de service neurope de l'hôpital des enfants Armand Trousseau 26, avenue du docteur Arnold M... 75571 PARIS cédex 12

Avec pour mission de prendre connaissance de tous les documents fournis par les partis concernant la naissance de Kevin B..., prendre également connaissance du dossier d'hospitalisation de l'enfant lors de son séjour à l'hôpital des enfants en septembre octobre 1989.

Prendre connaissance des deux rapports d'expertise, indiquer après avoir examiné de nouveau les séquelles présentées actuellement par Kevin B... si le handicap de ce dernier est imputable à la seule pose inadaptée du forceps de TARNIER et à la fracture du crane consécutive à un geste fautif ou si la double circulaire du cordon a pu jouer un rôle soit pendant l'accouchement, soit en provoquant un

mauvais positionnement du forceps lors de l'utilisation de celui-ci. Indiquer si les deux éléments ont pu jouer un rôle et dans quelles proportions.

Donner toutes

Donner toutes précisions qui leur paraîtront utiles.

Dit que les experts déposeront leur rapport au secrétariat-greffe de la Cour dans les 6 mois de leur saisine.

Dit que les frais d'expertise seront avancés par Monsieur X... Y... à concurrence de 1 000 euros.

Sursoit à statuer sur les demandes.

Réserve les dépens.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Patrick GABORIAU, Président, et par Monsieur Hervé E..., Greffier.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Ct0045
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006950178
Date de la décision : 24/04/2006

Analyses

RESPONSABILITE CIVILE


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bordeaux;arret;2006-04-24;juritext000006950178 ?
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