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06/04/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000006949956

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Ct0028, 06 avril 2006, JURITEXT000006949956


SB DU 06 AVRIL 2006 No DU PARQUET : 05/01282 No D'ORDRE : M.P. C/ Monsieur B... D.P.A.C
LE SIX AVRIL DEUX MILLE SIX LA COUR D'APPEL DE BORDEAUX
En l'audience publique de la Troisième Chambre Correctionnelle tenue par :
Monsieur BOUGON, X...,
Monsieur MINVIELLE, Conseiller,
Monsieur BERTHOMME, Conseiller,
En présence de Monsieur Y..., Substitut de Monsieur le Procureur Général
Et avec l'assistance de Madame Z..., A..., a rendu l'arrêt dont la teneur suit :
ENTRE : Monsieur le Procureur Général près la Cour d'Appel de BORDEAUX
ET : Monsieur B... âgé de 54 ans

, actuellement détenu pour autre cause au Centre de Détention d'EYSSES né le... à LA...

SB DU 06 AVRIL 2006 No DU PARQUET : 05/01282 No D'ORDRE : M.P. C/ Monsieur B... D.P.A.C
LE SIX AVRIL DEUX MILLE SIX LA COUR D'APPEL DE BORDEAUX
En l'audience publique de la Troisième Chambre Correctionnelle tenue par :
Monsieur BOUGON, X...,
Monsieur MINVIELLE, Conseiller,
Monsieur BERTHOMME, Conseiller,
En présence de Monsieur Y..., Substitut de Monsieur le Procureur Général
Et avec l'assistance de Madame Z..., A..., a rendu l'arrêt dont la teneur suit :
ENTRE : Monsieur le Procureur Général près la Cour d'Appel de BORDEAUX
ET : Monsieur B... âgé de 54 ans, actuellement détenu pour autre cause au Centre de Détention d'EYSSES né le... à LA TESTE DE BUCH (33) de Monsieur et Madame D... de nationalité française, divorcé, Déjà condamné
PRÉVENU, appelant et intimé, convoqué le 22 Novembre 2005, détenu pour une autre cause au Centre de détention d'EYSSES, présent, assisté de Maître FALGA, Avocat au Barreau d'AGEN et de Maître DANGLADE, Avocat au barreau de BORDEAUX.
ET : Madame E... divorcée B... agissant en son nom personnel et en qualité de représentante légale de son fils mineur F..., demeurant ... 33440 AMBARES ET LAGRAVE
PARTIE CIVILE, intimée et appelante, citée, absente, représentée par Maître GROSSELLE, Avocat au Barreau de BORDEAUX.
RAPPEL DE LA PROCÉDURE
Par actes reçus au Secrétariat-Greffe du Tribunal de Grande Instance
de BORDEAUX, le prévenu Monsieur B... en date du 02 Novembre 2005 (de l'ensemble du jugement), le Ministère Public et la partie civile Madame E... agissant tant en son nom personnel qu'es qualités de représentante légale de son fils mineur F... le 03 Novembre 2005 ont relevé appel d'un jugement contradictoire, rendu par ledit Tribunal le 26 Octobre 2005, à l'encontre de Monsieur B... poursuivi comme prévenu d'avoir à AMBARES et LAGRAVE (33) en tout cas sur le territoire national entre 1993 et 1994 et depuis temps non couvert par la prescription, commis des atteintes sexuelles avec violence, contrainte, menace ou surprise, en l'espèce en pratiquant sur F..., mineur de 15 ans pour être né le... à BORDEAUX, des attouchements sexuels avec cette circonstance que les faits ont été commis par un ascendant légitime. Infraction prévue par les articles 222-30 2 , 222-29 1 du Code Pénal et réprimée par les articles 222-30, 222-44, 222-45, 222-47 AL.1, 222-48, 222-48-1 du Code Pénal.
LE TRIBUNAL
Sur l'action publique
A déclaré le prévenu coupable des faits reprochés ; en répression l'a condamné à une peine de un an d'emprisonnement à titre de peine principale et a rejeté la demande de confusion de cette peine avec celle prononcée par la Cour d'Assises de la Gironde le 3 avril 1998. Sur l'action civile
A déclaré la constitution de partie civile de Madame E... agissant tant en son nom personnel qu'es qualités de représentante légale de son fils mineur F... recevable et régulière en la forme.
A condamné Monsieur B... à payer les sommes suivantes : - 1 ç à
titre de dommages-intérêts à Madame E... en réparation de son préjudice personnel, - 3000 ç à titre de dommages-intérêts à Madame E... en réparation du préjudice subi par F..., - 500 ç en application de l'article 475-1 du Code de Procédure Pénale à Madame E....
A dit que la somme allouée au mineur sera placée sous le contrôle du juge des tutelles compétent.
Sur ces appels et selon citations de Monsieur le Procureur Général, l'affaire a été appelée à l'audience publique du 23 Février 2006, la Cour étant composée de Monsieur BOUGON, X..., Monsieur MINVIELLE et Madame CHAMAYOU-DUPUY, Conseillers, assistée de Madame Z..., A...
A ladite audience, le prévenu a comparu et son identité a été constatée ;
Madame le Conseiller CHAMAYOU-DUPUY a fait le rapport oral de l'affaire ;
Le prévenu a été interrogé ;
Maître GROSSELLE, Avocat, a développé les conclusions de la partie civile, Madame E... agissant tant en son nom personnel qu'es qualités de représentante légale de son fils mineur F... et a sollicité l'aide juridictionnelle provisoire.
Monsieur le Substitut de Monsieur le Procureur Général a été entendu en ses réquisitions ;
Maître FALGA et maître DANGLADE, ont présenté les moyens d'appel et de défense du prévenu ;
Le prévenu a eu la parole en dernier ;
SUR QUOI,
Le X... a informé les parties présentes que l'affaire était mise en délibéré à l'audience publique du 06 avril 2006.
A ladite audience, Monsieur Le X... a donné lecture de la
décision suivante :
Les appels successivement interjetés par le prévenu, Monsieur B..., le Ministère public et Madame E..., agissant tant en son nom personnel qu'en qualité de représentante légale de son fils mineur F..., sont recevables.
La partie civile sollicite la confirmation du jugement qui lui a alloué en réparation de son préjudice personnel la somme de 1 euro à titre de dommages et intérêts. Es qualités de représentante de son fils mineur F..., elle demande une majoration de l'indemnisation accordée, soit 15.250 euros, outre 1.000 euros sur le fondement de l'article 475-1 du Code de Procédure Pénale.
Elle sollicite également le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire.
Le Ministère Public requiert la confirmation de la décision entreprise.
Monsieur B... qui nie toute agression sur la personne de F... conclut à sa relaxe. Il souligne que le premier rapport psychologique qui a servi de déclenchement aux poursuites, décrit la mère comme démissionnaire, dans une position de déni et qu'elle même, qualifie son fils de menteur et qu'il aurait été opportun, pour éviter toute ambigu'té, de faire représenter F... par un administrateur ad hoc. Par ailleurs, il précise que les répercussions psychologiques décrites chez F..., peuvent s'expliquer par un contexte familial perturbé par les accusations, portées contre lui par ses autres enfants, dont il nie catégoriquement le bien fondé. Il fait remarquer qu'à l'occasion d'une procédure antérieure, tous les enfants ont été examinés et entendus. Or, F... n'a rien dit, ce qu'il n'aurait pas manqué de faire, si les faits qu'il a dénoncés six ans plus tard, avaient existé.
Enfin, il fait valoir qu'on ne peut fonder une condamnation sur ses seuls antécédents judiciaires.
MOTIFS DE LA DÉCISION
S'agissant de l'action publique
Michèle AMIRAULT COUSTY, psychologue, a été désignée par le juge des affaires matrimoniales pour examiner les enfants B... dans le cadre de la procédure initiée par leurs grands-parents paternels revendiquant un droit de visite et d'hébergement.F... et sa soeur G... confient à l'expert qu'ils ont été victimes d'attouchements à caractère sexuel de la part de leur père.
C'est ainsi que F... indiquait qu'alors qu'il était âgé de quatre à cinq ans son père lui caressait le sexe lorsqu'ils se trouvaient tous les deux seuls dans la cuisine et qu'il le menaçait de ne pas lui donner à manger s'il refusait de se laisser faire.
Il ajoutait que de toute façon, il ne lui demandait pas son avis et continuait malgré ses pleurs.
Entendu sur ces faits, le prévenu les a niés vigoureusement, tout comme il a nié les faits d'agressions sexuelles ou de viols, commis sur ses autres enfants et pour lesquels il a précédemment été condamné par la Cour d'Assises le 3 Avril 1998.
Son ex-épouse Madame E..., aujourd'hui partie civile, tant en son nom personnel qu'es qualités de représentante légale de leur fils mineur F..., a dans un premier temps également contesté les faits dénoncés.
Toutefois, les rapports d'expertise la décrivent comme démissionnaire et dans une position de déni.
Par contre, au vu des accusations réitérées de l'enfant elle a fini par convenir que les faits dénoncés étaient matériellement possibles, puisque à l'époque les dissensions dans le couple existaient déjà et qu'elle ne mangeait plus en compagnie de son époux, lequel de ce fait
pouvait parfaitement se retrouver seul avec leur plus jeune fils, âgé de quatre ans dans la cuisine pour le repas.
Cependant, Hervé BROUCA, le psychologue chargé d'examiner le prévenu au cours de cette procédure, sensible à ses dénégations véhémentes, a fait quelques réserves sur les conditions de l'audition de F... par les services d'enquête et les conclusions de Marie-France MARAIS, premier expert chargé d'examiner le mineur.
Dès lors, à la requête du prévenu, une contre expertise a été organisée confiée à Elisabeth PANICAULT.
Les conclusions de ces deux experts convergent pour reconnaître que l'enfant n'a révélé qu'avec difficultés et honte, ce que lui avait fait subir son père, qu'il était authentique dans son discours et que les troubles psychiques qu'il présentait, pouvaient être directement en relation avec les infractions reprochées à Monsieur B... .
Celui-ci a été examiné au cours de la présente procédure, cependant il n'a pas voulu se soumettre à divers tests de personnalité. De ce fait les résultats de cette expertise ont été tronqués et il convient de se référer pour être tout à fait informé, aux expertises annexées à la procédure et réalisées au cours de l'information ayant donné lieu à son renvoi devant la Cour d'assises.
Il apparaît, notamment dans le cadre de l'expertise du Docteur C..., psychiatre, comme doté d'une personnalité dont le lien à l'autre s'établit sur un mode pervers, c'est à dire dans une perspective d'aliénation, de soumission d'autrui à son propre narcissisme.
Rien chez lui ne vient vraiment faire un frein, dans la manière qu'il peut avoir d'utiliser l'autre à son avantage, indistinctement de ce qu'il est, de son âge et de sa position. Son fonctionnement d'ensemble, face aux règles et obstacles légaux est de manipuler tout système qui s'oppose à la satisfaction recherchée.
Il n'est atteint d'aucune pathologie mentale, mais sa personnalité paraît aménagée sur un mode de perversion de caractère ou de perversion narcissique, ce qui définit un mode de fonctionnement psychique, où l'autre est avant tout là, pour participer aux exigences narcissiques. Cette disposition est très nettement en faveur des passages à l'acte, dont il était accusé à cette époque sur ses autres enfants.
Or, les faits dénoncés par F... se situent à la même période.
Quant au questionnement que fait naître la tardiveté des révélations de F..., elle est toute relative, dans le contexte qui était le sien à cette époque.
En effet ce retard s'explique par le traumatisme qui a été généré par les investigations qui ont précédé l'arrestation de son père, comme le décrit Michèle AMIRAUT COUSTY, psychologue clinicienne, qui a reçu les premières confidences de l'enfant.
F... lui a décrit la panique qui s'était emparée de lui, lorsqu'il n'a plus vu sa mère au cours des interrogatoires et il se rappelle avoir rencontré, à cette période, de nombreux adultes qui lui posaient beaucoup de questions sur son papa.
Il était très angoissé d'avoir été séparé de sa mère et se sentait coupable de cette situation.
Il a donc expliqué qu'à ce moment là, il ne voulait plus parler de tout cela et a exprimé une honte douloureuse à l'évocation des faits, symptomatique des enfants ayant été abusés sexuellement.
En conséquence, comme a pu le dénoncer F..., en des termes identiques, devant les psychologues, les gendarmes ou le juge d'instruction, Monsieur B... a caressé à plusieurs reprises le sexe de son enfant, alors âgé de quatre ou cinq ans, en le grondant ou le menaçant de privation de nourriture, faits qui caractérisent suffisamment les éléments constitutifs de l'infraction qui lui est
reprochée.açant de privation de nourriture, faits qui caractérisent suffisamment les éléments constitutifs de l'infraction qui lui est reprochée.
Le rapport d'expertise déposé par le Docteur C... mentionnait que le pronostic sur le comportement de Monsieur B... était extrêmement réservé, car certaines de ses attitudes dangereuses pour autrui, sont contingentes à sa personnalité.
Son incapacité par ailleurs à tout questionnement ou remise en cause, son déni même de toute difficultés psychologique au sens large, ne lui permet pas d'accéder aux soins.
L'expert ajoutait que seule la crainte des effets de la loi, peut de l'extérieur, venir tempérer quelque peu sa volonté d'emprise sans limite.
Son comportement durant l'audience, permet de se convaincre que le prévenu n'a pas évolué depuis le dépôt de ce rapport d'expertise.
Dès lors le jugement déféré sera confirmé tant sur la qualification des faits et la déclaration de culpabilité que sur la sanction prononcée, parfaitement adaptée à la nature des faits et à la personnalité du prévenu.
S'agissant de l'action civile :
Le tribunal a fait une juste appréciation de la recevabilité de la constitution de partie civile de Madame E..., agissant tant en son nom personnel, qu'en qualité d'administratrice légal de son fils mineur F..., de l'entière responsabilité de Monsieur B... dans la survenance de son préjudice et des sommes accordées en réparation de celui de F..., dont tous les psychologues consultés s'accordent à dire qu'il est en voie de réussir sa reconstruction, grâce aux soins psychothérapeutiques qu'il a suivis.
Dès lors, le jugement déféré sera confirmé en toutes ses dispositions civiles. Il sera accordé à Madame E... en sa double qualité,
le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire. Par contre il ne sera pas fait droit à la demande fondée sur les dispositions de l'article 475-1 du Code de Procédure Pénale, Madame E... ne justifiant pas avoir exposé devant la Cour des frais qui ne seraient pas indemnisés par l'aide juridictionnelle.
PAR CES MOTIFS
LA COUR, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement et par arrêt contradictoire à signifier, le prévenu n'étant pas extrait pour le prononcé de l'arrêt,
DECLARE les appels recevables,
ACCORDE à Madame E... l'aide juridictionnelle provisoire, tant pour elle même qu'en qualité de représentante légale de son fils F... ,
CONFIRME le jugement déféré,
Y AJOUTANT,
Déboute Madame E... de ses demandes sur le fondement des dispositions de l'article 475-1 du Code de Procédure Pénale,
La présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure d'un montant de cent vingt Euros dont est redevable chaque condamné par application de l'article 1018 A du Code Général des Impôts,
Le présent arrêt a été signé par Monsieur BOUGON, X..., et Madame Z... A... présent lors du prononcé.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Ct0028
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006949956
Date de la décision : 06/04/2006

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bordeaux;arret;2006-04-06;juritext000006949956 ?
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