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31/01/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000006947276

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Ct0003, 31 janvier 2006, JURITEXT000006947276


COUR D'APPEL DE BORDEAUX SIXIÈME CHAMBRE CIVILE --------------------------

CL ARRÊT DU : 31 JANVIER 2006 (Rédacteur : Philippe GUENARD, Conseiller) No de rôle : 04/05914 Yves X... c/ Michelle Adéma Y... épouse X... Z... de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le : aux avoués :Décision déférée à la Cour :

jugement rendu le 13 septembre 2004 par le Juge aux Affaires Familiales du Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX (RG no 02/01901) suivant déclaration d'appel du 10 novembre 2004

APPELANT :

Yves X...,

né le 05 Juin 1939 à LA CL

ISSE (17600),

de nationalité Française,

demeurant La Pauterie - 33820 PLEINE SELVE, représenté pa...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX SIXIÈME CHAMBRE CIVILE --------------------------

CL ARRÊT DU : 31 JANVIER 2006 (Rédacteur : Philippe GUENARD, Conseiller) No de rôle : 04/05914 Yves X... c/ Michelle Adéma Y... épouse X... Z... de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le : aux avoués :Décision déférée à la Cour :

jugement rendu le 13 septembre 2004 par le Juge aux Affaires Familiales du Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX (RG no 02/01901) suivant déclaration d'appel du 10 novembre 2004

APPELANT :

Yves X...,

né le 05 Juin 1939 à LA CLISSE (17600),

de nationalité Française,

demeurant La Pauterie - 33820 PLEINE SELVE, représenté par la SCP CASTEJA-CLERMONTEL etamp; JAUBERT, avoués à la Cour, assisté de Maître Isabelle DAVY substituant Maître Lionel MARCONI, avocat au barreau de BORDEAUX,

INTIMÉE :

Michelle Adéma Y... épouse X...,

née le 11 Mars 1946 à MORNAC SUR SEUDRE (17113),

de nationalité Française,

demeurant Le Bourg - 17500 CLAM, représentée par la SCP TOUTON-PINEAU etamp; FIGEROU, avoués à la Cour, assistée de Maître Marjolaine DE PONCHEVILLE - TOUTON, avocat au barreau de BORDEAUX,

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 910 du Nouveau Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 13 décembre 2005 hors la présence du public, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Franck LAFOSSAS, Président et Philippe GUENARD, Conseiller, chargés du rapport,

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Franck LAFOSSAS, Président,

Philippe GUENARD, Conseiller,

Philippe LEGRAS, Conseiller,

Greffier lors des débats : Josette della GIUSTINA

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 al. 2 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Par acte remis au Greffe de la Cour le 10 novembre 2004 Yves X... a déclaré relever appel contre Michelle Y... épouse X... du jugement rendu le 13 septembre 2004 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX qui a prononcé leur divorce aux torts exclusifs du mari condamné au paiement d'un capital de 135.000 euros à titre de prestation compensatoire et à la somme de 7.623 euros à titre de dommages et intérêts, autorisé l'épouse à conserver l'usage du nom marital outre la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

L'appelant précise dans ses dernières conclusions signifiées le 25

novembre 2005 que la décision déférée est critiquable parce que :

- ils se sont mariés en 1964 sans contrat préalable et ont deux enfants aujourd'hui majeurs,

- il n'a jamais souhaité se séparer de son épouse, le rapport d'un détective privé ne démontre pas l'existence de relations adultères ou injurieuses de sa part avec Madame A... qui effectuait le ménage au sein de leur domicile et de son entreprise,

- il est exact que l'intimée a participé au succès de l'entreprise X... et fils sans toutefois être déclarée, le domicile conjugal jouxtait l'entreprise et elle n'a effectué que de menus services, il n'a cependant jamais souhaité dépouiller son épouse,

- l'intimée l'a abandonné et a notamment quitté le domicile conjugal pendant 7 mois en 2001, elle appartient aux Témoins de Jéhovah qui ont une influence néfaste sur elle,

- elle ne justifie pas d'aucun préjudice particulier,

- il ne s'oppose pas au paiement d'une prestation compensatoire au profit de son épouse, il était dirigeant d'entreprise jusqu'en 1999 et perçoit désormais une pension de retraite mensuelle de 2.122,42 euros, il a vendu son entreprise et a réparti le produit de la vente entre leurs enfants et la communauté formée par eux, il a perçu des revenus accessoires liés à des commissions sur la vente de produits de traitement du bois mais il ne va pas poursuivre cette activité au regard de son âge et de sa situation,

- il a procédé au placement d'une partie du produit de la vente de son entreprise dans l'intérêt de la communauté des époux, il a perçu en 2004 des revenus de capitaux mobiliers de l'ordre de 246,42 euros par mois mais cette somme sera au minimum réduite de moitié après liquidation de la communauté,

- leur couple bénéficie de l'usufruit d'un appartement situé à DOLUS D'OLERON (17), il souhaiterait conserver l'immeuble commun qu'il

occupe actuellement et qui est situé à Pleine Selve pour le transmettre à leurs enfants mais il devra dans cette hypothèse payer une soulte à hauteur de 136.000 euros à son épouse, il assume 500 euros de charges fixes mensuelles,

- son épouse ne perçoit aucun revenu mais elle bénéficiera de la moitié des capitaux qu'il a fait fructifier soit la somme de 175.000 euros à son profit, elle dispose également seule de comptes épargne alimentés par lui qui s'élèvent à la somme de 45.000 euros, il lui a laissé la jouissance de l'appartement à DOLUS D'OLERON.

Il est en conséquence demandé, par réformation de :

- rejeter la demande en divorce de l'intimée,

- à titre subsidiaire, prononcer leur divorce aux torts partagés, rejeter toute demande de dommages et intérêts et fixer à la somme de 30.000 euros le capital qu'il payera à son épouse au titre de la prestation compensatoire.

L'intimée, par ses dernières conclusions signifiées le 9 novembre 2005, sollicite la confirmation outre la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

A cet effet elle fait valoir :

- il a entretenu plusieurs relations adultères pendant les 37 ans de mariage et notamment avec leur ancienne femme de ménage ce qui est démontré par le rapport d'enquête d'un détective privé, il la traitait de façon méprisante en se contentant de lui donner de l'argent de poche,

- elle justifie d'un préjudice puisqu'elle s'est trouvée dans une solitude morale et en raison du comportement de son mari elle a subi une situation dépressive importante de juin 2001 à mai 2002,

- elle a travaillé à temps plein dans l'entreprise de son mari pendant 30 ans sans la moindre rémunération et elle effectuait de nombreuses tâches, en 1981 son mari a constitué une société avec

leurs deux enfants et ne l'a pas intégrée, elle n'a donc rien perçu lorsqu'il l'a liquidée,

- il perçoit une pension retraite mensuelle de 2.339,64 euros outre ses revenus accessoires et il possède un capital mobilier de 342.840 euros dont il peut disposer librement,

- elle assume un loyer chaque mois pour se loger et doit payer la totalité des charges de l'appartement à DOLUS D'OLERON alors qu'elle n'en a pas la jouissance exclusive, elle a aujourd'hui 59 ans et elle ne peut plus se qualifier pour trouver un emploi,

- il n'a eu de cesse de dissimuler ses revenus et de faire obstacle à des débats transparents. SUR QUOI, LA COUR

1) Sur les demandes en divorce

Monsieur X... verse notamment aux débats :

- un rapport d'enquête de détective privé ayant constaté que les 21, 27 et 28 décembre 2001 Monsieur X... s'est rendu au domicile de Madame B..., ancienne femme de ménage des époux et de l'entreprise familiale, et y était à chaque fois resté plusieurs heures, comportement gravement injurieux et répété.

- diverses attestations ayant constaté les relations injurieuses de Monsieur X... avec Madame B..., soit dans le cadre même de l'entreprise, que ce soit dans les bureaux avant l'ouverture de ceux-ci, ou dans le parc d'activités de l'entreprise où le témoin LANDRY déclare avoir vu les deux intéressés "manger des fruits et se passer tour à tour les fruits de bouche à bouche", conduite excédant à l'évidence les rapports normaux entre un employeur et son agent technique d'entretien.

De son côté Monsieur X... ne verse strictement aucune pièce à l'appui de ses allégations. Il reproche à celle-ci d'avoir quitté le domicile conjugal durant sept mois, mais non seulement ne lui a fait

délivrer aucune sommation de réintégrer le domicile conjugal, mais encore Madame X... produit diverses pièces établissant qu'elle a en réalité quitté le domicile conjugal pendant trois mois, pour faire une cure et aller se reposer chez des amis. Enfin Madame X... produit une lettre de son mari certifiant son retour le 15 février 2001, et lui demandant de lui pardonner "toutes ses méchancetés" et "ses conneries" qu'il reconnaît.

Ainsi il ressort de cet examen, en application de l'article 242 du Code Civil, à la charge du mari, la preuve de faits constituant une violation grave et renouvelée des devoirs et obligations du mariage rendant intolérable le maintien de la vie commune.

Il convient donc de confirmer le prononcé du divorce aux torts exclusifs du mari.

2) Sur les conséquences du divorce

a) l'usage du nom marital

Monsieur X... sollicite de "réformer en son intégralité le jugement" (sic), mais la Cour n'a trouvé ni dans les motifs, ni dans le dispositif de ses écritures, la moindre critique afférente au maintien de l'usage du nom marital, qui sera donc confirmé.

b) les dommages et intérêts

Non seulement Monsieur X... a eu de multiples relations injurieuses avec son ancienne femme de ménage, mais il a cru devoir adopter en appel une stratégie de contestation déraisonnable, sans toutefois s'expliquer sur des séjours de plusieurs heures à l'intérieur de la même semaine au domicile de cette tierce personne, outre des relations privilégiées au sein de l'entreprise, ou des dégustations de fruits plus que familières sur le parc de celle-ci, au vu et au su de tout le personnel, humiliant d'autant plus l'épouse alors que celle-ci travaillait dans l'entreprise, et que le domicile conjugal

était contigu, le tout dans la petite localité de PLEINE SELVE.

Ainsi le préjudice lié aux fautes réitérées du mari dans un tel contexte apparaît singulièrement aggravé, outre celui résultant du projet normal de la femme, après plus de quarante années de mariage, de terminer sa vie auprès de son mari. Il convient donc de confirmer à titre exceptionnel le montant élevé de 7.623 euros fixé à titre de dommages et intérêts, sur le double fondement des articles 1382 et 266 du Code Civil, toutes causes confondues.

c) la demande de prestation compensatoire

A cet égard l'article 270 du code civil prévoit que "l'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation compensatoire destinée à compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives".

L'article 271 du même code ajoute que "la prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible".

En application de l'article 272 du code civil énumérant de manière non exhaustive les éléments à prendre en considération dans la détermination des besoins et des ressources, il convient de retenir les points suivants :

- mari âgé de 66 ans, et femme de 59 ans,

- durée du mariage : 41 ans (et près de 38 ans jusqu'à l'ordonnance de non conciliation),

- deux enfants majeurs ;

- mari chef d'entreprise retraité, percevant à ce titre 2.122 euros par mois, outre un revenu mensuel provisoire de courtage de bois déclaré à hauteur de 381 euros ; immeuble de PLEINE SELVE occupé par le mari ;

- femme sans ressources ni retraite, vivant à JONZAC dans un modeste

logement de 36 m ; elle ne peut utiliser comme griefs le fait que son mari ne l'ait point déclarée pendant de longues années malgré son travail avéré, mais en revanche ce point constitue un élément essentiel en raison de l'absence de droit à la retraite ;nt essentiel en raison de l'absence de droit à la retraite ;

- actif de communauté comparant l'immeuble susvisé déclaré valoir 272.000 euros selon le mari, et affirmé par la femme déjà acheté 300.000 euros en 1985, ce que la Cour n'ose retenir comme vraisemblable, sauf à douter quelque peu de l'évaluation soumise par le mari ...

Outre cet immeuble, le couple possède un actif mobilier d'environ 350.000 euros, et la femme s'est vue attribuer l'usufruit d'une maison à DOLUS D'OLERON, dont la nu-propriété a été donnée au fils, et où la femme estime trop triste d'y résider durant la morte saison. Ainsi il ressort de cet examen la preuve d'une disparité important créée par la rupture du mariage dans les conditions de vie respectives, en ce que, une fois l'actif de communauté partagé, le mari percevra toujours avec certitude 2.211 euros par mois de plus que sa femme même quand il aura abandonné son activité de courtage, c'est de manière justifiée que le premier juge a fixé la prestation compensatoire due par le mari sous la forme d'un capital de 135.000 euros, et il convient de confirmer de ce chef la décision entreprise. Il convient enfin de condamner Monsieur X... aux entiers dépens de première instance et d'appel, ainsi qu'à verser, outre l'indemnité pour frais irrépétibles de 3.000 euros déjà décidée par le premier juge, une indemnité de 2.000 euros pour frais irrépétibles d'appel. PAR CES MOTIFS LA COUR

Confirme en son entier le jugement attaqué,

Y ajoutant,

Condamne Monsieur X... à verser à Madame X... une indemnité de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Condamne Monsieur X... aux dépens d'appel, avec le droit pour la SCP TOUTON PINEAU etamp; FIGEROU, Avoués à en poursuivre le recouvrement, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

L'arrêt a été signé par le Président Franck LAFOSSAS, et par Josette della GIUSTINA, Greffier auquel il a remis la minute signée de la décision. LE GREFFIER,

LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Ct0003
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006947276
Date de la décision : 31/01/2006

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bordeaux;arret;2006-01-31;juritext000006947276 ?
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