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23/06/2005 | FRANCE | N°04/01676

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Premiere chambre section a, 23 juin 2005, 04/01676


ARRET RENDU PAR LA COUR D'APPEL DE BORDEAUX-------------------------- Le : 23 JUIN 2005 PREMIÈRE CHAMBRE SECTION A No de rôle : 04/ 01676 S. A. CREDIT LYONNAIS, prise en la personne de son Président du Conseil d'Administration domicilié en cette qualité au siège social, c/ S. C. I. PPR, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social, Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le : à :
Rendu par mise à disposition au Greffe, le 23 Juin 2005 par Monsieur Jean-Claude SABRON, Conseiller, en présence de Madame

Chantal SERRE, Greffier,
La COUR d'APPEL de BORDEAUX, PREMIERE CHAMBR...

ARRET RENDU PAR LA COUR D'APPEL DE BORDEAUX-------------------------- Le : 23 JUIN 2005 PREMIÈRE CHAMBRE SECTION A No de rôle : 04/ 01676 S. A. CREDIT LYONNAIS, prise en la personne de son Président du Conseil d'Administration domicilié en cette qualité au siège social, c/ S. C. I. PPR, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social, Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le : à :
Rendu par mise à disposition au Greffe, le 23 Juin 2005 par Monsieur Jean-Claude SABRON, Conseiller, en présence de Madame Chantal SERRE, Greffier,
La COUR d'APPEL de BORDEAUX, PREMIERE CHAMBRE SECTION A, a, dans l'affaire opposant :
S. A. CREDIT LYONNAIS, prise en la personne de son Président du Conseil d'Administration domicilié en cette qualité au siège social, sise 19 Boulevard des Italiens-75002 PARIS représentée par la SCP RIVEL et amp ; COMBEAUD, avoués à la Cour, et assistée de Me Pierre KAPPELHOFF LANCON, avocat au barreau de BORDEAUX
Appelante d'un jugement rendu le 05 février 2004 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX suivant déclaration d'appel en date du 24 février 2004,
à :
S. C. I. PPR, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social, 53-55 rue Elie Gintrac-33000 BORDEAUX représentée par la SCP MICHEL PUYBARAUD, avoués à la Cour, et assistée de Me Vincent DORLANNE, avocat au barreau de BORDEAUX
Intimée,
Rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue en audience publique, le 12 Mai 2005 devant :
Monsieur Jean-Claude SABRON, Conseiller, qui a entendu les plaidoiries, les Avocats ne s'y étant pas opposés, en application de l'article 786 du Nouveau Code de Procédure Civile, assisté de Chantal SERRE, Greffier,
Que Monsieur Jean-Claude SABRON, Conseiller, en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, celle-ci étant composée de : Monsieur Alain COSTANT, Président, Monsieur Jean-Claude SABRON, Conseiller, Madame Elisabeth LARSABAL, Conseiller,
Et qu'il en ait été délibéré par les Magistrats du Siège ci-dessus désignés ;
LES DONNEES DU LITIGE
Messieurs X..., Y... et Z... ont constitué le 24 octobre 1977 une SARL dénommée SOVIAN ayant pour objet le négoce de la viande et de tous produits alimentaires.
Le 12 février 1980, les mêmes associés ont constitué une SCI dénommée PPR au même siège que celui de la SARL et dont l'objet était l'acquisition de tous immeubles.
Cette société, réalisée dans le but d'acquérir l'immeuble dans lequel se trouvaient le siège et les locaux de l'entreprise de commerce de viande, a signé le 7 juillet 1981 avec la SARL SOVIAN un bail commercial portant sur l'usage desdits immeubles.
Selon acte du 27 octobre 1993, le CREDIT LYONNAIS qui est la banque des deux sociétés, a consenti à la SARL SOVIAN un crédit équipement de 600 000 F destiné à l'aménagement des locaux loués par la SCI, prêt garanti par le cautionnement hypothécaire fourni par cette dernière.
Le 3 avril 2000, alors que le solde du compte courant de la SARL SOVIAN était fortement débiteur, Monsieur X..., associé dans les deux sociétés et gérant de la SCI, a révoqué le cautionnement personnel qu'il avait consenti au CREDIT LYONNAIS en garantie des sommes dues par la SARL.
Le 20 juillet 2000, Monsieur X... a signé en sa qualité de gérant de la SCI PPR un acte sous seing privé par lequel cette société se portait caution à hauteur de la somme de 750 000 F, à augmenter des intérêts et accessoires, de toute dette de la SARL SOVIAN.
La SARL SOVIAN devait être mise en règlement judiciaire par jugement du 6 juin 2001 puis en liquidation judiciaire par jugement du 28 juin 2001.
Par lettre du 14 décembre 2001, le CREDIT LYONNAIS a mis la SCI PPR en demeure de lui payer en sa qualité de caution solidaire de la SARL SOVIAN la somme de 874 739, 89 F (133 353, 24 Euros) due au titre du solde débiteur du compte courant de la dite société, pour laquelle il avait déclaré sa créance dans la procédure collective.
La SCI PPR lui ayant opposé la nullité de ce cautionnement au motif que son gérant n'avait pas le pouvoir de le fournir, le CREDIT LYONNAIS l'a par acte du 2 août 2002 faite assigner en paiement devant le tribunal de grande instance de BORDEAUX.
Le tribunal a rendu le 5 février 2004 un jugement qui a déclaré nul l'acte de caution signé le 20 juillet 2000 par Monsieur X... et débouté la banque de l'intégralité de ses demandes.
Il a alloué à la SCI PPR une indemnité de 1 000 Euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
LE CREDIT LYONAIS a relevé appel de ce jugement dans des conditions dont la régularité ne donne pas lieu à contestation.
Il soutient que le cautionnement, aux yeux des tiers, se rattachait indirectement à l'objet social de la SCI PPR dés lors qu'il existait manifestement, en raison notamment de l'identité des associés et du siège des deux sociétés, une communauté d'intérêts entre la SCI, propriétaire des locaux d'exploitation, et la SARL SOVIAN, locataire de ces locaux, au profit de laquelle avait été consenti l'acte litigieux.
Le cautionnement serait par conséquent valable au regard des dispositions de l'article 1849 du code civil sans que puissent être opposées aux tiers les clauses statutaires limitant les pouvoirs du gérant quand bien même ils en auraient eu connaissance.
Le CREDIT LYONNAIS demande en conséquence à la cour d'infirmer le jugement entrepris qui aurait relevé à tort que la SCI ne trouvait aucun intérêt dans l'apport d'un cautionnement destiné à garantir le débit du compte courant de la société commerciale locataire, et de condamner l'intimée à lui payer la somme de 133 353, 24 Euros, montant pour lequel sa créance a été admise dans la liquidation judiciaire de la SARL SOVIAN, outre les intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 14 décembre 2001.
La société appelante sollicite en outre une indemnité de 3 000 Euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
La SCI PPR conclut à la confirmation du jugement.
Elle relève que l'acte litigieux n'entrait pas dans le cadre de son objet social et que l'extension jurisprudentielle invoquée par la banque ne peut pas trouver application en l'espèce dès lors qu'en l'absence d'intérêt pour la SCI à cautionner les dettes d'une SARL, il ne pouvait pas exister de communauté d'intérêts entre les deux sociétés à la date de la signature de l'acte litigieux.
La société intimée expose qu'en effet, il existait de graves dissensions, connues de la banque, entre les associés et que l'absence de communauté d'intérêts est démontrée par le fait que la SCI a continué d'exister en dépit de la mise en liquidation judiciaire de la SARL, après avoir honoré l'engagement de caution, valablement en vertu d'un pouvoir spécial, relatif au remboursement du crédit équipement.
A titre subsidiaire, la SCI PPR qui objecte qu'elle a formé une contestation contre l'admission de la créance du CREDIT LYONNAIS dans la liquidation judiciaire de la SARL SOVIAN, demande à la cour de dire que le cautionnement ne peut porter que sur la somme de 600 926, 89 F (92 677, 86 Euros), montant du solde débiteur du compte courant de la SARL à la date du prononcé de la liquidation judiciaire.
Elle sollicite le paiement d'une indemnité de 4 000 Euros sur le fondement de l'article 70 du Nouveau Code de Procédure Civile.
LES MOTIFS DE LA DECISION
Le cautionnement des engagements d'une société commerciale qui, comme en l'espèce, n'entre pas dans l'objet social de la SCI au nom de laquelle son gérant l'a contracté, peut être rattaché à cet objet social s'il est démontré qu'aux yeux du tiers qui en bénéficie, il pouvait exister une communauté d'intérêts entre la société garante et la société débitrice.
Le tiers bénéficiaire est en droit d'invoquer, dans une telle hypothèse, les dispositions de l'article 1849 du code civil dont il résulte que les actes qui entrent dans l'objet social engagent la société nonobstant les clauses statutaires qui, même connues de ce tiers, limitent les pouvoirs du gérant.
Toutefois, la SCI PPR relève à juste titre que le moyen du rattachement à l'objet social tiré d'une communauté d'intérêt avec la société cautionnée n'est opposable que s'il apparaît que la société qu'on prétend engagée pouvait avoir, à la date de l'acte contesté et aux yeux du tiers bénéficiaire, un intérêt à se porter caution.
Or il résulte des circonstances de l'espèce qu'à la date de l'acte litigieux, il existait de graves dissensions entre les associés des sociétés SOVIAN et PPR, attestées en particulier par une assignation délivrée le 12 novembre 2000 par la SARL SOVIAN à l'un des associés, Monsieur Y....
Par ailleurs, Monsieur X..., gérant de la SCI PPR, venait de révoquer le cautionnement personnel qu'il avait consenti, en sa qualité d'associé de la société commerciale, pour garantie des engagements de celle-ci dont le compte courant était devenu largement débiteur.
Le CREDIT LYONNAIS avait parfaitement connaissance du litige qui opposait les associés ainsi que cela résulte d'une lettre du 14 novembre 1991 dans laquelle la SARL SOVIAN s'était plaint de ce qu'il prêtait son concours à une activité concurrente créée par Monsieur Y... et de la réponse de la banque, datée du 19 décembre 1991, dans laquelle elle indique qu'elle déplore les dissensions existantes et assure la société sus nommée de la poursuite de leurs relations d'affaire..
La société appelante ne peut pas soutenir, dans de telles conditions, que le cautionnement souscrit au nom de la SCI PPR par Monsieur X... l'aurait été dans l'intérêt de celle-ci et qu'étant donné les liens qui existaient entre les deux sociétés, il apparaissait à ses yeux une communauté d'intérêts faisant présumer que l'acte signé en garantie des dettes de la société commerciale, se rattachait indirectement à l'objet social de la société garante.
Le tribunal a relevé à bon droit qu'en souscrivant le 20 juillet 2000 à l'insu de ses co-associés un cautionnement de 750 000 F en garantie du solde débiteur du compte courant de la société commerciale, cautionnement qui devait se substituer à l'engagement personnel qu'il venait de révoquer par lettre du 3 avril 2000, Monsieur X..., gérant de la SCI PPR, avait agi dans son propre intérêt et non dans celui de la société.
Le CREDIT LYONNAIS qui connaissait les dissensions entre les associés et avait été destinataire de la révocation du cautionnement de Monsieur X... était en possession d'indices de nature à mettre en doute la communauté d'intérêt qu'il invoque aujourd'hui et il devait par conséquent, dans la mesure où il n'entrait manifestement pas dans l'objet social de la SCI PPR de consentir un cautionnement au profit d'une société commerciale, s'assurer que Monsieur X... avait été habilité à signer cet acte par une délibération de l'assemblée générale des associés.
Il convient de confirmer le jugement entrepris dans toutes ses dispositions.
La SCI PPR est en droit de solliciter sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, au titre des frais exposés en appel qui ne sont pas compris dans les dépens, une indemnité complémentaire que la cour fixe à 1 500 Euros.
PAR CES MOTIFS
LA COUR Confirme en toutes ses dispositions le jugement prononcé le 5 février 2004 par le tribunal de grande instance de BORDEAUX.
Y ajoutant, condamne le CREDIT LYONNAIS à payer à la SCI PPR une indemnité complémentaire de 1 500 Euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Le condamne aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés par la SCP PUYBARAUD, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Alain COSTANT, Président, et par Madame Chantal SERRE, Greffier.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Premiere chambre section a
Numéro d'arrêt : 04/01676
Date de la décision : 23/06/2005

Références :

Décision attaquée : Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX, 05 février 2004


Composition du Tribunal
Président : M. Sabron, conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bordeaux;arret;2005-06-23;04.01676 ?
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