ARRET N° 24/
FD/XD
COUR D'APPEL DE BESANCON
ARRET DU 12 JUILLET 2024
CHAMBRE SOCIALE
Réputée contradictoire
Audience publique
du 14 Juin 2024
N° de rôle : N° RG 23/01275 - N° Portalis DBVG-V-B7H-EVJ7
S/appel d'une décision
du POLE SOCIAL DU TJ DE BESANCON
en date du 04 juillet 2023
code affaire : 88M
Majeur handicapé - Contestation d'une décision relative à une allocation
APPELANT
Monsieur [G] [X], demeurant [Adresse 2]
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 25056-2023-006091 du 24/11/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BESANCON)
représenté par Me Jean-Marc PIERRE, avocat au barreau de BESANCON
INTIMEE
MDPH DU DOUBS, sise [Adresse 1]
non comparante
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile l'affaire a été débattue le 14 Juin 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame DOMENEGO Florence, conseiller, entendue en son rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Christophe ESTEVE, président de chambre
Madame Bénédicte UGUEN-LAITHIER, conseiller
Madame Florence DOMENEGO, conseiller
qui en ont délibéré,
M. Xavier DEVAUX, directeur de greffe
Les parties ont été avisées de ce que l'arrêt sera rendu le 12 Juillet 2024 par mise à disposition au greffe.
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FAITS ET PRETENTION DES PARTIES :
M. [G] [X] a présenté le 24 septembre 2021 une demande d'attribution de l'allocation aux adultes handicapés (AAH) auprès de la Maison départementale des personnes handicapées (MDPH) du Doubs.
Par courrier du 18 novembre 2021, la présidente de la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH) a notifié à M. [G] [X] une décision de refus d'AAH du fait d'un taux d'incapacité permanente fixé inférieur à 50 %, décision qu'elle a maintenue le 18 novembre 2022 en suite du recours amiable effectué par M. [X], tout en retenant un taux d'incapacité permanente compris entre 50 et 79 % et une absence de reconnaissance d'une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi (RSDAE).
Contestant cette décision, M. [G] [X] a saisi le 16 janvier 2023 le pôle social du tribunal judiciaire de Besançon lequel a, dans son jugement du 4 juillet 2023, après avoir fait procéder à une consultation médicale à l'audience, confirmé la décision de la CDAPH et débouté M. [X] de ses demandes.
Par lettre recommandée du 28 juillet 2023, M. [G] [X] a relevé appel de cette décision invoquant avoir été victime le 7 juillet 2023 d'un nouvel infarctus et avoir subi un triple pontage le 17 juillet 2023.
Dans ses dernières écritures réceptionnées le 7 décembre 2023, soutenues à l'audience, M. [G] [X] demande à la cour de:
- infirmer le jugement en ce qu'il a confirmé la décision de la CDAPH du 1er juillet 2022 et l'a débouté de ses demandes
- juger qu'il est bien fondé à bénéficier de l'allocation aux adultes handicapés pour une durée de cinq ans avec effet rétroactif à compter de sa demande formulée le 24 septembre 2021
- débouter la MDPH du Doubs de l'intégralité de ses demandes
- condamner la MDPH du Doubs à verser à Maître Jean-Marc Pierre la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique
- condamner la MDPH du Doubs aux entiers dépens.
A l'appui, M. [X] fait principalement valoir que si son taux d'incapacité peut certes être fixé entre 50 et 79 %, il doit cependant se voir reconnaître une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi et doit bénéficier de l'AAH.
La MDPH du Doubs, régulièrement convoquée par lettre recommandée réceptionnée le 18 septembre 2023, n'était ni présente ni représentée.
MOTIFS DE LA DECISION :
Aux termes de l'article L 821-1 du code de la sécurité sociale, une personne peut se voir attribuer l'allocation aux adultes handicapés si elle présente un taux d'incapacité d'au moins 80 %. L'article L 821-2 du code de la sécurité sociale permet un versement de cette allocation, lorsque d'une part la personne présente un taux d'incapacité compris entre 50 et 80 % et que d'autre part la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH) lui reconnaît une restriction substantielle et durable de l'accès à l'emploi.
Le taux d'incapacité retenu est déterminé en application du guide barème pour l'évaluation des déficiences et incapacités des personnes handicapées présents à l'annexe 2-4 du code de l'action sociale et des familles. Le taux de 50 % est appliqué en cas de forme importante de déficiences et correspond 'à une gêne notable dans la vie sociale de la personne'. Le taux de 80% est appliqué quant lui en cas de forme sévère ou majeure des déficiences et correspond à 'une entrave majeure dans la vie quotidienne de la personne avec une atteinte de son autonomie individuelle'.
Au cas présent, pour rejeter la demande d'AAH présentée par M. [X], les premiers juges ont retenu un taux d'incapacité compris entre 50 et 79 % en s'appuyant sur le guide barème et sur les conclusions du docteur [T], médecin expert, ayant indiqué que si' M. [X] présentait une déficience locomotrice caractérisée par des antécédents de rupture de la coiffe des rotateurs de l'épaule droite chez un droitier ayant nécessité trois interventions chirurgicales', 's'il persistait des douleurs avec des amplitudes à peu près conservées mais précautionneuses (...) complétées par de nouvelles douleurs qui seraient d'origine vraisemblablement cervicales' et 's'il existait une seconde déficience caractérisée par une pathologie cardiaque pour laquelle le patient avait bénéficié d'un stentage' et conservait 'une dyspnée d'effort', 'M. [X] restait autonome dans les gestes essentiels de la vie quotidienne et nécessitait parfois une aide apportée par sa compagne pour le ménage, les repas','qu'il était encore à un âge jeune' (47 ans), et'qu'il pouvait donc être considéré qu'une accessibilité à l'emploi restait possible dans un métier certes ne nécessitant pas d'efforts physiques, ni d'utilisation trop forte et trop prolongée du membre supérieur droit'.
Si M. [X] soutient que l'expert ainsi désigné n'a pas pris en compte la totalité des informations médicales le concernant et n'en a notamment pas tiré les conséquences sur sa capacité à accéder durablement à un emploi, aucun élément ne permet cependant d'établir que l'existence d'une restriction durable et substantielle pour l'accès à l'emploi.
L'article D 821-1-2 du code de la sécurité sociale rappelle en effet que la restriction est substantielle lorsque le demandeur rencontre, du fait de son handicap même, des difficultés importantes d'accès à l'emploi, ne pouvant être surmontées soit par des réponses apportées au besoin de compensation mentionnés à l'article L 114-1-1 du code de l'action sociale et des familles facilitant l'accès à l'emploi, soit par des réponses susceptibles d'être apportées aux besoins d'aménagement du poste de travail par tout employeur, soit par des potentialités d'adaptation dans le cadre d'une situation de travail.
Or, en l'état, quand bien même M. [X] a été victime d' un nouvel incident cardiaque le 7 juillet 2023, un tel événement, sur lequel il s'appuie pour revendiquer la réformation du jugement, est cependant insuffisant pour démontrer les conséquences durables et irrémédiables de la déficience cardiaque sur l'accession au travail de ce patient.
La déficience cardiaque, qui comprenait notamment la nécessité d'une nouvelle intervention selon le médecin spécialiste, a en effet été prise en compte par le médecin expert lors de l'audience du pôle social et n'a pas modifié son appréciation, laquelle limitait les postes d'emploi à ceux dépourvus d'efforts physiques et d'utilisation prolongée du membre supérieur droit.
La cour relève par ailleurs que M. [X], qui n'est âgé que de 48 ans et dispose d'un BEP dans l'hôtellerie- restauration, n'a engagé aucune démarche d'insertion depuis le dernier jugement du pôle social du 24 septembre 2019, malgré sa reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé ; qu'il connaît une désinsertion professionnelle depuis 2015 et qu'il se contente dans ses conclusions de se prévaloir d'une impossibilité générale à travailler, sans justifier d'une part, d'avoir engagé de quelconques démarches de recherche d'emploi, voire de formation ou de reconversion professionnelle, et d'autre part, de s'être heurté à d'importantes difficultés de recrutement ou d'exécution des tâches ainsi confiées.
Enfin, le certificat médical du 25 novembre 2023 du docteur [P], médecin traitant, quand bien même il mentionne 'que M. [X] présente un état de santé d'une particulière gravité, l'empêchant de reprendre une activité professionnelle quelle qu'elle soit, en raison de ses multiples pathologies médicales invalidantes' est insuffisant pour établir que les troubles rencontrés par M. [X], certes multiples, obèrent toute possibilité d'emploi et ainsi démontrer que les conditions de l'article D 821-1-2 du code de la sécurité sociale sont réunies.
C'est donc à raison que les premiers juges ont débouté M. [X] de sa demande d'allocation aux adultes handicapés.
Le jugement entrepris sera en conséquence confirmé en toutes ses dispositions.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par décision réputée contradictoire, après débats en audience publique et en avoir délibéré conformément à la loi, :
- Confirme le jugement du tribunal judiciaire de Besançon du 4 juillet 2023 en toutes ses dispositions
- Déboute M. [X] de sa demande présentée au titre de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique
- Condamne M. [X] aux dépens de première instance et d'appel.
Ledit arrêt a été prononcé par mise à disposition au greffe le douze juillet deux mille vingt quatre et signé par Madame Florence DOMENEGO, conseiller, pour le président de chambre empêché, et Monsieur Xavier DEVAUX, directeur de greffe.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT DE CHAMBRE,