Le copies exécutoires et conformes délivrées à
ASW/FA
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Minute n°
N° de rôle : N° RG 24/00259 - N° Portalis DBVG-V-B7I-EXTL
COUR D'APPEL DE BESANÇON
1ère chambre civile et commerciale
ARRÊT DU 02 JUILLET 2024
Décision déférée à la Cour : jugement du 25 janvier 2024 - RG N°22/00664 - JUGE DE LA MISE EN ETAT DE BESANCON
Code affaire : 28A - Demande en partage, ou contestations relatives au partage
COMPOSITION DE LA COUR :
M. Michel WACHTER, Président de chambre.
M. Cédric SAUNIER et Mme Anne-Sophie WILLM, Conseillers.
Greffier : Mme Fabienne ARNOUX, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision.
DEBATS :
L'affaire a été examinée en audience publique du 07 mai 2024 tenue par M. Michel WACHTER, président de chambre, M. Cédric SAUNIER et Mme Anne-Sophie WILLM, conseillers et assistés de Mme Fabienne ARNOUX, greffier.
Le rapport oral de l'affaire a été fait à l'audience avant les plaidoiries.
L'affaire oppose :
PARTIES EN CAUSE :
APPELANT
Monsieur [N] [M]
né le [Date naissance 4] 1950 à [Localité 10], de nationalité française, retraitée,
demeurant [Adresse 5]
Représenté par Me Patricia VERNIER, avocat au barreau de BESANCON
ET :
INTIMÉ
Monsieur [D] [V]
né le [Date naissance 3] 1958 à [Localité 8], de nationalité française, retraité,
demeurant [Adresse 6]
Représenté par Me Delphine GROS de la SELARL AITALI -GROS-CARPI-LE DENMAT-DE BUCY-BECHARI, avocat au barreau de BESANCON
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant préalablement été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par M. Michel WACHTER, président de chambre et par Mme Fabienne ARNOUX, greffier lors du prononcé.
*************
EXPOSE DES FAITS, DE LA PROCEDURE ET DES PRETENTIONS
M. [D] [V] avait une soeur, [R] [V], qui est décédée le [Date décès 1] 2019 à [Localité 9].
Leur mère, [F] [E], est décédée le [Date décès 2] 2020.
Le 17 juillet 2009, [R] [V] et [N] [M] avaient conclu un pacte civil de solidarité, sous le régime de la séparation de biens, avec une convention d'indivision, enregistré le 21 août 2009.
Par acte du 14 avril 2022, M. [D] [V] a fait assigner M. [N] [M] devant le tribunal judiciaire de Besançon aux fins de le voir condamner à lui payer la somme de 81 493,44 euros au titre d'une dette sur la succession de sa soeur, outre le prix de vente d'un véhicule, un montant de 2 000 euros correspondant à des fonds versés par la [7] à M. [M] et des dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral.
M. [N] [M] a saisi le juge de la mise en état aux fins de :
- déclarer nuls et de nul effet les actes d'hérédité, de liquidation et de déclaration de succession dont se prévaut le demandeur,
- juger l'action en responsabilité et en pétition d'hérédité de M. [D] [V] irrecevable pour défaut de qualité et d'intérêt à agir,
- le débouter de ses demandes et le condamner à lui payer une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ordonnance rendue le 25 janvier 2024, le juge de la mise en état a :
- rejeté les demandes en annulation des actes d'hérédité, de liquidation et de déclaration de succession,
- rejeté la fin de non-recevoir pour défaut d'intérêt à agir soulevée par M. [N] [M],
- condamné M. [N] [M] à verser à M. [D] [V] la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit que les dépens de l'incident suivront le sort de ceux de l'instance principale,
- renvoyé l'affaire à la mise en état silencieuse pour les conclusions au fond de la partie défenderesse.
Pour statuer ainsi, le juge de la mise en état a retenu :
Sur la nullité des actes d'hérédité, de liquidation et de déclaration de succession
- que M. [N] [M] n'invoquait aucun moyen de droit au soutien de sa demande en annulation des pièces produites par M. [V],
- que l'on ne voyait pas sur quel fondement un tribunal pourrait annuler un acte liquidatif ou une déclaration de succession,
- que s'agissant de l'acte de notoriété dressé le 8 juin 2021, il appartenait à M. [M], d'introduire, le cas échéant, une procédure en inscription de faux,
- que la qualité héréditaire de M. [D] [V] dans la succession de sa soeur n'était pas discutable, puisqu'il n'était pas contesté qu'il était bien son frère et qu'il n'y avait pas d'autre héritier dans l'ordre successoral, à l'exception de [F] [V] décédée le [Date décès 2] 2020 et aux droits de laquelle venait M. [D] [V],
- qu'au jour de son décès, [R] [V] n'avait laissé ni conjoint successible, ni enfant,
- qu'en tous les cas, les demandes d'annulation étaient sans incidence sur la fin de non recevoir soulevée et il n'appartenait pas au juge de la mise en état de statuer sur des prétentions relevant des pouvoirs de la formation de jugement du tribunal,
- que les demandes étaient donc rejetées ;
Sur la fin de non recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir
- qu'il n'était pas discuté que M. [D] [V] était le frère de [R] [V], qu'il intervenait en sa qualité d'héritier de celle-ci et qu'il venait aux droits de sa mère décédée,
- que le testament invoqué par M. [M] était sans incidence sur l'intérêt à agir de M. [V] en sa qualité d'héritier,
- que M. [V] avait un intérêt certain à solliciter que ce moyen de défense, invoqué dans le cadre de la procédure, soit rejeté ou à en demander l'annulation,
- que l'existence d'un légataire universel était une question de fond qui ne conditionnait pas la recevabilité de l'action du demandeur, mais son bien fondé,
- que l'on ne voyait pas en quoi l'absence de demande en annulation du testament olographe présentée dans l'assignation ne permettait pas au demandeur de répondre à ce moyen invoqué par le défendeur dans le cadre de l'instance et, le cas échéant, de soulever une exception de nullité,
- que la fin de non recevoir était donc rejetée de ce chef.
-oOo-
Par déclaration du 19 février 2024, M. [N] [M] a relevé appel de l'ordonnance en toutes ses dispositions.
Aux termes de ses uniques conclusions transmises le 21 mars 2024, il demande à la cour :
- d'infirmer l'ordonnance du juge de la mise en état du 25 janvier 2024,
Et statuant à nouveau,
- de constater que feue [R] [V] l'a par testament olographe du 17 juillet 2009 institué son légataire universel, légataire universel saisi de plein droit par la mort du testateur, sans être tenu de demander la délivrance de son legs en l'absence d'héritier réservataire,
- de constater que M. [D] [V] n'a aucune qualité d'héritier réservataire, pas plus d'ailleurs qu'une quelconque qualité d'héritier de feue [R] [V],
- de constater que M. [D] [V] n'a pas contesté le testament olographe du 17 juillet 2009 dans le délai de cinq ans à compter de la date de décès de [R] [V] et que son action serait dans tous les cas prescrite,
- de juger l'action en responsabilité de [D] [V] irrecevable pour défaut de qualité et d'intérêt à agir,
En conséquence,
- de débouter M. [D] [V] de ses demandes,
- de le condamner, outre aux dépens de l'instance, à lui payer la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
-oOo-
Aux termes de ses uniques conclusions transmises le 12 avril 2024, M. [D] [V] demande à la cour :
- de confirmer l'ordonnance de mise en état rendue le 25 janvier 2024 par le juge de la mise en état près le tribunal judiciaire de Besançon (RG 22/00664),
- de débouter M. [M] de l'intégralité de ses demandes,
Y ajoutant,
- de condamner M. [N] [M] à lui verser la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur d'appel,
- de condamner M. [N] [M] aux entiers dépens de la procédure d'appel.
-oOo-
L'ordonnance de clôture a été rendue le 16 avril 2024.
L'affaire a été appelée à l'audience du 7 mai 2024 et elle a été mise en délibéré au 2 juillet 2024.
Pour l'exposé complet des moyens des parties, la cour se réfère aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
SUR CE, LA COUR
L'appel portant sur la nullité des actes d'hérédité, de liquidation et de déclaration de succession n'étant pas soutenu par M. [N] [M] dans le dispositif de ses conclusions, l'ordonnance entreprise sera en conséquence confirmée en ce qu'elle a rejeté les demandes en annulation des actes d'hérédité, de liquidation et de déclaration de succession.
I. Sur l'irrecevabilité de l'action pour défaut de qualité et d'intérêt à agir
M. [N] [M] conclut à l'irrecevabilité des demandes de M. [D] [V] en indiquant que le jour de la conclusion du pacte civil de solidarité avec [R] [V], il a institué cette dernière légataire universelle par testament olographe établi sur un formulaire remis par le notaire et qu'il a été fait de même à son égard par [R] [V]. Il soutient que M. [V] n'est pas héritier réservataire, et qu'il ne rapporte ni la preuve de sa qualité, ni celle d'un intérêt à agir pour demander des comptes de gestion. Il fait en outre valoir que M. [V] n'ayant jamais saisi le tribunal d'une demande de nullité du testament, il ne peut qu'être constaté qu'il n'a pas la qualité d'héritier et que lui seul se trouve être héritier désigné par testament du 17 juillet 2009.
M. [D] [V] soutient qu'il a qualité à agir dans la mesure où il est le frère de la défunte, qu'elle n'avait ni conjoint successible, ni enfant, et que leur mère, [F] [V], qui avait été appelée à lui succéder, est également décédée. Il renvoie à l'acte de notoriété établi par le notaire, et indique que la présence d'un légataire universel n'enlève pas la qualité d'héritiers réservataires aux autres ayants droits.
Réponse de la cour :
Aux termes de l'article 31 du code de procédure civile : 'L'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé'.
Par ailleurs, selon l'article 734 du code civile : 'En l'absence de conjoint successible, les parents sont appelés à succéder ainsi qu'il suit :
1° Les enfants et leurs descendants ;
2° Les père et mère ; les frères et soeurs et les descendants de ces derniers ;
3° Les ascendants autres que les père et mère ;
4° Les collatéraux autres que les frères et soeurs et les descendants de ces derniers.
Chacune de ces quatre catégories constitue un ordre d'héritiers qui exclut les suivants.'
En l'espèce, il résulte de l'acte de notoriété établi le 8 juin 2021 par Maître [J] [Z], notaire, qu'au jour du décès de [R] [V], avaient la qualité d'héritiers sa mère, [F] [V], et son frère, M. [D] [V].
[F] [V] étant décédée le [Date décès 2] 2020, M. [D] [V], héritier de sa soeur, s'est alors trouvé saisi des droits de sa mère dans la succession.
La circonstance que M. [N] [M] puisse être légataire universel de [R] [V] est sans incidence sur l'intérêt à agir de M. [V] fondée sur sa qualité d'héritier, étant rappelé, comme l'a pertinemment fait le premier juge, que la recevabilité de l'action de M. [V] ne préjuge pas de son bien-fondé, dont l'appréciation relève de l'office du seul juge du fond.
Compte-tenu de ces éléments, l'ordonnance entreprise sera confirmée sur la qualité et l'intérêt à agir de M. [D] [V].
II. Sur les dépens et sur l'article 700 du code de procédure civile
L'ordonnance déférée sera confirmée sur les dépens et sur les frais irrépétibles.
M. [N] [M] sera condamné aux dépens d'appel.
Il sera en outre condamné à payer à M. [D] [V] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et sera débouté de sa demande formée de ce chef.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,
CONFIRME, en toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 25 janvier 2024 par le juge de la mise en état au tribunal judiciaire de Besançon ;
CONDAMNE M. [N] [M] aux dépens d'appel ;
CONDAMNE M. [N] [M] à payer à M. [D] [V] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
DEBOUTE M. [N] [M] de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Michel Wachter, président de chambre, magistrat ayant participé au délibéré et Fabienne Arnoux, greffier.
Le greffier, Le président,