La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/07/2024 | FRANCE | N°22/01712

France | France, Cour d'appel de Besançon, 1ère chambre, 02 juillet 2024, 22/01712


Le copies exécutoires et conformes délivrées à

MW/FA











REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



Minute n°

N° de rôle : N° RG 22/01712 - N° Portalis DBVG-V-B7G-ESGM





COUR D'APPEL DE BESANÇON

1ère chambre civile et commerciale



ARRÊT DU 02 JUILLET 2024





Décision déférée à la Cour : jugement du 14 septembre 2022 - RG N°2021/03112 - TRIBUNAL DE COMMERCE DE BESANCON

Code affaire : 50B - Demande en paiement du prix ou ten

dant à faire sanctionner le non-paiement du prix





COMPOSITION DE LA COUR :



M. Michel WACHTER, Président de chambre.

Madame Bénédicte MANTEAUX et Mme Anne-Sophie WILLM, Conseillers.

Gr...

Le copies exécutoires et conformes délivrées à

MW/FA

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Minute n°

N° de rôle : N° RG 22/01712 - N° Portalis DBVG-V-B7G-ESGM

COUR D'APPEL DE BESANÇON

1ère chambre civile et commerciale

ARRÊT DU 02 JUILLET 2024

Décision déférée à la Cour : jugement du 14 septembre 2022 - RG N°2021/03112 - TRIBUNAL DE COMMERCE DE BESANCON

Code affaire : 50B - Demande en paiement du prix ou tendant à faire sanctionner le non-paiement du prix

COMPOSITION DE LA COUR :

M. Michel WACHTER, Président de chambre.

Madame Bénédicte MANTEAUX et Mme Anne-Sophie WILLM, Conseillers.

Greffier : Mme Fabienne ARNOUX, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision.

DEBATS :

L'affaire a été examinée en audience publique du 30 avril 2024 tenue par M. Michel WACHTER, président de chambre, Madame Bénédicte MANTEAUX et Mme Anne-Sophie WILLM, conseillers et assistés de Mme Fabienne ARNOUX, greffier.

Le rapport oral de l'affaire a été fait à l'audience avant les plaidoiries.

L'affaire oppose :

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

S.A.R.L. S.N. SODIFALUX

Sise [Adresse 1]

Inscrite au RCS de Dijon sous le numéro 343 728 077 00029

Représentée par Me Christine PETAMENT, avocat au barreau de BESANCON, avocat postulant

Représentée par Me Marie-Christine TRONCIN, avocat au barreau de DIJON, avocat plaidant

ET :

INTIMÉE

S.N.C. LA PRESSE QUINGEOISE

Sise [Adresse 2]

Inscrite au RCS de Besançon sous le numéro 812 842 789 00016

Représentée par Me Lucie TEIXEIRA, avocat au barreau de BESANCON

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant préalablement été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Michel WACHTER, président de chambre et par Mme Fabienne ARNOUX, greffier lors du prononcé.

*************

Par devis accepté du 21 mai 2019, la SNC la Presse Quingeoise, qui exploite un débit de tabac, presse, loterie, dans un secteur de la commune de [Localité 3] (25) protégé au titre des bâtiments de France, a confié à la société SN Sodifalux, spécialisée dans les enseignes et la signalétique, la fabrication, la fourniture et la pose d'un caisson lumineux, d'une enseigne bandeau en aluminium et d'un habillage en aluminium laqué de couleur bleue RAL 5013, pour un prix de 11 214 euros TTC.

En suite du dépôt d'une déclaration préalable de travaux, l'architecte des bâtiments de France a imposé la modification du projet concernant la couleur de la devanture.

Le 17 janvier 2020, le maire de la commune a pris un arrêté de non-opposition, avec prescription d'application de la couleur beige gris RAL 1019.

Le 6 janvier 2021, une nouvelle déclaration de travaux a été déposée en mairie pour le compte de la société la Presse Quingeoise, qui n'était pas signée par celle-ci, et qui faisait état d'une couleur violet pastel, à laquelle l'architecte des bâtiments de France a donné un avis favorable le 19 janvier 2021.

Les 16 et 17 mars 2021, la société Sodifalux a procédé à la pose du bandeau aluminium de couleur violet pastel RAL 4009, puis a adressé à la société la Presse Quingeoise sa facture d'un montant de 11 214 euros.

La société la Presse Quingeoise s'est acquittée d'un montant de 2 228,40 euros, contestant le solde au motif que la couleur appliquée ne correspondait pas à son choix.

Le 27 mai 2021, la mairie a notifié à la société la Presse Quingeoise son opposition à la délcaration préalable du 6 janvier 2021, au motif qu'aucune régularisation n'était intervenue s'agissant de l'absence de signature.

Par exploit du 29 septembre 2021, la société Sodifalux a fait assigner la société la Presse Quingeoise devant le tribunal de commerce de Besançon en paiement du solde de 8 985,60 euros TTC, outre 3 000 euros de dommages et intérêts pour résistance abusive. La demanderesse a fait valoir que la teinte appliquée correspondait à la demande de la défenderesse, et qu'elle avait été validée par la gérante de celle-ci, qui avait signé le bon à tirer en apposant la mention manuscrite 'RAL 4009".

La société la Presse Quingeoise s'est opposée aux demandes formées à son encontre, et a sollicité reconventionnellement, outre que soit écartée des débats l'attestation établie par M. [Y], la condamnation sous astreinte de la société Sodifalux à repeindre le commerce avec la teinte RAL 1019, et l'allocation d'une somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral. Elle a indiqué au soutien de sa position qu'à la suite des préconisaitons de l'architecte des bâtiments de France, la teinte RAL 1019 avait été substituée à la teinte RAL 5013 initialement prévue, et a affirmé n'être pas à l'origine de la déclaration préalable du 6 janvier 2021 portant sur la teinte RAL 4009, qu'elle n'avait jamais signée, et qui avait été faite à son insu.

Par jugement du 14 septembre 2022, le tribunal de commerce a :

- débouté la société SARL SN Sodifalux de ses demandes ;

- débouté la société SNC la Presse Quingeoise de ses demandes reconventionnelles ;

- condamné la société SARL SN Sodifalux à payer à la société SNC la Presse Quingeoise la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la société SARL SN Sodifalux aux entiers dépens ;

- liquidé les dépens du présent jugement à la somme de 69,59 euros.

Pour statuer ainsi, le tribunal a retenu :

- s'agissant de la déclaration préalable du 6 janvier 2021, que les affirmations de la demanderesse selon lesquelles elle correspondrait à une demande de la gérante de la société la Presse Quingeoise qui n'aurait pas été satisfaite de la teinte RAL 1019 proposée par l'architecte des bâtiments de France, estimée trop proche de la teinte de la façade, n'étaient pas corroborées par le moindre commencement de preuve ; que la société Sodifalux ne produisait la trace d'aucun échange à ce sujet, encore moins d'une acceptation formalisée de cette nouvelle teinte ; que cette déclaration préalable du 6 janvier 2021 n'avait pas été signée par la société la Presse Quingeoise, de sorte qu'elle avait fait l'objet d'une décision d'opposition tacite ; que la secrétaire de mairie attestait que ce dossier de déclaration préalable n'avait pas été déposé par la gérante de la société la Presse Quingeoise ; que la demanderesse n'était donc pas en mesure de démontrer que le changement de couleur avait pour origine une exigence nouvelle de sa cliente ;

- s'agissant de l'affirmation de la demanderesse selon laquelle la gérante de la société cliente avait validé la teinte sur le bon à tirer, que la seule pièce attestant de l'acceptation du changement de teinte par la société la Presse Quingeoise était la pièce n°15 de la demanderesse, constituée d'un document de 3 pages dans lequel apparaissait, à la page 2, une annotation 'RAL 4009" suivie d'une signature attribuée à Mme [W], gérante de la société défenderesse ; que ni l'identité du signataire, ni la date de la signature n'apparaissaient, alors que Mme [W] contestait formellement avoir signé ce document, qu'elle qualifiait de faux ; qu'en dépit des attestations de deux collaborateurs de la société Sodifalux, dont celle de M. [Y] dont rien ne justifiait qu'elle soit écartée des débats, faisant état d'une procédure interne de validation des projets permettant de s'assurer du respect de la demande du client, il était pour le moins problématique qu'un changement de teinte de la façade, élément central du projet de rénovation, n'ait pas été formalisé d'une manière ne laissant pas place au doute quant à son acceptation par le client ; qu'il était pour le moins étonnant au regard du professionnalisme revendiqué par la société Sodifalux, qui faisait état de plusieurs rencontres avec Mme [W], qu'elle n'ait pas établi et communiqué un compte-rendu écrit de la teneur de ces échanges et décisions ; qu'il était tout aussi étonnant que la société Sodifalux ait pu déposer en mairie une autorisation de travaux non signée ; que force était de constater que la demanderesse avait démarré les travaux sans s'être assurée du consentement clair et dénué d'ambiguïté de sa cliente sur la teinte définitive retenue ;

- que le projet devait donc s'exécuter avec la couleur RAL '1009" telle que rappelée par le maire dans un courrier du 17 décembre 2021, de sorte que la société Sodifalux devait être déclarée avoir failli à ses obligations contractuelles, et la société la Presse Quingeoise fondée à retenir le paiement du solde de la facture ;

- que la société la Presse Quingeoise réclamait à la fois de ne pas payer la facture des travaux exécutés et que le prestataire repeigne à ses frais la façade ; qu'il ne serait pas de bonne justice de permettre un cumul de mesures qui aurait pour effet d'aboutir à la quasi gratuité des travaux de rénovation, de sorte que la demande de condamnation sous astreinte de la société Sodifalux à repeindre la façade devait être rejetée ;

- que la défenderesse ne fournissait aucun élément attestant d'un quelconque préjudice d'image.

La société Sodifalux a relevé appel de cette décision le 9 novembre 2022, en déférant à la cour les chefs du jugement l'ayant déboutée de ses demandes, et l'ayant condamnée au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens.

Par conclusions n°2 transmises le 26 juillet 2023, l'appelante demande à la cour :

Vu les articles 1103 et suivants du code civil,

Vu l'article 1240 du code civil,

Vu l'article 1217 du code civil,

Vu les articles 232 et suivants du code de procédure civile,

Vu les articles 561, 563, 564, 566 et 910-4 du code de procédure civile,

- de déclarer la SARL SN Sodifalux recevable et bien fondée en son appel ;

L'y recevant et statuant à nouveau :

- d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté la SARL SN Sodifalux en ses demandes et l'a condamnée à payer une somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;

En, conséquence,

A titre principal :

- de condamner la SNC la Presse Quingeoise à payer à la SARL SN Sodifalux la somme de 8 985,60 euros TTC, outre intérêts au taux légal à compter du 21 avril 2021, date de la mise en demeure ;

- de condamner la SNC la Presse Quingeoise à payer à la SARL SN Sodifalux une somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive, sur le fondement des dispositions de l'article 1240 du code civil ;

A titre subsidiaire :

- d'ordonner une expertise graphologique qui sera confiée à tel expert qu'il plaira à la cour d'appel de céans de désigner, expert graphologue inscrit sur la liste des experts dressée par la cour d'appel de Besançon, avec mission :

* de convoquer les parties,

* de se faire remettre tout document qu'il estimera utile à l'accomplissement de sa mission, de faire un historique succinct des éléments du litige,

* de réaliser l'expertise graphologique concernant la signature de Mme [W] sur les pièces produites par la société Sodifalux (pièces n°1, 14, 15a, 17 et 19 figurant au bordereau de communication de pièces de la société Sodifalux),

* de déterminer si la signature figurant sur le document numéroté 15a est la signature ou non de Mme [W] ;

- de fixer la provision concernant les frais d'expertise à la charge de la SNC la Presse Quingeoise ;

- de surseoir à statuer dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise ;

A titre infiniment subsidiaire :

- de condamner la SNC la Presse Quingeoise à payer à la SARL SN Sodifalux la somme de 6 985,60 euros TTC, outre intérêts au taux légal à compter du 21 avril 2021, date de la mise en demeure ;

En tout état de cause :

- de condamner la SNC la Presse Quingeoise à payer à la SARL SN Sodifalux une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- de condamner la SNC la Presse Quingeoise aux entiers dépens de première instance et d'appel, ;

- de débouter la SNC la Presse Quingeoise de ses demandes, fins et conclusions.

Par conclusions récapitulatives notifiées le 25 octobre 2023, la société la Presse Quingeoise demande à la cour :

Vu les articles 1003, 1217, 1231-1 et suivants du code civil,

Vu les articles 1792-6 et 1353 du même code,

Vu les articles 562 et 564 du code de procédure civile,

- de déclarer irrecevable la demande d'expertise graphologique formulée par la SARL SN Sodifalux puisque formulée nouvellement à hauteur de cour ;

- de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a':

* jugé que les travaux réalisés par la SARL SN Sodifalux pour le compte de la SNC la Presse Quingeoise ne sont pas conformes aux stipulations contractuelles';

* jugé que la SARL SN Sodifalux a manqué à ses obligations contractuelles';

* jugé que la SARL SN Sodifalux ne justifie pas des demandes en paiement présentées à l'encontre de la SNC la Presse Quingeoise';

En conséquence,

- de débouter la SARL SN Sodifalux de l'ensemble de ses demandes, fins, moyens et conclusions'présentées à l'encontre de la SNC la Presse Quingeoise ;

- d'infirmer le jugement pour le surplus et statuant à nouveau':

- d'écarter des débats l'attestation établie par M. [R] [Y] en ce qu'elle ne peut refléter la réalité, ce dernier n'étant pas présent au cours des réunions avec la mairie ;

- de condamner la SARL SN Sodifalux à repeindre le commerce de la SNC la Presse Quingeoise avec la teinte RAL 1019, couleur taupe, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du huitième jour suivant la signification du présent jugement, au titre de son préjudice matériel ;

- de condamner la SARL SN Sodifalux à verser la somme de 10 000 euros à la SNC la Presse Quingeoise au titre de son préjudice moral ;

En tout état de cause :

- de condamner la SARL SN Sodifalux à régler à la SNC la Presse Quingeoise une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel ;

- ainsi que les entiers dépens qui seront recouvrés par Me Lucie Teixeira conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La clôture de la procédure a été prononcée le 9 avril 2024.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer pour l'exposé des moyens des parties à leurs conclusions récapitulatives visées ci-dessus.

Sur ce, la cour,

Sur la demande d'expertise graphologique

C'est vainement que la société la Presse Quingeoise soulève l'irrecevabilité de la demande d'expertise au motif qu'elle était formée pour la première fois à hauteur d'appel, alors qu'en application de l'article 144 du code de procédure civile les mesures d'instruction peuvent être ordonnées en tout état de cause.

Il ne sera toutefois pas fait droit à la demande d'expertise graphologique, qui ne présente pas d'intérêt pour la solution du litige, dès lors que la société la Presse Quingeoise ne conteste pas que la signature pour l'analyse de laquelle cette mesure d'instruction est sollicitée émane de sa dirigeante, seule la date d'apposition de cette signature étant sujette à débat, particulièrement s'agissant de sa concomitance avec une mention manuscrite dont il est admis qu'elle a quant à elle été apposée par le responsable de la société Sodifalux.

Sur la demande tendant à voir écarter une pièce des débats

L'intimée sollicite que soit écartée des débats l'attestation établie par M. [R] [Y], au motif qu'elle ne connaissait pas l'attestant, qui n'avait jamais été présent à aucune réunion de chantier, de sorte que l'attestation qu'il avait établie au profit de la société Sodifalux était de pure complaisance.

Ce faisant, la société la Presse Quingeoise se borne à évoquer des circonstances de nature à influer sur l'appréciation de la force probante du document concerné, mais qui ne justifient pas qu'elle soit écartée des débats.

Les jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a refusé d'écarter cette pièce des débats.

Sur le fond

1° sur le solde sur facture

L'article 1103 du code civil dispose que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

L'article 1353 du même code énonce que celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver et que réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

Pour s'opposer au paiement du solde de la facture émise par la société Sodifalux, la société la Presse Quingeoise fait valoir que les travaux correspondant au montant impayé n'ont pas été réalisés conformément à la commande, dès lors qu'ils ont consisté en la mise en oeuvre d'un habillage dont la couleur ne correspondait pas à celle qui avait été convenue, telle qu'elle résultait de la prescription figurant à l'arrêté de non-opposition du 17 janvier 2020.

La société Sodifalux conclut à l'infirmation du jugement et à la condamnation de l'intimée au paiement du solde de sa facture au motif que la couleur mise en oeuvre correspondait très exactement à la dernière demande en date de la société la Presse Quingeoise.

Il est constant que les travaux de modification de la façade du commerce exploité par l'intimée étaient soumis à déclaration préalable, et à transmission à l'architecte des bâtiments de France en raison de son inclusion dans un périmètre protégé au titre des monuments historiques. Dans ce cadre, l'architecte des bâtiments de France a refusé la couleur bleue prévue au devis établi par la société Sodifalux, de sorte que la mairie a notifié le 17 janvier 2020 à la société la Presse Quingeoise un arrêté de non-opposition, sous réserve du respect d'une prescription tenant à la mise en oeuvre d'une teinte dominante RAL 1019, laquelle correspond, selon le nuancier concerné, à une couleur 'beige gris'.

Les travaux contestés ont été réalisés en mars 2021, et ont consisté à la mise en place d'un habillage de couleur RAL 4009, soit, selon ce nuancier, une couleur 'violet pastel'.

S'il n'est pas contesté que la mairie a été destinataire le 6 janvier 2021 d'une nouvelle déclaration préalable, dans laquelle la couleur de l'habillage est indiquée comme étant 'violet pastel', sans indication de référence RAL, cette déclaration a cependant donné lieu à une décision d'opposition tacite de la part de la mairie, au motif qu'ayant été invitée à compléter le dossier par l'apposition d'une signature sur le formulaire, la société la Presse Quingeoise n'avait pas régularisé la situation. L'intimée fait valoir que cette nouvelle déclaration de travaux a été déposée par la société Sodifalux sans avoir reçu son aval, ce qui est contesté par l'appelante, mais ce que tend à l'évidence à confirmer le fait que ce document n'ait pas été soumis à la signature de la société la Presse Quingeoise préalablement à son dépôt, et son absence de régularisation par cette dernière malgré la demande qui lui en a été directement faite par la commune. Comme l'ont pertinemment retenu les premiers juges, ce document est donc en lui-même impropre à caractériser un accord de la société la Presse Quingeoise pour la mise en oeuvre d'une couleur 'violet pastel'.

L'appelante s'appuie surtout sur une maquette du 13 novembre 2020 sur laquelle elle affirme que Mme [W], la dirigeante de la société intimée, a contresigné la modification de la teinte, et validé le choix de la couleur RAL 4009.

Comme déjà indiqué précédemment, la société la Presse Quingeoise ne conteste en réalité pas que la signature figurant sur ce document soit bien celle de Mme [W], mais soutient qu'elle avait été apposée pour valider la maquette à une époque où la mention manuscrite 'RAL 4009", dont se prévaut l'appelante, n'y figurait pas. A cet égard, et pour autant que le permette la fidélité toute relative du rendu d'une teinte sur une impression papier, la cour relève que la couleur figurant sur les représentations graphiques constituant cette maquette est plus proche du beige que du violet.

La société Sodifalux reste ambiguë sur la date à laquelle la signature aurait été apposée. En effet, pour critiquerles motifs du jugement ayant considéré que la date de la signature restait ignorée, l'appelante invoque la date figurant de manière imprimée sur le document lui-même, à savoir le 13 novembre 2020. Pourtant, l'attestation de M. [Y], dont elle se prévaut par ailleurs, mentionne quant à elle une signature le 1er décembre 2020, soit deux semaines plus tard, date à laquelle, selon M. [Y], a également été portée la mention manuscrite 'Ral 4009", qui vient modifier la référence désignant la teinte litigieuse telle qu'elle est imprimées sur la maquette à savoir 'Pantone 437C Leche N6/N535", dont la cour ignore à quelle teinte précise elle correspond. Au regard de ces incohérences, il ne saurait être considéré comme établi que la signature litigieuse ait été apposée alors qu'avait déjà été portée sur le document la mention manuscrite se référant au RAL 4009, de sorte qu'il ne peut être considéré que cette maquette permette de rapporter la preuve certaine d'une validation en toute connaissance de cause de la teinte RAL 4009 par la société la Presse Quingeoise.

Il ne peut par ailleurs être accordé aucune valeur probante particulière aux deux attestations produites aux débats par l'appelante, dès lors qu'elle ont été établies respectivement par l'un de ses préposés et par son gérant, ce dont il résulte l'existence d'une communauté d'intérêt évidente de nature à jeter le doute sur l'impartialité des attestants. Au surplus, il ne résulte pas de l'attestation de M. [Y] qu'il ait personnellement été présent lors des faits qu'il relate, alors que la société intimée soutient quant à elle, sans être contredite, qu'elle n'a jamais eu de contact avec lui.

La société la Presse Quingeoise verse quant à elle un courrier du maire de la commune de [Localité 3], dont il n'est pas contesté qu'il a été associé à certaines réunions entre les parties, et dont il ressort qu'il n'a jamais été question en sa présence d'une modification de la teinte retenue en accord avec les prescriptions de l'architecte des bâtiments de France, et que la teinte effectivement mise en oeuvre ne correspond pas à celle-ci.

Enfin, il ne saurait être tiré aucune conclusion particulière du fait que la société la Presse Quingeoise n'ait formulé aucune observation sur la fiche de pose, qui ne prévoit aucune rubrique à cet effet, ni sur le fait, contesté par l'intimée, qu'aucune réclamation n'aurait été formulée par la suite, la société Sodifalux reconnaissant d'ailleurs dans son courrier du 21 avril 2021 l'existence de plusieurs conversations téléphoniques postérieurement à la réalisation des travaux.

Au regard de ces divers éléments, il devra être retenu, comme l'ont à juste titre fait les premiers juges, que la société Sodifalux ne démontre pas que la teinte mise en oeuvre sur les habillages du commerce avait été validée par sa cliente.

C'est en conséquence à bon droit qu'au regard de ce manquement contractuel, qui a pour conséquence de placer la société la Presse Quingeoise en possession d'un ouvrage ne répondant pas aux prescriptions dont était assorti l'arrêté de non-opposition aux travaux, la société Sodifalux devait être déboutée de sa demande en paiement du solde sur facture. Le préjudice ne peut être limité à une somme de 2 000 euros, comme le sollicite l'appelante à titre subsidiaire, sans d'ailleurs s'en expliquer, dès lors que le défaut de conformité de la teinte affecte tous les éléments dont le paiement est réclamé.

La confirmation s'impose de ce chef.

2° sur la demande relative à la remise en peinture du commerce

La société la Presse Quingeoise relève appel incident de la disposition du jugement l'ayant déboutée de sa demande tendant à voir la société Sodifalux condamnée à repeindre le commerce dans la teinte RAL 1019, critiquant le jugement au motif que les sanctions de l'inexécution contractuelle telles que prévues par l'article 1217 du code civil sont cumulables entre elles.

La société Sodifalux conclut à la confirmation de la décision déférée.

L'article 1217 du code civil dispose que la partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté, ou l'a été imparfaitement, peut :

- refuser d'exécuter ou suspendre l'exécution de sa propre obligation ;

- poursuivre l'exécution forcée en nature de l'obligation ;

- obtenir une réduction du prix ;

- provoquer la résolution du contrat ;

- demander réparation des conséquences de l'inexécution.

Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s'y ajouter.

Dès lors que la demande formée par la société Sodifalux au titre du paiment de la prestation mal exécutée a été accueillie, cette société ne saurait cumulativement être condamnée à la reprise de sa prestation, ces deux sanctions étant incompatibles dès lors qu'elles conduiraient à faire bénéficier la société la Presse Quingeoise d'une prestation totalement gratuite.

La décision déférée sera donc confirmée sur ce point.

3° Sur les demandes de dommages et intérêts

L'issue donnée au litige impose en premier lieu le rejet de la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive formée par la société Sodifalux. Le jugement sera confirmé de ce chef.

La confirmation s'impose également s'agissant du rejet de la demande indemnitaire formée par la société la Presse Quingeoise au titre d'un préjudice moral, faute pour l'intéressée de caractériser de quelque manière que ce soit la détérioration de l'image qu'elle allègue.

Sur les autres dispositions

Le jugement sera confirmé s'agissant des dépens et des frais irrépétibles.

La société Sodifalux sera condamnée aux dépens d'appel, qui pourront être recouvrés directement conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, ainsi qu'à payer à l'intimée la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ces motifs

Statuant contradictoirement, après débats en audience publique,

Déclare recevable la demande d'expertise graphologique formée par la société SN Sodifalux ;

Rejette cette demande ;

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 14 septembre 2022 par le tribunal de commerce de Besançon ;

Y ajoutant :

Condamne la société SN Sodifalux aux dépens d'appel, avec possibilité de recouvrement direct conformément aux dispositions de l'artilce 699 du code de procédure civile ;

Condamne la société SN Sodifalux à payer à la SNC la Presse Quingeoise la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Ledit arrêt a été signé par Michel Wachter, président de chambre, magistrat ayant participé au délibéré et Fabienne Arnoux, greffier.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Besançon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22/01712
Date de la décision : 02/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 09/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-02;22.01712 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award