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14/06/2024 | FRANCE | N°22/01884

France | France, Cour d'appel de Besançon, 1ère chambre, 14 juin 2024, 22/01884


Le copies exécutoires et conformes délivrées à

CC/LZ











REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



Minute n°

N° de rôle : N° RG 22/01884 - N° Portalis DBVG-V-B7G-ESRM





COUR D'APPEL DE BESANÇON

1ère chambre civile et commerciale



ARRÊT DU 14 JUIN 2024





Décision déférée à la Cour : jugement du 15 novembre 2022 - RG N°21/00565 - TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE BESANCON

Code affaire : 58G - Demande en paiement de l

'indemnité d'assurance dans une assurance de personnes





COMPOSITION DE LA COUR :



M. Michel WACHTER, Président de chambre.

M. Cédric SAUNIER et Madame Cécile CUENIN, Conseillers.



Gre...

Le copies exécutoires et conformes délivrées à

CC/LZ

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Minute n°

N° de rôle : N° RG 22/01884 - N° Portalis DBVG-V-B7G-ESRM

COUR D'APPEL DE BESANÇON

1ère chambre civile et commerciale

ARRÊT DU 14 JUIN 2024

Décision déférée à la Cour : jugement du 15 novembre 2022 - RG N°21/00565 - TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE BESANCON

Code affaire : 58G - Demande en paiement de l'indemnité d'assurance dans une assurance de personnes

COMPOSITION DE LA COUR :

M. Michel WACHTER, Président de chambre.

M. Cédric SAUNIER et Madame Cécile CUENIN, Conseillers.

Greffier : Melle Leila ZAIT, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision.

DEBATS :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 8 mars 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés devant Mme Cécile CUENIN, conseiller qui a fait un rapport oral de l'affaire avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour.

L'affaire oppose :

PARTIES EN CAUSE :

APPELANT

Monsieur [U] [Y]

né le [Date naissance 1] 1974 à [Localité 4], demeurant [Adresse 3]

Représenté par Me Ludovic PAUTHIER de la SCP DUMONT - PAUTHIER, avocat au barreau de BESANCON

ET :

INTIMÉE

S.A. CNP

sise [Adresse 2]

Représentée par Me Nathalie BERGER, avocat au barreau de BESANCON

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant préalablement été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Michel WACHTER, président de chambre et par Melle Leila ZAIT, greffier lors du prononcé.

*************

EXPOSE DU LITIGE, DE LA PROCÉDURE ET DES PRÉTENTIONS

Le 31 mai 2007, M. [U] [Y] a été victime d'un accident domestique en tombant du toit de sa maison qu'il était en train d'entretenir. Au moment de l'accident, il était conseiller financier auprès de La Poste et il avait adhéré à un contrat d`assurance ' Prévialys', souscrit le 12 octobre 2002 auprès de la société Assurposte, devenue la Banque Postale Prévoyance (BPP).

[U] [Y] a été admis au service des urgences du CHRU de [Localité 4] le 31 mai 2007, jour de l'accident, puis pris en charge par le service de réanimation. Selon certificat médical du 13 juillet 2007, il présentait un traumatisme crânien, une fracture de l'anneau pelvien, une contusion hémorragique frontale gauche, une fracture de la lame de la première vertèbre thoracique, une contusion pulmonaire droite et gauche avec un pneumothorax droit, une contusion hépatique avec dilatation des voies biliaires post-traumatique et une contusion du coude gauche avec synostose radio-cubitale post-traumatqiue.

La BPP a commis le docteur [F] pour effectuer une expertise médicale dont le rapport définitif a été déposé le 2 novembre 2013.

Deux provisions de 30 000 et 90 000 euros ont été respectivement versées le 12 avril 2016 et le 31 août 2018 par la BPP à M. [Y]. Ensuite, 49 860 euros ont été réglés à celui-ci par le BPP le 21 septembre 2020 au titre de l'incapacité permanente partielle, du préjudice esthétique et des souffrances endurées, soit une somme totale de 169 860 euros perçue alors par M. [Y].

M. [Y] a par suite sollicité par courriels des 12 novembre 2020 et 4 février 2021, l'indemnisation des postes de préjudices suivants : incidence professionnelle, préjudice d'agrément, frais d'appareillage et médicaux restés à sa charge, demandes qui ont été rejetées par la BPP le 24 février 2021.

Par acte en date du 12 avril 2021, M. [Y] a fait assigner la BPP devant le tribunal judiciaire de Besançon aux fins d'obtenir notamment la condamnation de la BPP au paiement des sommes suivantes :

* 730 000 euros au titre de son préjudice économique,

* 45 000 euros au titre de son préjudice d'agrément dans ses composantes définies au contrat c'est à dire le préjudice d'agrément, d'établissement et sexuel,

* 22 209,37 euros au titre des frais d'appareillage

* 23 759,34 euros au titre des frais médicaux restés à sa charge sauf à chiffrer le coût de ces frais pour l'avenir,

* paiement du préjudice matériel qui sera fixé pour mémoire.

La BPP a répliqué en sollicitant notamment une réduction du poste d'indemnisation professionnelle et du poste du préjudice d'agrément, le rejet des demandes relatives au titre des pertes de gains futurs, des frais d'aménagement et d'appareillage, du préjudice sexuel et d'établissement.

Par jugement rendu le 15 novembre 2022, le tribunal judiciaire de Besançon a :

* fixé les indemnités en réparation des préjudices subis par M. [Y] comme suit :

- Dépenses de santé actuelles : 10 865,19 euros,

- Perte de gains professionnels actuels : 25 000 euros,

- lncidence professionnelle : 275 178,33 euros,

- Préjudice d 'agrément : 18 000 euros,

- Préjudice matériel: 15 054,87 euros,

- condamné la BPP à verser à M. [Y] la somme de 344 098,39 euros en réparation de ses préjudices,

- débouté M. [Y] du surplus de ses demandes, ainsi que de ses demandes au titre des frais de logement adapté, frais de santé futurs, perte de gains professionnels futurs, préjudice sexuel et du préjudice d'établissement,

- condamné la BPP à verser à M. [Y] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure- civile,

- débouté la BPP de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la BPP aux dépens de l'instance,

- débouté les parties de toutes demandes plus amples ou contraires,

- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision,

- débouté la BPP de ses demandes de consignation de la somme sur un compte séquestre et de constitution d'une garantie réelle ou personnelle par M. [Y].

Le tribunal a notamment considéré que le principe de la garantie par la BPP n'était pas contesté et il a procédé à l'évaluation du préjudice corporel de M. [Y] en s'appuyant sur le rapport d'expertise du Docteur [F].

Au titre des préjudices patrimoniaux de M. [Y] il a été retenu les éléments suivants :

* Préjudices temporaires :

$gt; dépenses de santé actuelles : seules les dépenses justifiées doivent être indemnisées à hauteur de ce qui est réellement resté à la charge de M. [Y] soit : pour les soins homéopathiques, l'attestation établie par le cabinet de médecine générale et homéopathie (règlement d'un montant de 1 350 euros), des factures d'ostéopathie (758 euros), les factures de dépassement d'honoraires concernant les soins des cordes vocales ( 225,19 euros), un règlement de la somme de 3 940 euros au titre du suivi kinésithérapeutique, une attestation de la psychothérapeute de M.[Y] (3 662 euros réglés pour une thérapie de couple), et enfin le règlement justifié d'une avance de 930 euros au titre d'une thérapie cognitive et comportementale.

$gt; préjudice matériel : la défenderesse n'a pas discuté ce montant aux termes de ses écritures et la demande de M. [Y] d'indemnisation d'une somme de 15 054,87 euros (multiples frais de transport depuis les faits pour des raisons notamment médicales), est justiée au regard du récapitulatif versé aux débats.

$gt; perte de gains professionnels actuels : l'article 10.1 des conditions générales du contrat d'assurance prévoit l'indemnisation notamment des gains professionnels manqués avant la consolidation dans la limite de 25 000 euros, la demande de M. [Y] à hauteur de 25 000 euros n'est pas contestée et la BPP n'évoque pas ce poste dans ses conclusions.

* Préjudices permanents :

$gt; dépenses de santé futures :la demande est rejetée dans la mesure où l'expert ne retient pas de telles dépenses.

$gt; Frais de logement adapté et d'apparaillage : la demande est rejetée dans la mesure où l'expert ne retient pas la nécessité de procéder à des aménagements tels que les changements de literie allégués.

$gt; Perte de gains professionnels futurs : rejet de la demande au motif que la perte de gains futurs n'est pas couverte par le contrat Prévialys.

$gt; Incidence professionnelle :

$gt;$gt; Perte de chance : il résulte du rapport d'expertise que M. [Y] a subi une importante répercussion sur ses activités professionnelles puisqu'il n'a pas pu reprendre ses activités antérieures et exerce actuellement des activités beaucoup moins valorisantes. Avant l'accident, il était augmenté significativement chaque année, il pouvait dès lors prétendre à une progression de carrière avantageuse. Après son accident, il lui a été fait une proposition de poste d'un niveau de qualification inférieur ce qui démontre le déclassement professionnel subi. En outre, l'empêchement d'être en contact avec le public est manifestement un frein au développement d'une carrière dans le milieu bancaire. Il a enfin perdu son emploi des suites de cet accident et n'a pu en retrouver un en rapport avec son niveau de qualification et de rémunération. Toutefois, étant donné que le développement de la carrière de M. [Y], alors qu'il était âgé de 33 ans au moment des faits, pouvait dépendre également d'autres facteurs non maîtrisés, il sera retenu une perte de chance d'avoir développé une carrière plus avantageuse, de nature à réduire son indemnisation à hauteur de 60 000 euros.

$gt;$gt; Perte de droits à la retraite : il a été pris en considération les estimations versées aux débats par M. [Y] retenant une pension de 2 089 euros mensuels pour un départ à 63 ans qu'il aurait dû obtenir et une pension de 1 170 euros pour un départ à 62 ans et 11 mois, soit une perte de 215 178,33 euros (2 089 - 1 170 = 919 ; 919* 12* 19,512).

Au titre des préjudices extra patrimoniaux permanents de M. [Y], le tribunal a estimé que les préjudices sexuels et d'établissement n'étaient pas couverts par la garantie avant de rejeter les demandes présentées à ce titre. Quant au préjudice d'agrément, il a été indemnisé à hauteur de 18 000 euros en relevant que M. [Y] versait au débat deux attestations qui corroboraient les conclusions de l'expert en ce sens que l'accident avait eu un retentissement sur les activités de foot-ball, de squash et de musique qu'il pratiquait avant la survenance des faits.

-oOo-

Par déclaration du 15 décembre 2022, M. [Y] a relevé appel du jugement en ce qu'il a :

* fixé les indemnités en réparation des préjudices subis par M. [Y] comme suit :

- Dépenses de santé actuelles : 10 865,19 euros,

- Perte de gains professionnels actuels : 25 000 euros,

- Incidence professionnelle : 275 178,33 euros

- Préjudice d 'agrément : 18 000 euros

- Préjudice matériel: 15 054,87 euros

- condamné la BPP à verser à M. [Y] la somme de 344 098,39 euros en réparation de ses préjudices,

- débouté M. [Y] du surplus de ses demandes, ainsi que de ses demandes au titre des frais de logement adapté, frais de santé futurs, perte de gains professionnels futurs, préjudice sexuel et du préjudice d'établissement,

- débouté M. [Y] de toutes demandes plus amples ou contraires.

La déclaration d'appel a été signifiée à personne le 23 janvier 2023.

-oOo-

Le 2 février 2024, la CNP ASSURANCES PREVOYANCE venant aux droits de la BPP, a constitué avocat.

-oOo-

Aux termes de ses dernières conclusions transmises le 9 février 2024, M. [Y] demande à la cour de :

- le recevoir en son appel,

- infirmer le jugement entrepris dans les limites de son appel,

- fixer après actualisation les indemnités à la somme de 1 067 208,09 euros se décomposant comme suit :

* dépenses de santé actuelles : 14 212,18 euros,

* perte de gains professionnels actuels : 25 000 euros,

* incidence professionnelle : 963 000 euros,

* préjudice d'agrément : 45 000 euros,

* préjudice matériel : 19 995,87 euros.

Vu le plafond de garantie fixé à la somme de 1 000 000 euros,

* condamner la société CNP, venant aux droits de la société BPP à lui verser la somme de 1 000 000 euros en réparation de ses préjudices, dont à déduire la somme de 344 098,39 euros versée par provision et au titre de l'exécution provisoire,

* confirmer le jugement entrepris du chef de l'article 700 du code de procédure civile alloué en première instance, et des dépens d'instance,

* condamner la société CNP venant aux droits de la BPP au paiement de la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel, ainsi qu'aux entiers dépens de la procédure d'appel.

-oOo-

L'ordonnance de clôture a été rendue le 16 février 2024 à 9h39.

-oOo-

Aux termes de ses conclusions premières et dernières transmises le 16 février 2024 à 13h38 , la CNP Assurances Prévoyance demande notamment à la cour de confirmer le jugement relativement aux postes de : dépenses de santé actuelles, perte de gains professionnels actuels, incidence professionnelle, préjudice d'agrément et préjudice matériel et, la recevant en son appel incident, d'infirmer le jugement relativement au poste de préjudice matériel ou à titre subisidiaire, limiter l'indemnisation de M. [Y] à la somme de 15 054,87 euros.

-oOo-

Aux termes de ses conclusions de procédure transmises 19 février 2024, M. [Y] demande à la cour d'écarter des débats et de déclarer en toutes hypothèse irrecevables les conclusions et pièces déposées le 16 février 2024 par la SA CNP Assurances Prévoyance.

-oOo-

Aux termes de ses conclusions de procédure transmises le 28 février 2024, la CNP Assurances Prévoyance demande à ce que ses conclusions au fond et ses pièces soient jugées recevables.

-oOo-

L'ordonnance de clôture a été rendue le 16 février 2024 et l'affaire a été appelée à l'audience du 8 mars 2024.

Elle a été mise en délibéré au 14 juin 2024.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer pour l'exposé des moyens des parties à leurs conclusions récapitulatives visées ci-dessus.

En application de l'aticle 473 du code de procédure civile, le présent arrêt sera réputé contradictoire.

SUR CE, LA COUR,

I. Sur la recevabilité des conclusions

Le 16 février 2024, la société CNP a envoyé des conclusions au fond. Dans ses conclusions de procédure du 19 février 2024, M. [Y] sollicite qu'elles soient écartées des débats et en tout état de cause qu'elles soient déclarées irrecevables, à l'instar des pièces qui les accompagnent.

Dans cette perspective, ilsoutient que la société CNP Assurances Prévoyance n'a ni constitué ni conclu dans les délais ouverts par l'article 909 du code de procédure civile. Il précise que ces conclusions, qui forment de surcroît appel incident, ont été déposées postérieurement à la clôture des débats.

Aux termes de ses conclusions de procédure transmises le 28 février 2024, la CNP Assurances Prévoyance demande à ce que ses conclusions au fond et ses pièces soient jugées recevables au motif qu'elles ont été déposées concomitament à la clôture.

Elle soutient également que dans ses dernières conclusions, l'appelant a substantiellement modifié certaines demandes et a produit de nouvelles pièces, ce qui nécessite une réponse. Elle expose alors qu'en vertu de l'exigence de procès équitable et du principe de contradictoire, la notification de nouvelles conclusions par l'appelant (moyens nouveaux, prétentions supplémentaires ou pièces nouvelles) impose que l'intimé puisse répondre, alors même qu'il a pu voir ses premières écritures jugées irrecevables, dès lors qu'une modification substantielle ou significative est observée dans les nouvelles conclusions de l'appelant.

Réponse de la cour :

Aux termes de l'article 907 du code de procédure civile, à moins qu'il ne soit fait application de l'article 905, l'affaire est instruite sous le contrôle d'un magistrat de la chambre à laquelle elle est distribuée, dans les conditions prévues par les articles 780 à 807 et sous réserve des dispositions qui suivent.

Aux termes de l'article 802 du même code, après l'ordonnance de clôture, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office. Sont cependant recevables, d'une part, les demandes en intervention volontaire, les conclusions relatives aux loyers, arrérages, intérêts et autres accessoires échus et aux débours faits jusqu'à l'ouverture des débats, si leur décompte ne peut faire l'objet d'aucune contestation sérieuse, ainsi que les demandes de révocation de l'ordonnance de clôture et d'autre part, les conclusions qui tendent à la reprise de l'instance en l'état où celle-ci se trouvait au moment de son interruption.

En vertu enfin de l'article 803, l'ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s'il se révèle une cause grave depuis qu'elle a été rendue ; la constitution d'avocat postérieurement à la clôture ne constitue pas, en soi, une cause de révocation. L'ordonnance de clôture peut être révoquée, d'office ou à la demande des parties, soit par ordonnance motivée du conseiller de la mise en état, soit, après l'ouverture des débats, par décision de la cour.

En l'espèce, les conclusions au fond de la CNP Assurances Prévoyance ont été déposées à 13h38 tandis que l'ordonnance de clôture a été rendue à 9h39, soient postérieurement à celle-ci et en application de l'article 802 du code de procédure civile, elles doivent donc être déclarées irrecevables sauf si elles tendent à certaines fins limitativement énumérées. La cour constate que les conclusions litigieuses ne correspondent pas aux conclusions postérieures à la clôture recevables au sens de l'article susmentionné et qu'en tout état de cause la révocation de l'ordonnance de clôture n'a pas été demandée.

Dès lors, il n'existe aucune cause grave au sens de l'article 803 du code de procédure civile qui justifierait la révocation de l'ordonnance de clôture. En particulier la cour relève qu'il n'y a pas de modification substantielle entre les dernières conclusions déposées par M. [Y] le 9 février 2024 et les conclusions précédentes du 16 janvier 2024 étant relevé que les sommes dont il est demandé paiement dans ces écritures sont demeurées identiques et qu'aucune pièce n'a été ajoutée.

Par conséquent, la cour, déclare les conclusions de la société CNP datées du 16 février 2024, irrecevables.

II. Sur l'indemnisation du préjudice de M. [Y]

Les demandes de M. [Y] ont trait aux dépenses de santé actuelles et futures, à l'incidence professionnelle en ce compris les pertes de gains professionnels futurs, la perte de droits à la retraite et la perte de chance de carrière, au préjudice d'agrément en ce compris le préjudice sexuel et d'établissement et au préjudice matériel.

A titre liminaire il sera rappelé que l'accident de M. [Y] a eu lieu le 31 mai 2007.

La date de consolisation a été fixée au 31 août 2012 par le docteur [B] [F] qui a été saisi par La Banque Postale Prévoyance pour réaliser une expertise médicale et dont le rapport médical amiable définitif du 2 novembre 2013, non contesté par M. [Y], servira à l'instar du premier juge, de base d'évaluation du préjudice corporel subi par ce dernier.

1. Sur l'indemnisation du poste de dépenses de santé

Le jugement déféré a alloué la somme de 10 865 euros à M. [Y] au titre des dépenses de santé actuelles. Il sollicite l'infirmation du jugement et demande à la cour de fixer l'indemnisation de son préjudice à la somme de 14 212,18 euros pour actualiser le montant de ce poste.

M. [Y] allègue que pour la période postérieure au jugement, il justifie de frais de santé à hauteur de 3 346,99 euros. Aucune précision n'est apportée sur le lien entre ces dépenses et l'accident.

Réponse de la cour :

Le poste de dépenses de santé actuelles tend à indemniser les frais de santé exposés par la victime suite au fait générateur pour la période antérieure à la consolidation.

En l'espèce, certaines des sommes dont il est sollicité l'indemnisation ne sauraient être qualifiées de 'depenses de santé actuelles' en ce qu'elles ont été exposées après la date de consolidation.

Toutefois, conformément au principe de réparation intégrale et obligation étant faite au juge de redonner aux faits leur juste qualification juridique, dès lors qu'un préjudice est démontré, celui-ci a l'obligation de l'indemniser y compris en cas d'erreur de qualification, étant précisé que le conseil de M. [Y] a sollicité également l'infirmation du jugement en ce qu'il l'a débouté de sa demande au titre des dépenses de santé futures.

En l'espèce, il est constaté que M. [Y] produit et vise au soutien de sa demande (pièces 74-1 à 74-21) diverses notes d'honoraires, ordonnances, justificatifs de mutuelle (suite aux prescriptions du Dr [N]), prescriptions, attestations de suivi, relatifs aux années 2021, 2022 et 2023 (soit postérieurement à la consolidation) et relatifs à :

* des semelles orthopédiques (Dr [G] [N]),

* des orthèses plantaires (M. [R]),

* des actes de podologie/pédicurie ([T] [R]),

* de la psychothérapie (Mme [D]),

* de la kinésithérapie et précisément de digitoponcture (Mme [L]),

* de l'acunpuncture japonaise (Mme [C]),

* des compléments alimentaires (santé discount),

* du matériel de soutien lombaire (espace du dos),

* de la reconstruction posturale (M. [S])

* des actes d'osthéopathie (M. [S] et Mme [V]).

Il sera relevé qu'il ressort des deux justificatifs de mutuelle produits que les dépenses visées ne résultent pas d'un accident, sans autres éléments de nature à renseigner sur les matériels ou les actes concernés ou encore l'évènement justifiant les soins.

Ensuite, selon pièces non visées aux conclusions mais versées au débat (pièces 48 et suivantes) :

- sur les frais de podologie, selon attestation datée de 2021, M. [R] justifie le suivi depuis 2017 par la nécessité de compenser un membre inférieur gauche plus court, de soutenir un medio-pied dont l'arche est augmentée, de lutter contre une mise en supination de l'arrière pied et de contenir un genuvarum.

- sur le matériel de soutien lombaire, le devis produit ne permet pas d'établir le lien entre le matériel visé et l'accident alors même que le devis et la facture précitée ne concerne pas le même matériel.

- selon le certificat établi par le Dr [M] ou [E] (papier à double entête et absence de signature permettant d'identifier le rédacteur), M. [Y] a été traité suite à un polytraumatisme de mai 2017. Les soins apportés par le rédacteur, médecin généraliste, ne sont pas précisés. La cour relève toutefois que ce certificat se borne à décrire des actes effectués par d'autres médecins que le médecin rédacteur, lequel ne fait aucune constatation personnelle si ce n'est la normalisation du bilan hépatique.

- selon bilan radiologique du Dr [Z] daté de 2013, M. [Y] est affecté de discrets troubles de la statique dorso-lombo-pelvienne et d'importants remaniements de la symphyse pubienne sans autre anomalie notable.

- selon attestation de Mme [L], masseur-kinésithérapeute, M. [Y] est suivi depuis 2010 pour des douleurs du rachis avec variation de la localisation accompagnées de migraines et de perturbations du sommeil, outre anxiété et angoisse.

- selon attestation de Mme [D], psychothérapeute, M. [Y] et sa compagne sont suivis pour faire face aux suites de l'accident de M. [Y] (2502 euros).

- selon attestation de Mme [X], psychologue, M. [Y] a réalisé des séances afin de gérer ses émotions et l'estime de soi entre 2019 et 2020.

- selon attestation de 2009 du Dr [I], spécialiste en psychiatrie, M. [Y] présente des troubles de l'humeur à type de bipolarité.

- selon M. [A], kinésithérapeute, M. [Y] a bénéficié de 112 séances et il précise qu'il est possible que les symptomes traités aient un lien avec l'accident de mai 2007 dans la mesure où M. [Y] ne recourait pas à la kinésithérapie avant son accident.

Dans la perspective d'établir le lien entre ces frais et l'accident, outre les éléments susvisés, la cour relève que Le Dr [F] a constaté dans son rapport du 2 novembre 2013 :

- que M. [Y] ne présente pas de troubles de la mobilité, de mouvements anormaux, de tremblements ou de troubles cérébelleux.

- une légère réduction de la force de flexion de la cuisse gauche sur le bassin.

- la normalité et la symétrie des réflexes ostéo-tendineux, l'absence de troubles de sensibilités, de signe de Lasègue et la normalité de l'examen des paires de nerfs crâniens.

- présence de diverses cicatrices.

- zone abdominale indolore.

- des membres supérieurs de dimensions similaires mais extension réduite de 5° du coude gauche, pronation de l'avant-bras réduite de 10°.

- légers troubles de la statique d'attitude scoliotique au niveau du rachis vertrébral.

- l'absence de déformation, d'asymétrie ou de trouble de la statique au niveau du bassin, étant au demeurant indolore.

- une longueur identique des membres inférieurs. Laxité antérieure du genou gauche. Marche sans claudication et absence de troubles de la mobilité.

- l'absence de trouble de la statique au niveau du rachis et du bassin en position debout.

- présence d'une contracture lombaire para-vertébrale droite.

- M. [Y] signale la présence de fuites urinaires et une réduction importante de la libido.

- antérieurement à l'accident, M. [Y] prenait des antidépresseurs et s'était soumis à la cure chirurgicale d'une laxité ligamentaire de genou gauche.

Il se déduit des éléments précités que, parmi les dépenses dont il est sollicité l'indemnisation, aucun lien n'est démontré entre l'accident du 31 mai 2007 et les dépenses suivantes : semelles orthopédiques, orthèses plantaires, podologie/pédicurie, digitoponcture, acunpuncture japonaise, compléments alimentaires, matériel de soutien lombaire, reconstruction posturale et osthéopathie.

La nécessité de ces soins est au demeurant parfois contredite par l'expertise médicale. Cette absence de lien entre les dépenses susvisées et l'accident s'infère alternativement de l'absence de précisions sur les soins pratiqués et, concernant l'osthéopathie et la kinésithérapie l'absence de précisions des zones traitées, de l'absence de proximité temporelle entre l'accident et la date de réalisation des soins ou les achats, de l'absence de mention dans les certificats médicaux ou l'expertise sur la nécessité des soins et achats litigieux et enfin de l'absence de production d'éléments corroborants.

Il se déduit des éléments précités que seules les dépenses de psychothérapie exposées auprès de Mme [D] entre 2021 et 2023 sont liées à l'accident de mai 2007. Selon attestation de Mme [D] visée à l'appui de la demande d'indemnisation, les frais s'élèvent à la somme totale de 1 300 euros.

Par conséquent, la cour infirme le jugement déféré en ce qu'il a condamné la CNP Assurances Prévoyance, venant aux droits de la BPP, (CNP) au paiement de la somme de 10 865,19  euros concernant le poste de dépenses de santé actuelles à M. [Y]. Statuant à nouveau la cour condamne la société CNP au paiement de la somme de 12 165,19 euros et déboute M. [Y] pour le surplus de ses demandes présentées à ce titre.

2. Sur la perte de gains professionnels actuels

Le jugement déféré a fixé le poste de pertes de gains professionnels actuels à la somme de 25 000 euros.

La disposition du jugement précitée, si elle est comprise dans la déclaration d'appel, n'a pas fait l'objet d'une demande soutenue par l'appelant devant la cour de sorte qu'elle ne peut qu'être confirmée.

Par conséquent, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a alloué la somme de 25 000 euros à M. [Y] au titre de sa perte de gains professionnels actuels.

3. Sur le préjudice matériel

Le jugement déféré a alloué à ce titre la somme de 15 054,87 euros à M. [Y] pour couvrir les frais de transport eu égard au récapitulatif versé au débat, et après avoir relevé que ce montant n'était pas discuté par l'assureur.

L'appelant sollicite l'infirmation du jugement et demande à la cour de fixer l'indemnisation de son préjudice à la somme de 19 995,87 euros pour actualiser le montant de ce poste et prendre en compte des trajets réalisés depuis le décompte arrêté en 2020.

Réponse de la cour :

L'appelant sollicite l'actualisation des frais engagés au titre de ses déplacements pour motif médical. Il précise que le premier juge s'est fondé sur un décompte arrêté en 2020. Il sollicite à hauteur de cour l'actualisation de cette somme pour être indemnisé des frais exposés entre 2020 et 2023. Il produit dans cette perspective'un état actualisé arrêté aux termes de l'année 2023". Ce décompte des frais ne permet pas de distinguer à quelle période les frais ont été exposés et quels frais supplémentaires auraient été exposés entre 2020 et 2023, les autres pièces versées au débat sont également, à cet égard, insuffisantes étant précisé qu'aucune explication n'est fournie dans les écritures.

Par conséquent, la cour confirme le jugement déféré qui a alloué à l'appelant la somme de 15 054,87 euros.

4. L'incidence professionnelle

M. [Y] sollicite l'infirmation du jugement en ce qu'il a rejeté sa demande au titre de la perte de gains professionnels futurs.

M. [Y] sollicite que le jugement qui lui a accordé la somme de 275 178,33 euros au titre de l'incidence professionnelle soit réformé pour obtenir la somme de 963 000 euros. Il expose à cet égard que l'incidence professionnelle définitive au sens du contrat Previalys couvre non seulement la perte de chance de mener une carrière plus favorable, la perte de droits à la retraite mais encore la perte de gains professionnels futurs. Selon le premier juge, les seules composantes indemnisables au sens du contrat Previalys résident dans la perte de chance de mener une carrière plus favorable et la perte de droits à la retraite, ces deux composantes étant respectivement évaluées à 60 000 et 215 178,33 euros, à l'exclusion de la perte de gains professionnels futurs.

Sur la prise en compte de la perte de gains professionnels futurs.

L'appelant précise que l'indemnisation est conditionnée contractuellement à l'existence d'une incapacité permanente supérieure à 10%, ce critère étant rempli, et que l'assureur est tenu sans limitation du préjudice économique correspondant aux pertes financières subies imputables directement à l'accident garanti. Il allègue que la garantie de l'incidence professionnelle définitive couvre nécessairement la perte de gains professionnels futurs outre l'incidence professionnelle et la perte de droits à la retraite. Il souligne l'incohérence qui consisterait à garantir la perte de gains professionnels actuels et non la perte de gains professionnels futurs. Il affirme qu'aucune exclusion ne ressort du contrat. Il conclut que ce poste de préjudice est indemnisable à hauteur de 362 026 euros.

Sur la perte de droits à la retraite.

M. [Y] précise que cette perte a été parfaitement évaluée mais qu'il convient de la réactualiser à la hausse afin de prendre en compte le recul de l'âge de départ à la retraite, celui-ci étant repoussé à 64 ans.

Sur la perte de chance.

M. [Y] soutient qu'il avait de réelles perspectives de carrière au regard de sa capacité manifeste à gravir les échelons. Il précise qu'il aurait pu devenir, à terme, directeur d'agence.

Réponse de la cour :

Sur la prise en compte de la perte de gains professionnels futurs

Aux termes de l'article 1134 du code civil en sa version applicable à la cause, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

En vertu de l'article 1156 du code civil en sa version applicable à la cause, il doit être recherché dans les conventions quelle a été la commune intention des parties contractantes, plutôt que de s'arrêter au sens littéral des termes de celles-ci. L'article 1158 du dit code précise en outre que les termes susceptibles de deux sens doivent être pris dans le sens qui convient le plus à la matière du contrat.

En l'espèce, il est constaté :

- que le contrat d'assurance litigieux a pour objet de garantir l'indemnisation des préjudices résultant d'un accident survenu dans le cadre de la vie privée, qui a pour conséquence soit le décès soit une incapacité permanente d'au moins 10%.

- selon l'article 10.1 des conditions générales, au titre du préjudice économique sont garanties les pertes financières et parmi elles les gains professionnels manqués avant la consolidation dans la limite de 25 000 euros et 'l'incidence professionnelle définitive du préjudice fonctionnel', sans définir davantage ces postes de préjudice.

- que le contrat litigieux, souscrit en 2002, est antérieur à la nomenclature Dintilhac, laquelle ne saurait dès lors guider dans la définition des postes de préjudice couverts.

La cour relève qu'il se déduit de l'article 10.1 que l'assureur n'entendait pas couvrir l'intégralité des pertes financières subies consécutivement à l'accident mais seulement certaines d'entre elles.

En effet, le champ de la garantie est restreint aux pertes financières limitativement définies à savoir 'les gains professionnels manqués avant la consolidation et l'incidence professionnelle définitive'. Les périodes pré-consolidation et post-consolidation sont donc nettement distinguées et pour chacune d'elle, un type de préjudice différent est garanti. M. [Y] ne saurait donc réclamer le même type d'indemnité pour la période antérieure et pour la période postérieure à la consolidation.

En particulier, si la garantie de la perte de gains professionnels est explicitement prévue pour la période pré-consolidation, tel n'est pas le cas pour la période post-consolidation. L'argument selon lequel l'assureur était tenu d'indemniser tous les préjudices découlant d'une incapacité supérieure à 10% ne saurait prospérer alors qu'il est acquis que le préjudice n'est indemnisable que dans les limites que définit la suite des stipulations contractuelles.

Il n'est pas nécessairement incohérent que l'assureur couvre une perte de gains professionnels temporaires et par nature, plus prévisible mais ne couvre pas une perte de gains définitive dont le montant et la durée sont aléatoires. La cour ajoute qu'il ne saurait être demandé à l'assureur de préciser l'intégralité des risques qui ne sont pas couverts.

Il s'en infère que toutes les pertes financières découlant de l'accident ne sont donc pas garanties, contrairement à ce qui est soutenu par l'appelant.

En conséquence, la cour retient que le contrat Previalys souscrit par M. [Y] ne couvre pas la perte de gains professionnels futurs mais seulement la perte de gains professionnels actuels.

Sur la perte de droits à la retraite.

En première instance, la prise en compte de la perte de droits à la retraite n'était pas contestée par l'assureur dans son principe. Conformément à la méthode de calcul des premiers juges et suivant les informations présentées dans le 'récapitulatif de votre scénario', la cour constate que la somme de 299 994,92 euros constitue une juste indemnisation du préjudice de perte de droits à la retraite. La somme allouée à ce poste sera donc actualisée de la somme de 215 178,33 euros à celle de 299 994,92 euros pour prendre en compte le recul de deux années de l'âge de la retraite.

Sur la perte de chance.

En première instance, la prise en compte de la perte de chance n'était pas contestée par l'assureur dans son principe. C'est par des motifs exacts que la cour adopte que le premier juge a évalué l'incidence professionnelle comme une perte de chance et ce à hauteur de 60 000 euros.

Par conséquent, le poste d'incidence professionnelle sera évalué à la somme totale de 359 994,92 euros.

Le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a fixé ce poste de préjudice à la somme de 275 178,33 euros et la cour statuant à nouveau, alloue à ce titre à M. [Y] la somme de 359 994,92 euros.

5. Frais de logement adapté et d'appareillage

Le jugement déféré a débouté M. [Y] de sa demande.

Si les dispositions du jugement relatives à ce poste sont visées dans la déclaration d'appel, ce poste de préjudice n'a pas fait l'objet d'une demande soutenue par l'appelant devant la cour .

Par conséquent, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté M. [Y] de sa demande présentée à ce titre.

6. Préjudice d'agrément

Ce poste de préjudice a été fixé par le premier juge à la somme de 18 000 euros.

M. [Y] conteste cette évaluation en soutenant que le préjudice d'agrément au sens du contrat Previalys ne couvre pas seulement la perte de l'exercice des activités de loisirs mais également les préjudices sexuels et d'établissement. Il reproche au premier juge de s'être fondé sur la nomenclature Dintilhac, postérieure au contrat, pour interpréter celui-ci. Il rappelle la définition contractuelle du préjudice d'agrément en précisant que les préjudices sexuels et d'établissement relèvent du préjudice personnel et non du préjudice fonctionnel, comme l'aurait relevé à tort le premier juge.

M. [Y] sollicite :

* 20 000 euros pour la privation des différents loisirs auxquels il s'adonnait assidument et qu'il ne peut plus pratiquer suite à l'accident.

* 20 000 euros au titre du préjudice d'établissement alors que l'accident est à l'origine de sa séparation conjugale, qu'il n'a pas pu reprendre de vie de couple et que sa relation avec sa fille s'est considérablement détériorée.

* 5 000 euros alors qu'il est affecté de petites fuites urinaires, de douleurs au bassin, de ronflement, d'asthénie chronique et d'une réduction de la libido.

Réponse de la cour :

Aux visas des articles du code civil précités, il est constaté que selon les conditions générales du contrat d'assurance litigieux, prises en leur article 10.1, au titre des préjudices personnels, le préjudice d'agrément est un préjudice indemnisable. Le préjudice d'agrément est défini comme la perte ou réduction définitive, à compter de la date de consolidation, du fait des séquelles de l'accident, des capacités de l'assuré à poursuivre ses activités familiales, affectives et de loisirs habituellement pratiquées avant la survenance de l'accident garanti.

La couverture du préjudice d'agrément par la police d'assurance est manifeste et n'était au demeurant pas contestée par l'assureur en première instance.

M. [Y] affirme que la notion contractuelle de 'préjudice d'agrément' recouvre celle de 'préjudice d'établissement' et à ce titre il demande l'indemnisation de son préjudice consistant en la perte de capacité à mener une vie conjugale et familiale. La cour relève toutefois que le contrat limite la garantie à la perte de capacité à poursuivre la pratique d'activités familiales et affectives, ce qui ne correspond pas au préjudice d'établissement tel qu'envisagé par M. [Y].

M. [Y] affirme de surcroît que la notion contractuelle de 'préjudice d'agrément' recouvre celle de 'préjudice sexuel'. Il est cependant manifeste que la garantie de la perte de capacité à poursuivre la pratique d'activités familiales et affectives ne comprend pas la perte de capacité à avoir des relations sexuelles qui constitue un préjudice distinct non visé audit contrat.

Faute d'éléments sérieux de contestation, c'est donc par des motifs propres que la cour adopte que le premier juge a fixé l'évaluation de ce poste de préjudice à la somme de 18 000 euros.

Par conséquent la cour déboute M. [Y] de sa demande et confirme le jugement déféré en ce qu'il a fixé le poste de préjudice d'agrément à la somme de 18 000 euros.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par réputé contradictoire, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

DECLARE IRRECEVABLES les conclusions transmises le 16 février 2024 à 13h38 par la société CNP ASSURANCES PREVOYANCE ;

INFIRME le jugement du tribunal judiciaire de Besançon rendu entre les parties le 15 novembre 2022 en ce qu'il a condamné la Banque Postale Prévoyance à verser à [U] [Y] la somme de 344 098,39 euros en réparation de ses préjudices;

STATUANT A NOUVEAU, dans les limites de l'appel

CONDAMNE la société CNP ASSURANCES PREVOYANCE, venant aux droits de la Banque Postale Prévoyance, au paiement de la somme 430 214,98 euros ;

DEBOUTE [U] [Y] du surplus de ses demandes;

CONFIRME le jugement déféré pour le surplus,

Y AJOUTANT

CONDAMNE la société CNP ASSURANCES PREVOYANCE, venant aux droits de la Banque Postale Prévoyance, à payer à [U] [Y] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société CNP ASSURANCES PREVOYANCE, venant aux droits de la Banque Postale Prévoyance aux dépens d'appel ;

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Besançon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22/01884
Date de la décision : 14/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 22/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-14;22.01884 ?
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