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11/06/2024 | FRANCE | N°23/01358

France | France, Cour d'appel de Besançon, Chambre sociale, 11 juin 2024, 23/01358


ARRÊT N°

FD/SMG



COUR D'APPEL DE BESANÇON



ARRÊT DU 11 JUIN 2024



CHAMBRE SOCIALE







Audience publique

du 30 avril 2024

N° de rôle : N° RG 23/01358 - N° Portalis DBVG-V-B7H-EVQE



S/appel d'une décision

du Pole social du TJ de BESANCON

en date du 31 août 2023

Code affaire : 89E

A.T.M.P. : demande d'un employeur contestant une décision d'une caisse



APPELANTE



CPAM DU JURA, sise [Adresse 4]



représentée par

Mme [W] , audienciére, selon pouvoir signé le 15 décembre 2023 par Mme [L], Directrice





INTIMEE



S.A.S.U. [3], sise [Adresse 1]



représentée par Me Michaël RUIMY, avocat au barreau de LYON, présent


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ARRÊT N°

FD/SMG

COUR D'APPEL DE BESANÇON

ARRÊT DU 11 JUIN 2024

CHAMBRE SOCIALE

Audience publique

du 30 avril 2024

N° de rôle : N° RG 23/01358 - N° Portalis DBVG-V-B7H-EVQE

S/appel d'une décision

du Pole social du TJ de BESANCON

en date du 31 août 2023

Code affaire : 89E

A.T.M.P. : demande d'un employeur contestant une décision d'une caisse

APPELANTE

CPAM DU JURA, sise [Adresse 4]

représentée par Mme [W] , audienciére, selon pouvoir signé le 15 décembre 2023 par Mme [L], Directrice

INTIMEE

S.A.S.U. [3], sise [Adresse 1]

représentée par Me Michaël RUIMY, avocat au barreau de LYON, présent

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats du 30 Avril 2024 :

Monsieur Christophe ESTEVE, Président de Chambre

Madame Bénédicte UGUEN-LAITHIER, Conseiller

Mme Florence DOMENEGO, Conseiller

qui en ont délibéré,

Mme MERSON GREDLER, Greffière

Les parties ont été avisées de ce que l'arrêt sera rendu le 11 Juin 2024 par mise à disposition au greffe.

**************

FAITS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Le 15 octobre 2021, Mme [B] [G], salariée de la société [3] en qualité d'infirmière depuis 2014, a adressé à la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Jura une déclaration de maladie professionnelle concernant une ' MP tableau 57 : rupture transfixiante coiffe des rotateurs à droite' au regard d'un certificat médical initial du 4 octobre 2021.

Le 14 février 2022, après instruction, la CPAM du Jura a notifié à la société [3] la prise en charge de la maladie de Mme [B] [G] au titre de la législation sur les risques professionnels, tableau n° 57.

Par lettre recommandée du 30 mars 2022, la société [3] a contesté cette décision devant la commission de recours amiable de la CPAM et en suite de sa décision de rejet en date du 6 juillet 2022, a saisi le 5 juillet 2022 le pôle social du tribunal judiciaire de Besançon.

Par jugement du 31 août 2023, le tribunal judiciaire de Besançon a :

- infirmé la décision de la commission de recours amiable

- dit que la caisse n'avait pas mis à la disposition de l'employeur l'intégralité des pièces du dossier prévu à l'article L 441-14 du code de la sécurité sociale

- jugé que la CPAM n'avait pas respecté le principe du contradictoire

- jugé que la décision de prise en charge de la maladie professionnelle du 30 août 2021 de Mme [B] [G] était inopposable à la [3]

- jugé que les conséquences financières de la maladie professionnelle du 30 août 2021 de Mme [B] [G] étaient inopposables à la [3]

- ordonné à la CPAM de communiquer les informations nécessaires à la [2] pour la rectification du compte employeur et des taux AT de la Clinique [3]

- condamné la caisse aux entiers dépens.

Par lettre recommandée du 7 septembre 2023, la CPAM du Jura a relevé appel de cette décision.

Dans ses dernières écritures réceptionnées le 23 février 2024, soutenues à l'audience, la CPAM du Jura, appelante, demande à la cour de :

- constater qu'elle n'avait pas à mettre à disposition de l'employeur, dans le cadre du dossier de consultation de la maladie professionnelle de Mme [B] [G] du 30 août 2021, les certificats médicaux de prolongation qui lui avaient été prescrits

- constater en conséquence que la procédure contradictoire instaurée dans le cadre de la procédure de reconnaissance des maladies professionnelles telle que fixée par le code de la sécurité sociale a été respectée

- infirmer en conséquence le jugement

- juger que la décision de prise en charge à titre professionnel de la maladie professionnelle déclarée par Mme [B] [G] doit être déclarée opposable à la société [3]

- condamner la société [3] aux dépens.

Dans ses dernières écritures réceptionnées le 2 avril 2024, la société [3], intimée, demande à la cour de :

- confirmer le jugement en toutes ses dispositions

- à titre subsidiaire, juger que la CPAM n'a pas respecté le délai de consultation sans observation de l'article R 461-9 du code de la sécurité sociale

- ordonner en conséquence l'inopposabilité à son encontre de la décision de prise en charge de la maladie professionnelle du 30 août 2021 de Mme [B] [G]

- condamner la CPAM aux dépens

- ordonner à la CPAM de communiquer les informations nécessaires à la [2] pour la rectification du compte employeur et des taux AT de la société [3].

Pour l'exposé complet des moyens des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Aux termes de l'article R 461-9 du code de la sécurité sociale, la caisse dispose d'un délai de 120 jours pour statuer sur le caractère professionnel de la maladie ou saisir le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles.(..). La caisse engage des investigations, comprenant notamment un questionnaire à destination de la victime ou de ses représentants, et de l'employeur et peut également recourir à une enquête complémentaire, interroger tout employeur ainsi que tout médecin du travail de la victime.

A l'issue de ses investigations, la caisse met à disposition de la victime ou de ses représentants, et de l'employeur auquel la décision est susceptible de faire grief un dossier dans les délais prévus à l'article R 461-9 du code de la sécurité sociale et devant comprendre, par application de l'article R 441-14 du code de la sécurité sociale, :

1° la déclaration d'accident du travail ou de maladie professionnelle ;

2° les divers certificats médicaux détenus par la caisse ;

3° les constats faits par la caisse primaire ;

4° les informations communiquées à la caisse par la victime ou ses représentants ainsi que par l'employeur ;

5° les éléments communiqués par la caisse régionale ou, le cas échéant, tout autre organisme.

Au cas présent, la caisse fait grief aux premiers juges d'avoir déclaré inopposable à l'employeur sa décision de prise en charge au titre de la législation professionnelle de la pathologie déclarée par Mme [R], aux motifs qu'elle aurait méconnu le principe du contradictoire à défaut d'avoir mis à disposition de l'employeur un dossier complet, comprenant les divers certificats médicaux de prolongation établis et adressés à la caisse jusqu'à la clôture de l'investigation.

La caisse conteste une telle appréciation et revendique au contraire avoir parfaitement respecté les dispositions susvisées, soutenant que l'employeur n'a pas consulté le dossier qu'elle a constitué dans les délais impartis ; qu'il n'établit donc pas que les certificats médicaux de prolongation n'ont pas été mis à sa disposition dans le dossier de consultation ; qu'il ne démontre pas plus avoir été dans l'impossibilité de consulter le dossier ; qu'en tout état de cause, les certificats de prolongation sont dépourvus d'intérêt dans la preuve de l'existence de la pathologie au moment où elle a été déclarée par la victime ; et que ces certificats ont été au demeurant abandonnés depuis la réforme issue du décret n° 2019-854 du 20 août 2019, seul l'avis d'arrêt de travail étant désormais délivré depuis le mois de mai 2022.

Comme le rappelle cependant à raison l'employeur, la caisse doit mettre à disposition de l'employeur l'entier dossier ( Cass Civ 2ème- 16 septembre 2010 n° 09-67.727), lequel doit contenir l'ensemble des certificats médicaux dont elle a été destinataire, quel qu'en soit l'objet, et peu important que l'employeur n'ait en définitive pas consulté le dossier dans les délais impartis.

Or, en l'espèce, la caisse ne démontre pas que ces certificats de prolongation, dont elle dénie toute portée sur l'appréciation qu'elle a faite de la maladie professionnelle de Mme [G], étaient bien présents dans le dossier mis à disposition de l'employeur, alors qu'une telle charge de la preuve lui incombe. (Cass civ 2ème- 24 mai 2017 n° 16-17.728)

L'existence même des certificats médicaux ne peut au surplus être sérieusement contestée par la caisse dès lors que l'employeur produit son compte employeur duquel il ressort que la salariée a été 186 jours en arrêt de travail sur l'année 2021, puis à compter du 13 janvier 2022 jusqu'au 12 avril 2022 de telle sorte qu'au 31 janvier 2022, date à laquelle la caisse a informé l'employeur de l'ouverture de la période de consultation, l'arrêt de travail de Mme [G] avait manifestement été prolongé. Tout autant est sans emport le fait que la forme des certificats médicaux ait été modifiée par le décret n° 2019-854 susvisé, les nouveaux CERFA mentionnant toujours bien le descriptif des lésions constatées.

Or, cette absence des certificats médicaux de prolongation au dossier consultable est de nature à causer un grief à l'employeur dès lors qu'elle le prive de la possibilité d'apprécier la chronologie des différentes constatations médicales de la maladie professionnelle, d'établir éventuellement l'existence d'un état pathologique antérieur et une continuité de symptômes et de soins et d'utiliser l'intégralité des pièces du dossier de la salariée pour pouvoir présenter ses observations.

Le respect du principe du contradictoire suppose au contraire que l'employeur puisse consulter le dossier mentionné à l'article R 441-14 sans que la caisse n'ôte de sa propre initiative les certificats qu' elle estime insusceptibles de faire grief à l'employeur.

C'est donc à bon droit que les premiers juges ont retenu que la caisse avait contrevenu à son devoir d'information et que la décision de prise en charge de la maladie de Mme [G] au titre de la législation professionnelle devait en conséquence être déclarée inopposable à la CPAM du Jura.

Le jugement entrepris sera en conséquence confirmé en toutes ses dispositions, sans qu'il ne soit nécessaire d'examiner l'appel incident de la société sur l'inopposabilité issue du non-respect des délais de procédure, ce dernier étant devenu sans objet.

Partie perdante, la caisse sera condamné aux dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant contradictoirement, après débats en audience publique et en avoir délibéré conformément à la loi, :

Confirme le jugement du tribunal judiciaire de Besançon du 31 août 2023 en toutes ses dispositions

Condamne la caisse primaire d'assurance maladie du Jura aux dépens d'appel.

Ledit arrêt a été prononcé par mise à disposition au greffe le onze juin deux mille vingt quatre et signé par Mme Florence DOMENEGO, Conseiller, pour le Président empêché, et Mme MERSON GREDLER, Greffière.

LA GREFFIÈRE, LE CONSEILLER,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Besançon
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 23/01358
Date de la décision : 11/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 17/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-11;23.01358 ?
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