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04/06/2024 | FRANCE | N°23/00439

France | France, Cour d'appel de Besançon, Chambre sociale, 04 juin 2024, 23/00439


ARRÊT N°

BUL/SMG



COUR D'APPEL DE BESANÇON



ARRÊT DU 4 JUIN 2024



CHAMBRE SOCIALE







Audience publique

du 2 avril 2024

N° de rôle : N° RG 23/00439 - N° Portalis DBVG-V-B7H-ETUL



S/appel d'une décision

du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BELFORT

en date du 06 mars 2023

Code affaire : 80C

Demande d'indemnités ou de salaires



APPELANTE



S.A.S. ARC EN CIEL BOURGOGNE, sise [Adresse 1]



représentée

par Me Emmanuelle HUOT, avocat au barreau de BESANÇON, présente





INTIMEES



Madame [J] [E], demeurant [Adresse 3]



représentée par Me Vincent BESANCON, avocat au barreau de BELFORT, présent



S.A.S....

ARRÊT N°

BUL/SMG

COUR D'APPEL DE BESANÇON

ARRÊT DU 4 JUIN 2024

CHAMBRE SOCIALE

Audience publique

du 2 avril 2024

N° de rôle : N° RG 23/00439 - N° Portalis DBVG-V-B7H-ETUL

S/appel d'une décision

du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BELFORT

en date du 06 mars 2023

Code affaire : 80C

Demande d'indemnités ou de salaires

APPELANTE

S.A.S. ARC EN CIEL BOURGOGNE, sise [Adresse 1]

représentée par Me Emmanuelle HUOT, avocat au barreau de BESANÇON, présente

INTIMEES

Madame [J] [E], demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Vincent BESANCON, avocat au barreau de BELFORT, présent

S.A.S. ATALIAN PROPRETE, sise [Adresse 2]

représentée par Me Florence ROBERT, Postulante, avocat au barreau de BESANÇON, présente et par Me Daniel SAADAT, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, absent

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats du 2 Avril 2024 :

Monsieur Christophe ESTEVE, Président de Chambre

Madame Bénédicte UGUEN-LAITHIER, Conseiller

Mme Florence DOMENEGO, Conseiller

qui en ont délibéré,

Mme MERSON GREDLER, Greffière

Les parties ont été avisées de ce que l'arrêt sera rendu le 4 Juin 2024 par mise à disposition au greffe.

**************

FAITS ET PROCEDURE

Mme [J] [E], initialement engagée par la société PRO IMPEC en qualité d'agent de service à compter du 7 juin 2013 sur le chantier ADOMA, fut ensuite salariée de la société ATALIAN PROPRETÉ EST, qui avait repris le marché, sous contrat de travail à durée indéterminée.

Elle fut placée en arrêt de travail pour accident du travail à compter du 11 décembre 2020, lequel a été renouvelé jusqu'au 25 mai 2021.

Reprenant son poste à compter du 27 mai 2021, elle a travaillé sur le site ADOMA les 27, 28 et 31 mai 2021.

Par courrier du 31 mai 2021, la société ATALIAN PROPRETÉ EST a informé la salariée que la société ARC EN CIEL BOURGOGNE reprenait le marché de nettoyage du site ADOMA, et qu' en application des dispositions de l'article 7 de la Convention collective des entreprises de propreté, elle intégrerait les effectifs de cette société à compter du 1er juin 2021.

Mme [J] [E] a travaillé sur le site ADOMA le 1er juin 2021 mais suite à la visite de reprise organisée le 2 juin 2021, le médecin du travail a conclu que son état de santé n'était pas compatible avec la reprise de son poste de travail et elle a donc été placée en arrêt de travail du 3 au 18 juin 2021.

A sa reprise du travail le 18 juin 2021, il a été demandé à Mme [J] [E] de rentrer chez elle, au motif qu'elle n'était pas sous contrat de travail avec le nouveau titulaire du marché, la société ARC EN CIEL BOURGOGNE.

Mme [J] [E] a adressé le même jour un courrier à cette société pour lui exposer la situation et lui confirmer qu'elle se tenait à sa disposition et n'a pu s'inscrire à PÔLE EMPLOI.

La salariée a adressé un second courrier le 28 juin 2021, mettant en demeure la société ARC EN CIEL BOURGOGNE de régler la situation, lequel est resté sans réponse en dépit d'une relance par la voie de son conseil le 9 juillet 2021.

Par avis du 26 juillet 2021 le médecin du travail a déclaré Mme [J] [E] apte à la reprise à son poste.

Saisie par Mme [J] [E] d'une demande de réintégration dans les effectifs, la juridiction de référé du conseil de prud'hommes de Belfort a constaté l'existence de contestations sérieuses, et renvoyé Mme [J] [E] à mieux se pourvoir au fond.

Une nouvelle demande de régularisation auprès de la société ATALIAN PROPRETÉ EST et de la société ARC EN CIEL par l'intermédiaire de son conseil étant demeurée vaine, la salariée a, par requête du 16 novembre 2021, saisi le conseil de prud'hommes de Belfort, lequel a par jugement du 6 mars 2023 :

- mis hors de cause la Société ATALIAN PROPRETÉ

- dit que le contrat de travail de Mme [J] [E] a été transféré à la SAS ARC EN CIEL BOURGOGNE à compter du 1er juin 2021

- prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme [J] [E] aux torts exclusifs de l'employeur à la date du 6 mars 2023

- condamné la SAS ARC EN CIEL à régler à Mme [J] [E] les sommes de:

* 6 229,59 € au titre des salaires du 1er juin 2021 au 31 mai 2022

* 622,96 € à titre d'indemnité de congés payés afférente

* 5 191,30 € à titre de rappel de salaires du 1er juin 2022 au 6 mars 2023

* 519,13 € à titre d'indemnité de congés payés afférents

* 1 038,23 à titre d'indemnité de préavis

* 103,82 € au titre de l'indemnité de congés payés afférente

* 1 135,60 € à titre d'indemnité légale de licenciement

* 4 105,04 € à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse

* 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- ordonné la remise par la SAS ARC EN CIEL à Mme [J] [E] de l'ensemble des documents de fin de contrat, à savoir un certificat de travail, une attestation PÔLE EMPLOI et un reçu pour solde de tout compte ainsi que la totalité des bulletins de salaires

- dit que la remise de ces documents devra intervenir dans un délai de 8 jours suivants la notification du jugement sous peine d'une astreinte de 50 € par jour passé ce délai

- dit qu'il se réserve le droit de liquider l'astreinte

- rejeté les demandes d'indemnité de procédure de la SAS ARC EN CIEL et de la SAS ATALIAN PROPRETE

- dit qu'il n'y a pas lieu de prononcer l'exécution provisoire au-delà des dispositions prévues par le code du travail

- condamné la SAS ARC EN CIEL aux entiers dépens ainsi qu'à rembourser au Trésor public les frais avancés par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle en application des articles 43 de la loi du 10 juillet 1991 et 23 du décret du 9 décembre 1991

Par déclaration du 16 mars 2023, la société ARC EN CIEL BOURGOGNE a relevé appel de la décision et aux termes de ses écritures du 1er septembre 2023, demande à la cour de :

- infirmer le jugement entrepris

- prononcer sa mise hors de cause

- débouter Mme [J] [E] de l'ensemble de ses demandes,

- condamner la société ATALIAN à lui verser une somme de 4 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Selon écrits visés le 28 août 2023, Mme [J] [E] demande à la cour de :

A titre principal :

- confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions

A titre subsidiaire :

- dire que la rupture du contrat de travail avec la Société ATALIAN PROPRETÉ à la date du 31 mai 2021 doit s'analyser en un licenciement irrégulier et nul, ou subsidiairement sans cause réelle et sérieuse

- condamner la société ATALIAN PROPRETÉ à lui payer les sommes suivantes :

* indemnité de préavis : 519,13 € x 2 = 1 038,23 €

* indemnité de congés payés sur préavis : 103,82 €

* indemnité légale de licenciement : 1 005,81 €

* indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse : 4 105,04 €

* indemnité pour irrégularité de procédure : 519,13 €

En tout état de cause :

- condamner la société ARC EN CIEL, ou subsidiairement la Société ATALIAN PROPRETÉ à payer son avocat une somme de 3 000 € au titre de la procédure d'appel sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991

- à défaut, condamner la société ARC EN CIEL, ou subsidiairement la société ATALIAN PROPRETÉ à lui payer la somme de 3 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance

Selon écrits visés le 7 juillet 2023, la société ATALIAN PROPRETE demande à la cour de:

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il l'a mise hors de cause et dit que le contrat de travail avait été transféré à la SAS ARC EN CIEL BOURGOGNE à compter du 1er juin 2021

- débouter Mme [J] [E] et la société ARC EN CIEL BOURGOGNE de leurs demandes à son encontre

- subsidiairement, et si par impossible la cour devait infirmer la décision déférée et juger que le contrat de travail s'était poursuivi avec la société ATALIAN, dire que l'envoi des documents de fin de contrat a mis un terme le 31 mai 2022 à la relation de travail

En conséquence,

- débouter Mme [J] [E] de sa demande de rappel de salaire et d'indemnité pour procédure irrégulière

- réduire sa demande indemnitaire à de bien plus justes proportions

En tout état de cause,

- condamner la société ARC EN CIEL à la garantir de l'ensemble des condamnations

qui seraient mises à sa charge

- condamner solidairement Mme [J] [E] et la société ARC EN CIEL au paiement de la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

Pour l'exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux dernières conclusions précédemment visées en application de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 mars 2024.

MOTIFS

I- Sur le transfert du contrat de travail

Au terme de l'article L.1224-1 du code du travail, «lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise.»

En l'espèce, il est admis aux débats d'une part que Mme [J] [E] était employée, en vertu d'un contrat de travail à durée indéterminée, par la société ATALIAN PROPRETE EST, et exerçait ses fonctions d'agent de service sur le site ADOMA, et d'autre part qu'à compter du 1er juin 2021 la société ARC EN CIEL BOURGOGNE a repris le marché de nettoyage du site ADOMA dans les conditions prescrites à l'article 7.2 de la Convention collective des entreprises de propreté et services associés du 26 juillet 2011.

Cet article, dont l'application n'est pas remise en cause par les parties, prévoit une garantie de maintien de l'emploi ainsi libellée :

'Le nouveau prestataire s'engage à garantir l'emploi de 100 % du personnel affecté au marché faisant l'objet de la reprise qui remplit les conditions suivantes :

A. Appartenir expressément :

- soit à l'un des 4 premiers niveaux de la filière d'emplois 'exploitation' de la classification nationale des emplois (AS, AQS, ATQS et CE) et passer sur le marché concerné 30 % de son temps de travail total effectué pour le compte de l'entreprise sortante ;

- soit à l'un des 2 premiers échelons du niveau agent de maîtrise exploitation de la classification nationale des emplois (MP1 et MP2) et être affecté exclusivement sur le marché concerné.

B. Etre titulaire :

a) Soit d'un contrat à durée indéterminée et,

- justifier d'une affectation sur le marché d'au moins 6 mois à la date d'expiration du contrat commercial ou du marché public ;

- ne pas être absent depuis 4 mois ou plus à la date d'expiration du contrat. A cette date, seules les salariées en congé maternité seront reprises sans limitation de leur temps d'absence. La totalité de la durée de l'absence sera prise en compte, congé de maternité compris, pour l'appréciation de cette condition d'absence de 4 mois ou plus, dans l'hypothèse où la salariée ne serait pas en congé de maternité à la date d'expiration du contrat commercial ou du marché public.

b) Soit d'un contrat à durée déterminée conclu pour le remplacement d'un salarié absent qui satisfait aux conditions visées ci-dessus en a.

C. Etre en situation régulière au regard de la législation du travail relative aux travailleurs étrangers '.

D. Ne pas avoir été reconnu médicalement inapte définitif sur le postre de travail attaché au marché.

E. Ne pas être en situation de préavis, exécuté ou non.'

Il est à relever que la convention collective ne fait pas référence à la notion juridique de 'suspension du contrat de travail' mais seulement à celle d'absence du salarié, et c'est précisément et exclusivement sur ce point que porte le litige soumis à la présente cour, la société sortante et Mme [J] [E] affirmant qu'à la date de la reprise effective du marché par la société entrante, le 1er juin 2021, la salariée était présente à son poste de travail, alors que la société ARC EN CIEL BOURGOGNE prétend le contraire, considérant ainsi que le transfert n'a pu s'opérer.

Il ressort des productions que la salariée a fait l'objet d'un arrêt de travail à compter du 11 décembre 2020 consécutif à un accident du travail, successivement prolongé jusqu'à un certificat médical final intervenu le 25 mai 2021.

Il est communiqué aux débats trois attestations concordantes de collègues de la salariée, dûment munies de la pièce d'identité de leur auteur, dont celle de sa chef d'équipe (pièces n°33 à 35), qui témoignent que Mme [J] [E] a bien travaillé sur le site ADOMA les 27, 28, 31 mai et 1er juin 2021 (les 29 et 30 mai correspondant au week-end).

S'il est établi que la salariée a fait l'objet d'une visite de reprise par le médecin du travail le 2 juin 2021, conformément aux prescriptions de l'article R.4624-31 du code du travail, et que le docteur [T] a estimé que son état de santé n'était pas compatible avec la reprise de son poste de travail, l'a renvoyée à la médecine de soins et a prévu une nouvelle visite à la reprise effective du poste, il n'en demeure pas moins qu'à la date du 1er juin 2021 elle était présente sur le site ADOMA et que le transfert de son contrat a été automatiquement transféré à la société entrante.

A cet égard, si la société ARC EN CIEL BOURGOGNE tente de se prévaloir du caractère frauduleux de cette reprise au prétexte que la société sortante aurait volontairement différé la visite de reprise pour voir opérer le transfert litigieux, ce grief n'apparaît pas fondé dans la mesure où la visite ne peut se concevoir alors que la salariée est encore en situation d'arrêt de travail et que, en vertu de l'article R.4624-31 précité, il est précisément prévu dans cette hypothèse que 'Dès que l'employeur a connaissance de la date de la fin de l'arrêt de travail, il saisit le service de santé au travail qui organise l'examen de reprise le jour de la reprise effective du travail par le travailleur, et au plus tard dans un délai de huit jours qui suivent cette reprise'.

La société ATALIAN PROPRETE EST pouvait donc organiser la visite de reprise à compter du 27 mai 2021 et dans les huit jours qui ont suivi cette date, de sorte que la visite est bien intervenue dans le délai réglementairement prescrit.

Au surplus, à supposer même que la visite de reprise soit intervenue le jour même de la reprise, soit le 27 mai 2021, cela n'aurait pas exclu le transfert litigieux dès lors que la salariée aurait été considérée comme présente à son poste et n'aurait pas relevé de l'exclusion portant sur l'absence de 4 mois au moins visée par le texte. Il n'est d'ailleurs pas inutile de préciser à cet égard que le médecin du travail n'a pas émis un avis d'inaptitude le 2 juin 2021 mais une simple 'attestation de suivi individuel de l'état de santé' concluant simplement que la reprise du travail était prématurée, à telle enseigne qu'elle a été finalement en mesure de reprendre son poste le 18 juin suivant, sauf à être confrontée au refus de la société entrante de la reconnaître dans ses effectifs, et que son état de santé a été jugé compatible avec la reprise de son poste de travail habituel par le médecin du travail le 27 juillet suivant (pièce n°24).

Alors que le critère d'exclusion du bénéfice du transfert est, dans la situation dont s'agit, l'absence du salarié, l'appelante ajoute à l'évidence au texte pour le contourner lorsqu'elle considère que si la salariée a occupé son poste du 27 mai au 1er juin, c'était sous réserve de son aptitude constatée a posteriori par le médecin du travail pour en déduire qu'à la date du transfert, le 1er juin 2021, Mme [J] [E] se trouvait en arrêt de travail au motif que sa reprise n'avait pas encore été validée par une aptitude médicalement constatée.

C'est encore en vain que l'appelante reproche à l'entreprise sortante de n'avoir pas été en capacité de lui transmettre la 'dernière attestation de suivi médical ou avis d'aptitude à jour' de la salariée, comme le prescrit l'article 7.3 de la convention collective applicable, dès lors que la situation de Mme [J] [E] présentait la particularité d'avoir été en arrêt de travail plusieurs mois jusqu'au 26 mai 2021, que sa visite de reprise était fixée au 2 juin 2021 et qu'il ne peut être fait grief à la société sortante de n'avoir pu, avant le 1er juin 2021, justifier de ce seul document.

En tout état de cause, l'article 7.2 de ladite convention prévoit que 'la carence de l'entreprise sortante dans la transmission des renseignemetns prévus par les présentes dispositions ne peut empêcher le changement d'employeur que dans le seul cas où cette carence met l'entreprise entrante dans l'impossibilité d'organiser la reprise effective du marché'.

Force est de constater que l'appelante n'apporte pas la démonstration qu'elle a été confrontée à une telle impossibilité alors qu'il est admis que la charge de cette preuve pèse sur la société entrante (Soc. 8 mars 2012 n°10-19208) et qu'il résulte des productions que la société ATALIAN PROPRETE EST a transmis dans les meilleurs délais l'avis d'incompatibilité du 2 juin 2021 et l'avis d'aptitude de la salariée du 26 juillet 2021, aussitôt qu'elle en a été destinataire (pièces de l'appelante n°4 et 5 et pièce n°3 de la société sortante).

Les autres critères conventionnels de maintien dans l'emploi n'étant pas discutés, il résulte par conséquent des développements qui précèdent que c'est à bon droit que les premiers juges ont retenu que le contrat de travail de la salariée avait été transféré le 1er juin 2021 à la société ARC EN CIEL BOURGOGNE.

II- Sur la résiliation judiciaire du contrat

Le juge saisi d'une demande de résiliation judiciaire d'un contrat de travail, dispose d'un pouvoir souverain pour apprécier si les manquements établis à l'encontre de l'employeur sont suffisamment graves pour justifier cette mesure.

Il appartient dès lors à la salariée, qui sollicite la résiliation, de caractériser l'existence de faits d'une gravité suffisante pour rendre impossible la poursuite du contrat.

Si l'appelante s'est abstenue de tout développement à ce titre dans ses écritures, Mme [J] [E] concluant pour sa part à la confirmation du jugement entrepris et fait valoir à la suite des premiers juges que le non paiement de son salaire et l'absence de fourniture de travail par la société ARC EN CIEL BOURGOGNE constituent des manquements suffisamment graves pour justifier la résiliation du contrat aux torts du nouvel employeur.

L'obligation de fournir un travail au salarié constitue effectivement, avec celle de lui verser une rémunération, l'une des obligations principales incombant à l'employeur dans le cadre de l'exécution du contrat de travail.

Il est suffisamment établi en la cause que la société ARC EN CIEL BOURGOGNE a considéré à tort que le contrat de travail de Mme [J] [E] n'avait pas été transféré, qu'elle ne faisait donc pas partie de ses effectifs depuis le 1er juin 2021 et a refusé de lui fournir du travail, en dépit des sollicitations répétées de la salariée, en personne ou par le truchement de son conseil.

Or, il a été démontré que la salariée satisfaisait à l'ensemble des conditions prescrites pour bénéficier du transfert de son contrat de travail, étant rappelé qu'en vertu de l'article L.1224-2 du code du travail, il incombait dès lors à l'appelante de faire application du contrat ainsi transféré aux mêmes conditions.

C'est donc par des motifs pertinents que la cour adopte que les premiers juges ont retenu que, ce faisant, l'employeur avait gravement manqué à ses obligations contractuelles et ont prononcé la résiliation du contrat de travail à ses torts exclusifs à la date du 6 mars 2023.

III- Sur les conséquences financières de la résiliation

Les dispositions du jugement déféré n'étant pas formellement critiquées par la société ARC EN CIEL BOURGOGNE et Mme [J] [E] concluant à la confirmation du jugement déféré à ce titre, la cour confirmera la décision entreprise de ces chefs.

IV- Sur les demandes accessoires

Il résulte des développements qui précèdent que le jugement querellé mérite confirmation en ce qu'il a 'mis hors de cause' la société ATALIAN PROPRETE EST, de sorte qu'il n'y a pas lieu d'examiner les prétentions subsidiaires de celles-ci ni les moyens développés à leur soutien.

Le jugement déféré sera également confirmé en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et dépens.

La société ARC EN CIEL qui succombe sera condamnée aux dépens d'appel et déboutée de sa demande d'indemnité de procédure.

Pour le même motif, elle sera condamnée à verser à la société ATALIAN PROPRETE EST la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles, que cette dernière a été contrainte d'exposer à hauteur d'appel.

En outre, elle sera condamnée à verser au conseil de Mme [J] [E] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 2° du code de procédure civile, dès lors que celle-ci est bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, et il sera procédé sur ce point comme il est dit aux alinéas 3 et 4 de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

PAR CES MOTIFS

La cour, chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions.

Y ajoutant,

Condamne la SAS ARC EN CIEL BOURGOGNE à payer à la SAS ATALIAN PROPRETE EST la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne la SAS ARC EN CIEL BOURGOGNE à verser à l'avocat de Mme [J] [E] la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 2° du code de procédure civile et dit qu'il sera procédé comme il est dit aux alinéas 3 et 4 de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Déboute la SAS ARC EN CIEL BOURGOGNE de sa demande d'indemnité de procédure.

Condamne la SAS ARC EN CIEL BOURGOGNE aux dépens d'appel.

Ledit arrêt a été prononcé par mise à disposition au greffe le quatre juin deux mille vingt quatre et signé par Mme Bénédicte UGUEN-LAITHIER, Conseiller, pour le Président empêché, et Mme MERSON GREDLER, Greffière.

LA GREFFIÈRE, LE CONSEILLER,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Besançon
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 23/00439
Date de la décision : 04/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-04;23.00439 ?
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