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31/05/2024 | FRANCE | N°23/00929

France | France, Cour d'appel de Besançon, Chambre sociale, 31 mai 2024, 23/00929


ARRET N° 24/

BUL/XD



COUR D'APPEL DE BESANCON



ARRET DU 31 MAI 2024



CHAMBRE SOCIALE







Audience publique

du 03 Mai 2024

N° de rôle : N° RG 23/00929 - N° Portalis DBVG-V-B7H-EUTJ



S/appel d'une décision

du POLE SOCIAL DU TJ DE LONS LE SAUNIER

en date du 16 mai 2023

code affaire : 88G

Autres demandes contre un organisme





APPELANTE



Société [2], sise [Adresse 3]



représentée par Me Olivia COLMET DAAGE, av

ocat au barreau de PARIS substitué par Me Fabien STUCKLE, avocat au barreau de BESANCON





INTIMEE



CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE HAUTE MARNE, sise [Adresse 1]



représentée par Me Julie DUFOUR, avoc...

ARRET N° 24/

BUL/XD

COUR D'APPEL DE BESANCON

ARRET DU 31 MAI 2024

CHAMBRE SOCIALE

Audience publique

du 03 Mai 2024

N° de rôle : N° RG 23/00929 - N° Portalis DBVG-V-B7H-EUTJ

S/appel d'une décision

du POLE SOCIAL DU TJ DE LONS LE SAUNIER

en date du 16 mai 2023

code affaire : 88G

Autres demandes contre un organisme

APPELANTE

Société [2], sise [Adresse 3]

représentée par Me Olivia COLMET DAAGE, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Fabien STUCKLE, avocat au barreau de BESANCON

INTIMEE

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE HAUTE MARNE, sise [Adresse 1]

représentée par Me Julie DUFOUR, avocat au barreau de BESANCON

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile l'affaire a été débattue le 03 Mai 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame UGUEN-LAITHIER Bénédicte, conseiller, entendue en son rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Christophe ESTEVE, président de chambre

Madame Bénédicte UGUEN-LAITHIER, conseiller

Madame Florence DOMENEGO, conseiller

qui en ont délibéré,

M. [S] [X], directeur de greffe

Les parties ont été avisées de ce que l'arrêt sera rendu le 31 Mai 2024 par mise à disposition au greffe.

**************

FAITS ET PROCEDURE

M. [V] [G], salarié de la société [2] en qualité de responsable de boucherie, a formalisé le 1er décembre 2021 une demande de reconnaissance de maladie professionnelle au titre d'une tendinopathie chronique de l'épaule gauche, affection médicalement constatée le 14 mai 2021, accompagnée d'un certificat médical initial du 23 juin 2021 faisant état d'une 'rupture des muscles de la coiffe de l'épaule gauche. Doit se faire opérer le 23/06" .

La Caisse primaire d'assurance maladie de Haute-Marne (ci-après CPAM) a reconnu cette pathologie en tant que maladie professionnelle (tendinopathie chronique de la coiffe des rotateurs de l'épaule gauche inscrite au tableau n°57) et a notifié sa décision le 4 mai 2022.

L'état de santé de M. [V] [G] a été considéré consolidé avec séquelles le 25 mars 2022 et un taux d'incapacité permanente partielle (IPP) de 10% lui a été reconnu.

Contestant la fixation de ce taux, la société [2] a saisi le 29 août 2022 la Commission médicale de recours amiable de la CPAM, laquelle a, par décision du 24 octobre 2022, confirmé le taux retenu par le médecin conseil et rejeté sa contestation.

Par requête transmise sous pli recommandé expédié le 12 décembre 2022, la société [2] a exercé un recours devant le tribunal judiciaire de Lons le Saunier, qui, au vu des conclusions du docteur [D] [N], désigné en qualité de médecin consultant, a par jugement du 16 mai 2023 :

- confirmé la décision de la Commission de recours amiable du 24 octobre 2022

- dit qu'à la date du 25 mars 2022, les séquelles présentées par M. [V] [G] justifient un taux d'IPP de 10%, opposable à la société [2]

- rejeté les autres demandes plus amples ou contraires

- condamné la société [2] aux dépens

Par déclaration adressée au greffe sous pli recommandé avec avis de réception le 16 juin 2023, la société [2] a relevé appel de cette décision et, aux termes de ses écrits, visés le 16 octobre 2023, demande à la cour de :

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a maintenu le taux d'IPP de M. [V] [G] à 10%

A titre principal,

- entérinant les observations du docteur [L], dire que le taux d'IPP attribué à M. [V] [G] doit être ramené de 10% à 5%

A titre subsidiaire,

- dire qu'il existe un litige d'ordre médical portant sur cette évaluation

- enjoindre à la CPAM de transmettre le rapport d'évaluation des séquelles de l'assuré au docteur [L] et ordonner avant dire droit une expertise judiciaire aux fins de déterminer le taux d'IPP relatif aux séquelles dues à l''accident' de M. [V] [G]

Aux termes de ses écrits visés le 20 février 2024, la CPAM de Haute-Marne demande à la cour de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a attribué à M. [V] [G] taux d'IPP de 10%, de confirmer la décision de la Commission de recours amiable du 24 octobre 2022 et de condamner la société [2] aux dépens.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour l'exposé des moyens des parties, à leurs conclusions susvisées, auxquelles les parties se sont rapportées lors de l'audience du plaidoirie du 3 mai 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Conformément aux dispositions de l'article L.434- 2 du code de la sécurité sociale le taux de l'incapacité permanente est déterminé d'après la nature de l'infirmité, l'état général, l'âge, les facultés physiques et mentales de la victime, ainsi que d'après ses aptitudes et sa qualification professionnelle, compte tenu d'un barème indicatif d'invalidité.

Ce barème indicatif, annexé à l'article R.434- 32 du code de la sécurité sociale, précise notamment que 'les quatre premiers éléments de l'appréciation concernent l'état du sujet considéré, du strict point de vue médical. Le dernier élément concernant les aptitudes et la qualification professionnelle est un élément médico- social ; il appartient au médecin chargé de l'évaluation, lorsque les séquelles de l'accident ou de la maladie professionnelle lui paraissent devoir entraîner une modification dans la situation professionnelle de l'intéressé, ou un changement d'emploi, de bien mettre en relief ce point susceptible d'influer sur l'estimation globale (...) On peut être ainsi amené à majorer le taux théorique affecté à l'infirmité, en raison des obstacles que les conséquences de l'âge apportent à la réadaptation et au reclassement professionnel (...).' ;

Pour fixer à 10% le taux d'IPP de M. [V] [G], les premiers juges se sont appuyés sur la consultation réalisée à l'audience par le médecin consultant désigné par leurs soins, lequel a conclu que 'l'incapacité permanente de 10% n'a pas lieu d'être modifiée', ce que confirment les notes d'audiences prises devant la juridiction prud'homale.

Pour combattre l'appréciation des premiers juges s'agissant de l'attribution du taux d'IPP, l'appelante se prévaut du rapport de son médecin conseil, le docteur [J] [L], qui estime surévalué le taux retenu à hauteur de 10%, considérant qu'une fixation d'un taux de 5% serait une plus juste évaluation des séquelles du salarié.

Selon le barème indicatif des maladies professionnelles liées aux atteintes articulaires de l'épaule susvisé, il est précisé que :

'Epaule :

La mobilité de l'ensemble scapulo-huméro thoracique s'estime, le malade étant debout ou assis, en empaumant le bras d'une main, l'autre main palpant l'omoplate pour en apprécier la mobilité :

- Normalement, élévation latérale : 170° ;

- Adduction : 20° ;

- Antépulsion : 180° ;

- Rétropulsion : 40° ;

- Rotation interne : 80° ;

- Rotation externe : 60°.

La main doit se porter avec aisance au sommet de la tête et derrière les lombes, et la circumduction doit s'effectuer sans aucune gêne.

Les mouvements du côté blessé seront toujours estimés par comparaison avec ceux du côté sain. On notera d'éventuels ressauts au cours du relâchement brusque de la position d'adduction du membre supérieur, pouvant indiquer une lésion du sus-épineux, l'amyotrophie deltoïdienne (par mensuration des périmètres auxilaires vertical et horizontal), les craquements articulaires. Enfin, il sera tenu compte des examens radiologiques'.

Il y est proposé pour une 'limitation légère de tous les mouvements de l'épaule non dominante' un taux d'incapacité entre 8 et 10%'.

Or, il ressort des éléments du débat que M. [V] [G] a fait l'objet d'une intervention chirurgicale de l'épaule gauche le 23 juin 2021 par le docteur [Z], dont il ressort du compte-rendu post-opératoire que le patient présentait une 'rupture de coiffe des rotateurs (sus-épineux + sous-scapulaire) du côté gauche dans un contexte de conflit sous-acromial associé à une tendinopathie de la longue portion du biceps brachial, intervention pratiquée : arthroscopie épaule gauche : suture de la coiffe des rotateurs + ténodèse de la longue portion du biceps + acromioplastie, rupture ponctuellement transfixiante essentiellement partielle superficielle de la partie antérieure du supraspinatus, délamination intra-tendineuse du sous scapulaire avec fissure, ténodèse de la LPB sur une ancre Healicoil médiale, suture du sous scapulaire sur une ancre Healicoil, suture du supra-épineux par un double rang, acromioplastie à la fraise'.

Si le docteur [L] s'étonne que le chirurgien décrive une rupture du sus-épineux et du sous-scapulaire, alors que l'IRM réalisée trois semaines avant l'intervention concluait à une 'tendino-bursite modérée sans rupture du supra-épineux', il apparaît difficile de mettre en doute les constatations médicales du docteur [Z] au seul visa des conclusions d'une IRM qui a pu vouloir indiquer qu'il n'y avait pas de rupture totale ou transfixiante du supra épineux.

Le salarié a ensuite fait l'objet d'un arrêt de travail jusqu'au 16 décembre 2021, date de sa reprise du travail à temps partiel, étant observé que son activité professionnelle exige une contrainte physique du membre atteint.

S'il ne présente à la date de la consolidation aucune amyotrophie de l'épaule gauche, comme le souligne le docteur [L], qui considère ce constat peu compatible avec une limitation des mouvements de l'épaule, sans toutefois étayer cet avis, le médecin conseil de la Caisse ainsi que le médecin consultant relèvent tous deux que tous les mouvements de l'épaule non dominante sont limités, le premier précisant que les mouvements complexes ne sont réalisables qu'avec compensation (coude abaissé, tête abaissée) et qu'il est constaté une limitation de moitié de la rétropulsion et de la rotation (externe et interne).

Face à ce constat convergent, si le docteur [L] considère que les séquelles se limitent à une douleur lors de certains mouvements de l'épaule et une limitation très légère de deux mouvements en rapport (élévation latérale et antérieure du bras gauche), il doit être relevé que son avis médical résulte exclusivement d'une consultation sur pièces des éléments médicaux.

Dans ces circonstances, et alors qu'aucun autre élément médical n'est produit par l'appelante qui viendrait contredire de façon convaincante les conclusions convergentes susvisées, confirmées par la Commission de recours amiable, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande subsidiaire d'expertise médicale, une mesure d'instruction n'ayant pas vocation à pallier la carence d'une partie dans l'administration de la preuve et la cour étant suffisamment éclairée par les éléments médicaux du débat.

Il suit de là qu'il apparaît justifié de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a rejeté la demande d'expertise et fixé à 10% le taux d'IPP médicale du salarié opposable à la société [2].

L'issue du litige à hauteur de cour justifie que les dépens d'appel soient supportés par l'appelante, étant relevé que la cour n'est saisie d'aucune critique s'agissant des dépens de première instance.

PAR CES MOTIFS

La cour, chambre sociale, statuant dans la limite de l'appel par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions.

Condamne la SAS [2] aux dépens d'appel.

Ledit arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe le trente et un mai deux mille vingt quatre et signé par Madame Bénédicte UGUEN-LAITHIER, conseiller, pour le président de chambre empêché, et Monsieur Xavier DEVAUX, directeur de greffe.

LE GREFFIER, LE CONSEILLER,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Besançon
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 23/00929
Date de la décision : 31/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 08/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-31;23.00929 ?
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