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14/05/2024 | FRANCE | N°23/01940

France | France, Cour d'appel de Besançon, 1ère chambre, 14 mai 2024, 23/01940


Le copies exécutoires et conformes délivrées à

MW/FA















REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



Minute n°





N° de rôle : N° RG 23/01940 - N° Portalis DBVG-V-B7H-EWXM







COUR D'APPEL DE BESANÇON

1ère chambre civile et commerciale



ARRÊT DU 14 MAI 2024







Décision déférée à la Cour : jugement du 15 novembre 2023 - RG N°22/00426 - JUGE DE LA MISE EN ETAT DE LONS-LE-SAUNIER

Code

affaire : 54Z - Autres demandes relatives à un contrat de réalisation de travaux de construction





COMPOSITION DE LA COUR :



M. Michel WACHTER, Président de chambre

Mme Anne-Sophie WILLM, conseiller

M. Cédric SAUNIER, co...

Le copies exécutoires et conformes délivrées à

MW/FA

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Minute n°

N° de rôle : N° RG 23/01940 - N° Portalis DBVG-V-B7H-EWXM

COUR D'APPEL DE BESANÇON

1ère chambre civile et commerciale

ARRÊT DU 14 MAI 2024

Décision déférée à la Cour : jugement du 15 novembre 2023 - RG N°22/00426 - JUGE DE LA MISE EN ETAT DE LONS-LE-SAUNIER

Code affaire : 54Z - Autres demandes relatives à un contrat de réalisation de travaux de construction

COMPOSITION DE LA COUR :

M. Michel WACHTER, Président de chambre

Mme Anne-Sophie WILLM, conseiller

M. Cédric SAUNIER, conseiller.

Greffier : Mme Fabienne ARNOUX, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision.

DEBATS :

L'affaire a été examinée en audience publique du 09 avril 2024 tenue par M. Michel Wachter, président de chambre, Mme Anne-Sophie Willm, conseiller et assistés de Mme Fabienne Arnoux, greffier.

Le rapport oral de l'affaire a été fait à l'audience avant les plaidoiries.

M. Michel Wachter, président de chambre et Mme Anne-Sophie Willm, conseiller, ont rendu compte des plaidoiries dans le délbéré de la cour.

DELIBERE :

M. Michel Wachter, président de chambre et Mme Anne-Sophie Willm, conseiller, ont rendu compte

conformément à l'article 786 du code de procédure civile à :

M. Cédric Saunier, conseiller.

L'affaire oppose :

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTES

S.A.R.L. ETABLISSEMENTS TONNAIRE

Sise [Adresse 1] - [Localité 4]

Immatriculée au RCS de Lons le Saunier sous le numéro B788 396 034

Représentée par Me Adrien MAIROT de la SCP LETONDOR - GOY LETONDOR - MAIROT, avocat au barreau de JURA, avocat postulant

Représentée par Me Frédéric JANIN de la SELARL NEXEN CONTENTIEUX, avocat au barreau de LYON, avocat plaidant

Société L'AUXILIAIRE Société d'assurances mutuelle à cotisations variables

Immatriculée au RCS de LYON sous le n°775 649 056

Sise [Adresse 2] - [Localité 8]

Représentée par Me Jean-Yves REMOND, avocat au barreau de JURA, avocat plaidant

Représentée par Me Benjamin LEVY, avocat au barreau de BESANCON, avocat postulant

ET :

INTIMÉS

Monsieur [V] [G]

né le 23 Février 1979 à [Localité 9]

de nationalité française, demeurant [Adresse 3] - [Localité 6]

Représenté par Me Alexandre MAILLOT de la SELARL MAILLOT - VIGNERON, avocat au barreau de JURA

Madame [R] [B]

née le 07 Octobre 1984 à [Localité 10]

de nationalité française, demeurant [Adresse 3] - [Localité 6]

Représentée par Me Alexandre MAILLOT de la SELARL MAILLOT - VIGNERON, avocat au barreau de JURA

SARL AGENCE TEMERAIRE IMMOBILIER agissant poursuites et diligences de son gérant en exercice

Sise [Adresse 7] - [Localité 5]

Inscrite au RCS de Lons le Saunier sous le numéro 398 447 565

Représentée par Me Ludovic PAUTHIER de la SCP DUMONT - PAUTHIER, avocat au barreau de BESANCON, avocat postulant

Représentée par Me Anne-Sophie PIA de la SELEURL AWKIS, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant préalablement été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Michel WACHTER, président de chambre et par Mme Fabienne ARNOUX, greffier lors du prononcé.

*************

Par acte notarié du 2 septembre 2014, M. [V] [G] et Mme [R] [B] ont acquis de la société HBFC, aujourd'hui liquidée, un chalet en bois à usage d'habitation pour un prix de 210 000 euros. La vente s'est faite par l'intermédiaire de la SARL Agence Téméraire Immobilier, et un dossier de diagnostic technique établi par la SARL LGDI a été annexé à l'acte.

Se plaignant d'un manque d'isolation, d'un défaut d'étanchéité et d'une surconsommation électrique, les consorts [G]-[B] ont fait établir le 25 janvier 2018 par la société Flir un rapport de diagnostic thermique.

Par exploits des 2 et 3 octobre 2018, ils ont fait assigner la société LGDI ainsi que son assureur, la SA AXA France IARD, ainsi que la SARL Etablissements Tonnaire, en qualité de constructeur, et la SAMCV l'Auxiliaire, son assureur, devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Lons le Saunier, qui, par décision du 30 avril 2019, après avoir mis hors de cause la société Etablissements Tonnaire et son assureur, la société l'Auxiliaire, a ordonné une mesure d'expertise judiciaire et à désigné à cette fin M. [L], lequel a déposé le rapport de ses opérations le 5 janvier 2022.

Par exploits des 24 mai, 3 et 7 juin 2022, les consorts [G]-[B] ont fait assigner les sociétés LGDI, AXA France IARD, Etablissements Tonnaire, l'Auxiliaire et Agence Téméraire Immobilier devant le tribunal judiciaire de Lons le Saunier en réparation de leurs préjudices.

Par conclusions notifiées le 4 mai 2023, la société Etablissements Tonnaire a demandé au juge de la mise en état d'ordonner la nullité du rapport d'expertise judiciaire, à tout le moins de constater son inopposabilité à son égard, et de déclarer les demandes des consorts [G]-[B] irrecevables à son encontre pour défaut d'intérêt à agir, dès lors qu'elle n'était pas le constructeur du chalet, mais le sous-traitant de celui-ci, la société Tonnaire Maison Bois.

La société l'Auxiliaire a conclu dans le même sens, et a soulevé en outre la prescription des demandes des consorts [G]-[B] par expiration du délai de garantie décennale.

Les consorts [G]-[B] se sont opposés aux demandes et fins de non-recevoir soulevés.

Par ordonnance du 15 novembre 2023, le juge de la mise en état a :

- déclaré irrecevables les demandes de nullité et d'inopposabilité du rapport d'expertise en date du 5 janvier 2022 ;

- rejeté la fin de non-recevoir tirée de la forclusion soulevée par la société l'Auxiliaire ;

- rejeté la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir soulevée par la société Etablissements Tonnaire ;

- rejeté la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir à défendre soulevée par la société

l'Auxiliaire ;

- débouté M. [V] [G] et Mme [R] [B] de leur demande de dommages et intérêts pour

résistance abusive ;

- dit n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- réservé les dépens qui seront joints au fond.

Pour statuer ainsi, le juge de la mise en état a retenu :

- que si elle était soumise au régime des nullités de procédure en application de l'article 175 du code de procédure civile, la demande en nullité de l'expertise ne constituait pas une exception de procédure, au sens de l'article 73 du même code, relevant des pouvoirs du juge de la mise en état ;

- que le délai de dix ans prévu par l'article 1792-4-1 du code civil était un délai de forclusion et non un délai de prescription ; que si le délai de forclusion n'était en principe pas susceptible d'interruption, l'article 2241 du code civil prévoyait que, par exception, la demande en justice, même en référé, l'interrompait ; que les consorts [G]-[B] avaient introduit une demande d'expertise devant le juge des référés, à laquelle il avait été fait droit, de sorte que le délai de forclusion de 10 ans avait été valablement interrompu, quand bien même une partie avait été mise hors de cause ;

- que l'ordonnance de référé ayant mis hors de cause la société Etablissements Tonnaire n'avait pas autorité de chose jugée au fond ; que deux factures non produites en référé, dont nul ne contestait l'authenticité, démontraient que la société Etablissements Tonnaire était intervenue dans la construction du chalet, en procédant au montage de la structure constitutive de l'ossature de l'ouvrage ; que si la société Etablissements Tonnaire prétendait n'être intervenue qu'en qualité de sous-traitant, elle ne produisait aucun élément de nature à établir l'existence d'un tel contrat, la seule mention 'prestation de services' sur ses factures étant insuffisantes à cet égard, et alors que la qualification de contrat de sous-traitance ne pouvait pas plus résulter du montant prétendûment modéré de la facturation ;

- que le rejet de la fin de non-recevoir soulevé par l'assuré imposait le rejet de celle soulevée par l'assureur ;

- que les consorts [G]-[B] ne rapportaient pas la preuve de la mauvaise foi des sociétés Etablissements Tonnaire et l'Auxiliaire et ne justifiaient pas de leur préjudice.

La société Etablissements Tonnaire a relevé appel de cette décision le 30 novembre 2023, en intimant les consorts [G]-[B], la société l'Auxiliaire, la société Agence Téméraire Immobilier, la société LGDI et la société AXA France IARD.

La société l'Auxiliaire en a relevé appel le 5 décembre 2023, en intimant les consorts [G]-[B] et la société Etablissements Tonnaire.

Par ordonnance du 13 décembre 2023, le président de chambre a ordonné la jonction des deux dossiers.

Par ordonnance du 14 février 2024, le président de chambre a déclaré caduque la déclaration d'appel formée le 30 novembre 2023 par la société Etablissements Tonnaire en tant qu'elle était dirigée à l'encontre de la société LGDI et la société AXA France IARD.

Par conclusions transmises le 12 janvier 2024, la société Etablissements Tonnaire demande à la cour :

Vu les articles 122 et suivants du code de procédure civile,

Vu l'article 1792-4 du code civil,

- d'infirmer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a :

* déclaré irrecevables les demandes de nullité et d'inopposabilité du rapport d'expertise du 5 janvier 2022 ;

* rejeté la fin de non-recevoir tirée de la forclusion soulevée par la société Etablissements Tonnaire ;

* rejeté la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir soulevée par la société Etablissements Tonnaire ;

Statuant à nouveau :

- de juger que M. [G] et Mme [B] sont forclos à agir contre la société Etablissements Tonnaire ;

- de juger les consorts [G]-[B] hors délai car leur action de référé contre la société Etablissements Tonnaire a été introduite après l'expiration du délai de la garantie décennale ;

- de juger les consorts [G]-[B] sont irrecevables à agir à l'encontre de la société Etablissements Tonnaire ;

- d'ordonner la nullité du rapport d'expertise judiciaire du 5 janvier 2022 versé aux débats par M. [G] et Mme [B] ;

- de juger que le rapport d'expertise judiciaire du 5 janvier 2022 est inopposable à la société Etablissements Tonnaire ;

- de juger que la société Etablissements Tonnaire est étrangère à la construction du chalet de M. [G] et Mme [B] qui a été faite par la société Tonnaire Maison Bois ;

- de juger que les sociétés LGDI et AXA France n'ont donc pas d'intérêt à agir contre la société Etablissements Tonnaire ;

- de débouter M. [G] et Mme [B] de l'ensemble de leurs prétentions, fins et conclusions à l'égard de la société Etablissements Tonnaire ;

- de débouter les sociétés LGDI et AXA France de l'ensemble de leurs prétentions, fins et conclusions à l'égard de la société Etablissements Tonnaire ;

- de condamner solidairement M. [G] et Mme [B] à payer 5 000 euros à la société Etablissements Tonnaire au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépense de l'instance.

Par conclusions notifiées le 4 janvier 2024, la société l'Auxiliaire demande à la cour :

Vu l'article 789 du code de procédure civile,

Vu les articles 31 et suivants du code de procédure civile,

Vu l'article 122 du code de procédure civile,

Vu les articles 175 et 114 du code de procédure civile,

Vu l'article 2243 du code civil,

- d'infirmer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a :

* déclaré irrecevables les demandes de nullité et d'inopposabilité du rapport d'expertise du 5 janvier 2022 ;

* rejeté la fin de non-recevoir tirée de la forclusion soulevée par la société l'Auxiliaire ;

* rejeté la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir soulevée par la société Etablissements Tonnaire ;

* rejeté la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir à défendre soulevée par la société l'Auxiliaire ;

Statuant à nouveau

In limine litis,

- de juger nul et non opposable à l'égard de la société l'Auxiliaire le rapport d'expertise du 5 janvier 2022 ;

- de juger que la SARL Etablissements Tonnaire et la société Tonnaire Maison Bois sont deux personnes morales distinctes ;

- de juger irrecevables les demandes de M. [V] [G] et Mme [R] [B] formulées contre la société l'Auxiliaire qui n'a aucune qualité à défendre ;

- de juger irrecevables en raison de la forclusion les demandes de M. [V] [G] et Mme [R] [B] formulées contre la société l'Auxiliaire ;

- de rejeter toutes les autres demandes de M. [V] [G] et Mme [R] [B] ;

- de condamner M. [V] [G] et Mme [R] [B] à payer une indemnité de 2 500 euros à la société l'Auxiliaire, en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- de condamner M. [V] [G] et Mme [R] [B] aux entiers dépens de l'instance, avec possibilité de recouvrement direct au profit de Maître Benjamin Levy, en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions responsives et récapitulatives transmises le 14 février 2024, les consorts [G]-[B] demandent à la cour :

- de confirmer la décision déférée en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'elle a débouté M. [V] [G] et Mme [R] [B] de leur demande de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

En conséquence,

- de statuer à nouveau,

Vu l'article 1240 du code civil,

- de condamner in solidum l'Auxiliaire et la SARL Etablissements Tonnaire à payer aux consorts [G] & [B] une somme de 1 500 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive, outre intérêts de droit au taux légal ;

Au surplus,

- de débouter l'Auxiliaire et la SARL Etablissements Tonnaire de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions ;

- de débouter la SARL Agence Téméraire Immobilier de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;

Au surplus,

- de condamner in solidum l'Auxiliaire et la SARL Etablissements Tonnaire à verser aux consorts [G] & [B] une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- de les condamner sous la même solidarité aux dépens, lesquels seront directement recouvrés par la SELARL Maillot & Vigneron en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions notifiées le 7 février 2024, la société Agence Téméraire Immobilier demande à la cour :

- de constater qu'aucune demande n'est formulée à l'encontre de la société Téméraire Immobilier ;

- de prendre acte à la SARL Téméraire Immobilier de ce qu'elle s'en rapporte aux demandes formulées par la société Etablissements Tonnaire ;

En tout état de cause,

- de débouter les parties de l'intégralité de leurs éventuelles demandes, fins et prétentions formulées à l'encontre de la SARL Téméraire Immobilier, notamment au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- de condamner tout succombant au paiement de la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d'appel.

La clôture de la procédure a été prononcée le 19 mars 2024.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer pour l'exposé des moyens des parties à leurs conclusions récapitulatives visées ci-dessus.

Sur ce, la cour,

Sur la nullité de l'expertise

L'ordonnance déférée mérite en premier lieu confirmation en ce qu'elle a déclaré irrecevables les demandes de nullité et d'inopposabilité du rapport d'expertise, après avoir à bon droit rappelé que, si la demande de nullité d'un rapport d'expertise est soumise au régime des nullités de procédure en application de l'article 175 du code de procédure civile, elle ne constitue cependant pas une exception de procédure au sens de l'article 73 du même code, de sorte qu'elle ne relève pas de l'office du juge de la mise en état, ni, partant, de celui de la cour saisie d'un recours contre sa décision.

Sur la forclusion

L'article 1792-4-2 du code civil dispose que les actions en responsabilité dirigées contre un sous-traitant en raison de dommages affectant un ouvrage ou des éléments d'équipement d'un ouvrage mentionnés aux articles 1792 et 1792-2 se prescrivent par dix ans à compter de la réception des travaux et, pour les dommages affectant ceux des éléments d'équipement de l'ouvrage mentionnés à l'article 1792-3, par deux ans à compter de cette même réception.

L'article 1792-6 du même code énonce que la réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserves. Elle intervient à la demande de la partie la plus diligente, soit à l'amiable, soit à défaut judiciairement. Elle est, en tout état de cause, prononcée contradictoirement.

En l'espèce, il est constant qu'aucune réception expresse n'a été prononcée concernant l'ouvrage ultérieurement acquis par les consorts [G]-[B].

Les parties sont en désaccord sur la date à laquelle la réception de l'ouvrage est intervenue. La société Etablissements Tonnaire la situe au 25 septembre 2008, date à laquelle a été établi le dossier de diagnostic technique par la société LGDI, et en déduit que le délai de l'action décennale était expiré à la date à laquelle les consorts [G]-[B] avaient saisi le juge des référés, de sorte qu'il n'y avait pas lieu de s'interroger sur l'éventuel caractère interruptif de cette assignation. Les consorts [G]-[B] considèrent quant à eux que la réception doit être fixée à la date de délivrance de la déclaration d'achèvement et de conformité des travaux, soit le 14 octobre 2008 s'agissant des travaux objets du permis de construire initial, et le 3 mars 2009 pour ceux objets du permis de construire modificatif.

Le diagnostic technique produit aux débats ne permet pas, par ses indications, de démontrer que l'ouvrage était, à la date de la visite du diagnostiqueur, en état d'être reçu. Il sera considéré en conséquence que la réception, constituant le point de départ du délai de forclusion décennale, a commencé à courir au plus tôt à compter du 14 octobre 2008, date à laquelle il est attesté de l'achèvement et de la conformité des travaux.

Il en résulte que le délai de la garantie décennale n'était pas expiré à la date à laquelle les consorts [G]-[B] ont fait assigner la société Etablissements Tonnaire et la société l'Auxiliaire devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Lons le Saunier aux fins d'expertise, soit le 2 octobre 2018.

L'article 2241 du code civil dispose que la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion.

Il en est de même lorsqu'elle est portée devant une juridiction incompétente ou lorsque l'acte de saisine de la juridiction est annulé par l'effet d'un vice de procédure.

L'article 2243 ajoute que l'interruption est non avenue si le demandeur se désiste de sa demande ou laisse périmer l'instance, ou si sa demande est définitivement rejetée.

Il est constant que, par sa décision du 30 avril 2019, le juge des référés a ordonné l'expertise sollicitée par les consorts [G]-[B], mais a mis hors de cause la société Etablissements Tonnaire et son assureur l'Auxiliaire. Ce faisant, il a rejeté la demande d'expertise en tant qu'elle était dirigée contre ces deux sociétés, et n'en a reconnu le bien-fondé qu'à l'égard des autres parties appelées à l'instance.

Il en résulte que la désignation de l'expert n'a pu avoir d'effet interruptif de prescription à l'égard des parties mises hors de cause.

A défaut d'interruption, la forclusion était incontestablement acquise à la date à laquelle les consorts [G]-[B] ont fait assigner au fond les sociétés Etablissements Tonnaire et l'Auxiliaire.

L'ordonnance déférée sera donc infirmée, les demandes formées à l'encontre de la société Etablissements Tonnaire et l'Auxiliaire étant déclarées irrecevables, sans qu'il y ait lieu d'examiner les moyens tirés du défaut de qualité à agir.

L'issue de l'instance commande que soit confirmé le chef de l'ordonnance déférée relatif au rejet de la demande de dommages et intérêts formée par les consorts [G]-[B], en l'absence de caractérisation d'un abus.

Les consorts [G] [B] seront condamnés aux dépens de première instance et d'appel.

Les demandes formées sur le fondement de l'article 700 seront rejetées.

Par ces motifs

Statuant contradictoirement, après débats en audience publique,

Confirme l'ordonnance rendue le 15 novembre 2023 par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Lons le Saunier en ce qu'elle a déclaré irrecevables les demandes de nullité et d'inopposabilité du rapport d'expertise en date du 5 janvier 2022 et débouté M. [V] [G] et Mme [R] [B] de leur demande de dommages et intérêts ;

Infirme l'ordonnance déférée pour le surplus ;

Statuant à nouveau, et y ajoutant :

Déclare irrecevables les demandes formées par M. [V] [G] et Mme [R] [B] à l'encontre de la SARL Etablissements Tonnaire ;

Déclare irrecevables les demandes formées par M. [V] [G] et Mme [R] [B] à l'encontre de la SAMCV l'Auxiliaire ;

Condamne M. [V] [G] et Mme [R] [B] aux dépens de première instance et d'appel ;

Rejette les demandes formées par les parties sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Ledit arrêt a été signé par Michel Wachter, président de chambre, magistrat ayant participé au délibéré et Fabienne Arnoux, greffier.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Besançon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23/01940
Date de la décision : 14/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 23/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-14;23.01940 ?
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