La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/05/2024 | FRANCE | N°23/00050

France | France, Cour d'appel de Besançon, 1ère chambre, 14 mai 2024, 23/00050


Le copies exécutoires et conformes délivrées à

MW/FA











REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



Minute n°

N° de rôle : N° RG 23/00050 - N° Portalis DBVG-V-B7H-ES2F





COUR D'APPEL DE BESANÇON

1ère chambre civile et commerciale



ARRÊT DU 14 MAI 2024





Décision déférée à la Cour : jugement du 14 décembre 2022 - RG N°19/00619 - TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE MONTBÉLIARD

Code affaire : 58E - Demande en paiement

de l'indemnité d'assurance dans une assurance de dommages





COMPOSITION DE LA COUR :



M. Michel WACHTER, Président de chambre

Madame Bénédicte MANTEAUX , conseiller

Madame Anne-Sophie WIL...

Le copies exécutoires et conformes délivrées à

MW/FA

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Minute n°

N° de rôle : N° RG 23/00050 - N° Portalis DBVG-V-B7H-ES2F

COUR D'APPEL DE BESANÇON

1ère chambre civile et commerciale

ARRÊT DU 14 MAI 2024

Décision déférée à la Cour : jugement du 14 décembre 2022 - RG N°19/00619 - TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE MONTBÉLIARD

Code affaire : 58E - Demande en paiement de l'indemnité d'assurance dans une assurance de dommages

COMPOSITION DE LA COUR :

M. Michel WACHTER, Président de chambre

Madame Bénédicte MANTEAUX , conseiller

Madame Anne-Sophie WILLM, conseiller

Greffier : Mme Fabienne ARNOUX, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision.

DEBATS :

L'affaire a été examinée en audience publique du 12 mars 2024 tenue par M. Michel WACHTER, président de chambre et Madame Bénédicte MANTEAUX, conseiller, assistés de Mme Fabienne ARNOUX, greffier.

Le rapport oral de l'affaire a été fait à l'audience avant les plaidoiries.

LORS DU DELIBERE:

Monsieur Michel WACHTER, président et Madame Bénédicte MANTEAUX ont rendu compte conformément à l'article 786 du code de procédure civile à un autre magistrat :

Madame Anne-Sophie WILLM conseiller.

L'affaire oppose :

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

S.A. INTER MUTUELLES ENTREPRISES

Sise [Adresse 3]

Immatriculée au RCS de Rouen sous le numéro 493 147 011

Représentée par Me Pierre-Henri SURDEY de la SCP SURDEY GUY - AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MONTBELIARD

ET :

INTIMÉS

Monsieur [Z] [D]

de nationalité française, demeurant [Adresse 1]

Défaillant, à qui la déclaration d'appel a été signifiée le 17 février 2023

S.A.R.L. ETABLISSEMENT PERRIN ET CIE prise en la personne de son représentant légal domicilié de droit audit siège

Sise [Adresse 2]

Immatriculée au RCS de Belfort sous le numéro 535 620 165

Représentée par Me Séverine WERTHE de la SCP DSC AVOCATS, avocat au barreau de BESANCON

ARRÊT :

- DEFAUT

- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant préalablement été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Michel WACHTER, président de chambre et par Mme Fabienne ARNOUX, greffier lors du prononcé.

*************

La SARL Etablissement Perrin et Cie (la société Perrin) est propriétaire d'un ensemble immobilier à [Localité 4] (25), qu'elle a donné à bail à M. [Z] [D], moyennant un loyer mensuel de 800 euros HT, aux termes d'une convention d'occupation précaire renouvelée le 21 juin 2016 pour une durée de 5 mois.

M. [D] a souscrit une assurance couvrant les locaux loués auprès de la Matmut, qui fait partie de la SA Inter Mutuelles Entreprises (la société IME).

Le 31 octobre 2016, un incendie a pris naissance dans le hangar où étaient entreposés du matériel et cinq véhicules motorisés appartenant à M. [D]. Le bâtiment et son contenu ayant été entièrement détruits, M. [D] a fait une déclaration de sinistre auprès de son assureur.

A la suite de deux réunions, les experts mandatés par les sociétés IME et Perrin ont établi un procès-verbal de constatations relatives aux causes, circonstances et à l'évaluation des dommages. Les opérations d'expertise amiable n'ont pas permis de déterminer la cause de l'incendie mais les dommages ont été évalués à la somme de 142 716,65 euros HT (valeur à neuf) et 116 365,41 HT (vétusté déduite), intégrant le coût des travaux de désamiantage.

La société Perrin ayant vainement sollicité de la société IME la prise en charge de l'indemnisation de ses dommages, elle a saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Montbéliard, qui, par décision du 7 février 2018 a ordonné une expertise judiciaire.

L'expert a déposé son rapport le 4 août 2018.

Par exploits des 9 et 12 juillet 2019, la société Perrin a fait assigner M. [D] et son assureur IME devant le tribunal de grande instance de Montbéliard, en sollicitant que M. [D] soit déclaré responsable des conséquences de l'incendie et qu'il soit condamné, solidairement avec son assureur, à lui payer la somme de 116  365,41 euros HT en réparation du préjudice subi.

Elle a soutenu que le locataire était responsable en cas d'incendie sauf causes exonératoires sur le fondement de l'article 1733 du code civil, et que la preuve d'une telle cause exonératoire n'était pas rapportée dans la mesure où la cause de l'incendie n'avait pas été déterminée de manière certaine. Concernant les exclusions de garantie alléguées par l'assureur, elle a fait valoir notamment que le désamiantage n'était qu'une conséquence de la réparation intégrale du préjudice. Elle a par ailleurs considéré que la réduction proportionnelle invoquée par l'assureur était infondée, et qu'elle ne concernait en tout état de cause que l'assuré.

La société IME a sollicité le rejet de l'ensemble des demandes formées à son encontre, subsidiairement a exposé que les exclusions de garantie prévues au contrat et la règle proportionnelle de prime étaient applicables, et que toute condamnation éventuelle devait être limitée à la somme de 29 930,41 euros.

Elle a fait valoir que la présomption de responsabilité du locataire devait être renversée dès lors que la cause de l'incendie relevait selon l'expert judiciaire d'un fait intentionnel, qui devait être assimilé à un cas de force majeure. Concernant sa garantie, elle a opposé une exclusion concernant les travaux relatifs à l'amiante et une réduction proportionnelle au motif que l'assuré n'avait pas déclaré la surface correspondant au risque assuré.

Par jugement rendu le 14 décembre 2022 en l'absence de comparution de M. [D], le tribunal a :

- déclaré M. [Z] [D] responsable de l'incendie au titre de l'article 1733 du code civil ;

- débouté la SA Inter Mutuelles Entreprises de ses demandes ;

- condamné solidairement M. [Z] [D] et la SA Inter Mutuelles Entreprises à payer à la SARL Etablissement Perrin et compagnie la somme de 116 365,41 euros HT, soit 139 638,492 euros TTC en réparation du préjudice subi ;

- condamné in solidum M. [Z] [D] et la SA Inter Mutuelles Entreprises à supporter les dépens, en ce compris les frais d'expertise avancés par la demanderesse et en conséquence à rembourser à cette dernière la somme de 3 453,70 euros ;

- condamné in solidum M. [Z] [D] et la SA Inter Mutuelles Entreprises à payer à la SARL Etablissement Perrin et compagnie la somme de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles ;

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

- ordonné l'exécution provisoire de la décision.

Pour parvenir à cette décision, le tribunal a retenu :

- que le fait qu'une hypothèse soit privilégiée par l'expert n'équivalait pas à l'établissement certain de la cause de l'incendie, de sorte qu'en l'absence d'identification de la cause du sinistre, l'impossibilité de déterminer l'origine exacte de l'incendie ne pouvait correspondre à l'existence du cas fortuit ou de la force majeure au sens de l'article 1733 du code civil, de sorte que la responsabilité de l'occupant, qui supportait le risque de la preuve, était engagée ;

- que le locataire devait réparer l'entier dommage causé par l'incendie, dont l'évaluation résultant du procès-verbal de constatations relatives aux causes et circonstances et à l'évaluation des dommages n'était pas contestée ;

- qu'au titre des exclusions de garantie figuraient les dommages causés directement ou indirectement par l'amiante ou tout matériau comportant de l'amiante ; que tel n'était pas le cas en l'espèce, dès lors que les dommages résultaient d'un incendie, la présence d'amiante n'ayant aucun rapport dans la cause du dommage ;

- qu'une réduction proportionnelle supposait de démontrer le caractère inexact de la déclaration de l'assuré au regard des modalités prévues par l'assureur et de leur opposabilité à l'assuré ; que la notion de 'surface développée des locaux assurés' mentionnée dans les conditions générales, pour le moins imprécise et et non expliquées par les conditions générales, n'était pas celle reprise dans le rapport d'expertise amiable, ni par l'expert judiciaire, qu'ainsi, en l'absence de cohérence entre les données comparées, aucune inexactitude dans la délaration de M. [D] ne pouvait être relevée.

Par déclaration du 12 janvier 2023, la société IME a interjeté appel de cette décision.

Par conclusions transmises le 11 avril 2023, l'appelante demande à la cour :

Vu les dispositions de l'article 1103 du code civil,

Vu les dispositions de l'article 1733 du code civil,

Vu l'article L. 113-9 du code de sassurances et la jurisprudence de la Cour de cassation,

- d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il :

* déclare M. [Z] [D] responsable de l'incendie au titre de l'article 1733 du code civil ;

* déboute la SA Inter Mutuelles Entreprises de ses demandes ;

* condamne solidairement M. [Z] [D] et la SA Inter Mutuelles Entreprises à payer à la SARL Etablissement Perrin et compagnie la somme de 116 365,41 euros HT, soit 139 638,492 euros TTC en réparation du préjudice subi ;

* condamne in solidum M. [Z] [D] et la SA Inter Mutuelles Entreprises à supporter les dépens, en ce compris les frais d'expertise avancés par la demanderesse et en conséquence à rembourser à cette dernière la somme de 3 453,70 euros ;

* condamne in solidum M. [Z] [D] et la SA Inter Mutuelles Entreprises à payer à la SARL Etablissement Perrin et compagnie la somme de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles ;

* déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

A titre principal,

- de débouter la SARL Etablissement Perrin et Cie de l'ensemble de ses demandes dirigées à l'encontre de la SA Inter Mutuelles Entreprises ;

A titre subsidiaire,

- de dire et juger applicables les exclusions de garantie prévues au contrat et la règle proportionnelle de prime prévue par la loi et, en conséquence :

- de limiter toute condamnation éventuelle de la SA Inter Mutuelles Entreprises à la somme de 29 930,41 euros ;

Plus subsidiairement encore,

- de limiter toute condamnation éventuelle de la SA Inter Mutuelles Entreprises à la somme de 43 011,11 euros ;

En ces deux hypothèses,

- de condamner la SARL Etablissement Perrin et Cie aux entiers dépens de première instance et d'appel y compris les frais d'expertise judiciaire de M. [R] ;

- de condamner la SARL Etablissement Perrin et Cie à payer à la société Inter Mutuelles Entreprises la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions notifiées le 29 juin 2023, la société Perrin demande à la cour :

Vu les articles 1733 et 1315 du code civil,

- de confirmer purement et simplement le jugement déféré ;

En tout état de cause :

- de débouter les défendeurs de toutes prétentions contraires ;

- de condamner in solidum M. [Z] [D] et la SA Inter Mutuelles Entreprises à payer à la SARL Etablissement Perrin et Compagnie la somme de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles ;

- de les condamner in solidum aux entiers dépens.

La société IME a fait signifier sa déclaration d'appel à M. [D] par acte du 17 février 2023 remis selon les modalités de l'article 659 du code de procédure civile.

Les parties ont fait signifier leurs conclusions respectives à M. [D].

M. [D] n'a pas constitué avocat.

Il sera statué par arrêt de défaut.

La clôture de la procédure a été prononcée le 20 février 2024.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer pour l'exposé des moyens des parties à leurs conclusions récapitulatives visées ci-dessus.

Sur ce, la cour,

Sur la responsabilité de M. [D]

L'article 1733 du code civil dispose que le preneur répond de l'incendie, à moins qu'il ne prouve :

Que l'incendie est arrivé par cas fortuit ou force majeure, ou par vice de construction,

Ou que le feu a été communiqué par une maison voisine.

C'est aux termes d'une analyse pertinente des pièces qui lui étaient soumises, et en particulier du rapport d'expertise judiciaire, qui ne détermine pas les causes de l'incendie, mais se borne à privilégier l'hypothèse du fait d'un tiers sans la caractériser de manière certaine, que le premier juge, par une motivation circonstanciée dont aucun élément nouveau produit à hauteur de cour ne permet de remettre en cause le bien-fondé, a retenu l'absence de démonstration d'un cas fortuit ou de force majeure de nature à exonérer le preneur de sa responsabilité.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur l'indemnisation

C'est d'abord de manière vaine que l'appelante critique la décision entreprise en ce qu'elle a refusé de déduire de l'indemnisation la somme correspondant au désamiantage. En effet, la clause d'exclusion de l'article 5 des conditions générales du contrat, sur lequel l'assureur fonde son argumentation, écarte l'indemnisation des dommages 'causés directement ou indirectement par l'amiante ou tout matériau contenant de l'amiante', ce qui ne correspond pas au cas d'espèce, où le désamiantage n'est pas la cause du dommage, mais constitue lui-même l'un des dommages résultant de l'incendie.

Ensuite, c'est encore à bon droit que le premier juge a écarté la demande de réduction de l'indemnisation due à la société Perrin par application de la règle proportionnelle de prime, dès lors que l'assureur échoue à démontrer une fausse déclaration de son assuré relativement à la superficie des locaux objets de la garantie, en présence de l'indication par le contrat d'une déclaration portant sur la 'surface développée des locaux', alors que les experts amiable et judiciaire ont évalué la superficie sans se référer à cette notion spécifique de 'surface développée', et en aboutissant au demeurant à des évaluations profondément divergentes, soit respectivement 194 et 135 m².

La décision déférée sera donc également confirmée de ce chef.

Sur les autres dispositions

La confirmation s'impose s'agissant des dépens et des frais irrépétibles.

L'appelante sera condamnée aux dépens d'appel, ainsi qu'à payer à la société Perrin la somme de 2 500 euros.

Par ces motifs

Statuant par défaut, après débats en audience publique,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 14 décembre 2022 par le tribunal judiciaire de Montbéliard ;

Y ajoutant :

Condamne la SA Inter Mutuelles Entreprises aux dépens d'appel ;

Condamne la SA Inter Mutuelles Entreprises à payer à la SARL Etablissement Perrin & Cie la somme de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Ledit arrêt été signé par Michel Wachter, président de chambre, magistrat ayant participé au délibéré et Fabienne Arnoux, greffier.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Besançon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23/00050
Date de la décision : 14/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 23/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-14;23.00050 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award