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30/04/2024 | FRANCE | N°23/00220

France | France, Cour d'appel de Besançon, 1ère chambre, 30 avril 2024, 23/00220


Le copies exécutoires et conformes délivrées à

MW/FA











REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



Minute n°

N° de rôle : N° RG 23/00220 - N° Portalis DBVG-V-B7H-ETGH





COUR D'APPEL DE BESANÇON

1ère chambre civile et commerciale



ARRÊT DU 30 AVRIL 2024





Décision déférée à la Cour : jugement du 19 janvier 2023 - RG N°20/00764 - TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE LONS LE SAUNIER

Code affaire : 70B - Demande formée p

ar le propriétaire de démolition d'une construction ou d'enlèvement d'une plantation faite par un tiers sur son terrain





COMPOSITION DE LA COUR :



M. Michel WACHTER, Président de chambre....

Le copies exécutoires et conformes délivrées à

MW/FA

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Minute n°

N° de rôle : N° RG 23/00220 - N° Portalis DBVG-V-B7H-ETGH

COUR D'APPEL DE BESANÇON

1ère chambre civile et commerciale

ARRÊT DU 30 AVRIL 2024

Décision déférée à la Cour : jugement du 19 janvier 2023 - RG N°20/00764 - TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE LONS LE SAUNIER

Code affaire : 70B - Demande formée par le propriétaire de démolition d'une construction ou d'enlèvement d'une plantation faite par un tiers sur son terrain

COMPOSITION DE LA COUR :

M. Michel WACHTER, Président de chambre.

Madame Bénédicte MANTEAUX et M. Cédric SAUNIER, Conseillers.

Greffier : Mme Fabienne ARNOUX, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision.

DEBATS :

L'affaire a été examinée en audience publique du 27 février 2024 tenue par M. Michel WACHTER, président de chambre, Madame Bénédicte MANTEAUX et M. Cédric SAUNIER, conseillers et assistés de Mme Fabienne ARNOUX, greffier.

Le rapport oral de l'affaire a été fait à l'audience avant les plaidoiries.

L'affaire oppose :

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTS

Madame [N] [Y]

née le 01 Avril 1955 à [Localité 8], de nationalité française, retraitée,

demeurant [Adresse 1]

Représentée par Me Christine PILLOT-QUENOT, avocat au barreau de BESANCON

Madame [T] [Y]

née le 17 Juillet 1940 à [Localité 8], de nationalité française, retraitée,

demeurant [Adresse 4]

Représentée par Me Christine PILLOT-QUENOT, avocat au barreau de BESANCON

Monsieur [B] [Y]

né le 03 Octobre 1946 à [Localité 8], de nationalité française, médecin,

demeurant [Adresse 5]

Représenté par Me Christine PILLOT-QUENOT, avocat au barreau de BESANCON

Madame [V] [Y]

née le 30 Décembre 1949 à [Localité 8], de nationalité française, responsable de service, demeurant [Adresse 3]

Représentée par Me Christine PILLOT-QUENOT, avocat au barreau de BESANCON

Monsieur [H] [Y]

né le 14 Novembre 1947 à [Localité 8], de nationalité française, médecin,

demeurant [Adresse 10]

Représenté par Me Christine PILLOT-QUENOT, avocat au barreau de BESANCON

ET :

INTIMÉ

Monsieur [P] [A]

né le 22 Mai 1952 à [Localité 9], de nationalité française, retraité,

demeurant [Adresse 2]

Représenté par Me Aurélie DEGOURNAY de la SELAS AGIS, avocat au barreau de JURA

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant préalablement été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Michel WACHTER, président de chambre et par Mme Fabienne ARNOUX, greffier lors du prononcé.

*************

Par exploit du 25 août 2020, faisant valoir qu'il était propriétaire des parcelles cadastrées commune de [Localité 9] (39), section I n°[Cadastre 6] et [Cadastre 7], sur lesquelles un ponton ainsi qu'un cabanon avaient été installés, M. [P] [A] a fait assigner Mme [N] [Y] devant le tribunal judiciaire de Lons le Saunier afin d'obtenir sous astreinte la démolition du ponton en béton construit en extension du cabanon et sa condamnation à vider celui-ci. Le demandeur a précisé que le cabanon litigieux avait été installé avec l'autorisation de son père par [Z] [Y], père de Mme [Y], mais que celle-ci ne pouvait se prévaloir de la prescription acquisitive, alors que seul un prêt à usage avait été concédé, et que, faute de stipulation d'un terme, le prêteur pouvait mettre fin à la convention à tout moment. Il a ajouté que le ponton avait été construit depuis une dizaine d'années et qu'au regard du danger qu'il représentait, sa démolition devait être ordonnée.

Mme [T] [Y], M. [B] [Y], Mme [V] [Y] ainsi que M. [H] [Y], frères et soeurs de Mme [N] [Y], sont intervenus volontairement à la procédure aux côtés de celle-ci. Ils se sont opposés aux demandes formées par M. [A], au motif qu'ils étaient propriétaires des parcelles de terrain sur lesquelles étaient édifiés le cabanon et le ponton par le jeu de la prescription acquisitive, du fait d'une possession continue, paisible, publique et non équivoque.

Par jugement du 19 janvier 2023, le tribunal judiciaire a :

- reçu l'intervention volontaire de Mme [T] [Y], M. [B] [Y], Mme [V] [Y] et M. [H] [Y] venant aux droits de Mme [N] [Y] ;

- ordonné que Mme [T] [Y], M. [B] [Y], Mme [V] [Y] et M. [H] [Y] venant aux droits de Mme [N] [Y] démolissent le ponton en béton construit en extension du cabanon sis sur les parcelles cadastrées I [Cadastre 6] et I [Cadastre 7] appartenant à M. [P] [A] sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la signification de la présente décision dans la limite de 6 mois ;

- ordonné que Mme [T] [Y], M. [B] [Y], Mme [V] [Y] et M. [H] [Y] venant aux droits de Mme [N] [Y] vident le cabanon sis sur les parcelles cadastrées I [Cadastre 6] et I [Cadastre 7] appartenant à M. [P] [A] sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la signification de la présente décision dans la limite de 6 mois ;

- condamné in solidum Mme [T] [Y], M. [B] [Y], Mme [V] [Y] et M. [H] [Y] venant aux droits de Mme [N] [Y] à verser à M. [P] [A] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédre civile ;

- condamné in solidum Mme [T] [Y], M. [B] [Y], Mme [V] [Y] et M. [H] [Y] venant aux droits de Mme [N] [Y] aux entiers dépens ;

- constaté l'exécution provisoire de la présente décision ;

- dit que les avocats en la cause en ayant fait la demande, pourront, chacun en ce qui le concerne, recouvrer sur la partie condamnée ceux des dépens dont ils auront fait l'avance sans avoir reçu provision en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Pour statuer ainsi, le tribunal a retenu :

- qu'il ressortait du titre de propriété et des relevés cadastraux que M. [P] [A] était propriétaire des parcelles cadastrées I [Cadastre 6] et I [Cadastre 7] sur la commune de [Localité 9] ;

- que les parties s'accordaient à dire que, dans les années 1950, M. [Z] [Y] avait demandé à M. [L] [A] l'autorisation de déposer un conteneur sur sa parcelle au bord du lac, lequel s'était au fil du temps tranformé en cabanon ; que les consorts [Y] avait fait édifier une dalle en béton faisant office de ponton, qui n'existait pas à l'origine ;

- que le conteneur avait ainsi été déposé sur le terrain depuis plus de trente ans, mais que la prescription acquisitive était soumise à plusieurs conditions, tenant à une possession continue, non-interrompue, paisible, publique et non-équivoque ;

- que les consorts [Y] versaient des attestations mentionnant que la cabane leur appartenait, sans cependant apporter d'éléments temporels précis ;

- que les photos versées au débat n'étaient pas datées, sans précision du lieu où elles avaient été prises ;

- que les deux factures datées du 16 novembre 2009 et du 30 septembre 2014 informaient que les consorts [Y] avaient effectué des travaux, mais ne produisaient pas d'autorisation quant à la construction du ponton en béton, ni d'éléments quant à sa date ;

- que, depuis les années 1950, les consorts [Y] ne produisaient pas d'éléments probants quant à une possession continue et non-interrompue alors que, selon leurs propres écritures, ce cabanon était utilisé ponctuellement à titre de loisir ;

- que les constats d'huissier versés au débat démontraient que la solidité du ponton en béton n'était pas certaine en raison des cailloux et du grillage qui semblaient le maintenir, alors que des pneus et des tiges en fer étaient visibles à proximité, ce dont il résultait un danger excluant le caractère paisible de la possession ;

- qu'en l'absence de démontsration d'une possession continue, non-interrompue, paisible, publique et non-équivoque, le contrat en cause pouvait être qualifié de prêt à usage verbal d'un cabanon pour des activités de loisir au bénéfice des consorts [Y] ; que, dès lors qu'aucun terme n'avait été convenu, le prêteur avait le droit d'y mettre fin à tout moment.

Les consorts [Y] ont interjeté appel de cette décision le 17 février 2023, en déférant à la cour l'ensemble de ses chefs.

Par conclusions récapitulatives transmises le 11 janvier 2024, les appelants demandent à la cour :

- de déclarer l'appel interjeté par les consorts [Y] recevable et fondé ;

- de réformer le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

- de juger recevables et bien fondés Mme [T] [Y], Mme [V] [Y], M. [B] [Y] et M. [H] [Y], frères et soeurs de Mme [N] [Y], en leur intervention volontaire ;

- de juger que Mme [N] [Y], Mme [T] [Y], Mme [V] [Y], M. [B] [Y] et M. [H] [Y] sont propriétaires par l'effet de la prescription acquisitive, des parcelles de terrain sur lesquelles sont édifiés le cabanon et le ponton figurant sur les parcelles situées sur la commune de [Localité 9] (Jura) et cadastrées section I n° [Cadastre 6] et [Cadastre 7] ;

- de désigner tel géomètre qu'il plaira à la juridiction aux fins de procéder au bornage desdites parcelles appartenant aux consorts [Y] ;

- de juger que la partie la plus diligente sera autorisée à publier au service de la publicité foncière la décision à intervenir ;

- d'ordonner à M. [P] [A] de retirer le grillage et le panneau qu'il a installés aux abords du cabanon et du ponton, et ce sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir ;

- de débouter M. [P] [A] de toutes ses demandes, fins et conclusions contraires ;

- de condamner M. [P] [A] à payer aux consorts [Y] la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- de le condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Par conclusions notifiées le 22 juin 2023, M. [A] demande à la cour :

Vu les dispositions des articles 554 et suivants, 1885 et suivants et 2261 et suivants du code civil,

A titre principal,

- de confirmer en tous points le jugement déféré ;

A titre subsidiaire,

- de juger que la prescription acquisitive ne peut porter que sur l'assiette du conteneur ;

En conséquence,

- d'ordonner la démolition, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir, du ponton construit en extension du cabanon sans autorisation ;

En toute hypothèse,

- de condamner solidairement Mme [N] [Y], Mme [V] [Y], M. [B] [Y], Mme [T] [Y] et M. [H] [Y] à payer à M. [P] [A] la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- de condamner les mêmes aux entiers dépens de première instance et d'appel.

La clôture de la procédure a été prononcée le 6 février 2024.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer pour l'exposé des moyens des parties à leurs conclusions récapitulatives visées ci-dessus.

Sur ce, la cour,

Sur l'intervention volontaire de Mme [T] [Y], M. [B] [Y], Mme [V] [Y] ainsi que M. [H] [Y]

Si l'intervention volontaire des intéressés est parfaitement recevable, et d'ailleurs non contestée, c'est à tort que le premier juge a indiqué que ces intervenants venaient aux droits de Mme [N] [Y], alors que celle-ci est toujours personnellement présente à la procédure, et que l'intervention volontaire est justifiée par la volonté des intervenants de se joindre à l'argumentation opposée par leur soeur à la demande dirigée à son encontre, ainsi qu'aux demandes qu'elle forme relativement à la prescription acquisitive.

La décision entreprise sera infirmée en ce sens.

Sur la prescription acquisitive

L'article 2258 du code civil dispose que la prescription acquisitive est un moyen d'acquérir un bien ou un droit par l'effet de la possession sans que celui qui l'allègue soit obligé d'en rapporter un titre ou qu'on puisse lui opposer l'exception déduite de la mauvaise foi.

L'article 2261 énonce que, pour pouvoir prescrire, il faut une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque, et à titre de propriétaire.

Il résulte de l'article 2264 que le possesseur actuel qui prouve avoir possédé anciennement, est présumé avoir possédé dans le temps intermédiaire, sauf la preuve contraire, et de l'article 2265 que, pour compléter la prescription, on peut joindre à sa possession celle de son auteur, de quelque manière qu'on lui ait succédé, soit à titre universel ou particulier, soit à titre lucratif ou onéreux.

Enfin, l'article 2272 du même code dispose que le délai de prescription requis pour acquérir la propriété immobilière est de trente ans.

En l'espèce, il est constant entre les parties que le cabanon a été installé à l'emplacement qu'il occupe encore actuellement par le père des appelants, à une date qui, pour n'être pas connue de manière précise, est en tout état de cause antérieure de plus de trente ans à la date de l'assignation, comme étant localisée par les parties elles-mêmes au cours des années 1955 ou 1956.

M. [A] n'est quant à lui devenu propriétaire des parcelles sur lesquelles ce cabanon est implanté qu'à l'issue du partage ayant fait suite au décès de son père, survenu le 27 mai 2002.

S'il soutient l'existence d'un prêt à usage conclu entre son père et celui des appelants, force est cependant de constater l'absence de preuve d'une telle convention, qui suppose la démonstration de l'engagement du père des consorts [Y] à restituer la chose après s'en être servi. Au demeurant, il ne peut y avoir eu prêt du cabanon lui-même, dont il est en effet constant qu'il a été installé, non pas par le père de M. [A], mais par celui des consorts [Y]. En outre, à supposer même l'existence d'un prêt à usage, qui se transmet aux héritiers tant du prêteur que de l'emprunteur par l'effet de l'article 1879 du code civil, c'est à tort que M. [A] soutient qu'il pouvait y mettre fin librement, alors qu'à défaut de preuve de la stipulation d'un terme, le prêteur ne peut retirer la chose prêtée qu'après que l'usage de la chose ait cessé, ce qui n'est pas le cas en l'occurrence, où il n'est pas contesté que les consorts [Y] continuent d'utiliser les lieux.

Il résulte suffisamment des pièces produites par les appelants, notamment les attestations de témoins et les photographies, que le cabanon a été occupé et utilisé par la famille [Y] depuis son installation et qu'il continuait de l'être à la date d'introduction de la procédure par M. [A], soit pendant plus de soixante ans.

Ainsi qu'en attestent sans ambiguïté les témoignages et photographies produits, cette occupation s'est faite à titre de propriétaire, dès lors que les consorts [Y] ont toujours été les utilisateurs exclusifs du cabanon, dont ils disposaient seuls des moyens d'accès, ainsi que de manière publique et non équivoque, dans la mesure où cette occupation s'est toujours déroulée au vu et au su tant des consorts [A] que des autres riverains. Cette occupation s'est également faite de manière continue et non interrompue, le tribunal ayant retenu à mauvais escient que ce caractère faisait défaut eu égard au caractère ponctuel de l'occupation, alors qu'un cabanon de loisir installé au bord d'un lac, destiné par essence à une utilisation simplement saisonnière, doit être considéré comme utilisé de manière continue dès lors qu'il l'est à chaque nouvelle saison, ce qui n'est pas remis en cause en l'espèce. Enfin, il n'est produit strictement aucune pièce démontrant que cette occupation à titre de propriétaire ait été contestée par quiconque au cours des trente années ayant suivi l'installation du cabanon, et ce jusqu'à l'introduction de la présente instance, de sorte qu'elle doit être qualifiée de paisible, la considération du tribunal selon laquelle la présence de certains objets aux alentours des lieux pouvaient présenter un risque pour la sécurité des occupants étant à cet égard dépourvue de tout emport.

La prescription acquisitive a donc joué pour le cabanon, et son strict terrain d'assiette.

S'agissant du ponton, qui est implanté en prolongement de la façade du cabanon côté lac, s'il est constant qu'il était inexistant au moment de la création du cabanon, et que sa facture actuelle en béton est récente, il est cependant établi par les pièces versées par les appelants que l'ouvrage actuel n'a fait que remplacer un ouvrage en bois préexistant, dont les origines, qui ne peuvent être déterminées avec précision, sont cependant antérieures de bien plus de trente années à la date de l'assignation. Il est en effet fourni diverses photographies dont l'apparence notamment vestimentaire des sujets représentés, caractéristique des années 1970, démontre indubitablement qu'elles sont anciennes. Cette datation est corroborée en particulier par l'attestation de Mme [J] [F], née le 22 janvier 1973, indiquant être le nourrisson figurant sur ces photographies (pièce 12 des appelants), et précisant qu'elle était alors âgée de 7 mois, ce qui permet de dater de l'été 1973 ces prises de vue, sur l'une desquelles figure de manière très apparente le ponton en bois. Dès lors par ailleurs que ce ponton a été occupé par les consorts [Y] dans les mêmes conditions que le cabanon, la prescription acquisitive a également joué le concernant, ainsi que son strict terrain d'assiette, peu important qu'au regard de sa vétusté l'ouvrage en bois ait été remplacé par un ouvrage en béton.

Le jugement déféré sera donc infirmé en toutes ses dispositions, les consorts [Y] étant reconnus propriétaires du cabanon, du ponton, ainsi que de la partie des fonds cadastrés section I n° [Cadastre 6] et [Cadastre 7] constituant leur strict terrain d'assiette. Les demandes de M. [A] tendant à la démolition du ponton et à l'évacuation du cabanon seront en conséquences rejetées.

Sur la demande de retrait d'un grillage et d'un panneau

Il résulte du procès-verbal de constat établi le 26 juillet 2021à la requête de Mme [V] [Y] par Me [D], huissier de justice à [Localité 11], qu'un grillage a été installé sur la périphérie du ponton, entravant l'accès au cabanon et interdisant l'accès au lac, alors par ailleurs qu'un panneau circulaire mentionnant une interdiction de baignade, de pêche et de camping a été apposé dans le lac, à proximité immédiate du ponton.

M. [A] admet être l'auteur de ces installations, qui, contrairement à ce qu'il soutient, ne constituent à l'évidence pas des mesures de sécurisation générale des bords du lac, dès lors qu'il résulte du procès-verbal de constat qu'elles ne sont mises en oeuvre qu'au seul droit du cabanon litigieux, et à aucun autre endroit du lac. Il s'en déduit, comme le font à juste titre valoir les consorts [Y], que ces installations n'ont aucune utilité objective et procèdent exclusivement d'une volonté de leur nuire. Elle s'analysent en conséquence en un abus du droit de propriété de la part de M. [A], qui justifie qu'il lui soit ordonné de retirer ces installations sous astreinte.

Sur les autres demandes

La demande des appelants tendant à la désignation d'un géomètre sera rejetée, alors qu'il leur appartient de faire leur affaire d'un éventuel bornage.

Il y a lieu d'ordonner que le présent arrêt soit publié au service de la publicité foncière territorialement compétent à la requête de la partie la plus diligente.

M. [A] sera condamné aux entiers dépens de première instance et d'appel, ainsi qu'à payer aux consorts [Y] une somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ces motifs

Statuant contradictoirement, après débats en audience publique,

Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 19 janvier 2023 par le tribunal judiciaire de Lons le Saunier ;

Statuant à nouveau, et ajoutant :

Reçoit l'intervention volontaire de Mme [T] [Y], de M. [B] [Y], de Mme [V] [Y] et de M. [H] [Y] aux côtés de Mme [N] [Y] ;

Dit que les consorts [Y] ont acquis, par le jeu de la prescription acquisitive, le cabanon, le ponton et leur strict terrain d'assiette, sis sur les parcelles cadastrées commune de [Localité 9] (39), section I n° [Cadastre 6] et [Cadastre 7] ;

Ordonne à M. [P] [A] de retirer le grillage implanté en périphérie du ponton précité, ainsi que le panneau implanté dans le lac, au droit de ce ponton, dans le mois de la signification du présent arrêt, sous peine, passé ce délai, d'une astreinte provisoire de 50 euros par jour de retard pendant une durée de 6 mois ;

Rejette la demande de désignation d'un géomètre-expert ;

Ordonne la publication du présent arrêt au service de publicité foncière territorialement compétent, à la requête de la partie la plus diligente ;

Condamne M. [P] [A] aux entiers dépens de première instance et d'appel ,

Condamne M. [P] [A] à payer aux consorts [Y] la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Ledit arrêt a été signé par Michel Wachter, président de chambre, magistrat ayant participé au délibéré et Fabienne Arnoux, greffier.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Besançon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23/00220
Date de la décision : 30/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 12/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-30;23.00220 ?
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