Le copies exécutoires et conformes délivrées à
ASW/LZ
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Minute n°
N° de rôle : N° RG 21/01601 - N° Portalis DBVG-V-B7F-ENMD
COUR D'APPEL DE BESANÇON
1ère chambre civile et commerciale
ARRÊT DU 19 MARS 2024
Décision déférée à la Cour : jugement du 21 mai 2021 - RG N°2019J97 - TRIBUNAL DE COMMERCE DE LONS-LE-SAUNIER
Code affaire : 53I - Cautionnement - Demande en paiement formée contre la caution seule
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ:
M. Michel WACHTER, Président de chambre.
M. Cédric SAUNIER et Mme Anne-Sophie WILLM, Conseillers.
Greffier : Melle Leila ZAIT, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision.
DEBATS :
L'affaire a été examinée en audience publique du 16 janvier 2024 tenue par M. Michel WACHTER, président de chambre, Mmes Florence DOMENEGO et Anne-Sophie WILLM, conseillers et assistés de Melle Leila ZAIT, greffier.
Le rapport oral de l'affaire a été fait à l'audience avant les plaidoiries.
L'affaire oppose :
PARTIES EN CAUSE :
APPELANT
Monsieur [L] [C]
né le [Date naissance 1] 1957 à [Localité 3]
demeurant [Adresse 4]
Représenté par Me Yannick GAY, avocat au barreau de JURA (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/5078 du 30/09/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BESANCON)
ET :
INTIMÉE
CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE CHAMPAGNOLE - MOREZ - LES ROUSSES
RCS de Lons le Saunier n°399 373 240
sise [Adresse 2] / FRANCE
Représentée par Me Adrien MAIROT de la SCP LETONDOR - GOY LETONDOR - MAIROT, avocat au barreau de JURA
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant préalablement été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par M. Michel WACHTER, président de chambre et par Melle Leila ZAIT, greffier lors du prononcé.
*************
EXPOSE DES FAITS, DE LA PROCEDURE ET DES PRETENTIONS
La SAS EVP a souscrit auprès de la Caisse de Crédit Mutuel Champagnole Morez Les Rousses (la CCM) :
- un prêt professionnel n°08735 00020709702 d'un montant de 25 000 euros, au taux de 1,50 % l'an, pour le financement d'un camion et l'aménagement d'une boucherie, remboursable en 60 mensualités,
- un prêt professionnel n°08735 00020709704 d'un montant de 5 000 euros, avec pour objet l'avance de TVA sur achat de véhicule, au taux de 2% l'an, remboursable en 6 mensualités,
- un prêt privilège entreprise n°08735 00020709706 d'un montant de 19 400 euros pour l'achat et l'aménagement d'un véhicule de vente itinérante, au taux de 1 % l'an, remboursable en 60 mensualités.
Le prêt n°08735 00020709702 a été notamment garanti par le cautionnement solidaire de M. [L] [C] à hauteur de 25 000 euros incluant le principal, les intérêts et, le cas échéant, les pénalités ou intérêts de retard.
Le prêt n°08735 00020709706 a été garanti par le cautionnement solidaire de M. [L] [C] dans la limite de 23 280 euros couvrant le principal, les intérêts et le cas échéant les pénalités ou intérêts de retard.
Par lettre recommandée avec avis de réception en date du 17 avril 2019, M. [L] [C] a été mis en demeure d'honorer ses engagements de caution.
Par jugement du 19 juillet 2019, le tribunal de commerce de Lons le Saunier a ouvert une procédure de redressement judiciaire au bénéfice de la société EVP.
La CCM a déclaré ses créances à la procédure.
La liquidation judiciaire de la société EVP a été prononcée le 18 septembre 2019.
-oOo-
Par acte du 16 décembre 2019, la CCM a assigné M. [L] [C] devant le tribunal de commerce de Lons le Saunier aux fins de paiement en sa qualité de caution.
Par jugement rendu le 21 mai 2021, le tribunal de commerce a :
- déclaré la Caisse de Crédit Mutuel de Champagnole Morez Les Rousses recevable et bien fondée en ses demandes,
- dit et jugé que les cautionnements souscrits par M. [L] [C] ne sont atteints d'aucune cause de nullité,
- dit et jugé que les cautionnements souscrits par M. [L] [C] étaient parfaitement proportionnés à ses biens et revenus déclarés,
- dit et jugé que la Caisse de Crédit Mutuel de Champagnole Morez Les Rousses peut se prévaloir des cautionnements souscrits par M. [L] [C],
- dit et jugé que la Caisse de Crédit Mutuel de Champagnole Morez Les Rousses n'a commis aucune faute,
- dit et jugé que la Caisse de Crédit Mutuel de Champagnole Morez Les Rousses n'a pas engagé sa responsabilité,
- débouté M. [L] [C] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,
- condamné M. [L] [C] en sa qualité de caution du contrat de prêt n°08735 00020709702 à payer à la Caisse de Crédit Mutuel de Champagnole Morez Les Rousses la somme de 9 617,40 euros, outre intérêts au taux de 4,50 % à compter du 30 juillet 2019 et ce jusqu'au jour du parfait règlement,
- condamné M. [L] [C] en sa qualité de caution du contrat de prêt n°08735 00020709706 à payer à la Caisse de Crédit Mutuel de Champagnole Morez Les Rousses la somme de 10 501,10 euros, outre intérêts au taux de 4 % à compter du 30 juillet 2019 et ce jusqu'au jour du parfait règlement,
- ordonné la capitalisation des intérêts selon l'article 1343-2 du code civil,
- ordonné l'exécution provisoire de la décision à intervenir malgré voies de recours et sans caution,
- condamné M. [L] [C] à payer à la Caisse de Crédit Mutuel de Champagnole Morez Les Rousses la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. [L] [C] aux entiers dépens de l'instance,
- rejeté toutes autres demandes, fins et conclusions contraires.
Pour statuer ainsi, le tribunal a retenu :
Sur la proportionnalité des cautionnements
- que la disproportion des engagements devait être évaluée en fonction de tous les éléments du patrimoine et pas seulement des revenus de la caution,
- que M. [L] [C] avait complété, lors de chacun de ses engagements de garant, une fiche patrimoniale,
- qu'il avait déclaré disposer de revenus annuels de 30 000 euros et être propriétaire d'une maison d'habitation en pleine propriété d'une valeur estimée de 200 000 euros,
- que le cautionnement limité à 25 000 euros correspondait donc à moins de 10 % de ses capacités financières,
- que s'agissant du cautionnement limité à la somme de 23 280 euros, il avait régularisé une nouvelle fiche patrimoniale précisant que son actif se composait de revenus de l'ordre de 3 000 euros par mois, d'une maison d'habitation évaluée à 250 000 euros ainsi que de différents éléments financiers et mobiliers présentant une valeur résiduelle de 5 000 et 200 000 euros,
- que son actif était donc de 491 000 euros,
- qu'au passif, il ne faisait état que de son précédent engagement de caution de 26 000 euros,
- qu'il présentait dès lors une capacité d'engagement de l'ordre de 465 000 euros de sorte que son cautionnement limité à la somme de 23 280 euros était parfaitement proportionné à ses biens et revenus déclarés ;
Sur la validité des cautionnements
- que M. [L] [C] avait reçu un exemplaire de chacun des prêts garantis de sorte que les dispositions de l'ancien article 1325 avaient été respectées,
- qu'il n'existait donc aucune cause de nullité des cautionnements souscrits ;
Sur l'absence de faute de la banque
- que M. [L] [C] était président de la société EVP depuis le 15 août 2015,
- qu'ayant débuté dans le commerce depuis cette date, il ne pouvait sérieusement prétendre, 4 ans après, qu'il n'avait aucune expérience dans le monde des affaires,
- que la banque n'avait en conséquence pas commis de faute ;
Sur les obligations de M. [C]
- que le débiteur principal, la société EVP, était défaillant,
- que les engagements de caution personnelle et solidaire de M. [L] [C] étaient incontestables vis à vis de la CCM,
- qu'il devait dès lors s'acquitter des sommes dues.
-oOo-
Par acte du 30 août 2021, M. [L] [C] a formé appel de ce jugement en toutes ses dispositions, à l'exception de celle relative à l'exécution provisoire.
Aux termes de ses conclusions transmises le 7 octobre 2021, il demande à la cour :
- de le dire fondé et recevable en son appel,
Statuant à nouveau
- de dire que les engagements de caution dont se prévaut le Crédit Mutuel de Champagnole Morez les Rousses sont nuls,
- de dire que les engagements de caution dont se prévaut le Crédit Mutuel de Champagnole Morez les Rousses sont disproportionnés au sens de l'article L. 332-1 du code de la consommation,
- de dire que le Crédit Mutuel de Champagnole Morez les Rousses ne peut se prévaloir de cautionnements souscrits par lui,
- de dire que le Crédit Mutuel de Champagnole Morez les Rousses lui a fait souscrire, tant en qualité de caution qu'en qualité d'entrepreneur commercial en devenir, des engagements dangereux sans honorer vis-à-vis de celui-ci ses obligations d'information, de conseil et de mise
en garde alors pourtant même qu'il était profane en matière commerciale,
- de dire qu'il a ainsi été poussé à l'échec commercial, a connu la faillite et, encore aujourd'hui, se trouve poursuivi en justice,
En conséquence :
- de condamner le Crédit Mutuel de Champagnole Morez les Rousses à lui payer la somme de 3 000 euros de dommages et intérêts,
- de condamner le Crédit Mutuel de Champagnole Morez les Rousses à lui payer la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- de condamner le Crédit Mutuel de Champagnole Morez les Rousses aux entiers dépens.
-oOo-
Aux termes de ses conclusions transmises le 17 décembre 2021, la CCM demande à la cour :
- de confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de commerce de Lons
le Saunier en date du 21 mai 2021 (RG n°2019100097),
- de débouter M. [L] [C] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,
- de condamner M. [L] [C] en sa qualité de caution du contrat de prêt n°0873500020709702 à lui payer la somme de 9 617,40 euros, outre intérêts au taux de 4,50 % à compter du 30 juillet 2019 et ce jusqu'au jour du parfait règlement,
- de condamner M. [L] [C] en sa qualité de caution du contrat de prêt n°0873500020709706 à lui payer la somme de 10 501,10 euros, outre intérêts au taux de 4 % à compter du 30 juillet 2019 et ce jusqu'au jour du parfait règlement,
- d'ordonner la capitalisation des intérêts selon l'article 1343-2 du code civil.
-oOo-
La clôture a été ordonnée le 19 décembre 2023 et l'affaire a été appelée à l'audience du 16 janvier 2024.
Elle a été mise en délibéré au 19 mars 2024.
Pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, la cour se réfère aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
SUR CE, LA COUR
I. Sur la nullité des engagements de caution
M. [L] [C] conclut à la nullité du contrat de prêt n° 08735 00020709702 en faisant valoir qu'il a été passé par la société EVP alors qu'elle n'était pas encore immatriculée. Il soutient que la société ne disposait donc pas de la personnalité morale pour contracter et ainsi rendre son engagement opposable aux tiers. Il fait valoir que le contrat de prêt se trouve entaché de nullité absolue et que l'acte de cautionnement, qui en est l'accessoire, est de la sorte sans objet.
La CCM s'oppose à la nullité en soutenant qu'au jour de la régularisation du prêt n° 0873500020709702, la société EVP disposait de la personnalité morale. Elle observe que si le contrat n'est pas daté, différents documents attestent qu'il a été édité le 20 août 2015 et qu'il n'a donc pu être régularisé au plus tôt qu'à cette date, précisant que la société EVP a été immatriculée le 11 août 2015, soit avant la régularisation du prêt.
Réponse de la cour :
Selon l'article 1842, alinéa 1, du code civil : 'Les sociétés autres que les sociétés en participation visées au chapitre III jouissent de la personnalité morale à compter de leur immatriculation.'
Par ailleurs, l'article L. 210-6 du code de commerce dispose notamment que 'les sociétés commerciales jouissent de la personnalité morale à dater de leur immatriculation au registre du commerce et des sociétés.'
En l'espèce, il est constaté que le contrat de crédit portant sur les prêts professionnels n°0873500020709702 et n°08735 00020709704 n'est pas daté.
L'acte mentionne que les prêts sont souscrits par la SAS EVP en cours d'immatriculation représentée par M. [L] [C], que chaque partie devra avoir signé le contrat et que celui-ci devra être en possession du prêteur avant le 20 septembre 2015 (page 11).
Le tableau d'amortissement y joint porte comme date d'édition le 20 août 2015 et il est justifié de la transmission à la société EVP et à M. [L] [C] de la proposition de financement et de l'assurance liée aux deux prêts par courriers du 20 août 2015 (pièces CCM N°10 et 12).
Par ailleurs, l'extrait Kbis de la société EVP indique qu'elle a été immatriculée le 11 août 2015.
Compte-tenu de ces éléments, desquels il ressort que la société EVP avait acquis la personnalité morale avant que la proposition de crédit critiquée lui soit adressée, M. [L] [C] sera débouté de sa demande de nullité des engagements de caution et le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.
II. Sur la disproportion des engagements de caution
M. [L] [C] soutient qu'au moment de la signature de ses cautionnements, la CCM n'avait pas tenu compte d'un engagement antérieur de 400 000 euros qu'il avait souscrit à son bénéfice. Il fait en conséquence valoir la disproportion de ses cautionnements à ses biens et revenus déclarés.
La CCM rétorque que les engagements de garant de M. [L] [C] étaient proportionnés, et observe que pour le prêt n° 0873500020709702, il avait fait état d'un actif de l'ordre de 230 000 euros ainsi que d'un cautionnement limité à 4 000 euros. Concernant le prêt n° 0873500020709706, elle indique que M. [C] avait fait mention d'un actif de 491 000 euros et qu'au passif, il avait rappelé son précédent engagement de caution, de sorte qu'il présentait une capacité de l'ordre de 465 000 euros.
Réponse de la cour :
Aux termes des articles L.341-4 et L.332-1 du code de la consommation dans leur rédaction applicable au litige : 'Un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation'.
Il appartient à la caution, qui l'invoque, de démontrer l'existence de la disproportion manifeste de son engagement au moment de sa conclusion, et au créancier d'établir qu'au moment où il appelle la caution, le patrimoine de celle-ci lui permet de faire face à son engagement.
La disproportion au sens de l'article L. 341-4 précité suppose que la caution soit, au jour où elle
contracte l'engagement, dans l'impossibilité manifeste d'y faire face et doit être appréciée en prenant en considération son endettement global à la date de son engagement.
Si la disproportion d'un cautionnement doit être évaluée en prenant en considération l'endettement global de la caution, y compris celui résultant d'engagements de caution antérieurs ou concomitants, ces engagements eussent-ils eux-mêmes été déclarés disproportionnés, il n'est en revanche pas tenu compte des engagements postérieurs, fussent-ils conclus dans le cadre d'une même opération.
En outre et sauf anomalies apparentes, il n'incombe pas au créancier de procéder à la vérification des informations fournies dans le cadre d'une fiche de renseignements patrimoniale, la caution étant tenue de la compléter de bonne foi.
En l'espèce, il est rappelé que M. [L] [C] a successivement souscrit deux engagements de caution, savoir :
- le 20 août 2015, pour un montant de 25 000 euros incluant le principal, les intérêts et, le cas échéant, les pénalités ou intérêts de retard,
- le 7 juillet 2016, pour un montant de 23 280 euros couvrant le principal, les intérêts et le cas échéant les pénalités ou intérêts de retard.
Sur le cautionnement de 25 000 euros
S'agissant du premier cautionnement, il ressort de la fiche patrimoniale signée par M. [L] [C] le 20 août 2015 en perspective du prêt, que celui-ci avait déclaré 30 000 euros de revenus annuels, outre 2 maisons d'habitation estimées à une valeur globale de 200 000 euros. Au titre des charges, il n'avait fait état d'aucun emprunt, mais d'un cautionnement antérieur de 400 000 euros. A cet égard, il sera observé que, contrairement à ce que soutient la CCM, ce cautionnement a bien été porté dans la fiche de renseignement pour un montant de 400 k€, soit 400 000 euros, et non pour un montant de seulement 4 000 euros.
Il ressort de la fiche patrimoniale signée par M. [L] [C] le 20 août 2015 en perspective du prêt, que celui-ci avait déclaré 30 000 euros de revenus annuels, outre deux maisons d'habitation estimées à 200 000 euros.
Au titre des charges, il n'avait fait état d'aucun emprunt, mais d'un cautionnement antérieur de 400 000 euros consenti au profit de la CCM elle-même en garantie d'un prêt octroyé par celle-ci au GAEC de la Garrigue. A cet égard, il sera observé que, contrairement à ce qu'indique la CCM dans ses écritures, ce cautionnement a bien été porté dans la fiche de renseignement pour un montant de 400 k€, soit 400 000 euros, et non pour un montant de seulement 4 000 euros.
Les éléments ainsi portés à la connaissance de la CCM par M. [L] [C] montrent que celui-ci était dans l'impossibilité manifeste de faire face à un engagement de 25 000 euros avec ses biens et revenus.
Il sera relevé que la CCM, à laquelle incombe la charge de la preuve de l'éventuelle capacité de la caution à faire face à son engagement à la date à laquelle elle est appelée, ne fait rien valoir à ce sujet, et ne produit en tout état de cause aucun élément de nature à l'établir.
Le jugement entrepris sera en conséquence infirmé en ce qu'il a dit que le cautionnement souscrit par M. [C] à hauteur de 25 000 euros au titre du prêt n°0873500020709702 était proportionné.
Sur le cautionnement de 23 280 euros
La fiche patrimoniale que M. [L] [C] a renseignée fait état de revenus mensuels de 3 000 euros, soit 36 000 euros par an, outre deux maisons d'habitation estimées à 250 000 euros et un patrimoine financier et mobilier d'un montant total de 300 000 euros.
Au titre des charges, M. [C] n'a fait état que du cautionnement antérieur de 25 000 euros et d'un passif résiduel de 95 000 euros.
Au regard de ces éléments, et même à prendre en compte l'engagement antérieur de 400 000 euros, que la CCM, qui en était bénéficiaire, ne pouvait ignorer, l'engagement de caution de M. [L] [C], limité à la somme de 23 280 euros, ne peut en conséquence être considéré comme manifestement disproportionné, et le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.
III. Sur la demande de dommages et intérêts
A titre liminaire, il sera constaté que, dans les motifs de ses dernières écritures, M. [L] [C] soutient que la CCM ne s'est pas acquittée de l'obligation d'information annuelle de la caution et qu'elle ne l'a pas non plus informé de la défaillance de la SAS EVP dès le premier incident de paiement non régularisé, ce dont il tire la conclusion que la banque doit être déchue de son droit aux intérêts. Or, dans le dispositif de ces mêmes écritures, qui seules saisissent la cour, il ne formule aucune demande de déchéance du droit aux intérêts, de sorte que la cour n'est saisie d'aucune prétention en ce sens par application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile.
M. [L] [C] fait par ailleurs valoir que la CCM ne lui a jamais remis de copie du prêt n°0873500020709702 au moment de sa conclusion, et qu'elle a manqué à l'obligation d'information, de conseil et de mise en garde, en indiquant qu'il a été poussé à l'échec commercial et qu'il a connu la faillite. Il formule en conséquence une demande de dommages et intérêts.
La CCM souligne que M. [L] [C] a reçu un exemplaire de chacun des prêts garantis, et renvoie sur ce point aux mentions portées sur les actes. Elle indique par ailleurs que la défaillance de l'emprunteur principal est intervenue pour les deux contrats de prêt au mois de décembre 2018 et qu'elle a mis M. [L] [C] en demeure d'honorer ses engagements le 17 avril 2019.
Réponse de la cour :
En application de l'article 1147 du code civil dans sa rédaction applicable au litige : 'Le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.'
La banque est tenue à un devoir de mise en garde s'il apparaît, en considération de la situation financière et patrimoniale personnelle de la caution non avertie et de l'importance de l'engagement souscrit, que son engagement n'est pas adapté à ses facultés financières.
En l'espèce, il est constaté que contrairement à ce qu'il affirme, M. [L] [C], en sa qualité de caution, a reçu un exemplaire de l'acte de prêt n°0873500020709702 ainsi qu'il est mentionné en page 5 du contrat paraphé par lui, sous le titre 'Remise d'un exemplaire de l'acte'.
Par ailleurs, M. [L] [C] ne démontre par aucune pièce l'existence d'un lien entre la disproportion de son engagement de caution d'août 2015 et le préjudice qu'il invoque dans le dispositif de ses conclusions au titre de l'échec commercial et la faillite de la société EVP dont le redressement judiciaire a été prononcé quatre années plus tard et trois années après son second engagement de caution du 7 juillet 2016 qui a été proportionné à sa situation financière.
Le jugement entrepris sera en conséquence confirmé en ce qu'il a débouté M. [L] [C] de sa demande sur ce point.
IV. Sur les sommes dues par M. [L] [C]
Le cautionnement souscrit au titre du prêt n°0873500020709702 étant disproportionné, la CCM ne peut s'en prévaloir.
Le jugement entrepris sera en conséquence infirmé en ce qu'il a condamné M. [L] [C] à payer à la Caisse de Crédit Mutuel de Champagnole-Morez-Les Rousses la somme de 9 617,40 euros, outre intérêts au taux de 4,50 % à compter du 30 juillet 2019 et ce jusqu'au jour du parfait règlement.
S'agissant des sommes dues en vertu du prêt n°08735 00020709706, leur caractère exigible n'est pas contestable dès lors que la déchéance du terme a été prononcée et qu'au surplus la liquidation judiciaire de la société empruntrice a été prononcée.
M. [L] [C] est en conséquence tenu au paiement du solde de ce prêt en sa qualité de caution et il ressort des décomptes produits, du tableau d'amortissement du contrat de prêt ainsi que de la déclaration de créance effectuée lors de l'ouverture du redressement judiciaire de la société EVP, qu'à cette date le capital restant dû s'établissait à 10 501,10 euros, outre les intérêts au taux contractuel de 4 %.
Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a condamné M. [L] [C] au paiement de cette somme, outre intérêts au taux de 4 % à compter du 30 juillet 2019, et en ce qu'il a ordonné la capitalisation des intérêts selon l'article 1343-2 du code civil.
V. Sur les dépens et sur l'article 700 du code de procédure civile
Le jugement sera confirmé sur les dépens et sur les frais irrépétibles.
La CCM sera condamnée aux dépens d'appel.
Les demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile seront rejetées.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,
INFIRME, dans les limites de l'appel, le jugement rendu par le tribunal de commerce de Lons le Saunier le 21 mai 2021 en ce qu'il a condamné M. [L] [C] à payer à la Caisse de Crédit Mutuel Champagnole Morez Les Rousses, en sa qualité de caution du contrat de prêt n°0873500020709702, à lui payer la somme de 9 617,40 euros, outre intérêts au taux de 4,50 % à compter du 30 juillet 2019 et ce jusqu'au jour du parfait règlement ;
LE CONFIRME pour le surplus ;
STATUANT A NOUVEAU ET Y AJOUTANT
DEBOUTE la Caisse de Crédit Mutuel Champagnole Morez Les Rousses de sa demande de condamnation de M. [L] [C], en sa qualité de caution du contrat de prêt n°0873500020709702, à lui payer la somme de 9 617,40 euros, outre intérêts au taux de 4,50 % à compter du 30 juillet 2019 et ce jusqu'au jour du parfait règlement ;
CONDAMNE la Caisse de Crédit Mutuel Champagnole Morez Les Rousses aux dépens d'appel ;
REJETTE les demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Le greffier, Le président,