ARRÊT N°
MW/FA
COUR D'APPEL DE BESANÇON
- 172 501 116 00013 -
ARRÊT DU 16 MAI 2023
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE
Contradictoire
Audience publique du 14 mars 2023
N° de rôle : N° RG 21/01060 - N° Portalis DBVG-V-B7F-EMKI
S/appel d'une décision du TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE LONS-LE-SAUNIER en date du 14 décembre 2020 [RG N° 19/00526]
Code affaire : 57B Demande en réparation des dommages causés par un intermédiaire
[X] [E] C/ [U] [N]
PARTIES EN CAUSE :
Monsieur [X] [E]
né le 03 Mai 1959 à POLIGNY (39800)
de nationalité française, demeurant [Adresse 1]
Représenté par Me Nicolas MOREL de l'AARPI AFM AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de JURA
APPELANT
ET :
Monsieur [U] [N]
de nationalité française, demeurant [Adresse 2]
Représenté par Me Jean-Marie LETONDOR de la SCP LETONDOR - GOY LETONDOR MAIROT, avocat au barreau de JURA
INTIMÉ
COMPOSITION DE LA COUR :
Lors des débats :
PRÉSIDENT : Monsieur Michel WACHTER, Président de chambre.
ASSESSEURS : Messieurs Jean-François LEVEQUE et Cédric SAUNIER, Conseillers.
GREFFIER : Madame Fabienne ARNOUX, Greffier.
Lors du délibéré :
PRÉSIDENT : Monsieur Michel WACHTER, Président de chambre, magistrat rédacteur.
ASSESSEURS : Messieurs Jean-François LEVEQUE et Cédric SAUNIER, conseillers.
L'affaire, plaidée à l'audience du 14 mars 2023 a été mise en délibéré au 16 mai 2023. Les parties ont été avisées qu'à cette date l'arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe.
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Souhaitant effectuer un placement financier, M. [X] [E] a, le 8 février 2013, conclu avec M. [U] [N], exerçant une activité de courtier en assurance sous l'enseigne Estassur Courtage, un mandat de recherche de produits d'art et de collection.
Le même jour, et par l'entremise de M. [N], M. [E] a acquis de la société Aristophil, dont l'activité consistait à vendre des parts dans des documents de valeur, six parts indivises dans l'oeuvre 'Les grandes heures du génie humain, chapitre III' pour un montant de 9 000 euros HT. M. [E] a parallèlement conclu avec la société Aristophil un contrat de garde et de conservation aux termes duquel cette société restait en possession de l'oeuvre, et stipulant une promesse de vente par laquelle l'indivisaire promettait unilatéralement de vendre à la société Aristophil la collection dont il était propriétaire, la levée éventuelle de l'option par cette société devant se faire à un prix qui ne pouvait être inférieur au prix d'achat majoré de 8 % par an.
Une information judiciaire a par la suite été ouverte à l'encontre des dirigeants de la société Aristophil pour blanchiment, abus de biens sociaux, présentation de comptes infidèles, abus de confiance et pratiques commerciales trompeuses en bande organisée.
La société Aristophil a alors été placée en redressement judiciaire, puis, par jugement du tribunal de commerce de Paris du 5 août 2015, en liquidation judiciaire.
Par exploit du 9 mai 2019, faisant valoir qu'il était dans l'impossibilité de recouvrer le montant de son placement, et faisant grief à M. [N] d'un manquement à ses obligations de conseil et de mise en garde, M. [E] l'a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Lons le Saunier en paiement de 9 720 euros en indemnisation de son préjudice financier, et de 2 000 euros en réparation de son préjudice moral.
M. [N] a soulevé l'irrecevabilité des demandes formées à son encontre faute pour le demandeur de disposer d'un intérêt actuel à agir, subsidiairement a conclu au débouté en contestant la commission d'une faute.
Par jugement du 14 décembre 2020, le tribunal judiciaire a :
- déclaré les demande de [X] [E] recevables ;
- débouté [X] [E] de l'ensemble de ses demandes ;
- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- dit que chaque partie supportera ses dépens ;
- rejeté toutes les autres demandes plus amples ou contraires formées par les parties.
Pour statuer ainsi, le tribunal a retenu :
- que M. [E] justifiait d'un intérêt à agir, sans qu'il soit nécessaire à ce stade de déterminer si sa demande était fondée eu égard à la demande de revendication des livres pendante auprès du liquidateur de la société Aristophil, et peu important qu'il soit propriétaire des ouvrages acquis en indivision ;
- qu'à la lecture du mandat de recherche formalisant la prestation de M. [N] et du contrat conclu entre M. [E] et la société Aristophil, il ressortait que le défendeur n'était pas intervenu en qualité de prestataire de services d'investissement au sens de l'article L.541-1 du code monétaire et financier, comme le soutenait le demandeur, les objets d'art n'entrant pas dans la catégorie des instruments financiers tels qu'énumérés à l'article L.211-1 dudit code, et qu'il n'était pas plus intervenu comme intermédiaire en biens divers au sens de l'article L.550-1 du même code, dès lors que les contrats signés avaient pour objet la garde et la conservation, lesquelles ne pouvaient être assimilées à un acte de gestion ;
- qu'en réalité M. [N] avait agi auprès de M. [E] en qualité de conseil en gestion de patrimoine, et qu'il était tenu en cette qualité à une obligation d'information et de conseil, et non à une obligation de mise en garde, en l'absence d'élément spéculatif ;
- qu'il devait, au vu des connaissances alors disponibles et avec les moyens qui étaient les siens, s'assurer que les valeurs sur lesquelles reposaient ces investissements n'étaient pas fictives ou exagérées ; que si, jusqu'en 2012, la société Aristophil avait bonne presse, et que rien ne permettait encore de suspecter la surévaluation des oeuvres qu'elle faisait, tel n'était plus le cas en 2013, comme en attestait un article du journal 'Libération' en date du 1er février 2013, qui émettait des critiques sur ce type de placement, ainsi qu'une publication de l'autorité des marchés financiers de décembre 2012 appelant les épargnants à la vigilance ; que M. [N] se devait de donner cette information à son client, ce qu'il n'avait pas fait, manquant ainsi à son obligation contractuelle ;
- que, toutefois, il incombait encore à M. [E] d'établir l'existence d'un préjudice ainsi que d'un lien de causalité avec la faute ; que le préjudice de M. [E] était susceptible de découler de la perte subie lors de la revente de ses parts indivises dans les biens et valeurs de la société Aristophil ; que, tant que cette vente n'était pas intervenue, l'existence d'un préjudice financier n'était pas certaine ; que le préjudice moral invoqué par ailleurs n'était pas caractérisé.
M. [E] a relevé appel de cette décision le 15 juin 2021.
Par conclusions transmises le 13 septembre 2021, il demande à la cour :
Vu, dans leur rédaction en vigueur à la date de conclusion du contrat litigieux, soit le 8 février
2013,
- les articles 1147 et 1984 et suivants du code civil,
- les articles L. 541-1, L. 541-8-1, L. 531-2 du code monétaire et financier,
- l'article L. 112-2 du code de la consommation,
- l'article 700 du code de procédure civile,
- de déclarer l'appel de M. [X] [E] recevable et bien fondé ;
- de réformer la décision entreprise en ce qu'elle a débouté M. [X] [E] de l'ensemble de ses demandes ;
Et statuant à nouveau :
- de dire et juger que M. [U] [N] a commis une faute contractuelle consistant en un manquement à son devoir d'information, de conseil et de mise en garde de nature à engager sa responsabilité ;
- de déclarer M. [U] [N] responsable des préjudices subis par M. [E] ;
- de condamner M. [U] [N] à indemniser moral (sic) de M. [E] à hauteur de 2 000 euros ;
- de condamner M. [U] [N] à indemniser le préjudice financier de M. [E] à hauteur de 9 720 euros ;
- subsidiairement, de le condamner à indemniser ce même préjudice financier à hauteur de 8 262 euros ;
- d'enjoindre M. [U] [N] à déclarer le sinistre auprès de son assureur ;
- de condamner M. [U] [N] à verser à M. [X] [E] la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- de condamner M. [U] [N] aux entiers frais et dépens.
Par conclusions notifiées le 29 novembre 2021, M. [N] demande à la cour :
Vu les articles 31 et 122 du code de procédure civile,
Vu l'ancien article 1147 du code civil applicable à la cause,
- d'infirmer le jugement déféré ce qu'il a déclaré les demandes M. [X] [E] recevables ;
Si par impossible la cour devait déclarer les demandes de M. [X] [E] recevables,
- de confirmer le jugement déféré ce qu'il a débouté de (sic) M. [X] [E] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;
En toutes hypothèses,
- de condamner M. [X] [E] à payer à M. [U] [N] la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- de condamner M. [X] [E] aux entiers dépens de l'instance, avec possibilité pour Maître [J] [H] de faire application de l'article 699 du code de procédure civile.
La clôture de la procédure a été prononcée le 21 février 2023.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer pour l'exposé des moyens des parties à leurs conclusions récapitulatives visées ci-dessus.
Sur ce, la cour,
Sur la recevabilité de l'action de M. [E]
Si l'intimé sollicite l'infirmation du jugement déféré en ce qu'il a déclaré les demandes de M. [E] recevables, il ne saisit cependant pas la cour d'une quelconque demande sur le sort à réserver aux prétentions de l'intéressé en cas d'infirmation.
En tout état de cause, le premier juge a à bon droit retenu que la détermination de l'intérêt à agir n'était pas subordonnée à l'appréciation préalable du bien-fondé du préjudice allégué.
La décision sera donc confirmée sur ce point.
Sur la faute de M. [N]
C'est à juste titre qu'au regard des spécificités du placement proposé, le tribunal a retenu que M. [N] était intervenu à l'opération en qualité de conseil en gestion de patrimoine, tenu à ce titre d'une obligation d'information et de conseil, et non d'une obligation de mise en garde.
Pour contester tout manquement à l'obligation de conseil, l'intimé soutient qu'il ne disposait, à la date de conclusion de l'opération litigieuse, d'aucun élément lui permettant de mettre en doute le sérieux de la société Aristophil, exposant que les contrats proposés par cette dernière étaient vantés par la société d'assurances AXA dans le cadre de son service de gestion des grosses fortunes, qu'ils étaient bien cotés par la Banque de France, et qu'il avait antérieurement proposé ces mêmes produits à d'autres particuliers, dont notamment des membres de sa propre famille, qui en avaient été parfaitement satisfaits.
Il sera rappelé que le placement litigieux a été souscrit le 8 février 2013.
La plaquette de promotion du Cercle Vaupalière, émanation de la compagnie AXA à destination de clients privilégiés, dont se prévaut M. [N], porte en référence une mention 'Réf : 962965 - 06-2011" qui, faute de tout autre élément de datation, tend à établir qu'elle a été éditée en juin 2011, soit près de deux années avant cette souscription.
La cotation par la Banque de France de la société Aristophil en catégorie C3, caractérisant une capacité 'forte' de la société à honorer ses engagements financiers à un horizon de trois ans, est elle-aussi datée du 1er juin 2011. S'il est fait état dans les écritures de M. [N] d'un maintien de cette cotation en septembre 2014, force est de constater qu'il n'en est pas justifié autrement que par les énonciations des motifs d'un arrêt de la cour d'appel de Paris du 1er avril 2019, invérifiables en l'absence de production de tout autre élément.
Il en résulte que les pièces objectives sur lesquelles l'intimé appuie son argumentation quant au sérieux de la société Aristophil étaient manifestement obsolètes au moment où il a proposé le placement à M. [E], compte tenu de leur ancienneté. Or, tout conseil en gestion de patrimoine se doit de pouvoir fournir aux investisseurs recourant à ses services une information et un conseil actualisés, ce qui lui impose de maintenir constamment à jour ses propres connaissances relatives à la pertinence et au rendement des produits qu'il propose.
A cet égard, M. [E] produit un communiqué de presse en date du 12 décembre 2012, donc antérieur de deux mois à la souscription du contrat litigieux, par lequel l'Autorité des Marchés Financiers 'appelle les épargnants à la plus grande vigilance en matière de placements atypiques proposés au public', et 'met en garde' sur les placements proposés 'dans des secteurs aussi divers que les lettres et manuscrits, les oeuvres d'art (...)', rappelle que ces secteurs n'étaient pas soumis à la règlementation protectrice des instruments financiers, qu'elle constatait dans ces secteurs, corrélativement à la faiblesse contemporaine des taux d'intérêts, un développement d'offres aux rendements flatteurs, que tout produit affichant un rendement supérieur au taux monétaire compportait a priori un risque sensible, et invite à la prise d'informations solides.
Si certes ce communiqué ne mentionne pas le nom de la société Aristophil, ni d'aucune autre d'ailleurs, il n'en demeure pas moins qu'il vise expressément le domaine d'activité très spécifique dans lequel cette société intervenait, ce qui aurait dû amener M. [N], auquel cette mise en garde n'aurait pas dû échapper eu égard à son activité de conseil en gestion de patrimoine, et qui proposait à M. [E] un placement de ce type, à répercuter à cet épargnant l'information relative au risque particulier soulevé par l'AMF, qui était nécessairement de nature à influer sur sa prise de décision.
Dès lors qu'il n'est ni soutenu, ni a fortiori démontré qu'il ait porté cet élément à la connaissance de M. [E], M. [N] a indubitablement manqué à son obligation d'information et de conseil.
Cela est au demeurant d'autant moins contestable qu'il ressort des pièces versées par M. [E] que les investisements proposés par la société Aristophil, laquelle était cette fois nommément désignée, avaient déjà été antérieurement mis en cause dans un article publié dans la revue Que Choisir dès le mois de mars 2011, et l'avaient à nouveau été, de manière détaillée, dans un autre article de presse, publié dans le journal national 'Libération' le 1er février 2013, soit quelques jours avant la souscription du contrat litigieux. Indépendamment de leur bien-fondé, l'existence de ces mises en cause réitérées de la société Aristophil ne pouvait à l'évidence être ignorée dans le milieu des investisseurs proposant les placements de cette société, ce qui les obligeait envers les épargnants investisseurs profanes, comme l'était M. [E], à la délivrance d'une information et d'un conseil spécifique à cet égard.
Le fait que M. [N] ait pu proposer le même placement à d'autres investisseurs, fussent-ils des membres de sa famille, est sans emport sur la méconnaissance de l'obligation d'information et de conseil dont il était tenu à l'égard de M. [E].
Le premier juge sera donc approuvé en ce qu'il a retenu la commission d'une faute par M. [N].
Sur le préjudice
C'est également à juste titre que le tribunal a considéré qu'en l'état le préjudice financier invoqué par M. [E], à savoir la perte de son investissement et du rendement promis, n'était qu'hypothétique.
En effet, l'appelant reste à ce jour propriétaire des parts indivises du bien objet du placement, et une éventuelle perte du montant investi ne pourra être établie de manière certaine et objective qu'en cas de vente de ce bien, par différence entre le prix de vente et le montant de l'investissement.
C'est vainement que M. [E] base subsidiairement ses calculs sur des moyennes issues des ventes d'autres oeuvres d'ores et déjà intervenues, alors que rien ne permet de tirer de celles-ci des conséquences nécessaires sur la réalité et le cas échéant sur l'ampleur de la perte qui sera éventuellement subie en l'espèce, compte tenu du caractère fluctuant du marché spécifique concerné, ou encore de l'intérêt très variable pouvant être suscité auprès des acquéreurs potentiels en fonction des auteurs des oeuvres concernées ou des sujets qu'elles abordent. Il ne peut par ailleurs être tiré aucun préjudice certain de la perte alléguée de rendement, alors qu'il résulte à la lecture du contrat que le rendement évoqué n'était acquis à l'investisseur que dans le cas où, en cas de revente, la société Aristophil levait l'option d'achat stipulée à son profit.
Le fait pour M. [E] d'avoir investi auprès de la société Aristophil sans avoir été utilement informé des circonstances qui auraient pu l'amener à renoncer au placement proposé, et d'avoir dû faire très rapidement le constat de la déconfiture de cette société a nécessairement causé à M. [E] un préjudice moral, du fait de l'incertitude dans laquelle il se trouve du sort que sera celui de son investissement, et du sentiment d'avoir été abusé, qui génère nécessairement un sentiment de culpabilité et de honte. Ce préjudice sera indemnisé par l'allocation d'une somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts, que l'intimé sera condamné à payer à l'appelant.
Le jugement sera infirmé en ce sens.
Sur les autres dispositions
En l'absence de tout élément quant à l'assureur de M. [N] et aux éventuelles conditions de sa garantie, il ne sera pas fait droit à la demande de l'appelant tendant à ce qu'il lui soit fait injonction de procéder à une déclaration de sinistre. La confirmation s'impose sur ce point.
La décision entreprise sera infirmée s'agissant des dépens.
M. [N] sera condamné aux entiers dépens de première instance et d'appel, ainsi qu'à payer à M. [E] la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ces motifs
Statuant contradictoirement, après débats en audience publique,
Confirme le jugement rendu le 14 décembre 2020 par le tribunal judiciaire de Lons le Saunier en ce qu'il a déclaré recevables les demandes de M. [X] [E], rejeté la demande de M. [X] [E] en indemnisation d'un préjudice financier, rejeté la demande de M. [X] [E] tendant à ce qu'il soit fait injonction à M. [U] [N] de déclarer un sinistre à son assureur, ainsi qu'en sa disposition relative aux frais irrépétibles :
Infirme le jugement déféré pour le sruplus ;
Statuant à nouveau des chefs infirmés, et ajoutant :
Condamne M. [U] [N] à payer à M. [X] [E] la somme de 2 000 euros en réparation de son préjudice moral ;
Condamne M. [U] [N] à payer à M. [X] [E] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. [U] [N] aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Ledit arrêt a été signé par Michel Wachter, président de chambre, magistrat ayant participé au délibéré et Leila Zait, greffier.
Le greffier, Le président,