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02/05/2023 | FRANCE | N°21/01656

France | France, Cour d'appel de Besançon, 1ère chambre, 02 mai 2023, 21/01656


ARRÊT N°



BM/LZ



COUR D'APPEL DE BESANÇON

- 172 501 116 00013 -



ARRÊT DU 02 MAI 2023



PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE









Audience publique du 28 février 2023

N° de rôle : N° RG 21/01656 - N° Portalis DBVG-V-B7F-ENP7



S/appel d'une décision du Tribunal de Commerce de Belfort en date du 06 juillet 2021 [RG N° R.19-3358]

Code affaire : 53I - Cautionnement - Demande en paiement formée contre la caution seule





[F] [Z], [G] [H]

C/ CAISSE DE CREDIT MUTUEL VALDOIE GIROMAGNY





PARTIES EN CAUSE :





Monsieur [F] [Z]

né le [Date naissance 4] 1970 à [Localité 5] (ALGERIE)

demeurant [Adresse 1]



Représenté p...

ARRÊT N°

BM/LZ

COUR D'APPEL DE BESANÇON

- 172 501 116 00013 -

ARRÊT DU 02 MAI 2023

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

Audience publique du 28 février 2023

N° de rôle : N° RG 21/01656 - N° Portalis DBVG-V-B7F-ENP7

S/appel d'une décision du Tribunal de Commerce de Belfort en date du 06 juillet 2021 [RG N° R.19-3358]

Code affaire : 53I - Cautionnement - Demande en paiement formée contre la caution seule

[F] [Z], [G] [H] C/ CAISSE DE CREDIT MUTUEL VALDOIE GIROMAGNY

PARTIES EN CAUSE :

Monsieur [F] [Z]

né le [Date naissance 4] 1970 à [Localité 5] (ALGERIE)

demeurant [Adresse 1]

Représenté par Me Jean-Sébastien GAROT de la SCP D'AVOCAT GAROT, avocat au barreau de BELFORT

Représenté par Me Ludovic PAUTHIER de la SCP DUMONT - PAUTHIER, avocat au barreau de BESANCON

Madame [G] [H]

née le [Date naissance 2] 1971 à [Localité 6]

demeurant [Adresse 1]

Représentée par Me Jean-Sébastien GAROT de la SCP D'AVOCAT GAROT, avocat au barreau de BELFORT

Représentée par Me Ludovic PAUTHIER de la SCP DUMONT - PAUTHIER, avocat au barreau de BESANCON

APPELANTS

ET :

CAISSE DE CREDIT MUTUEL VALDOIE GIROMAGNY

RCS de BELFORT sous le n°778 725 093

Sise [Adresse 3]

Représentée par Me Caroline LEROUX, avocat au barreau de BESANCON

INTIMÉE

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats :

PRÉSIDENT : Monsieur Michel WACHTER, Président de chambre.

ASSESSEURS : Madame Bénédicte MANTEAUX et Monsieur Cédric SAUNIER, Conseillers.

GREFFIER : Madame Leila Zait, Greffier

Lors du délibéré :

PRÉSIDENT : Monsieur Michel WACHTER, Président de chambre

ASSESSEURS : Madame Bénédicte MANTEAUX et Monsieur Cédric SAUNIER, Conseillers.

L'affaire, plaidée à l'audience du 28 février 2023 a été mise en délibéré au 02 mai 2023. Les parties ont été avisées qu'à cette date l'arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe.

**************

Exposé des faits et de la procédure

Madame [G] [H] et Monsieur [F] [Z], en leur qualité de représentants légaux de la SARL Iris, se sont portés solidairement cautions dans la limite de 66 000 euros d'une autorisation de découvert à durée indéterminée accordée en date du 26 septembre 2014 par la société coopérative de crédit Caisse de Crédit Mutuel Valdoie Giromagny (la banque) à la SARL Iris. Cette même société bénéficiait d'un prêt professionnel dont les échéances de remboursement étaient prélevées sur le compte courant cautionné par Mme [H] et M. [Z] et qui a été entièrement remboursé par la société emprunteuse en janvier 2016.

La SARL Iris ayant été déclarée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Besançon en date du 27 mars 2019, le compte courant cautionné a été clôturé.

La banque a mis en demeure Mme [H] et M. [Z] de lui régler la somme de 23 408,62 euros due par la SARL Iris au titre du compte courant par lettre recommandée avec accusé de réception du 15 mai 2019 ; elle a régulièrement, le 20 mai 2019, déclaré sa créance entre les mains du liquidateur judiciaire.

Saisi par assignation délivrée par la banque en date du 15 juillet 2019 en vue de condamner les cautions à lui verser la somme de 23 408,62 euros au titre du solde débiteur du compter courant de la SARL Iris au 16 mai 2016, le tribunal de commerce de Belfort a, par jugement rendu le 6 juillet 2021 :

- « rejeté la demande de Mme [H] et M. [Z] tendant au débouté de la banque de ses demandes » (sic),

- condamné solidairement Mme [H] et M. [Z] à payer à la banque la somme de 23 408,62 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 15 mai 2019 et ce, jusqu'au complet paiement,

- condamné solidairement Mme [H] et M. [Z] à payer à la banque la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et l'a déboutée du surplus de sa demande,

- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement,

- condamné solidairement Mme [H] et M. [Z] à supporter les dépens de la présente instance, dont les frais de greffe s'élèvent à la somme de 94,34 euros,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes.

Pour parvenir à cette décision, le premier juge a considéré :

- qu'en soutenant que la SARL Iris a trop versé à la banque la somme de 14 056 euros correspondant aux intérêts du prêt professionnel calculés de façon erronée par rapport aux stipulations contractuelles indûment prélevés sur le compte courant cautionné, et que ce montant de 14 056 euros doit venir en diminution du solde débiteur du compte courant, Mme [H] et M. [Z] soulèvent une exception inhérente à la dette qui est soumise à la prescription quinquennale,

- que le prêt professionnel consenti à la SARL Iris ayant été entièrement remboursé en janvier 2016, le délai de prescription qui aurait été opposable à l'emprunteur principal l'est également aux cautions,

- qu'en tout état de cause, le contrat d'échange de taux d'intérêts (swap) justifiant le trop versé allégué n'est pas prouvé, comme ne l'est pas le montant de 14 056 euros.

Par déclaration parvenue au greffe le 8 septembre 2021, Mme [H] et M. [Z] ont régulièrement interjeté appel de ce jugement.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 février 2023 et l'affaire a été appelée à l'audience du 28 février 2023 et mise en délibéré au 2 mai 2023.

Exposé des prétentions et moyens des parties

Selon conclusions transmises le 31 janvier 2023, Mme [H] et M. [Z] demandent à la cour d'infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et de :

- débouter la banque de l'ensemble de ses demandes ;

- la condamner à lui payer une indemnité de 3 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- la condamner aux entiers dépens.

Ils font valoir que :

- la SARL Iris a trop versé à la banque la somme de 14 056 euros au titre du remboursement de son prêt professionnel, la banque ayant omis de répercuter sur le montant des trimestrialités de remboursement prélevées sur le compte courant la baisse du taux variable d'intérêts du prêt qui était indexé sur l'Euribor à trois mois, taux qui a considérablement baissé entre les années 2009 et 2016 ;

- le solde débiteur du compte courant étant de 11 984,83 euros à la date la plus proche de la liquidation judiciaire de la SARL Iris, le solde n'est plus débiteur après réintégration du trop perçu de 14 056 euros au titre des intérêts, sans même réintégrer les commissions d'intervention, frais ou intérêts appliqués par la banque à raison du solde considéré indûment comme débiteur ;

- d'autres irrégularités de prélèvement existent qui sont incompréhensibles :

- en leur qualité de cautions, ils peuvent opposer les contestations qu'aurait pu opposer le débiteur principal et le délai de prescription quinquennal n'était pas acquis au motif de la liquidation judiciaire prononcée le 27 mars 2019 pour un prêt à terme en 2016.

La banque a répliqué en dernier lieu par conclusions transmises le 10 février 2022 pour demander à la cour de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et condamner solidairement les appelants à lui verser la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Elle fait valoir que :

- Mme [H] et M. [Z] ne prouvent pas l'erreur qu'ils allèguent sur l'application d'un taux d'intérêt inexact sur le prêt professionnel ni l'existence d'un trop perçu en sa faveur ;

- les appelants sont poursuivis en qualité de cautions de la SARL Iris pour le compte courant et non pour le remboursement du prêt professionnel, qui a par ailleurs été entièrement remboursé par la SARL Iris comme le reconnaissent les cautions ; or, si la caution solidaire peut opposer au créancier les exceptions inhérentes à la dette, encore faut-il que cette exception concerne la dette cautionnée, ce qui n'est pas le cas d'espèce ; le fait que le remboursement du prêt ait transité par le compte litigieux ne permet pas d'intégrer le remboursement du prêt dans la dette cautionnée ;

- ces contestations des intérêts sont prescrites puisque le délai de cinq ans a commencé à courir à compter de la réception des relevés de compte dont ils ont bien été destinataires puisque ce sont

eux qui les versent aux débats.

Pour l'exposé complet des moyens des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

Motifs de la décision

L'article 2313 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance n°2006-346 du 23 mars 2006 encore applicable à la situation soumise à la cour, dispose que la caution peut opposer au créancier toutes les exceptions qui appartiennent au débiteur principal et qui sont inhérentes à la dette.

La caution peut donc opposer au créancier garanti toutes les exception qui affectent l'existence de la dette, sa validité, son étendue ou ses modalités (prescription, nullité, novation, paiement, confusion, compensation, résolution, caducité).

S'agissant d'un compte courant débiteur, la caution est en droit d'en contester le solde à raison de prélèvements irréguliers.

En l'espèce, les cautions ont donc qualité à agir pour contester le montant des prélèvements trimestriels permettant le remboursement du prêt professionnel opérés sur le compte courant objet du cautionnement quand bien même elles ne seraient pas actionnées comme cautions du dit prêt professionnel.

Selon l'article 71 du code de procédure civile, « constitue une défense au fond tout moyen qui tend à faire rejeter comme non justifiée, après examen au fond du droit, la prétention de l'adversaire ».

Aux termes de l'article 64 du code de procédure civile, « constitue une demande reconventionnelle celle par laquelle le défendeur originaire prétend obtenir un avantage, tel le remboursement d'un trop perçu, autre que le simple rejet de la prétention de son adversaire ».

Le moyen qualifié de défense au fond est imprescriptible, alors que celui qualifié de demande reconventionnelle est soumis à la prescription quinquennale

En l'espèce, Mme [H] et M. [Z] ne demandent pas que la banque leur verse une somme au titre d'un trop-perçu mais se contentent de solliciter le rejet de sa demande en paiement. Dès lors, ils présentent un moyen de défense et non une demande reconventionnelle et la prescription ne leur est pas opposable.

La banque, dans le corps de ses conclusions transmises à la cour soulève la prescription des contestations de Mme [H] et M. [Z], mais ne saisit pas la cour d'une fin de non-recevoir faute de l'indiquer dans le dispositif de ses conclusions.

De même, le jugement a, dans ses motifs, opposé à Mme [H] et M. [Z] la prescription de leur « demande tendant au débouté de la banque » sans pour autant en tirer la conséquence en terme de fin de non-recevoir dans son dispositif.

Au regard de ces rédactions, la cour ne peut donc que rappeler que la prescription ne peut être opposée à la défense de Mme [H] et M. [Z] et constater qu'elle n'est pas saisie d'une fin de non-recevoir qui, en tout état de cause, aurait été rejetée.

La cour rappelle que le juge n'a pas à rejeter des moyens comme il lui était demandé dans les conclusions de la banque mais à y répondre, et qu'elle ne doit statuer, dans son dispositif, que sur les exceptions, fin de non-recevoir et demandes qui lui sont présentées dans le dispositif des conclusions. Le tribunal n'avait donc pas à répondre à « une demande de Mme [H] et M. [Z] tendant au débouté de la banque de ses demandes » ; la cour infirme donc, par retranchement, le premier chef du jugement.

Sur le fond, ils ont la charge de prouver l'irrégularité qu'ils allèguent concernant le montant des prélèvements relatifs au prêt professionnel.

Or, leurs contestations se fondent sur l'absence de prise en compte par la banque lors de l'application du taux d'intérêts contractuel du prêt, de 2011 à 2016, de la variation à la baisse du taux d'intérêts indexé sur l'Euribor à trois mois ; pour l'établir, ils se contentent de verser :

- des impressions tirées d'internet sur les variations de cet indice, document qui ne présente aucune valeur probante puisque non vérifiable ;

- un document qu'ils nomment « attestation cabinet d'expertise comptable Sofigec » qui n'a rien d'une attestation au sens de l'article 202 du code de procédure civile, n'est pas daté et relate que la somme de 14 056 euros a été inscrite au bilan « selon les indications données par le gérant » c'est à dire de Mme [H] et M. [Z] eux-mêmes.

Ainsi, les cautions échouant à prouver l'erreur de la banque dans l'application du taux d'intérêts sur les échéances du prêt professionnel prélevées sur le compte courant et donc à démontrer l'inexistence du solde débiteur du compte courant, ils seront, par confirmation du jugement, condamnés à verser à la banque la somme de 23 408,62 euros.

Le jugement sera infirmé en ce qu'il a assorti la condamnation de Mme [H] et M. [Z] aux dépens et aux frais irrépétibles de la solidarité alors que, à défaut de solidarité contractuelle ou légale pour ce type de condamnations, elles auraient dû être prononcées in solidum.

Dispositif : Par ces motifs,

La cour, statuant contradictoirement, après débats en audience publique :

Infirme par retranchement le jugement rendu entre les parties le 6 juillet 2021 par le tribunal de commerce de Belfort en ce qu'il a rejeté « la demande de Mme [G] [H] et M. [F] [Z] tendant au débouté de la société coopérative de crédit Caisse de Crédit Mutuel Valdoie Giromagny de ses demandes, fins et conclusions » ;

Confirme toutes les autres dispositions du jugement sauf à modifier le terme « solidairement » par « in solidum » pour les condamnations aux dépens et frais irrépétibles de première instance ;

Condamne in solidum Mme [G] [H] et M. [F] [Z] aux dépens de l'instance d'appel ;

Et, vu l'article 700 du code de procédure civile, déboute Mme [G] [H] et M. [F] [Z] de leurs demandes et les condamne in solidum à payer à la société coopérative de crédit Caisse de Crédit Mutuel Valdoie Giromagny la somme de 1 000 euros pour leur frais de l'instance d'appel.

Ledit arrêt a été signé par M. Michel Wachter, président de chambre, magistrat ayant participé au délibéré, et par Mme Leila Zait, greffier.

Le greffier, Le président de chambre,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Besançon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21/01656
Date de la décision : 02/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-02;21.01656 ?
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