ARRÊT N°
MW/LZ
COUR D'APPEL DE BESANÇON
- 172 501 116 00013 -
ARRÊT DU 05 AVRIL 2023
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE
Contradictoire
Audience publique du 01 Février 2023
N° RG 22/01457 - N° Portalis DBVG-V-B7G-ERVP
S/appel d'une décision du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de BESANCON en date du 26 juillet 2022 [RG N° 22/00026]
Code affaire : 38G- Demande de mainlevée d'opposition au paiement d'un chèque
[J] [C], [W] [C] C/ S.A.R.L. AFIGEST
PARTIES EN CAUSE :
Monsieur [J] [C]
né le [Date naissance 1] 1940 à [Localité 5] ([Localité 5])
de nationalité française, demeurant [Adresse 4]
Représenté par Me Robert BAUER, avocat au barreau de MONTBELIARD
Madame [W] [C]
née le [Date naissance 2] 1945 à [Localité 3] ([Localité 3])
de nationalité française, demeurant [Adresse 4]
Représentée par Me Robert BAUER, avocat au barreau de MONTBELIARD
APPELANTS
ET :
S.A.R.L. AFIGEST
RCS de Besancon n°417 881 240
sise [Adresse 6]
Représentée par Me Florence ROBERT de la SELARL ROBERT & MORDEFROY, avocat au barreau de BESANCON
INTIMÉE
COMPOSITION DE LA COUR :
Lors des débats :
MAGISTRAT RAPPORTEUR : Monsieur Michel WACHTER, Président de Chambre, conformément aux dispositions des articles 786 et 907 du Code de Procédure Civile, avec l'accord des Conseils des parties.
GREFFIER : Madame Leila Zait, Greffier.
Lors du délibéré :
Monsieur Michel WACHTER, Président de Chambre, a rendu compte conformément à l'article 786 du Code de Procédure Civile aux autres magistrats :
Monsieur Jean-François LEVEQUE et Monsieur Cédric SAUNIER, conseillers.
L'affaire, plaidée à l'audience du 01 février 2023 a été mise en délibéré au 05 avril 2023. Les parties ont été avisées qu'à cette date l'arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe.
**************
Le 14 décembre 2020, Mme [W] [C] a établi à l'ordre de la SARL Afigest un chéque d'un montant de 36 141,82 euros tiré sur le compte joint de Mme [C] et de son mari, M. [J] [C].
Les époux [C] ont par la suite formé opposition à l'encontre de ce chèque.
Par exploit du 27 janvier 2022, la société Afigest a fait assigner les époux [C] devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Besançon aux fins de mainlevée de l'opposition formée contre le chèque, et de condamnation des défendeurs au paiement à titre provisionnel de la somme de 36 141,82 euros.
La demanderesse a fait valoir que Mme [C] s'était librement engagée à lui régler la somme de 36 141,82 euros au titre des travaux comptables qu'elle avait effectués pour deux sociétés dont l'intéressée était gérante, et que l'opposition n'avait pas été formée pour l'un des motifs limitativement énumérés par le code monétaire et financier.
Les époux [C] se sont opposés aux demandes de mainlevée et de provision, en indiquant que la société Afigest avait usé de manoeuvres frauduleuses pour obtenir le chèque litigieux, dès lors qu'elle ne disposait d'aucune créance personnelle à leur encontre, et avait obtenu la remise de ce chèque après en avoir obtenu un précédent du même montant en 2015, à la suite de la liquidation judiciaire de l'une des sociétés de Mme [C], qu'elle avait laissé périmer, puis falsifié en en modifiant la date. Ils ont ajouté avoir déposé plainte contre les agissements de la demanderesse.
Par ordonnance du 26 juillet 2022, le juge des référés a :
- ordonné la mainlevée de l'opposition à l'encontre du chèque Crédit Mutuel n° 0549602 du 14 décembre 2020 de 36 141,82 euros, à1'ordre de la société Afigest, signé par Mme [W] [C] ;
- rejeté la demande de provision de la SARL Afigest ;
- dit n'y avoir lieu à l'applicatíon des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné M. [J] [C] et Mme [W] [C] aux dépens.
Pour statuer ainsi, le juge des référés a retenu :
- que la société Afigest produisait le chèque ainsi qu'une attestation de Mme [C] du 31 juillet 2021 dans laquelle elle s'engageait à régulariser ce chèque pour le 31 (sic) septembre 2021 ;
- que ni la circonstance qu'un précédent chèque ait été modifié, ni la contestation selon laquelle la somme concernerait les sociétés dont Mme [C] était la gérante ne constituaient des manoeuvres frauduleuses justifiant l'opposition formée contre le chèque ;
- que la demande de provision devait être rejetée, dès lors que le chèque était périmé et que les sommes mises en compte étaient contestées par Mme [C] à la fois dans leur montant et leur principe.
Les époux [C] ont relevé appel de cette décision en déférant à la cour le chef relatif à la mainlevée de l'opposition, ainsi que ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens.
Par conclusions transmises le 13 octobre 2022, les appelants demandent à la cour :
Vu les articles 131.35 (sic) et suivants du code monétaire et financier,
- de débouter la société Afigest de sa demande de main levée d'opposition ;
- subsidiairement, d'ordonner un sursis à statuer dans l'attente de l'aboutissement de la plainte pénale déposée par Mme [C] à l'encontre d'Afigest - M. [R] ;
- de condamner la société Afigest reconventionnellement au profit de M. et Mme [C] au paiement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Par conclusions notifiées le 14 novembre 2022, la société Afigest demande à la cour :
Vu l'article L135-35 alinéa 2 (sic) du code monétaire et financier,
- de dire et juger recevable mais non fondée Mme [C] en son appel ;
- de confirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
- de condamner les époux [C] à verser à la SARL Afigest la somme de 2 500 euros au titre
de l'article 700 du code de procédure civile ;
- de la (sic) condamner aux entiers dépens.
La clôture de la procédure a été prononcée le 31 janvier 2023.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer pour l'exposé des moyens des parties à leurs conclusions récapitulatives visées ci-dessus.
Sur ce, la cour,
L'article L 131-35 du code monétaire et financier dispose en son alinéa 2 qu'il n'est admis d'opposition au paiement par chèque qu'en cas de perte, de vol ou d'utilisation frauduleuse du chèque, de procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaires du porteur. Le tireur doit immédiatement confirmer son opposition par écrit, quel que soit le support de cet écrit.
L'utilisation frauduleuse légitimant l'émission d'une opposition doit, aux termes mêmes de ce texte, concerner le chèque objet de l'opposition.
Dès lors, les développements consacrés par les époux [C] à la falsification par la société Afigest d'un précédent chèque en vue de contourner sa péremption sont sans emport pour légitimer l'opposition qu'ils ont formée à l'encontre d'un deuxième chèque au sujet duquel il ne font état d'aucune falsification.
Par ailleurs, les allégations selon lesquelles la remise du chèque aurait été obtenue sous la pression et en abusant de la faiblesse de Mme [C] ne repose sur aucun élément de preuve concret, alors que l'intimée produit quant à elle un document rédigé par Mme [C] le 31 juillet 2021, soit plus de sept mois après l'établissement du chèque litigieux, par lequel elle confirme son engagement à régulariser ce chèque pour la fin septembre 2021.
Enfin, le fait que le montant du chèque corresponde à une créance détenue par la société Afigest sur des sociétés dirigées par Mme [C] ne caractérise en rien une utilisation frauduleuse du chèque.
Dans ces conditions, c'est à juste titre que le premier juge a fait droit à la demande de mainlevée de l'opposition en constatant que celle-ci n'avait pas été formée dans le cadre des seuls motifs limitativement énumérés à l'article L 131-35 précité.
La décision sera donc confirmée sur ce point.
La cour relèvera l'incohérence de la demande subsidiaire formée par les appelants, et qui tend, pour le cas où la société Afigest ne serait pas déboutée de sa demande de mainlevée de l'opposition, à ce qu'il soit sursis à statuer dans l'attente de l'issue de la plainte pénale déposée à son encontre. Or, un sursis à statuer ne peut en toute logique être ordonné que pour autant qu'il n'ait pas encore été statué, de sorte qu'une telle demande est nécessairement sans objet lorsqu'elle est formée à titre subsidiaire pour le cas où il aurait été statué de manière défavorable au principal.
L'ordonnance déférée sera par ailleurs confirmée en ce qu'elle a rejeté la demande de provision formée par la société Afigest, cette disposition n'étant pas remise en cause à hauteur de cour, ainsi qu'en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens.
Les époux [C] seront condamnés aux dépens d'appel, ainsi qu'à payer à l'intimée la somme de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ces motifs
Statuant contradictoirement, après débats en audience publique,
Confirme en toutes ses dispositions l'ordonnance rendue le 26 juillet 2022 par le juge des référés du tribunal judiciaire de Besançon ;
Y ajoutant :
Dit sans objet la demande subsidiaire aux fins de sursis à statuer ;
Condamne M. [J] [C] et Mme [W] [C] aux dépens d'appel ;
Condamne M. [J] [C] et Mme [W] [C] à payer à la SARL Afigest la somme de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Ledit arrêt a été signé par Monsieur Michel Wachter, président de chambre, magistrat ayant participé au délibéré et par Madame Leila Zait, greffier.
Le greffier, Le président,