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04/04/2023 | FRANCE | N°21/01303

France | France, Cour d'appel de Besançon, 1ère chambre, 04 avril 2023, 21/01303


ARRÊT N°



MW/LZ



COUR D'APPEL DE BESANÇON

- 172 501 116 00013 -



ARRÊT DU 04 AVRIL 2023



PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE







Contradictoire

Audience publique du 31 janvier 2023

N° de rôle : N° RG 21/01303 - N° Portalis DBVG-V-B7F-EMZU



S/appel d'une décision du TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE BESANCON en date du 08 juin 2021 [RG N° 17/02576]

Code affaire : 53B Prêt - Demande en remboursement du prêt





[L] [D], [X] [I]

épouse [D] C/ S.A. CREDIT FONCIER DE FRANCE





PARTIES EN CAUSE :





Monsieur [L] [D]

né le [Date naissance 2] 1968 à [Localité 6]

de nationalité française, demeurant [Adresse 3]
...

ARRÊT N°

MW/LZ

COUR D'APPEL DE BESANÇON

- 172 501 116 00013 -

ARRÊT DU 04 AVRIL 2023

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

Contradictoire

Audience publique du 31 janvier 2023

N° de rôle : N° RG 21/01303 - N° Portalis DBVG-V-B7F-EMZU

S/appel d'une décision du TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE BESANCON en date du 08 juin 2021 [RG N° 17/02576]

Code affaire : 53B Prêt - Demande en remboursement du prêt

[L] [D], [X] [I] épouse [D] C/ S.A. CREDIT FONCIER DE FRANCE

PARTIES EN CAUSE :

Monsieur [L] [D]

né le [Date naissance 2] 1968 à [Localité 6]

de nationalité française, demeurant [Adresse 3]

Représenté par Me Lucie TEIXEIRA, avocat au barreau de BESANCON

Madame [X] [I] épouse [D]

née le [Date naissance 1] 1978 à [Localité 5]

de nationalité française, demeurant [Adresse 3]

Représentée par Me Lucie TEIXEIRA, avocat au barreau de BESANCON

APPELANTS

ET :

S.A. CREDIT FONCIER DE FRANCE

RCS de Paris n°110 542 029 848

[Adresse 7]

Représentée par Me Caroline LEROUX, avocat au barreau de BESANCON

INTIMÉE

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats :

PRÉSIDENT : Monsieur Michel WACHTER, Président de chambre.

ASSESSEURS : Monsieur Jean-François LEVEQUE, conseiller et Monsieur Dominique RUBEY, vice-président placé.

GREFFIER : Madame Leila Zait, Greffier

Lors du délibéré :

PRÉSIDENT : Monsieur Michel WACHTER, Président de chambre

ASSESSEURS : Monsieur Jean-François LEVEQUE, conseiller et Monsieur Dominique RUBEY, vice-président placé.

L'affaire, plaidée à l'audience du 31 janvier 2023 a été mise en délibéré au 04 avril 2023. Les parties ont été avisées qu'à cette date l'arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe.

**************

Par acte authentique du 6 janvier 2015, M. [L] [D] et son épouse, née [X] [I], ont acquis un bien immobilier sis à [Adresse 3] (25), dont le prix a été financé par la SA Crédit Foncier de France au moyen d'un prêt relais n° 4754395 d'un montant de 73 500 euros dont le remboursement était différé de 24 mois dans l'attente de la vente par les époux [D] d'un appartement dont ils étaient propriétaires à [Localité 4], ainsi que par un prêt immobilier n° 4754396 d'un montant de 135 000 euros remboursable en 240 mensualités.

Les deux prêts étaient assurés auprès de la société d'assurances AFI-ESCA notamment au titre de l'invalidité permanente totale.

Les époux [D] n'ont pas vendu leur appartement bisontin, mais l'ont donné à bail à compter du 1er août 2016 moyennant un loyer mensuel de 501 euros.

M. [D] a été déclaré inapte à l'exercice de son activité d'ouvrier tripier le 2 décembre 2016, et licencié le 31 décembre 2016 pour ce motif. Par courrier du 18 décembre 2016, il a informé la société AFI-ESCA et a sollicité la prise en charge des mensualités des deux emprunts.

Par exploit du 22 novembre 2017, faisant valoir que les époux [D] n'avaient pas remboursé le prêt relais, la société Crédit Foncier de France les a fait assigner en paiement devant le tribunal de grande instance de Besançon.

Par exploit du 17 décembre 2019, les époux [D] ont fait assigner devant la même juridiction la société AFI-ESCA aux fins de prise en charge des sommes restant dues sur les deux emprunts.

Les procédures ont été jointes.

La société Crédit Foncier de France a sollicité la condamnation solidaire des époux [D] à lui payer la somme de 78 340,61 euros, outre intérêts au taux de 3,15 % à compter du 6 janvier 2017. Elle a contesté tout manquement à son obligation de mise en garde, a dénié toute obligation de conseil, et a fait grief aux emprunteurs de n'avoir pas mis en oeuvre les moyens suffisants pour parvenir à la vente de l'appartement bisontin, et de ne pas avoir affecté les revenus locatifs au remboursement du prêt.

Les époux [D] ont conclu au rejet des demandes formées à leur encontre, à la condamnation de la demanderesse à leur régler la somme de 78 340,61 à titre de dommages et intérêts, avec compensation, pour manquement aux devoirs de conseil et de mise en garde pour ne pas les avoir informés du risque de non-remboursement du prêt relais faute de vente de l'appartement dans les deux ans, et pour ne pas leur avoir conseillé de mobiliser la garantie de l'assureur. Ils ont encore réclamé le prononcé de la déchéance du droit aux intérêts, et la condamnation de l'assureur à prendre en charge le capital restant dû de chacun des prêts au titre de la garantie invalidité permanente et totale. Subsidiairement, ils ont demandé la suspension des obligations nées du prêt relais pendant deux ans.

La socité AFI-ESCA a demandé le rejet des prétentions formées à son encontre, au motif que l'emprunt n°4754395 n'était assuré que jusqu'au 15 décembre 2016, subsidiairement a fait valoir que sa garantie était limitée à un capital de 75 498,29 euros en raison d'une réticence dolosive dans le renseignement du questionnaire de santé, qui justifiait une limitation de garantie de 50 %.

Par jugement du 8 juin 2021, le tribunal judiciaire a :

- condamné solidairement M. [L] [D] et Mme [X] [I], épouse [D], à payer à la SA Crédit Foncier de France la somme de 78 340,61 euros, outre intérêts au taux conventionnel de 3,15 % à compter du 6 janvier 2017 et jusqu'à complet paiement ;

- débouté M. [L] [D] et Mme [X] [I], épouse [D], de l'intégralité de leurs demandes présentées à l'encontre de la SA Crédit Foncier de France ;

- débouté M. [L] [D] et Mme [X] [I], épouse [D], de leur demande présentée à l'encontre de la SA AFI ESCA au titre du prêt relais n°4754395;

- déclaré applicable la garantie invalidité permanente totale souscrite par M. [L] [D] auprès de la SA AFI ESCA au titre du prêt n° 4754396 ;

- condamné la SA AFI ESCA à garantir M. [L] [D] et Mme [X] [D] de l'ensemble des sommes dues au titre du prêt n° 4754396 ;

- condamné solidairement M. [L] [D] et Mme [X] [I], épouse [D], à verser à la SA Crédit Foncier de France une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté M. [L] [D] et Mme [X] [I], épouse [D], et la SA AFI ESCA de leurs demandes présentées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté les parties de toutes demandes plus amples et contraires ;

- condamné in solidum M. [L] [D] et Mme [X] [I], épouse [D], et la SA AFI ESCA aux entiers dépens ainsi qu'aux frais d'inscription d'hypothêque judiciaire provisoire et définitive ;

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

Pour statuer ainsi, le tribunal a retenu :

- qu'en vertu du principe de non-immixtion, le banquier dispensateur de crédit n'avait pas de devoir de conseil envers son client, et qu'il ne pouvait dès lors lui être reproché de ne pas avoir conseillé aux défendeurs de mobiliser leur assureur de prêt, ce d'autant que les époux [D] l'avaient fait dès le mois de décembre 2016 ;

- qu'il était constant que les époux [D] étaient des emprunteurs non avertis ; que, lorsque la vente du bien immobilier doit permettre, par son montant, le remboursement du prêt relais, le prêteur n'avait pas à attirer l'attention de l'emprunteur sur le risque d'endettement ; qu'en l'espèce le prêt relais était d'un montant inférieur à l'évaluation du bien à vendre fournie par les emprunteurs, que la banque n'avait pas à vérifier ;

- qu'il ne pouvait pas plus être fait grief à la banque, qui n'était pas tenue de contracter, de ne pas avoir octroyé un nouveau prêt ;

- que la créance du Crédit Foncier de France n'était contestée ni dans son principe, ni dans son quantum ;

- que, s'agissant de la demande de prise en charge du prêt relais par l'assureur, le terme du contrat était survenu antérieurement à la déclaration de sinistre, de sorte qu'aucune garantie n'était due ; que, s'agissant du deuxième prêt, si l'assureur faisait état d'une erreur dans les réponses apportées au questionnaire de santé, celui-ci n'était pas produit aux débats, de sorte que la preuve d'une fausse déclaration n'était pas rapportée ; qu'au titre de ce prêt, la garantie était donc due ;

- que la demande de délais de paiement devait être rejetée, et que celle de suspension du paiement de l'emprunt ne relevait pas de la compétence de la juridiction saisie.

Les époux [D] ont relevé appel de cette décision en intimant uniquement la société Crédit Foncier de France.

Par conclusions notifiées le 23 janvier 2023, les appelants demandent à la cour :

Vu les articles 31, 32 du code de procédure civile,

Vu les articles 1103, 1231-1, 1240 et suivant du code civil,

Vu les articles L. 311-1, L.312-9, L.312-21 et L.312-22, L.313-12 du code de la consommation,

Vu les articles 1244-1 et suivants du code civil,

- de juger l'appel interjeté par les époux [D] recevable et bien fondé ;

Y faisant droit :

- d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a :

* condamné solidairement M. [L] [D] et Mme [X] [I], épouse [D], à payer à la SA Crédit Foncier de France la somme de 78 340 61 euros, outre intérêts au taux conventionnel de 3,15 % à compter du 6 janvier 2017 et jusqu'à complet paiement ;

* débouté M. [L] [D] et Mme [X] [I], épouse [D], de l'intégralité de leurs demandes présentées à l'encontre de la SA Crédit Foncier de France ;

* condamné solidairement M. [L] [D] et Mme [X] [I], épouse [D], à verser à la SA Crédit Foncier de France une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

* débouté M. [L] [D] et Mme [X] [I], épouse [D], de leurs demandes présentées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

* débouté les parties de toutes demandes plus amples et contraires ;

* condamné in solidum M. [L] [D] et Mme [X] [I], épouse [D], et la SA AFI ESCA aux entiers dépens ainsi qu'aux frais d'inscription d'hypothèque judiciaire provisoire et définitive ;

- de le réformer et statuant à nouveau :

In limine litis

- de juger que la SA Crédit Foncier de France n'a pas intérêt à agir à l'encontre des époux [D] dès lors qu'il est désintéressé de l'intégralité des sommes réclamées par la société AFI ESCA, assureur emprunteur des époux [D], au titre des prêts :

* prêt n° 4754396 pour un montant de 113 702,44 euros en date du 7 avril 2022 ;

* prêt relais n°4754395 pour un montant de 78 340,61 euros en date du 21 septembre 2022 ;

En conséquence ;

- de débouter la SA Crédit Foncier de France de l'intégralité de ses demandes ;

- de juger que la SA Crédit Foncier de France a commis une faute lors de l'octroi des prêts en ne mettant pas en garde les époux [D] contre les risques d'endettement excessif ;

- de juger que la SA Crédit Foncier de France n'a pas respecté son obligation de conseil, de mise en garde à l'égard des époux [D] dans le cadre de la souscription du prêt relais ;

- de constater la bonne foi des époux [D] ;

- de condamner la SA Crédit Foncier de France à régler aux époux [D] la somme de 20 000  euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi ;

- de prononcer la déchéance de la SA Crédit Foncier de France de son droit à percevoir des intérêts et les frais et accessoires ;

En tout état de cause :

- de condamner la SA Crédit Foncier de France à payer aux époux [D] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, tant pour la procédure de première instance que d'appel ;

Ainsi que les entiers dépens qui seront recouvrés par Maître Lucie Teixeira conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions transmises le 25 janvier 2023, la société Crédit Foncier de France demande à la cour :

- de confirmer purement et simplement le jugement déféré, sauf à ramener les condamnations, vu les règlements effectués par la compagnie d'assurance des époux [D] à la somme de 16 798,69 euros au titre du prêt n°4754395 valeur 30 janvier 2023 outre intérêts pour mémoire jusqu'au paiement effectif ;

- de débouter M. et Mme [D] de leur demande de restitution de la somme de 1 297,55 euros ;

- de débouter M. et Mme [D] de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions ;

- y ajoutant, de condamner solidairement M. [L] [D] et Mme [X] [D] à régler à la SA Crédit Foncier de France la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens, de les condamner solidairement aux frais d'inscription d'hypothèque judiciaire provisoire, de renouvellement et définitive.

La clôture de la procédure a été prononcée le 30 janvier 2023.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer pour l'exposé des moyens des parties à leurs conclusions récapitulatives visées ci-dessus.

Sur ce, la cour,

A titre liminaire, il sera d'abord observé que si les époux [D] invoquent le défaut d'intérêt à agir du Crédit Foncier de France au motif qu'il serait désintéressé par les versements effectués par l'assurance emprunteur, ils n'en tirent cependant aucune conséquence juridique sur la recevabilité des demandes de la banque, dont ils concluent simplement au rejet. En tout état de cause, l'intimée dispose incontestablement d'un intérêts à agir, dès lors qu'elle soutient qu'en dépit des versements intervenus de la part de la société d'assurance, elle reste créancière d'un montant de 16 798,69 euros.

Il sera ensuite relevé que c'est vainement que, dans le dernier état de ses prétentions, la société Crédit Foncier de France demande à la cour de 'débouter M. et Mme [D] de leur demande de restitution de la somme de 1 297,55 euros', alors qu'il ne ressort pas du dispositif des dernières conclusions des appelants qu'ils aient formulé une telle demande.

Sur la demande en paiement de la société Crédit Foncier de France

Il sera rappelé que la demande de la banque porte depuis l'origine de la procédure sur le paiement des seules sommes dues au titre du remboursement du prêt relais.

L'argumentation développée par les époux [D] relativement aux manquements de l'organisme financier n'est pas de nature à faire échec au remboursement de la somme prêtée, mais a pour objet l'octroi de dommages et intérêts venant le cas échéant se compenser avec la créance de remboursement.

Il résulte des pièces versées aux débats, et plus précisément du relevé arrêté au 2 janvier 2023, que le montant en principal dû au titre du prêt relais a été remboursé le 15 décembre 2022 par le biais de l'assurance emprunteur.

Le solde de 16 798,69 euros, outre intérêts de retard, dont le paiement est sollicité par la société Crédit Foncier de France consiste, selon le même document, en des 'pénalités de retard' pour un montant total de 15 214,06 euros, et en des 'frais de poursuite' pour 1 584,63 euros.

L'intimée souligne à bon droit que les époux [D] ne développent aucune argumentation précise au soutien de leur demande tendant à ce que la banque soit déchue de son droit à percevoir des intérêts et des frais accessoires.

Les intérêts au taux contractuellement stipulé de 3,15 %, sont indubitablement dus, et ce à compter du 6 janvier 2017, date d'exigibilité du prêt relais, jusqu'à la date de son remboursement intégral effectif, soit jusqu'au 15 décembre 2022.

C'est en revanche à l'intimée, qui sollicite leur règlement, de démontrer qu'elle est contractuellement fondée à obtenir le paiement des sommes qu'elle met en compte au titre des pénalités de retard et des frais de poursuite. Or, force est de constater qu'il n'est fourni aucune précision ni aucun justificatif du bien-fondé de ces montants, ni de leur mode de calcul. Dans ces conditions, la demande en paiement de la somme de 16 798,69 euros sera rejetée.

Au regard de l'évolution du litige, le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a condamné solidairement les époux [D] à payer à la société Crédit Foncier de France la somme de 78 340,61 euros, outre intérêts au taux conventionnel de 3,15 % à compter du 6 janvier 2017 et jusqu'à complet paiement, les appelants étant solidiarement condamnés à payer à l'intimée la somme correspondant aux intérêts au taux conventionnel de 3,15 % produits par la somme de 78 340,61 euros du 6 janvier 2017au 15 décembre 2022.

Sur la demande reconventionnelle des époux [D]

Les appelants sollicitent une somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice qu'ils estiment avoir subi du fait des manquements de la société Crédit Foncier de France à son obligation de conseil et de mise en garde, ou aux obligations résultant du contrat.

Ils font d'abord valoir que l'opération globale de financement de l'acquisition de leur bien immobilier, constituée d'un prêt relais, d'un prêt immobilier classique ainsi que d'un troisième prêt destiné à financer les frais de notaire, aurait été inadaptée à leurs capacités de remboursement. Or, force est à cet égard de constater qu'ils ne justifient en rien du montant de leurs revenus, ni de la constitution précise de leur patrimoine à la date de conclusion de l'opération, de sorte qu'ils échouent à établir le bien-fondé de leur allégation selon laquelle l'intimée les aurait précipités dans une situation de surendettement. Il devra au contraire être constaté que, si l'on excepte le prêt relais, non encore exigible, les autres prêts étaient régulièrement remboursés jusqu'à la survenue de l'état d'invalidité de M. [D], ce dont il résulte que les difficultés de remboursement n'étaient manifestement pas imputables à une inadéquation des prêts à l'état de solvabilité des emprunteurs, mais à un retard de prise en charge de la part de l'assureur, et à l'absence de vente de l'appartement.

Il est encore fait grief à la banque d'avoir surestimé la valeur de l'appartement à mettre en vente pour accorder le prêt relais de 73 500 euros. D'une part, il n'est pas démontré que cet immeuble aurait été valorisé par l'intimée. Ensuite, et en tout état de cause, les appelants produisent eux-mêmes aux débats une estimation immobilière du bien à vendre qu'ils ont fait réaliser par la société Nexity, à une date qui n'est pas précisée, mais dont il résulte une valeur estimée entre 83 000 et 87 000 euros, soit entre 75 030 et 78 760 euros en net vendeur, ce qui confirme l'absence de surévaluation du bien dans le cadre de l'octroi du prêt relais. Or, en matière de prêt relais, il est admis que l'organisme financier n'est pas tenu à une obligation de mise en garde particulière dès lors que la valeur du bien mis en vente permet de couvrir le montant du prêt, ce qui est le cas en l'espèce. Il ne saurait être tiré à l'égard de la responsabilité de la banque aucune conséquence particulière du fait que l'appartement n'ait pas été vendu, dans la mesure où les époux [D] ne démontrent pas avoir fait toutes les diligences nécessaires pour parvenir à la vente, étant observé qu'ils ne justifient, entre 2014 et 2018, que de la signature successive de trois mandats de vente, et qu'ils ont donné le bien en location dès le 26 juillet 2016, soit plusieurs mois avant le terme du prêt relais, ce qui rendait plus difficile la mise en vente, et en réduisait nécessairement le prix.

Il est encore vainement reproché un défaut d'information sur le mécanisme du prêt relais, qui résulte de manière parfaitement claire des énonciations de l'acte signé par les époux [D], le fonctionnement de ce mécanisme d'utilisation commune étant au demeurant connu de tout emprunteur profane normalement diligent.

Les appelants sont également mal fondés à reprocher à la société Crédit Foncier de France de ne pas avoir fait droit à leur demande de réaménagement, et de ne pas leur avoir en conséquence octroyé à l'issue du prêt relais un prêt classique permettant son remboursement. Il doit en effet être constaté que la stipulation contractuelle que les époux [D] visent à cet égard ne fait peser aucune obligation à la charge de l'organisme financier, mais lui en laisse la simple faculté, qu'il est libre de mettre en oeuvre ou de refuser. L'intimée n'a par ailleurs pas commis de faute particulière en procédant, conformément aux règles communes, au fichage FICP des époux [D] en suite du défaut de règlement à l'échéance du montant du prêt relais.

En outre, les appelants ne démontrent pas en quoi la société Crédit Foncier de France aurait engagé sa responsabilité s'agissant de la mise en oeuvre de l'assurance emprunteur, alors qu'il ne résulte pas des pièces produites que l'intimée ait été avisée du sinistre justifiant l'intervention de l'assureur avant que les époux [D] n'aient eux-mêmes pris l'attache de ce dernier.

Il est enfin fait reproche à la banque d'avoir manqué de diligence en ne communiquant un premier relevé du prêt immobilier que le 11 mars 2022, alors que, dans l'optique de la prise en charge de ce prêt par l'assureur, la demande lui en avait été faite dès le 13 novembre 2019. Or, il n'est résulté pour les appelants aucun préjudice de ce retard, dès lors qu'ils indiquent eux-mêmes dans leurs écritures qu'en suite du remboursement par l'assureur du principal de ce prêt, la banque leur avait restitué les sommes qu'ils avaient payées au titre des périodes prises en charge par l'assureur, et avait renoncé à toute réclamation au titre des frais et pénalités. Il ne peut d'autre part être imputé à la banque une quelconque responsabilité dans le retard intervenu dans la prise en charge par l'assureur du prêt relais, alors que la demande qui avait été formée à ce titre devant le premier juge avait été rejetée, et que les époux [D] n'avaient pas fait appel sur ce point.

Au regard de ces différents éléments le jugement entrepris devra être confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts formée par les époux [D].

Sur les autres demandes

La décision déférée sera confirmée s'agissant des frais irrépétibles et des dépens.

Les époux [D] seront condamnés aux dépens d'appel.

Les demandes formées à hauteur d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile seront rejetées.

Par ces motifs

Statuant contradictoirement, après débats en audience publique,

Confirme, dans les limites de l'appel, le jugement rendu le 8 juin 2021 par le tribunal judiciaire de Besançon, sauf en ce qu'il a condamné solidairement M. [L] [D] et Mme [X] [I], épouse [D], à payer à la SA Crédit Foncier de France la somme de 78 340,61 euros, outre intérêts au taux conventionnel de 3,15 % à compter du 6 janvier 2017 et jusqu'à complet paiement ;

Vu l'évolution du litige,

Condamne solidairement M. [L] [D] et Mme [X] [I], épouse [D], à payer à la SA Crédit Foncier de France la somme correspondant aux intérêts au taux conventionnel de 3,15 % produits par la somme de 78 340,61 euros du 6 janvier 2017 au 15 décembre 2022 ;

Y ajoutant :

Condamne M. [L] [D] et Mme [X] [I], épouse [D], aux dépens d'appel ;

Rejette les demandes formées à hauteur d'appel sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Ledit arrêt a été signé par Monsieur Michel Wachter, président de chambre, magistrat ayant participé au délibéré et par Madame Leila Zait, greffier.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Besançon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21/01303
Date de la décision : 04/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-04;21.01303 ?
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