ARRÊT N°
DR/FA
COUR D'APPEL DE BESANÇON
- 172 501 116 00013 -
ARRÊT DU 14 MARS 2023
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE
Contradictoire
Audience publique du 10 janvier 2023
N° de rôle : N° RG 21/01276 - N° Portalis DBVG-V-B7F-EMYE
S/appel d'une décision du TRIBUNAL DE COMMERCE DE BESANCON en date du 21 avril 2021 [RG N° 2020002774]
Code affaire : 50B Demande en paiement du prix ou tendant à faire sanctionner le non-paiement du prix
S.A.S. HAPPY MEAL MATIC C/ S.A.S. CONNECTION
PARTIES EN CAUSE :
S.A.S. HAPPY MEAL MATIC prise en la personne de son représentant légal, Monsieur [U] [O], domicilié en cette qualité audit siège, immatriculée au RCS de Strasbourg sous le numéro B 841 183 635
Sise [Adresse 1]
Représentée par Me Delphine GROS de la SELARL TERRYN - AITALI -GROS-CARPI-LE DENMAT, avocat au barreau de BESANCON, avocat postulant,
Représentée par Me Jennifer GUIGUI, avocat au barreau de GRASSE, avocat plaidant
APPELANTE
ET :
S.A.S. CONNECTION société par actions simplifiée, immatriculée au RCS de BESANCON sous le numéro 824 397 194, ayant son siège social [Adresse 3], prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié es qualité audit siège.
Sise [Adresse 2]
Représentée par Me Florence ROBERT de la SELARL ROBERT & MORDEFROY, avocat au barreau de BESANCON, avocat postulant,
Représentée par Me Patrice CANNET de la SARL CANNET - MIGNOT, avocat au barreau de DIJON, avocat plaidant
INTIMÉE
COMPOSITION DE LA COUR :
Lors des débats :
PRÉSIDENT : Monsieur Michel WACHTER, Président de chambre.
ASSESSEURS : Messieurs Jean-François LEVEQUE, conseiller et Dominique RUBEY, vice-président placé,
GREFFIER : Madame Fabienne ARNOUX, Greffier.
Lors du délibéré :
PRÉSIDENT : Monsieur Michel WACHTER, Président de chambre,
ASSESSEURS : Messieurs Jean-François LEVEQUE, conseiller et Dominique RUBEY, vice-président placé, magistrat rédacteur.
L'affaire, plaidée à l'audience du 10 janvier 2023 a été mise en délibéré au 14 mars 2023. Les parties ont été avisées qu'à cette date l'arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe.
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Faits, procédure et prétentions des parties
La SAS Connection a conclu avec la SAS Happy Meal Matic (SAS HMM) deux contrats de location de distributeurs de pizzas les 18 mars 2019 et 2 juin 2019. La location a été consentie moyennant un premier loyer de 7 200 euros TTC par machine puis des loyers mensuels de 588 euros TTC. Par avenant au contrat, a été consentie la location d'un kiosque anti-vandalisme pour un montant de 108 euros TTC par mois.
La livraison a été effectuée après l'écoulementt d'un délai de 4 mois.
Le 12 novembre 2019, la société Connexion a sollicité la résiliation des deux contrats de location et la restitution de la somme de 14 400 euros, versée au titre des premiers loyers.
Le 14 novembre 2019, la SAS HMM a résilié les contrats pour défauts de paiement des loyers.
Par exploit d'huissier en date du 18 août 2020 la SAS Connection a fait assigner la SAS HMM devant le tribunal de commerce de Besançon.
Le 21 avril 2021, le tribunal de commerce de Besançon :
- s'est déclaré territorialement compétent,
- a constaté la non-exécution des contrats de location de distributeurs par la SAS HMM,
- a condamné la SAS HMM à restituer à la société Connection la somme de 14 400 euros, versée au titre des premiers loyers,
- a débouté la société Connection de sa demande en paiement de la somme de 500 euros au titre des frais de déplacement en Espagne pour visiter les usines de fabrication,
- a débouté la société Connection de sa demande de paiement de la somme de 1 600 euros, au titre des réparations effectuées sur les distributeurs,
- a condamné la SAS HMM à verser à la société Connection la somme de 2 000 euros, au titre des dommages et intérêts pour tous les désagréments causés,
- a constaté que la SAS HMM n'a pas constitué de dol à l'encontre de la société Connection en vantant l'autofinancement des distributeurs de pizzas,
- a déclaré valable en droit les contrats de location conclus entre la société Connection et la SAS HMM,
- a débouté la société Connection de sa demande de paiement de la somme de 5 000 euros, à titre de dommages et intérêts,
- a débouté la SAS HMM de ses demandes reconventionnelles,
- condamné la SAS HMM à verser à la société Connection la somme de 1 500 euros, au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- a ordonné l'exécution provisoire de la présente décision,
- a condamné la SAS HMM à tous les dépens,
- a liquidé les dépens du présent jugement à la somme de 73,22 euros.
Pour parvenir à cette décision, le premier juge a retenu :
- vu les articles 46 et 48 du code de procédure civile, alors que la clause d'attribution de juridiction désigne le ressort de le 'cour d'appel de Strasbourg', laquelle n'existait pas, que la juridiction saisie était bien compétente comme étant celle du lieu de livraison effective des distributeurs ;
- qu'en l'absence de délais de livraison, la livraison plus de 4 mois après la signature du contrat ne constituait pas une inexécution du contrat ;
- qu'au vu du mauvais état des machines, dont attestaient des courriels, un constat d'huissier du 9 août 2019, les multiples interventions qui avaient eu lieu sur les distributeurs, le rapport du technicien de la société JPB intervenu sur les machines, et ce que reconnaissait la SAS HMM, cette dernière avait violé son obligation de livraison d'un produit conforme ; que l'absence de fourniture d'un manuel d'utilisation constituait également une violation de ses obligations par la SAS HMM ;
- sur la prétendue promesse de la SAS HMM de rentabiliser la location des distributeurs par l'utilisation des écrans pour diffuser des messages publicitaires, que les contrats ne mentionnaient pas une telle fonction, de sorte qu'aucune inexécution ne pouvait être reprochée à la SAS HMM de ce chef ;
- que la SAS HMM avait satisfait à son obligation d'assistance en ayant fait intervenir la société JPB et en ayant échangé directement par courriels avec la société Connection sur les difficultés qu'elle rencontrait ;
- qu'au regard de la violation de ses obligations contractuelles par la SAS HMM, elle devait être condamnée au remboursement des deux premiers loyers majorés à hauteur de 14 400 euros ;
- que la société Connection ne démontrait pas avoir dû exposer les frais techniques d'installation des machines dont elle demandait remboursement, les factures étant adressées à la société Cierreci ;
- que la société Connection ne démontrait ni les montants engagés ni la date du déplacement en Espagne qu'elle prétendait avoir effectué pour visiter l'usine de fabrication des distributeurs ;
- que la somme de 2 000 euros réclamée par la société Connection au titre des désagréments et de la perte de temps occasionnés était fondée ;
- que, subsidiairement, le dol n'était pas caractérisé alors que les écrans publicitaires étaient fonctionnels ;
- qu'au regard de l'inexécution de ses obligations par la SAS HMM, il ne pouvait être reproché à la société Connection de ne pas avoir payé les loyers des deux machines au titre des mois de septembre, octobre et novembre 2019.
Par déclaration parvenue au greffe le 9 juillet 2021, la SAS HMM a relevé appel de cette décision et dans ses dernières conclusions transmises le 19 décembre 2022, elle demande à la cour :
Vu les articles 122 et suivants du code de procédure civile,
Vu les articles 1103, 1104, 1217, 1221, 1231-1, 1240 et 1241 du code civil,
Vu les articles 699 et 700 du code de procédure civile,
In limine litis,
- de juger que la société Connection a cessé toute activité et est désormais radiée du RCS de Besançon depuis le 22 octobre 2022 ;
-de juger que la société Connection a cessé d'exister juridiquement et ne justifie donc plus d'aucune qualité à agir dans le cadre de la présente instance ;
- de déclarer la société Connection dépourvue de qualité à agir suite à sa radiation du RCS de Besançon ;
A titre principal :
- de confirmer le jugement querellé en ce qu'il a :
* débouté la société Connection de sa demande de paiement de la somme de 1 600 eurosau titre des réparations effectuées sur les distributeurs ;
* constaté qu'elle n'a pas constitué de dol, à l'encontre de la SAS Connexion en vantant l'autofinancement des distributeurs de pizzas ;
* déclaré valable en droit les contrats de location conclus entre la SAS Connexion et la SAS HMM ;
* débouté la société Connection de sa demande en paiement de la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts
- d'infirmer le jugement querellé seulement en ce qu'il a :
* constaté la non exécution des contrats de location de distributeurs par la SAS HMM ;
* condamné la SAS HMM à restituer à la société Connection la somme de 14 400 euros versée au titre des premiers loyers ;
* condamné la SAS HMM à verser à la société Connection la somme de 2 000 euros au titre des dommages et intérêts pour tous les désagréments causés ;
* débouté la SAS HMM de ses demandes reconventionnelles ;
* condamné la SAS HMM à verser à la société Connection la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
* ordonné l'exécution provisoire ;
* condamné la SAS HMM aux dépens ;
Statuant à nouveau,
- de condamner la société Connection à lui verser la somme de 898,50 euros correspondant aux frais d'intervention abusifs de la société JBP sur le fondement de l'article 1217 du code civil ;
- de condamner la société Connection à lui verser l'intégralité des sommes dues au titre des loyers soit la somme de 3 597 euros, outre intérêts légaux de retard sur le fondement des articles 1103, 1217, 1221, 1231-1 du code civil ;
- de condamner la société Connection à lui verser la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice économique résultant de son manquement caractérisé à ses obligations contractuelles sur le fondement des articles 1217 et 1231-1 du code civil,
- de condamner la société Connection à lui verser la somme de 2 500 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi du fait de son attitude déloyale sur le fondement des articles 1104, 1240 et 1241 du code civil,
- de condamner la société Connection à lui verser la somme de 4 000 au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance
Dans ses dernières conclusions portant appel incident transmises le 5 janvier 2023, la société Connection a répliqué et sollicite de la cour de céans :
Vu les articles 789 et 907 du code de procédure civile,
Vu les articles 1130, 1137, 1178 1217, 1231-1 du code civil,
Sur la fin de non recevoir, :
- de se déclarer (sic) pour connaître de la fin de non-recevoir soulevée par la SAS HMM ;
- à titre subsidiaire, de constater sa qualité à agir ;
- de confirmer le jugement en ce qu'il a :
* constaté la non exécution des contrats de location de distributeurs par la SAS HMM ;
* condamné la SAS HMM à lui restituer la somme de 14 400 euros versée au titre des premiers loyers ;
* condamné la SAS HMM à lui verser le somme de 2 000 euros au titre des dommages et intérêts pour tous les désagréments causés ;
* débouté la SAS HMM de ses demandes reconventionnelles ;
* condamné la SAS HMM à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
* condamné la SAS HMM aux entiers dépens ;
- d'infirmer le jugement pour le surplus ;
Statuant à nouveau :
- de condamner la SAS HMM à lui rembourser le somme de 500 euros pour les frais de déplacement en Espagne pour visiter des usines de fabrication ;
- de condamner la SAS HMM à lui payer la somme de 1 600 euros au titre des réparations qu'elle a effectuées sur les distributeurs ;
A titre subsidiaire :
- de constater le dol commis par la SAS HMM en vantant l'autofinancement des distributeurs de pizzas ;
- de déclarer nul les contrats de location conclus entre la société Connexion et la société HMM ;
- de condamner la SAS HMMà lui verser la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
En tout état de cause :
- de condamner la SAS HMM à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- de condamner la SAS HMM aux entiers dépens.
Pour l'exposé complet des moyens des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 20 décembre 2022 et l'affaire a été appelée à l'audience du 10 janvier 2023 et mise en délibéré au 14 mars 2023.
Motifs de la décision
Sur la qualité à agir de la société Connection
La société HMM invoque le défaut de qualité à agir de la société Connection, au motif qu'elle aurait été radiée du RCS.
La société Connection fait valoir à bon droit que cette fin de non-recevoir aurait dû être soumise au conseiller de la mise en état qui était, jusqu'à son dessaisissment, seul compétent pour en connaître, étant observé quil ne s'agit en l'occurrence ni d'une fin de non-recevoir qui aurait été tranchée par le juge de la mise en état, ou par le tribunal, ni d'une fin de non-recevoir qui, bien que n'ayant pas été tranchée en première instance, aurait pour conséquence, si elle était accueillie, de remettre en cause ce qui a été jugé au fond par le premier juge.
Cette fin de non-recevoir doit donc être déclarée irrecevable.
Au surplus, au regard de l'extrait Kbis à jour au 4 janvier 2023 produit par la société Connection, cette dernière est manifestement en activité et a donc qualité à agir.
Sur le sort des contrats
Il résulte des pièces produites aux débats qu'en réponse au courrier de la société Connection du 12 novembre 2019 sollicitant la résiliation des contrats, la société HMM a, le 14 novembre 2019, prononcé cette résiliation pour défaut de paiement des loyers.
A la lecture des écritures, les parties ne remettent pas en cause la résiliation de ces contrats. La société Connection notamment ne conclut pas à leur résolution pour défaut de livraison conforme, son argumentation consistant à formuler ses griefs sous l'angle de l'inexécution par la société HMM de ses obligations contractuelles, et d'en tirer pour conséquence l'exception d'inexécution légitimant de sa part le défaut de paiement de l'intégralité des loyers, et l'allocation de dommages et intérêts.
Pour le cas où il ne serait pas fait droit à ses demandes tendant à être déchargée de ses obligations à paiement, la société Connection formule cependant une demande subsidiaire en annulation des contrats pour dol.
En toute logique juridique, dès lors qu'elle a pour objet de remettre en cause l'existence même des conventions, cette demande d'annulation doit, en dépit de son caractère subsidiaire, être examinée en premier lieu.
En application de l'article 1128 du code civil, sont nécessaires à la validité d'un contrat : le consentement des parties, la capacité de contracter et enfin un contenu licite et certain.
Parallèlement, en application de l'article 1130 du code civil, le dol vicie le consentement lorsqu'il est de tel nature que, sans lui, l'une des parties n'aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes, le caractère déterminant du dol s'apprécie eu égard aux personnes et aux circonstances dans lesquelles le consentement a été donné.
En particulier, le dol se définit comme le fait pour un contractant d'obtenir le consentement de l'autre par des man'uvres ou des mensonges selon l'article 1137 du même code.
Le juge du tribunal de commerce de Besançon considère que le dol n'est pas caractérisé, les écrans publicitaires étant fonctionnels.
La société Connection reproche à la SA HMM de lui avoir fait miroiter des revenus de nature à compenser le coût de location des distributeurs grâce à des écrans publicitaires présents sur ces appareils. Elle produit à cet effet un prospectus publicitaire de la SAS HMM, selon lequel l'autofinancement peut également être généré tout ou partie grâce à l'utilisation de l'écran tactile en mode Diaporama-Pub.
Le mensonge ou les manoeuvres caractérisant un dol, doivent porter sur une information intégrant le champ contractuel. Or les éléments exposés dans une publicité n'entrent pas automatiquement dans le champ contractuel. La société Connection ne produit aucun élément au soutien de ses prétentions de nature à établir que cet élément soit effectivement entré dans le champ des contrats litigieux. En tout état de cause, la société Connection ne démontre pas autrementque par sa simple allégation que la possibilité de diffuser des publicités ait été déterminante de son consentement et qu'elle n'aurait pas contracté ou à des conditions différentes avec la SAS HMM.
Il s'ensuit que les deux contrats de location de distributeur conclus entre la SAS HMM et la société Connection ne sont pas viciés par le dol et sont donc valables.
Par conséquent, la cour confirme le jugement déféré sur ce point et déboute la société Connection de sa demande d'annulation du contrat, ainsi que de sa demande accessoire en dommages et intérêts
Sur les manquements aux obligations contractuelles
La SAS HMM fait grief au premier juge de constater la non-exécution des contrats de location de distributeurs par elle et plus précisément la violation de l'obligation de livrer un produit conforme eu égard aux dysfonctionnements des machines et à l'absence de manuel d'utilisation, aisi que le non respect de l'obligation d'assistance et de livraison,en l'absence de stipulation relativement aux délais de livraison et d'engagement de la SAS HMM.
La SAS HMM sollicite l'infirmation du jugement sur ce point. Elle affirme avoir fourni le manuel d'utilisation en langue française. Elle concède la présence de défauts visuels, en précisant qu'elle ne s'engage pas à fournir des machines neuves, mais réfute l'existence de défauts mécaniques, évoquant des incidents inoffensifs dus au défaut d'entretien des machines et de consultation du manuel par l'intimée. Elle fait également observer que le gérant de la société Connection, M. [H] [T], a publiquement vanté la qualité et le fonctionnement des machines fournies dans un article de presse en date du 23 août 2019.
La SAH HMM rappelle en outre qu'en présence de difficultés, le contrat oblige la société Connection à contacter la hotline ou en cas d'échec à faire intervenir un de ses techniciens.
Elle ajoute que le rapport sur de prétendus dysfonctionnements de la société JPB n'est pas pertinent alors que cette société a pour objet sociall'exercice d'' autres activités récréatives et de loisirs'.
Elle soulève enfin que sur 2 000 cartons de pizzas fournis, seuls 1 125 lui ont été retournés, 875 pizzas ont donc été produites ce qui démontre le parfait fonctionnement des machines.
La SAS HMM conteste le rapport d'huissier du 9 août 2019 qui ne fait état que de défauts esthétiques et qui n'est pas pertinent pour juger du fonctionnement de la machine alors que l'huissier n'a pas branché les machines pour les tester.
Enfin, elle produit des échanges de courriels qui démontrent que la société Connection est en possession du manuel d'utilisation en français.
La société Connection sollicite inversement la confirmation du jugement sur ce point. Elle soutient que les machines devaient être neuves. Elle s'appuie sur des échanges de courriels où l'appelante reconnaît les dysfonctionnements, ainsi que sur le constat d'huissier précité et le rapport de la société JPB intervenue plusieurs fois sur les machines. Elle précise que l'objet social de cette société est le négoce, l'entretien, le dépannage et l'installation de tous les équipements neufs ou d'occasions, destinés à l'activité des hôtels, cafés et restaurants tels que notamment tous matériels, mobiliers meublants, électroménagers, machines à café, vaisselle et pièces détachées, ce qui la rend compétente pour apprécier la qualité des machines litigieuses.
Concernant le manuel, elle produit des courriels démontrant qu'elle est dans l'attente de la version française du manuel d'utilisation. Elle ajoute que, contrairement aux stipulations contractuelles, elle ne bénéficie pas d'une formation, et que les techniciens présents lors de l'installation n'étaient pas francophones.
Concernant les 875 cartons de pizzas, elle indique que, face aux erreurs manifestes dans les temps de cuisson indiqués sur le tableau de cuisson et vu l'absence de formation et de manuel, elle avait été contrainte de faire de nombreux tests.
Sur l'article de presse où le dirigeant de la société Connection encense les distributeurs litigieux, il ne faut y voir qu'une tentative de ce dernier d'attirer les clients pour rentabiliser son investissement.
- Sur l'obligation de livraison,
Il doit être consaté qu'aucun délai de livraison n'était stipulé dans les contrats de location de distributeurs. Dès lors, la société HMM devait livrer les distributeurs dans un délai raisonnable. Or, le délai de quatre mois pour livrer deux distributeurs volumineux depuis l'Italie doit être considéré comme constituant un délai raisonnable.
Le premier juge a donc considéré à juste titre que la SAS HMM n'a pas violé son obligation de livraison.
- Sur la délivrance d'un produit conforme,
Le courriel du 9 août 2019 est ambigu et ne permet pas d'établir un aveu de la part de la SAS HMM sur la présence et la nature d'un dysfonctionnement. Dans un courriel du 1er novembre 2019, M. [J] informe qu'il accepte de remplacer la machine défectueuse. Selon le procès verbal de constat dressé le 9 août 2019 par Maître [Y], Huissier de justice, de nombreux défauts esthétiques sont présents mais également certains défauts qui compromettent ou révèlent un dysfonctionnement comme la présence de résidus non évacués dans la partie cuisson ou, sur les parois intérieures, la prise électrique sans terre, l'oxydation ou la déformation de joints d'étanchéité. Au surplus, un rapport d'intervention établi par la société JPB fait état de problèmes récurrents résidant dans des défauts d'étanchéité et des défaillances moteurs.
La SAS HMM produit pour sa part un relevé des alarmes qu'elle a établi faisant état de dysfonctionnements mineurs.
Il en résulte que, si la SASHMM ne s'était pas engagée à livrer des distributeurs neufs, il est néanmoins établi que les deux appareils fournis par la SAS HMM présentent des dysfonctionnements majeurs compromettant leur usage.
Ainsi, comme l'a pertinemment retenu le premier juge, la SAS HMM a violé son obligation de délivrance conforme.
- Sur l'obligation d'assistance,
Dans un courriel du 28 octobre 2019, M. [T] indique s'être référé à la page 41 du manuel d'utilisation. La société Connection fournit une attestation non signée mais établie par la société JPB en date du 24 novembre 2020 affirmant au contraire qu'aucun manuel en français n'avait été fourni. M. [Y] atteste que le technicien envoyé en sa présence n'était pas francophone. L'attestation précitée corrobore le constat d'huissier. Il n'est fait état d'aucun message ou mail apportant une aide technique utile.
Force est ainsi de constater que la SAS HMM ne démontre pas avoir délivré une assistance utile à la société Connection, ni lui avoir fourni un manuel d'utilisation exploitable.
Il s'en suit que, contrairement à ce qu'a dit le premier juge, la SAS HMM a violé son obligation d'assistance.
Par conséquent, la SAS HMM a indubitablement violé ses obligations contractuelles. Le jugement déféré sera confirmé de ce chef.
Sur les demandes en paiement de la société Connection
- sur la demande en restitution de la somme de 14 400 euros au titre des deux premiers loyers
Le jugement critiqué condamne la SAS HMM à la restitution des deux premiers loyers. La SAS HMM sollicite l'infirmation de ce chef de jugement au motif qu'elle aurait respecté ses obligations contractuelles, alors que la société Connection sollicite sur ce point la confirmation au regard des manquements contractuels de l'appelante.
Il sera rappelé que la résiliation du contrat a été prononcée par la société HMM par courrier du 14 novembre 2019 pour non-paiement des loyers, sans que cette mesure fasse en elle-même l'objet d'une contestation.
Or, à la différence de la résolution, la résiliation n'a d'effet que pour l'avenir, mais n'a pas d'effet rétroactif, de sorte que les prestations échues antérieurement à la résiliation demeurent dues.
Par conséquent, la cour infirmera le jugement critiqué en ce qu'il l'a condamnée à restituer à la société Connection la somme de 14 400 euros versée au titre du premiers loyer de chacun des deux contrats.
- sur la demande de dommages et intérêts formée par la société Connection, au titre des désagréments liés à la violation par la SAS HMM de ses obligations,
Le jugement critiqué a condamné la SAS HMM à verser à la société Connection la somme de 2 000 euros à ce titre.
Cette dernière sollicite confirmation du jugement de ce chef, tandis que la SAS HMM sollicite son infirmation dans la mesure où elle n'a pas commis de faute et que la société Connection ne justifie pas de son préjudice.
Cependant, il a été établi précédemment que l'appelante a violé ses obligations contractuelles en ayant fourni des distributeurs dysfonctionnels nécessitant de nombreuses interventions, impliquant des arrêts d'exploitation et forçant la société Connection à effectuer des démarches pour, d'abord, obtenir une nouvelle machine en remplacement de la première défectueuse, puis pour se délier du contrat l'unissant à la SAS HMM.
Par conséquent, la cour confirme le jugement critiqué en ce qu'il a condamné la SAS HMM au versement de la somme de 2 000 euros à la société Connection, ce montant correspondant à une juste évaluation du préjudice causé à cette dernière par les désagréments subis.
- sur le remboursement des frais de déplacement en Espagne de la société Connection,
C'est par des motifs pertinents, que la cour adopte, et dont les pièces produites en appel ne permettent pas de remettre en cause le bien-fondé, que les premiers juges ont débouté la société Connection de sa demande. Ainsi, la cour confirmera le jugement critiqué sur ce point.
- sur la demande de remboursement des frais techniques d'installation de la société Connection,
C'est par des motifs pertinents que la cour adopte que le jugement critiqué a débouté la société Connection de sa demande. Ainsi, la cour confirme le jugement critiqué sur ce point.
- sur la demande de remboursement des frais d'intervention de la SAS HMM,
La société SAS HMM ne produit aucune facture de nature à étayer sa demande.
Par conséquent, la demande de la SAS HMM en remboursement des frais d'intervention, présentée pour la première fois à hauteur d'appel, sera rejetée.
Sur la demande en paiement de la société HMM
- sur la demande en paiement des loyers de septembre, octobre et novembre 2019
Il est établi qu'en raison des carences contractuelles de la société HMM, la société Connection s'est retrouvée dans l'impossibilité d'exploiter normalement les distributeurs litigieux,et d'en tirer les revenus qu'elle était en droit d'en attendre. Le fait que les loyers étaient ainsi dépourvus d'une réelle contrepartie confère aux manquements de l'appelante une gravité suffisante pour justifier qu'en vertu de l'exception d'inexécution l'intimée s'oppose au règlement des loyers postérieurs.
Le jugement déféré sera confirmé sur ce point.
- sur la demande reconventionnelle de la SAS HMM en paiement de dommages et intérêts,
La SAS HMM sollicite la somme de 5 000 euros au titre des dommages et intérêts en réparation du préjudice économique résultant de la violation par son contractant de ses obligations, ainsi que la somme de 2 500 euros en réparation du préjudice moral subi du fait de l'attitude déloyale de la société Connection.
Dès lors qu'il a été constaté précédemment que la SAS HMM a manqué à plusieurs de ses obligations contractuelles au détriment de la société Connection, le préjudice qu'elle allègue, soit le discrédit et les frais de mise à disposition des machines, découle directement de son propre comportement contractuel défaillant.
De fait, la SAS HMM ne saurait bénéficier des dommages et intérêts compensant un préjudice dont elle est à l'origine.
Par conséquent, la cour confirme le jugement déféré en ce qu'il a rejeté les demandes de dommages et intérêts de ma SAS HMM et la déboute de ses demandes.
- sur la restitution de la somme de 898,50 euros
La société HMM réclame la restitution d'une somme de 898,50 euros, qu'elle indique avoir réglée à l'intimée au titre des interventions de la société JPB, qu'elle estime indues.
Toutefois, dès lors que ces interventions ont été nécessitées par les dysfonctionnements dont l'appelante est elle-même responsable, elle ne saurait prétendre au remboursement de leur coût, qu'elle avait d'ailleurs réglé.
Cette demande, formée pour la première fois à hauteur d'appel, devra être rejetée.
Par ces motifs,
La cour, statuant contradictoirement, après débats en audience publique et en avoir délibéré conformément à la loi :
Déclare irrecevable la fin de non-recevoir tirée par la SAS Happy Meal Matic du défaut de qualité à agir de la SAS Connection ;
Confirme le jugement rendu le 21 avril 2021 par le tribunal de commerce de Besançon , sauf en ce qu'il a condamné la SAS Happy Meal Matic à la restitution des deux premiers loyers à hauteur de 14 400 euros ;
Statuant à nouveau,
- rejette la demande formée par la SAS Connection à l'encontre de la SAS Happy Meal Matic en remboursement de la somme de 14 400 euros ;
Y ajoutant,
- rejette la demande formée par la SAS Connection en paiement de la somme de 1 600 euros au titre des frais d'intervention ;
- rejette la demande formée par la SAS Happy Meal Matic en remboursement de la somme de 898,50 euros au titre des frais d'intervention ;
- condamne la SAS Happy Meal Matic aux dépens d'appel ;
- condamne, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, la SAS Happy Meal Matic à payer à la SAS Connection de la somme de 2500 euros.
Ledit arrêt a été signé par Michel Wachter, président de chambre, magistrat ayant
participé au délibéré et Fabienne Arnoux, greffier.
Le greffier, Le président,