ORDONNANCE N°
INCIDENT
SMG/CE
COUR D'APPEL DE BESANCON
ORDONNANCE D'INCIDENT
DU 9 MARS 2023
CHAMBRE SOCIALE
audience non publique
du 23 FEVRIER 2023
N° de rôle : N° RG 22/00421 - N° Portalis DBVG-V-B7G-EPSU
s/ appel d'une décision
du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MONTBELIARD
en date du 28 janvier 2022
code affaire : 80P
Demande de paiement de créances salariales sans contestation du motif de la rupture du contrat de travail
[E] [K]
c/
Société FAURECIA SYSTEMES D'ECHAPPEMENT
PARTIES EN CAUSE :
APPELANTE
Madame [E] [K], demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Emmanuelle-Marie PERNET, avocat au barreau de BESANCON, présente
ET :
INTIMEE
Société FAURECIA SYSTEMES D'ECHAPPEMENT sise [Adresse 1]
représenté par Me Ludovic PAUTHIER, avocat au barreau de BESANCON, présent
///////////
Nous, Christophe ESTEVE, Président de chambre, Magistrat en charge de la mise en état, assisté de Madame MERSON GREDLER, Greffière, Avons rendu l'ordonnance suivante :
Vu la procédure enregistrée sous le numéro du répertoire général R.G. 22/00421 - N° Portalis DBVG-V-B7G-EPSU,
Vu la déclaration d'appel transmise le 8 mars 2022 par Mme [E] [K] à l'encontre d'un jugement rendu le 28 janvier 2022 par le conseil de prud'hommes de Montbéliard dans le cadre du litige l'opposant à la société par actions simplifiée FAURECIA SYSTEMES D'ECHAPPEMENT,
Vu l'avis de désignation du conseiller de la mise en état en date du 10 mars 2022,
Vu les conclusions d'appelant transmises le 17 mai 2022,
Vu les conclusions d'intimée transmises le 17 août 2022,
Vu les premières conclusions d'incident transmises le 30 septembre 2022 par Mme [E] [K], appelante et demanderesse à l'incident,
Vu la sommation de communiquer délivrée le 12 janvier 2023 par l'appelant à l'intimée,
Vu les dernières conclusions d'incident transmises le 12 janvier 2023 par Mme [E] [K], qui demande au conseiller de la mise en état de :
- juger que la juridiction du conseiller de la mise en état est compétente pour statuer sur la recevabilité des demandes d'infirmation formulées par la société FAURECIA SYSTEMES D'ECHAPPEMENT,
- juger irrecevables les demandes d'infirmation du jugement formulées par la société FAURECIA SYSTEMES D'ECHAPPEMENT dans le dispositif de ses conclusions d'intimée, faute d'avoir régularisé un appel incident dans le délai de l'article 909 du code de procédure civile et dans les formes exigées par le code de procédure civile,
- juger en conséquence que les condamnations de la société FAURECIA SYSTEMES
D'ECHAPPEMENT à lui verser les sommes de 8 094 € outre 809,40 € d'incidence de congés payés au titre de la prime FVC, 2.351,23 € au titre du rappel d'indemnité de congés payés sur son préavis et 36,45 € au titre du rappel d'indemnité de licenciement sont définitives en vertu de l'autorité de la chose jugée,
à défaut pour le conseiller de la mise en état de se déclarer compétent,
- renvoyer cette question à l'appréciation de la cour d'appel,
- ordonner à la société FAURECIA SYSTEMES D'ECHAPPEMENT de produire le calcul détaillé et la méthode de calcul de la prime FVC due à Mme [E] [K] au titre du 2è semestre 2019 et pour la période du 01/10/2020 (en réalité 01/10/2019) au 10/01/2020 au prorata temporis,
- condamner la société FAURECIA SYSTEMES D'ECHAPPEMENT à lui payer la somme de 2.000 € au titre des frais de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens pour l'instance devant le conseiller de la mise en état,
Vu les dernières conclusions d'incident transmises le 15 novembre 2022 par la société FAURECIA SYSTEMES D'ECHAPPEMENT, intimée et défenderesse à l'incident, qui demande au conseiller de la mise en état de :
à titre principal :
- se déclarer incompétent pour statuer sur les demandes formulées par Mme [K] dans le cadre de ses conclusions d'incident ;
à titre subsidiaire :
- juger que la cour d'appel de Besançon a été valablement saisie, par la société FSE, d'un appel incident sur les dispositions non dévolues à la cour par la déclaration d'appel de Mme [K] ;
- rejeter la demande de Mme [K] aux fins de prononcé de l'irrecevabilité de l'appel incident formé par la société FSE ;
en tout état de cause :
- condamner Mme [K] à lui payer la somme de 3.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner Mme [K] aux entiers dépens de l'incident,
L'incident ayant pu être retenu à l'audience de mise en état du 12 janvier 2023,
Vu l'ordonnance avant dire droit rendue le 26 janvier 2023 par laquelle la réouverture des débats a été ordonnée à l'audience de mise en état du 9 février 2023 à 10h30 afin de mettre les parties en mesure de faire valoir leurs observations sur la fin de non-recevoir relevée d'office, tirée de la question de savoir si les conclusions d'intimée litigieuses déterminent l'objet du litige, au sens des dispositions des articles 909, 910-1 et 954 du code de procédure civile, dans la mesure où le dispositif desdites conclusions comportent bien une demande d'infirmation de divers chefs du jugement critiqués, mais aucune prétention en rapport avec ces derniers,
Vu les conclusions transmises le 17 février 2023 par la société FAURECIA SYSTEMES D'ECHAPPEMENT, intimée et défenderesse à l'incident, qui demande au conseiller de la mise en état de juger recevables les conclusions d'intimée à titre principal et d'appelante à titre incident transmises le 17 août 2022,
Après débats à l'audience de mise en état du 23 février 2023 à laquelle Mme [E] [K], qui n'a pas reconclu à la suite de la réouverture des débats, a déclaré s'en rapporter,
SUR CE
Sur la recevabilité de l'appel incident :
L'article 909 du code de procédure civile dispose :
« L'intimé dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, d'un délai de trois mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant prévues à l'article 908 pour remettre ses conclusions au greffe et former, le cas échéant, appel incident ou appel provoqué. »
Aux termes des dispositions de l'article 910-1 du même code, les conclusions exigées par les articles 905-2 et 908 à 910 sont celles, adressées à la cour, qui sont remises au greffe et notifiées dans les délais prévus par ces textes et qui déterminent l'objet du litige.
L'article 954 dispose :
« Les conclusions d'appel contiennent, en en-tête, les indications prévues à l'article 961. Elles doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation. Un bordereau récapitulatif des pièces est annexé.
Les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l'énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu'un dispositif récapitulant les prétentions. Si, dans la discussion, des moyens nouveaux par rapport aux précédentes écritures sont invoqués au soutien des prétentions, ils sont présentés de manière formellement distincte.
La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.
Les parties doivent reprendre, dans leurs dernières écritures, les prétentions et moyens précédemment présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures. A défaut, elles sont réputées les avoir abandonnés et la cour ne statue que sur les dernières conclusions déposées.
La partie qui conclut à l'infirmation du jugement doit expressément énoncer les moyens qu'elle invoque sans pouvoir procéder par voie de référence à ses conclusions de première instance.
La partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs. »
Aux termes des dispositions de l'article 914, les parties soumettent au conseiller de la mise en état, qui est seul compétent depuis sa désignation et jusqu'à la clôture de l'instruction, leurs conclusions, spécialement adressées à ce magistrat, tendant, notamment, à déclarer les conclusions irrecevables en application des articles 909 et 910.
L'étendue des prétentions dont est saisie la cour d'appel étant déterminée dans les conditions fixées par l'article 954 du même code, le respect de la diligence impartie par l'article 909 est nécessairement apprécié en considération des prescriptions de l'article 954.
Il en résulte que le conseiller de la mise en état est bien compétent pour statuer sur l'incident soulevé par l'appelante et sur le moyen qu'il a relevé d'office.
Au soutien de sa demande tendant à voir juger irrecevables les demandes d'infirmation formulées par la société FAURECIA SYSTEMES D'ECHAPPEMENT dans le dispositif de ses conclusions d'intimée, Mme [K] développe les arguments suivants :
- les conclusions d'intimée ne mentionnent pas dans leur entête l'existence d'un appel incident ;
- la société y est qualifiée de simple intimée, sans qu'il ne soit fait référence à une qualité d'appelante à titre incident ;
- le message RPVA de transmission de ces conclusions mentionne qu'il s'agit de conclusions sans appel incident ;
- ces conclusions ne contiennent aucune critique des chefs de jugement dont la société entend obtenir réformation.
Les trois premiers arguments sont dénués d'incidence sur la recevabilité des conclusions de l'intimée, l'appelante ajoutant aux dispositions susvisées des conditions de recevabilité qu'elles ne prévoient pas.
Quant au quatrième, il manque en fait, les chefs critiqués étant mentionnés dans le dispositif des conclusions d'intimée et faisant l'objet d'une discussion pages 51 à 54 desdites conclusions.
En revanche se pose la question de savoir si les conclusions d'intimée litigieuses déterminent l'objet du litige, au sens des dispositions des articles 909, 910-1 et 954 du code de procédure civile, dans la mesure où le dispositif desdites conclusions comportent bien une demande d'infirmation de divers chefs du jugement critiqués, mais aucune prétention en rapport avec ces derniers.
Il doit être rappelé :
- qu'en application de l'article 542 du code de procédure civile, l'appel, qu'il soit principal ou incident, tend, par la critique du jugement rendu par une juridiction du premier degré, à sa réformation ou à son annulation par la cour d'appel.
- que la demande d'infirmation, si elle est nécessaire, est insuffisante en soi pour valoir prétentions sur les chefs de jugement critiqués, l'appelant étant tenu de formuler expressément ses prétentions à ce titre (2è Civ. 5 décembre 2013 n° 12-23.611).
Au cas présent, la société FAURECIA SYSTEMES D'ECHAPPEMENT a transmis ses conclusions d'intimée le 17 août 2022, dont le dispositif, qui seul saisit la cour, est ainsi rédigé :
« - juger fondé le licenciement pour insuffisance professionnelle de Madame [K],
- constater l'absence d'agissements constitutifs de harcèlement moral à l'égard de Madame [K],
- constater l'absence de discrimination en raison de son handicap à l'égard de Madame [K],
- constater l'absence de manquement par la société FAURECIA SYSTEMES D'ECHAPPEMENT à son obligation de sécurité,
en conséquence :
- confirmer le jugement du CPH de Montbéliard du 28 janvier 2022 en ce qu'il a débouté Madame [K] de ses demandes à titre principal et subsidiaire,
- infirmer le jugement du CPH de Montbéliard du 28 janvier 2022 en ce qu'il a condamné la société FSE à verser à Madame [K] :
- 8.094 euros bruts au titre de la prime FVC, ainsi que 809,40 euros bruts au titre des congés payés afférents,
- 2.351,23 euros bruts à titre de rappel d'indemnité de congés payés sur préavis,
- 36,45 euros à titre de rappel d'indemnité de licenciement,
- condamner Madame [K] à verser à la société FAURECIA SYSTEMES D'ECHAPPEMENT la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner Madame [K] aux entiers dépens. ».
Si le dispositif de ces conclusions d'intimée comprend bien une demande d'infirmation de divers chefs de jugement critiqués, en revanche aucune prétention en rapport avec ces derniers n'y est formalisée.
C'est en vain que l'intimée se prévaut du fait que ses prétentions, qui tendent sans aucun doute au rejet des demandes de Madame [K], figurent dans le corps de ses conclusions, alors que celui-ci ne saisit pas la cour, qui ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif.
Il s'ensuit que les conclusions d'intimée, en ce qu'elles portent sur l'appel incident, ne déterminent pas l'objet du litige en appel et ne sont donc pas conformes aux dispositions susvisées.
La société n'a dès lors pas valablement formé appel incident, de sorte que ses demandes tendant à l'infirmation des chefs de jugement critiqués relatifs à la prime FVC, à l'indemnité de congés payés sur préavis et au rappel d'indemnité de licenciement ne peuvent qu'être déclarées irrecevables.
Sur la demande de l'appelante tendant à voir juger que les condamnations de la société Faurecia systèmes d'échappement à lui payer les sommes de 8.094 € outre 809,40 € d'incidence de congés payés au titre de la prime FVC, 2.351,23 € au titre du rappel d'indemnité de congés payés sur son préavis et 36,45 € au titre du rappel d'indemnité de licenciement sont définitives en vertu de l'autorité de la chose jugée :
Il n'entre pas dans les pouvoirs du conseiller de la mise en état de tirer les conséquences résultant du fait qu'un chef du dispositif de la décision de première instance n'est pas frappé d'appel, et spécialement pas d'un appel incident.
Il convient donc de déclarer cette demande irrecevable.
Sur la demande de production de pièces :
En application des articles 907, 788 et 789, 5° du code de procédure civile, le conseiller de la mise en état est compétent pour ordonner si nécessaire la production de pièces détenues par une partie au litige devant la cour.
Au cas présent, il a été jugé ci-avant que c'est à juste titre que l'appelante soutient que la cour n'est pas valablement saisie du chef du jugement entrepris portant sur la condamnation de la société à lui payer la somme de 8.094 € au titre de la prime FVC outre celle de 809,40 € au titre des congés payés afférents, de sorte qu'elle n'est pas recevable à solliciter communication par la partie adverse du calcul détaillé et de la méthode de calcul de la prime FVC due pour la même période.
Il convient en conséquence de rejeter la demande de production de pièces, étant précisé que la mention de son caractère subsidiaire ne figure que dans le corps des dernières conclusions d'incident de Mme [K].
Sur les frais irrépétibles et les dépens de l'incident :
Dans le cadre du présent incident, il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'une ou l'autre des parties.
Les dépens de l'incident suivront le sort de ceux de l'instance d'appel.
PAR CES MOTIFS
Nous, magistrat en charge de la mise en état,
Nous déclarons compétent pour statuer sur la demande tendant à l'irrecevabilité de l'appel incident ;
Disons que la société FAURECIA SYSTEMES D'ECHAPPEMENT n'a pas valablement formé appel incident à l'encontre du jugement entrepris ;
Déclarons en conséquence irrecevables les demandes de la société FAURECIA SYSTEMES D'ECHAPPEMENT tendant à l'infirmation des chefs de jugement critiqués relatifs à la prime FVC, à l'indemnité de congés payés sur préavis et au rappel d'indemnité de licenciement ;
Déclarons irrecevables les demandes de Mme [E] [K] tendant à voir juger que les condamnations de la société FAURECIA SYSTEMES D'ECHAPPEMENT à lui payer les sommes de 8.094 € outre 809,40 € d'incidence de congés payés au titre de la prime FVC, 2.351,23 € au titre du rappel d'indemnité de congés payés sur son préavis et 36,45 € au titre du rappel d'indemnité de licenciement sont définitives en vertu de l'autorité de la chose jugée ;
Rejetons la demande de production de pièces présentée par Mme [E] [K], portant sur le calcul détaillé et la méthode de calcul de la prime FVC due au titre du 2è semestre 2019 et pour la période du 01/10/2020 (en réalité 01/10/2019) au 10 janvier 2020 au prorata temporis ;
Disons n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Disons que les dépens de l'incident suivront le sort de ceux de l'instance d'appel ;
Rappelons qu'en application de l'article 916 du code de procédure civile, la présente ordonnance peut être déférée à la cour dans les quinze jours de sa date, par requête remise au greffe de cette chambre contenant, outre les mentions prescrites par l'article 57 et à peine d'irrecevabilité, l'indication de la décision déférée ainsi qu'un exposé des moyens en fait et en droit ;
Disons que la présente ordonnance sera notifiée aux représentants des parties par voie électronique.
Ainsi rendue et signée le NEUF MARS DEUX MILLE VINGT TROIS par Monsieur Christophe ESTEVE Président de chambre, magistrat en charge de la mise en état, assistée de Madame MERSON GREDLER, Greffière.
LA GREFFIERE, LE MAGISTRAT EN CHARGE DE LA MISE EN ETAT