La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/02/2023 | FRANCE | N°21/01520

France | France, Cour d'appel de Besançon, 1ère chambre, 14 février 2023, 21/01520


ARRÊT N°



FD/FA



COUR D'APPEL DE BESANÇON

- 172 501 116 00013 -



ARRÊT DU 14 FEVRIER 2023



PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE









Contradictoire

Audience publique du 13 décembre 2022

N° de rôle : N° RG 21/01520 - N° Portalis DBVG-V-B7F-ENHB



S/appel d'une décision du TRIBUNAL DE COMMERCE DE BELFORT en date du 13 juillet 2021 [RG N° 19/04886]

Code affaire : 59B Demande en paiement relative à un autre contrat





S.E.L.A.S. P

HARMACIE DU MARCHE C/ S.A.R.L. CALK, S.A.R.L. EVERYS, S.A.S.U. CEGELEASE







PARTIES EN CAUSE :





S.E.L.A.S. PHARMACIE DU MARCHE, immatriculée au RCS de belfort sous le numéro 519 129 4...

ARRÊT N°

FD/FA

COUR D'APPEL DE BESANÇON

- 172 501 116 00013 -

ARRÊT DU 14 FEVRIER 2023

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

Contradictoire

Audience publique du 13 décembre 2022

N° de rôle : N° RG 21/01520 - N° Portalis DBVG-V-B7F-ENHB

S/appel d'une décision du TRIBUNAL DE COMMERCE DE BELFORT en date du 13 juillet 2021 [RG N° 19/04886]

Code affaire : 59B Demande en paiement relative à un autre contrat

S.E.L.A.S. PHARMACIE DU MARCHE C/ S.A.R.L. CALK, S.A.R.L. EVERYS, S.A.S.U. CEGELEASE

PARTIES EN CAUSE :

S.E.L.A.S. PHARMACIE DU MARCHE, immatriculée au RCS de belfort sous le numéro 519 129 407, représentée par son président en exercice domicilié audit siège

Sise [Adresse 2]

Représentée par Me Robert BAUER, avocat au barreau de MONTBELIARD

APPELANTE

ET :

S.A.R.L. CALK prise en la personne de son gérant en exercice domicilié de droit audit siège, immatriculée au RCS de Besançon, sous le numéro 501 587 356

Sise [Adresse 1]

Représentée par Me Vincent BRAILLARD de la SELARL JURIDIL, avocat au barreau de BESANCON

S.A.R.L. EVERYS Société exerçant sous l'enseigne WINPHARMA, immatriculée au RCS de Vannes sous le numéro 398 064 055, représentée par son président en exercice domicilié audit siège

[Adresse 4]

Représentée par Me Anne-Laure MAUVAIS, avocat au barreau de BELFORT, avocat postulant,

Représentée par Me Jean-Michel PORTAIL, avocat au barreau de BAYONNE, avocat plaidant

S.A.S.U. CEGELEASE exerçant sous l'enseigne PHARMALEASE, immatriculée au RCS de Lille, sous le numéro 622 018 091, représentée par son président en exercice domicilié audit siège

[Adresse 3]

Représentée par Me Alexandra MOUGIN de la SELARL MOUGIN, avocat au barreau de BELFORT

INTIMÉES

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats :

PRÉSIDENT : Monsieur Michel WACHTER, Président de chambre.

ASSESSEURS : Mesdames Bénédicte MANTEAUX et Florence DOMENEGO, Conseillers.

GREFFIER : Madame Fabienne ARNOUX, Greffier.

Lors du délibéré :

PRÉSIDENT : Monsieur Michel WACHTER, Président de chambre,

ASSESSEURS : Mesdames Bénédicte MANTEAUX conseiller et Florence DOMENEGO, magistrat rédacteur.

L'affaire, plaidée à l'audience du 13 décembre 2022 a été mise en délibéré au 14 février 2023. Les parties ont été avisées qu'à cette date l'arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe.

Faits et prétentions des parties :

En 2013, la PHARMACIE DES GLACES a équipé son officine du logiciel WINPHARMA OCEANE, édité par la SARL EVERYS et distribué sur le département du Doubs par la SARL CALK , laquelle en assurait la maintenance et garantissait par ailleurs l'assistance sur le réseau et sur le matériel selon contrats en date du 17 juin 2013.

Selon devis en date du 5 août 2013, la PHARMACIE DES GLACES, devenue la SELAS PHARMACIE DU MARCHE en suite de l'acquisition d'une seconde officine, s'est fait installer un système d'étiquettes électroniques fonctionnant avec le logiciel WINPHARMA destiné à faciliter la gestion des stocks et commercialisé par la SARL EVERYS, qu'elle a acquis par contrat de location financière consentie par la SASU CEGELEASE, exerçant son activité sous l'enseigne PHARMALEASE.

Le 28 décembre 2015, un nouveau contrat de maintenance du logiciel WINPHARMA a été conclu avec la SARL CALK et la SARL EVERYS, lequel est venu se substituer aux précédents contrats. La SARL EVERYS et la SELAS PHARMACIE DU MARCHE se sont ainsi accordées pour voir facturer directement par la SARL EVERYS à la PHARMACIE DU MARCHE la mise à jour de la base produits et la mise à jour et les droits des licences Winpharma. La SARL CALK n'a conservé que la maintenance du matériel, l'accès à la hotline et la maintenance de quelques modules, conformément au contrat signé le 17 juin 2013.

Le 20 septembre 2016, la SELAS PHARMACIE DU MARCHE a remplacé son système d'étiquettes et a loué un système d'étiquetage électronique de nouvelle génération dénommé ELSA par le biais d'un nouveau contrat de location financière consenti par la SASU CEGELEASE, moyennant un loyer mensuel de 897,29 euros HT sur 72 mois.

Mécontente de la qualité des prestations ainsi fournies par le logiciel et reprochant à la SARL CALK son inaction pour remédier aux dysfonctionnements constatés, la SELAS PHARMACIE DU MARCHE a sollicité, par courrier du 20 septembre 2019, la rupture anticipée des contrats d'abonnement, de maintenance et de location souscrits auprès de la SARL CALK et de la SARL EVERYS avec effet au 31 décembre 2019.

En l'absence de réponse, la SELAS PHARMACIE DU MARCHE a saisi le 12 novembre 2019 le tribunal de commerce de Belfort aux fins de solliciter la résolution du contrat de vente du système d'étiquetage conclu Ie 20 septembre 2016 avec la SARL CALK, la résiliation à compter

du 1er novembre 2016 des contrats de maintenance conclus avec les SARL CALK et EVERYS ainsi que le prononcé de la caducité du contrat de location financière conclu le 20 septembre 2016 avec la SASU CEGELEASE et le paiement de diverses sommes en sa faveur.

Dans son jugement du 13 juillet 2021, le tribunal de commerce de Belfort a :

- constaté la résiliation unilatérale par la SELAS PHARMACIE DU MARCHE du contrat de vente du système d'étiquetage électronique ELSA commandé en septembre 2016 à la SARL CALK avec effet à la date du 31 décembre 2019 ;

- débouté la SELAS PHARMACIE DU MARCHE de sa demande tendant à voir prononcer la résolution judiciaire dudit contrat ;

- condamné la SELAS PHARMACIE DU MARCHE à payer à la SASU CEGELEASE la somme de 42 566,14 euros TTC au titre des loyers impayés des mois de novembre 2019 à février 2020 et de l'indemnité de résiliation augmentés d'une pénalité de 10 % ;

- condamné la SELAS PHARMACIE DU MARCHE à payer à la SASU CEGELEASE la somme de 1 076,75 euros par mois à compter du 1er mars 2020 jusqu'à restitution effective des matériels faisant l'objet du contrat de location financière n° 816 24576/10, au titre de l'indemnité d'indisponibilité contractuelle ;

- constaté la résiliation par la SELAS PHARMACIE DU MARCHE du « contrat de maintenance du logiciel WP '' conclu avec la SARL EVERYS en 2015, avec effet à la date du 31 décembre 2019 ;

- débouté la SELAS PHARMACIE DU MARCHE de sa demande tendant à voir prononcer la résolutionjudiciaire dudit contrat ;

- condamné la SELAS PHARMACIE DU MARCHE à payer à la SARL CALK la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et l'a déboutée du surplus de sa demande ;

- condamné la SELAS PHARMACIE DU MARCHE à payer à la SASU CEGELEASE la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et l'a déboutée du surplus de sa demande ;

- condamné la SELAS PHARMACIE DU MARCHE à payer à la SARL EVERYS la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et l' a déboutée du surplus de sa demande ;

- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement ;

- condamné la SELAS PHARMACIE DU MARCHE à supporter les dépens d'instance, dont les frais de greffe s'élèvent à la somme de 115,46 euros ;

- débouté les parties du surplus de leurs demandes.

Pour statuer ainsi, le tribunal a retenu que :

- s'agissant de ses relations avec la SARL CALK, même si la SELAS PHARMACIE DU MARCHE n'avait pas formellement mis en demeure cette dernière de remédier aux dysfonctionnements invoqués ni demandé à celle-ci de s'en expliquer préalablement à l'envoi d'un courrier de résiliation du contrat de vente du système d'étiquetage électronique en date du 20 septembre 2019, le libellé de ce courrier de résiliation était cependant dépourvu de toute ambiguïté quant à la volonté de la SELAS PHARMACIE DU MARCHE de résilier unilatéralement l'ensemble des contrats la liant à la SARL CALK et que la rupture du contrat de vente était donc acquise au 31 décembre 2019 ;

- s'agissant de ses relations avec la SASU CEGELEASE, le contrat de vente ainsi résilié n'était pas interdépendant du contrat conclu avec la SASU CEGELEASE et que seule l'interruption de paiement des loyers à compter du mois de novembre 2019 avait conduit cette société à prononcer le 24 février 2020 la résiliation du contrat de location financière et à solliciter de manière fondée le paiement des loyers demeurés impayés, de l'indemnité de résiliation et des pénalités prévues à l'article 15.3 des conditions générales du contrat ;

- s'agissant de ses relations avec la SARL EVERYS, le contrat de maintenance avait été rompu unilatéralement par la SELAS PHARMACIE DU MARCHE dans son courrier du 20 septembre 2019, conformément aux stipulations contractuelles, et la SARL EVERYS avait ainsi interrompu ses prestations à compter du 28 décembre 2019, date d'échéance annuelle du contrat conclu le 24 février 2015 ;

- aucune expertise ne se justifiait compte tenu des éléments présentés.

Par déclaration en date du 12 août 2021, la SELAS PHARMACIE DU MARCHE a relevé appel de cette décision et, dans ses dernières conclusions transmises le 27 juin 2022, demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et statuant à nouveau, de :

- prononcer la résolution du contrat de vente du système d'étiquetage électronique ELSA ;

- constater en conséquence, et au besoin prononcer, la caducité du contrat de location financière conclu avec la SASU CEGELEASE ;

- condamner la SASU CEGELEASE à lui payer la somme de 38 763 euros, correspondant aux loyers versés par elle ;

- lui donner acte de ce qu'elle tient à disposition de CEGELEASE l'ensemble du matériel objet du contrat de location caduc ;

- prononcer la résiliation à partir du ler novembre 2016 du contrat de maintenance conclu avec la SARL EVERYS le 24 février 2015 ;

- condamner en conséquence la SARL EVERYS à lui payer la somme de 7 425,20 euros ;

- prononcer la résiliation à partir du 1er novembre 2016 du contrat de maintenance conclu avec la SARL CALK ;

- condamner en conséquence la SARL CALK à lui payer la somme de 7338, 24 euros ;

- condamner enfin in solidum les sociétés CALK, EVERYS et CEGELEASE à lui payer la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

A l'appui de ses demandes, la SELAS PHARMACIE DU MARCHE soutient que le système de scan avec étiquettes électroniques et contrôle du stock par informatique intégré au progiciel WINPHARMA n'a jamais fonctionné de manière satisfaisante ; que les dysfonctionnements se sont accrus, sans que les sociétés EVERYS et CALK n'interviennent efficacement pour les faire cesser ; que ces derniers ont cependant sérieusement perturbé le fonctionnement de l'officine et généré des litiges avec les clients en raison des prix erronés ou des ruptures de stocks ; que la SARL CALK n'a ce faisant pas satisfait à son obligation de délivrance conforme du système d'étiquetage électronique ELSA; que le contrat de vente passé entre elles le 20 septembre 2016 doit en conséquence être résolu, tout comme doit être déclaré caduc celui ayant permis son financement et résiliés ceux assurant la maintenance du matériel et du logiciel.

Dans ses dernières conclusions transmises le 5 septembre 2022, la SARL CALK demande à la cour de :

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de commerce de Belfort le 13 juillet 2021 ;

- condamner la SELAS PHARMACIE DU MARCHE à lui payer la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouter la SELAS PHARMACIE DU MARCHE de l'ensemble de ses demandes à son encontre ;

- débouter la SASU CEGELEASE de toutes demandes dirigées à son encontre ;

- condamner la SELAS PHARMACIE DU MARCHE aux entiers dépens de l'appel.

A l'appui de ses demandes, la SARL CALK fait principalement valoir qu'elle n'était en charge que de la maintenance du matériel, l'accès à la hotline et la maintenance de quelques modules depuis le 28 décembre 2015 ; que lors de son intervention courant janvier 2019, le système fonctionnait parfaitement ; que, de manière brutale et incompréhensible, la SELAS PHARMACIE DU MARCHE lui avait adressé un courrier recommandé avec AR le 8 juin 2019 pour l'informer de sa volonté d'arrêter le partenariat « étiquettes électroniques » au regard de griefs et dysfonctionnements non-établis ; que l'ensemble en effet des éléments produits par la société PHARMACIE DU MARCHE était nettement insuffisant pour caractériser un manquement contractuel substantiel de sa part justifiant une rupture anticipée du contrat à ses torts et que le contrat ne pouvait en conséquence être résilié unilatéralement par anticipation, alors que son échéance était le 31 octobre 2022.

Dans ses dernières conclusions transmises le 16 décembre 2021, la SARL EVERYS demande à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris en l'ensemble de ses dispositions ;

- y ajoutant, condamner la SELAS PHARMACIE DU MARCHE à lui payer à la somme de 2000 euros supplémentaires en cause d'appel ;

- rejeter toute demande de résiliation judiciaire du contrat de maintenance logicielle WP signé en 2015 et toute demande de condamnation financière à ce titre à son encontre ;

- rejeter toute autre demande de condamnation, solidaire ou autre, de la SELAS PHARMACIE DU MARCHE son encontre ;

- condamner la SELAS PHARMACIE DU MARCHE à la somme totale de 4000 euros au titre ;

de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, dont distraction au profit de Mme Anne-Laure Mauvais, avocate, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

A l'appui de ses conclusions, la SARL EVERYS fait principalement valoir qu'elle n'a aucun rapport contractuel avec la SELAS PHARMACIE DU MARCHE pour ce qui concerne le marché des étiquettes électroniques ELSA issu des contrats de vente CALK et du contrat de crédit-bail CEGELEASE de septembre 2016 n'ayant signé qu'un contrat de maintenance du progiciel WINPHARMA ; que ce contrat, dont les limitations contractuelles sont opposables à la pharmacie, ne concerne que l'assistance pour dysfonctionnements du seul progiciel de gestion WINPHARMA et sa maintenance évolutive ; qu'aucun lien n'est démontré par la SELAS PHARMACIE DU MARCHE entre les dysfonctionnements invoqués sur le système d'étiquettes ELSA, commercialisé par la société M2COMM et un équipement ou une prestation de service quelconques qu'elle devait et qu'elle n'est en conséquence responsable d'aucun manquement contractuel.

Dans ses dernières conclusions transmises le 10 décembre 2021, la SASU CEGELEASE demande à la cour de :

- confirmer le jugement rendu le 13 juillet 2021 par le tribunal de commerce de Belfort en toutes ses dispositions ;

- subsidiairement, ordonner avant dire droit une mesure d'expertise technique judiciaire aux frais avancés de la SELAS PHARMACIE DU MARCHE, afin que puisse être contradictoirement vérifiée l'existence des prétendus dysfonctionnements relatés par la pharmacie , étant entendu que l'expert ainsi désigné devra également se prononcer sur les responsabilités des parties et sur l'imputabilité des éventuelles fautes commises ;

- très subsidiairement, condamner la SARL CALK, son fournisseur, à la garantir et la relever de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre, ainsi qu'à payer l'intégralité des loyers restants dus au titre du contrat de location en cas de résiliation de ce dernier ;

- débouter la SELAS PHARMACIE DU MARCHE de l'ensemble de ses demandes formulées à son encontre et dire qu'elle n'était pas fondée à interrompre le règlement de ses loyers en novembre 2019 ;

- constater en conséquence la résiliation du contrat de location n° 81624576/10 aux torts exclusifs de la SELAS PHARMACIE DU MARCHE et la condamner à lui payer la somme de 42 639,90 euros TTC au titre de l'indemnité contractuelle de résiliation, majorée d'une indemnité mensuelle d'occupation d'un montant de (non précisé) jusqu'au jour de restitution de l'intégralité du matériel loué ;

- condamner également la SELAS PHARMACIE DU MARCHE à lui verser une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La SASU CEGELEASE fait principalement valoir qu'elle s'est exclusivement engagée auprès de la PHARMACIE DU MARCHE à mettre à la disposition de cette dernière un ensemble de matériel à usage professionnel, désigné au contrat de location, en contrepartie du règlement d'un loyer mensuel ; qu'elle n'avait pas connaissance des autres engagements de la pharmacie, lesquels ne peuvent en conséquence lui être opposables ; qu'elle a parfaitement exécuté son engagement contractuel, en livrant le matériel sélectionné le 20 septembre 2016, conformément au contrat de location et qu'elle ne saurait en conséquence, en sa qualité de financeur du matériel, être tenue responsable d'éventuelles difficultés de paramétrage ou de mésusage du matériel loué. Elle soutient subsidiairement que la pharmacie ne démontre ni que le matériel loué auprès d'elle serait en cause ni qu'il serait affecté de dysfonctionnements.

Pour l'exposé complet des moyens des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 22 novembre 2022.

Motifs de la décision :

- sur le contrat de vente du système d'étiquetage électronique ELSA :

Aux termes de l'article 1184 du code civil, dans sa rédaction applicable au litige, la résolution du contrat peut être demandée en justice lorsque l'une des parties ne satisfait pas à ses obligations et que cette inexécution est suffisamment grave ou porte sur une obligation déterminante dans la conclusion du contrat pour justifier qu'il soit mis fin à ce dernier.

En l'espèce, les premiers juges ont débouté la pharmacie de sa demande de résolution judiciaire du contrat de vente du système d'étiquetage ELSA, au motif que la résiliation du contrat de vente du système d'étiquetage électronique était d'ores et déjà intervenue le 31 décembre 2019, à l'inititiave de la pharmacie qui avait adressé un courrier en ce sens le 20 septembre 2019.

Contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, la pharmacie ne pouvait unilatéralement procéder à la résiliation du contrat dès lors qu'aucune stipulation contractuelle ne lui octroyait une telle possibilité. Elle ne pouvait pas plus procéder d'office à la résolution, dès lors que les dispositions de l'article 1226 du code civil, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, applicable au 1er octobre 2016, qui permettent au créancier de résoudre le contrat par voie de notification, ne s'appliquaient pas et que seules s'imposaient celles de l'article 1184 du code civil, soumettant au seul juge le prononcé d'une telle sanction de l'inexécution du contrat.

Il ne saurait en conséquence être tiré aucun effet du courrier de 'résiliation' adressé le 20 septembre 2019 par la pharmacie, lequel ne déliait pas à cette date la contractante de ses obligations.

Reste que, comme le rappelle à raison la pharmacie, le vendeur est tenu à une obligation de délivrance conforme du matériel vendu en application des dispositions des articles 1603 et suivants du code civil.

Si la pharmacie soutient que la SARL CALK a méconnu cette obligation, elle ne justifie cependant pas que le matériel livré n'aurait pas été conforme à la commande effectuée selon le contrat de location en date du 20 septembre 2016 et que le système d'étiquetage électronique n'aurait pas pu se mettre en place, dès cette date, au sein de l'officine aux fins d'assurer la gestion de ses stocks.

A l'exception de deux courriels en date du 12 avril 2017 et du 26 février 2018, pour lesquels une réponse a manifestement été apportée, les lettres de mécontentement dont elle se prévaut ne datent en effet que de juin et juillet 2019 et concernent principalement des 'non-mise à jour des étiquettes dans leur ensemble, prix et stock', des'piles régulièrement usées', 'des produits ne correspondant pas' ou encore des 'étiquettes ne voulant pas se synchroniser', dysfonctionnements que Mme [M], huissier de justice, a confirmés dans ses constats des 27 août et 17 septembre 2019.

Or, l'existence de la non-conformité à la commande doit s'apprécier au jour de la vente, soit en l'état le 20 septembre 2016, ou à tout le moins dans un délai raisonnable, et non presque trois ans après la livraison des étiquettes aujourd'hui litigieuses, dont l'attestation de M. [Y] permet de retenir qu'elles fonctionnaient encore en janvier et avril 2020.

Cette non-conformité ne saurait pas plus s'exciper des dysfonctionnements invoqués, dès lors d'une part, que ces derniers sont fortement contestés par les sociétés EVERYS et CALK, lesquelles invoquent un stratagème aux fins de permettre à la pharmacie de changer sans frais de progiciel informatique ; d'autre part, que seules 66 étiquettes sur les 2300 étiquettes vendues ont rencontré des difficultés selon le constat d'huissier du 27 août 2019 et qu'enfin, l'absence de mise en cause de la société M2COMM, conceptrice de ces étiquettes et des routeurs affectés, ne permet pas de connaître l'origine de l'obsolescence invoquée du dispositif et d'en déterminer l'anormalité.

En outre, si M. [B], directeur régional de la société PHARMAGEST, société concurrente ayant succédé à la société WINCIPHARMA auprès de l'appelante, témoigne que les dysfonctionnements des étiquettes seraient en lien ' avec une panne de lecteur optique et de l'antenne de transmission, matériels nécessaires pour la mise à jour de l'affichage des étiquettes', ces allégations sont cependant contredites par le propre courrier de la pharmacie en date du 5 juin 2020 reconnaissant que l'antenne avait bien été changée par la société WINCIPHARMA et que 'cela n'avait apporté aucune amélioration'.

Enfin, si M. [T], expert informatique que la pharmacie a sollicité certes de manière non-contradictoire mais dont le rapport a été soumis régulièrement à la discussion des parties dans la présente instance, conclut que 'le problème de la pharmacie repose sur un dysfonctionnement aléatoire entre le point d'accès et les étiquettes par l'intermédiaire des routeurs ne permettant pas correctement leur mise à jour', ce dernier écarte de facto tout dysfonctionnement des étiquettes elles-mêmes et n'exclut pas la présence d'un 'problème d'interférence avec un autre matériel (détecteur sans fil d'alarme) comme pouvant être à l'origine des interruptions aléatoires de connexion avec les étiquettes'.

Aucun élément ne permet en conséquence de retenir que la SARL CALK aurait manqué à son obligation de délivrance conforme du système d'étiquetage électronique ELSA, comprenant étiquettes et routeurs, quand bien même des difficultés seraient apparues lors de l'utilisation du dispositif.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la pharmacie de sa demande de résolution du contrat de vente du 20 septembre 2016 et a retenu une résiliation au 31 décembre 2019, ce dernier chef de jugement n'étant pas contesté par la SARL CALK à hauteur d'appel.

- sur le contrat de location financière :

Contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, les contrats successifs qui s'inscrivent dans une opération incluant une location financière sont interdépendants et la résiliation de l'un d'entre eux entraîne la caducité, par voie de conséquence, des autres. (Cass com 12 juillet 2017 n° 15-27.703)

Pour autant, la vente du système d'étiquetage électronique ELSA n'étant pas ci-dessus résolue judiciairement et la résiliation effectuée unilatéralement par la pharmacie dans son courrier du 20 septembre 2019 étant irrégulière, cette dernière se devait d'assurer la totalité des échéances mensuelles jusqu'au terme contractuellement convenu.

Or, la pharmacie a interrompu tout paiement à compter du mois de novembre 2019, justifiant que la déchéance du terme soit prononcée le 24 février 2020 et rende exigible l'ensemble des sommes restant dues, ainsi que l'indemnité de résiliation équivalente aux loyers restant à courir et la pénalité contractuelle de 10 %.

C'est donc à bon droit que les premiers juges ont condamné la pharmacie à payer à la SASU CEGELEASE la somme de 42 566,14 euros TTC, conformément aux stipulations contractuelles.

Le jugement entrepris sera en conséquence confirmé de ce chef, mais infirmé en ce qu'il a condamné la pharmacie à payer la somme de 1 076,75 euros par mois à compter du 1er mars 2020 au titre de l'indemnité d'indisponibilité mensuelle'.

En effet, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, si l'article 15.3 oblige le locataire à restituer au propriétaire bailleur l'équipement loué, l'article 16.3 impose au bailleur de préciser au locataire l'endroit spécifique où cette restitution doit s'effectuer, démarche que la banque ne justifie pas avoir effectuée malgré les sollicitations expresses de la pharmacie dans son courrier recommandé ( date illisible) adressé en suite de la réception du courrier du 24 février 2020.

La SASU CEGELEASE sera en conséquence déboutée de sa demande de condamnation de la pharmacie à lui payer l' indemnité d'indisponibilité prévue à l'article 16.5, à défaut d'avoir mis son locataire dans la possibilité d'exécuter son obligation de restitution et une telle difficulté n'ayant manifestement pas été levée dans ses dernières conclusions.

- sur les contrats de maintenance :

En l'espèce, la maintenance du logiciel et les dépannages d'anomalies éventuelles étaiten assurés par la SARL EVERYS, selon un contrat en date du 28 décembre 2015, et celle du matériel, de l'accès à la hotline et des modules Wintikelec et Winterminal par la SARL CALK selon un contrat en date du 17 juin 2013.

Contrairement à ce qu'invoque la pharmacie, ces deux contrats, conclus bien antérieurement à la vente du système d'étiquetage électronique, relèvent d'opérations distinctes de cette dernière et ne présentent donc pas d'interdépendance.

La pharmacie ne peut en conséquence se prévaloir des défaillances ayant pu affecter le contrat de vente du système d'étiquetage électronique pour solliciter la résiliation des contrats de maintenance conclus avec les sociétés CLARK et EVERYS à compter de l'installation du système d'étiquetage dans l'officine, soit le 1er novembre 2016.

Le système a au surplus manifestement été effectif à cette date tout comme la maintenance tant du logiciel que de ses équipements, de telle sorte que les échéances ainsi facturées mensuellement au titre des deux abonnements ne sauraient être restituées à la pharmacie qui a indéniablement bénéficié des prestations contractées, comme en témoignent les listing d'intervention produits.

Cette demande de résiliation ne saurait pas plus aboutir à la date de la présente décision, dès lors que la SARL CALK prend acte dans ses conclusions de la résiliation unilatérale qu'a effectuée de manière unilatérale la pharmacie le 20 septembre 2019 et qu'elle ne formule aucune demande à son encontre.

Il en est de même de la SARL EVERYS, dont la responsabilité ne saurait être recherchée au titre de dysfonctionnements n'affectant manifestement ni son logiciel ni les interventions qu'elle devait effectuer pour actualiser ce dernier et dépanner ses éventuelles anomalies.

Le jugement entrepris mérite en conséquence confirmation en ce qu'il a débouté la pharmacie de ses demandes de résiliation des contrats de maintenance.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant contradictoirement, après débats en audience publique et en avoir délibéré conformément à la loi :

- Confirme le jugement du tribunal de commerce de Belfort en date du 13 juillet 2021, sauf en ce qu'il a condamné la SELAS PHARMACIE DU MARCHE à payer à la SASU CEGELEASE la somme de 1 076,75 euros par mois à compter du 1er mars 2020 jusqu'à réception effective des matériels faisant l'objet du contrat de location financière.

Statuant à nouveau du chef infirmé et y ajoutant :

- Déboute la SASU CEGELEASE de sa demande présentée au titre de l'indemnité d'indisponibilité contractuelle.

- Condamne la SELAS PHARMACIE DU MARCHE aux dépens d'appel, avec autorisation donnée à Mme Mauvais, avocate, de les recouvrer conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

- Et vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la SELAS PHARMACIE DU MARCHE à payer la somme de 2 000 euros à la SARL EVERYS, la somme de 2 000 euros à la SARL CALK et la somme de 2 000 euros à la SASU CEGELEASE et la déboute de sa demande présentée sur le même fondement.

Le présent arrêt a été signé par Michel Wachter, président, magistrat ayant participé au délibéré et Fabienne Arnoux, greffier.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Besançon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21/01520
Date de la décision : 14/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-14;21.01520 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award