ARRÊT N°
CE/SMG
COUR D'APPEL DE BESANÇON
ARRÊT DU 5 JUILLET 2022
CHAMBRE SOCIALE
Audience publique
du 1er février 2022
N° de rôle : N° RG 20/00522 - N° Portalis DBVG-V-B7E-EHWR
S/appel d'une décision
du Pole social du TJ de BELFORT
en date du 20 février 2020
Code affaire : 88G
Autres demandes contre un organisme
APPELANTE
URSSAF DE FRANCHE-COMTE sise [Adresse 2]
représentée par Me Séverine WERTHE, avocat au barreau de BESANÇON, présente
INTIMÉE
S.A.R.L. [5] sise [Adresse 1]
non comparante
COMPOSITION DE LA COUR :
Lors des débats du 1er Février 2022 :
Monsieur Christophe ESTEVE, Président de Chambre
Madame Bénédicte UGUEN-LAITHIER, Conseiller
Mme Florence DOMENEGO, Conseiller
qui en ont délibéré,
Mme MERSON GREDLER, Greffière lors des débats
Les parties ont été avisées de ce que l'arrêt sera rendu le 5 Avril 2022 par mise à disposition au greffe. A cette date la mise à disposition de l'arrêt a été prorogé au 17 mai 2022 puis au 14 juin 2022 et au 5 juillet 2022.
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Statuant sur l'appel interjeté le 19 mars 2020 par l'URSSAF de Franche-Comté d'un jugement rendu le 20 février 2020 par le pôle social du tribunal judiciaire de Belfort qui dans le cadre du litige l'opposant à la SARL [5] a :
- confirmé le redressement s'agissant du travail dissimulé par minoration d'heures déclarées,
- condamné la SARL [5] à payer à l'URSSAF de Franche-Comté la somme de 35.246 euros, soit 25.176 euros au titre des cotisations et 10.070 euros au titre de la majoration pour infraction de travail dissimulé,
- annulé le redressement forfaitaire opéré au titre du travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié,
- dit qu'il y avait lieu de limiter l'annulation des réductions générales des cotisations consécutivement à l'annulation du redressement forfaitaire,
- condamné la SARL [5] aux dépens,
Vu la convocation des parties à l'audience du 24 novembre 2020, celle de la SARL [5] ayant été retournée au greffe avec la mention 'Pli avisé et non réclamé',
Vu les conclusions visées par le greffe le 30 juillet 2020 aux termes desquelles l'URSSAF de Franche-Comté, appelante, demande à la cour de :
- infirmer le jugement critiqué en ce qu'il a :
- condamné la SARL [5] à payer à l'URSSAF de Franche-Comté la somme de 35 246 € euros, soit 25 176 € au titre des cotisations et 10 070 € au titre de la majoration pour infraction de travail dissimulé,
- annulé le redressement forfaitaire opéré au titre du travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié,
- dit qu'il y avait lieu de limiter l'annulation des réductions générales des cotisations consécutivement à l'annulation du redressement forfaitaire,
- condamner la SARL [5] à lui payer la somme actualisée du redressement de 42 415,95 € soit 28 635 € de cotisations, 10 070 € de majorations de redressement pour infraction de travail dissimulé et 3 665 € de majorations de retard,
- condamner la SARL [5] à lui payer la somme de 45,95 € au titre des frais d'inscription de privilèges,
- condamner la SARL [5] à lui payer la somme de 3 458 € au titre de l'annulation des réductions générales de cotisations,
- condamner la SARL [5] à lui payer la somme de 1 000 € au titre de ses frais irrépétibles ainsi qu'aux dépens,
Vu le renvoi de l'affaire à l'audience du 23 mars 2021, pour citation de l'intimée par l'appelante,
Vu la citation délivrée le 2 mars 2021 à la SARL [5] à la requête de l'URSSAF de Franche-Comté pour l'audience du 23 mars 2021, contenant signification de la déclaration d'appel, des conclusions d'appelant et des pièces avec le bordereau,
Vu la défixation de l'affaire et sa nouvelle fixation à l'audience du 8 juin 2021,
Vu la convocation des parties à l'audience du 8 juin 2021, celle de la SARL [5] ayant été retournée au greffe avec la mention 'Pli avisé et non réclamé',
Vu la non-comparution de l'intimée à l'audience du 8 juin 2021, au cours de laquelle l'affaire a été mise en délibéré au 21 septembre 2021,
Vu l'arrêt avant dire droit rendu le 21 septembre 2021 par la cour de céans, qui a ordonné la réouverture des débats à l'audience collégiale du 1er février 2022 et invité l'URSSAF de Franche-Comté, appelante, à faire citer la SARL [5], intimée, à cette audience,
Vu la citation délivrée le 15 octobre 2021 à la SARL [5] selon les dispositions prévues par l'article 659 du code de procédure civile pour l'audience du 1er février 2022 à 14h00, contenant signification des conclusions d'appelant et de l'arrêt avant dire droit précité,
Vu la non-comparution de la SARL [5] à cette audience,
La cour faisant expressément référence, pour un plus ample exposé des prétentions et moyens de l'appelante, aux conclusions susvisées que celle-ci a soutenues à l'audience du 1er février 2022,
SUR CE
EXPOSE DU LITIGE
Lors de plusieurs contrôles effectués en janvier, février et mai 2017 dans les locaux du restaurant 'le [4]', exploité par la SARL [5] à [Localité 3], puis le 3 juin 2017 sur un stand de restauration rapide, exploité pour le compte de cette même société, et après la réalisation d'investigations complémentaires et l'audition du gérant, l'URSSAF de Franche-Comté a été amenée à constater que pour deux salariés les déclarations sociales et les bulletins de salaire comportaient une minorations des heures de travail par rapport au nombre d'heures effectivement accompli et que pour deux autres personnes, en action de travail lors des contrôles, aucune déclaration préalable à l'embauche n'avait été régularisée.
Le 28 septembre 2017 l'URSSAF de Franche-Comté a adressé à la SARL [5] une lettre d'observations pour lui signifier un rappel de cotisations d'un montant de 37.928 euros, outre la somme de 13.784 euros correspondant à la majoration de redressement complémentaire pour infraction de travail dissimulé et les majorations de retard.
En l'absence d'observations dans le délai de 30 jours suivant la notification, une mise en demeure pour un montant total de 55.851 euros a été envoyée à la SARL [5].
Le 22 décembre 2017 la SARL [5] a saisi la commission de recours amiable de l'organisme de sécurité sociale en prétendant ne jamais avoir reçu la lettre d'observations.
L'URSSAF de Franche-Comté a donc de nouveau notifié à la société [5] la lettre d'observations. Comme lors du premier envoi, le pli recommandé a été retourné aux services de l'URSSAF de Franche-Comté avec la mention 'non réclamé'.
Par décision du 30 mars 2018 la commission de recours amiable a rejeté la requête de la SARL [5].
C'est dans ces conditions que le 6 juin 2018 la SARL [5] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Belfort (devenu le pôle social du tribunal judiciaire de Belfort) de la procédure qui a donné lieu au jugement entrepris le 20 février 2020.
MOTIFS
Sur le redressement opéré au titre de la minoration des heures déclarées (chef de redressement n° 1) :
Il ressort de la lettre d'observations que pour deux salariés, Mme [W] et le cuisinier M. [M], la SARL [5] a minoré les déclarations sociales depuis 2014 jusqu'à juin 2017, ce constat se basant sur les heures d'ouverture du restaurant tous les jours de la semaine, d'une part, et l'absence de relevés horaires fiables, d'autre part.
Lors de son audition, le gérant de la société [5] a reconnu les faits en faisant valoir qu'en la matière, la culture pakistanaise n'était pas la même qu'en France ; il a admis que le cuisinier était présent à temps complet dans l'établissement mais que la minoration des déclarations avait pour finalité d'économiser le coût des charges sociales et du salaire ; s'agissant de Mme [W], il a également reconnu la minoration des heures déclarées.
Ne pouvant se fonder sur un décompte fiable, l'URSSAF a donc procédé à un redressement forfaitaire, estimant que Mme [W] travaillait environ 2,5 heures par semaine sur 6 jours et que M. [M] travaillait pour sa part à temps complet.
En considération des éléments qui précèdent, les premiers juges ont validé justement le redressement effectué à ce titre sur le fondement des articles L.1221-10 et L.8221-5 du code du travail, soit un rappel de cotisations de 25.176 euros pour la période de janvier 2014 à juin 2017, outre la somme de 10.070 euros au titre de la majoration de redressement complémentaire pour infraction de travail dissimulé.
Le jugement entrepris sera donc confirmé de ce chef.
Sur le redressement opéré au titre du travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié résultant de l'absence de déclaration préalable à l'embauche (chef de redressement n° 2) :
Les premiers juges ont annulé ce chef du redressement en visant les conclusions déposées le 21 mars 2019 par l'URSSAF, auxquelles elle se serait référée, alors qu'en réalité celle-ci avait déposé le 7 octobre 2019 de nouvelles conclusions aux termes desquelles elle déclarait avoir annulé ce chef de redressement, dépourvu de fondement au regard des deux conventions de stage concernant les deux jeunes femmes dont la présence en situation de travail avait été constatée au début de l'année 2017 lors du contrôle, documents que la société [5] lui a communiqués au cours de l'instance.
La note d'audience du 10 octobre 2019 y fait d'ailleurs allusion puisqu'elle porte la mention : « Révision par l'URSSAF ».
La cour ne saurait cependant confirmer la décision de la commission de recours amiable, qui de surcroît ne tient évidemment pas compte de l'annulation postérieure de ce chef de redressement, lequel s'élevait à la somme de 9.285 euros au titre de la régularisation forfaitaire et à la somme de 3.714 euros correspondant au montant de la majoration de redressement complémentaire pour infraction de travail dissimulé.
Par ailleurs, il n'est pas justifié d'une notification par l'URSSAF de l'annulation de ce chef de redressement n° 2.
Dans ces conditions, il convient de confirmer par substitution de motifs le jugement entrepris en ce qu'il a annulé ce chef de redressement n° 2.
Sur l'annulation des réductions générales de cotisations (chef de redressement n° 3) :
Compte tenu de l'annulation du point n° 2 du redressement, le montant de l'annulation des réductions générales a été révisé par l'URSSAF, passant de 734 euros à 725 euros au titre de l'année 2017, de sorte que le montant total du chef de redressement n° 3, portant sur l'annulation des réductions générales de cotisations, s'élève désormais à la somme de 3.458 euros (au lieu de 3.467 euros).
L'URSSAF de Franche-Comté s'était précisément expliquée sur cette révision dans ses dernières conclusions de première instance en date du 7 octobre 2019.
Elle avait en outre sollicité la somme de 3.665 euros au titre des majorations de retard sur le redressement, qu'elle réclame à nouveau devant la cour à juste titre en application de l'article R. 243-18 du code de la sécurité sociale.
Il convient dès lors d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a dit qu'il y avait lieu de limiter l'annulation des réductions générales des cotisations consécutivement à l'annulation du redressement forfaitaire et, statuant à nouveau et y ajoutant, de condamner la SARL [5] à payer à l'URSSAF de Franche-Comté la somme de 3.458 euros au titre du chef de redressement n° 3, portant sur l'annulation des réductions générales de cotisations, et celle de 3.665 euros au titre des majorations de retard sur les chefs de redressement n° 1 et 3.
Sur les demandes accessoires :
La décision attaquée sera confirmée en ce qu'elle a statué sur les dépens de première instance.
En application de l'article 700 du code de procédure civile, il y a lieu d'allouer à l'URSSAF de Franche-Comté la somme de 1.000 euros au titre des frais irrépétibles qu'elle a dû exposer devant la cour, somme qui inclut les frais d'inscription de privilèges de 45,95 euros.
La SARL [5] qui succombe sera condamnée aux dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt réputé contradictoire mis à disposition au greffe,
Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a :
- confirmé le redressement s'agissant du travail dissimulé par minoration d'heures déclarées (chef de redressement n° 1),
- condamné la SARL [5] à payer à l'URSSAF de Franche-Comté la somme de 35.246 euros, soit 25.176 euros au titre des cotisations et 10.070 euros au titre de la majoration pour infraction de travail dissimulé (chef de redressement n° 1),
- annulé le redressement forfaitaire opéré au titre du travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié (chef de redressement n° 2),
- condamné la SARL [5] aux dépens,
L'infirme pour le surplus ;
Statuant à nouveau du chef infirmé et y ajoutant,
Condamne la SARL [5] à payer à l'URSSAF de Franche-Comté les sommes de :
- 3.458 euros au titre du chef de redressement n° 3 portant sur l'annulation des réductions générales de cotisations ;
- 3.665 euros au titre des majorations de retard sur les chefs de redressement n° 1 et 3 ;
Condamne la SARL [5] à payer à l'URSSAF de Franche-Comté la somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, somme incluant les frais d'inscription de privilèges de 45,95 euros ;
Condamne la SARL [5] aux dépens d'appel.
Ledit arrêt a été prononcé par mise à disposition au greffe le cinq juillet deux mille vingt deux et signé par Christophe ESTEVE, Président de chambre, et Mme MERSON GREDLER, Greffière.
LA GREFFIÈRE,LE PRÉSIDENT DE CHAMBRE,