ARRET N° 19/349
PB/MF
COUR D'APPEL DE BESANCON
ARRET DU 18 JUIN 2019
CHAMBRE SOCIALE
Audience publique
du 07 mai 2019
N° de rôle : N° RG 18/02040 - N° Portalis DBVG-V-B7C-EA75
S/appel d'une décision
du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BESANCON
en date du 16 novembre 2018
Code affaire : 80A
Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution
APPELANT
Monsieur [Z] [W], demeurant [Adresse 1]
comparant en personne
INTIMEE
SAS C&K COMPONENTS, dont le siège social est sis [Adresse 2]
représentée par Me Nicolas LEGER, avocat au barreau de BESANCON
COMPOSITION DE LA COUR :
Lors des débats du 07 Mai 2019 :
Mme Christine K-DORSCH, Président de Chambre
M. Jérôme COTTERET, Conseiller
Monsieur Patrice BOURQUIN, Conseiller
qui en ont délibéré,
Mme Magali FERREC, Greffier lors des débats
Les parties ont été avisées de ce que l'arrêt sera rendu le 18 Juin 2019 par mise à disposition au greffe.
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FAITS ET PROCEDURE
M. [Z] [W] a été embauché par la Sa C&K Components, alors dénommée ITT Industries le 1er juin 1989 en qualité d'opérateur moulage.
En 2012, M. [Z] [W] exerçait les fonctions de délégué syndical CGT, membre titulaire du comité d'entreprise, délégué du personnel titulaire et conseiller prud'homal.
Le 27 septembre 2012, il a été convoqué à un entretien préalable qui s'est tenu le 18 octobre 2012.
Le 14 novembre 2012, l'inspecteur du travail du Jura a autorisé le licenciement.
Le 18 novembre 2012, la Sa C&K Components a notifié à M. [Z] [W] son licenciement pour faute grave.
M. [Z] [W] a exercé un recours hiérarchique à l'encontre de la décision d'autorisation de licenciement et ce recours a été rejeté par décision du ministre du travail du 4 avril 2013.
Il a contesté cette décision devant le tribunal administratif de Besançon qui par jugement du 7 juillet 2015 a rejeté sa requête, la cour d'appel administrative de Nancy, par arrêt du 26 janvier 2017, annulant ultérieurement le jugement du tribunal administratif, la décision du ministre du travail du 4 avril 2013 et la décision de l'inspecteur du travail du 14 novembre 2012.
M. [Z] [W] a été réintégré dans l'entreprise au mois de février 2017.
La Sa C&K Components a formé un pourvoi à l'encontre de l'arrêt de la cour administrative d'appel et par décision du 18 juillet 2018 le conseil d'État a annulé l'arrêt et renvoyé l'affaire devant la cour administrative d'appel de Nancy autrement composée.
L'employeur a mis fin à la réintégration le 23 juillet 2018.
Le 30 septembre 2018, M. [Z] [W] a saisi le conseil de prud'hommes de Besançon statuant en formation de référé en demandant de :
- ordonner la poursuite de la réintégration,
-ordonner le paiement du salaire à compter du 23 juillet 2018 comme s'il avait continué à travailler, ainsi que le paiement des congés payés du 30 juillet au 25 août 2018 et les salaires du 27 au 31 août 2018,
- condamner la Sa C&K Components à lui payer la somme de 12'000 € à titre de dommages-intérêts pour entrave volontaire résistance abusive, volonté de nuire et atteinte à la personne du demandeur.
Par ordonnance du 16 novembre 2018 le conseil de prud'hommes a rejeté l'intégralité des demandes formulées par M. [Z] [W] et l'a condamné aux dépens.
Par déclaration enregistrée au greffe de la cour le 4 décembre 2018, M. [Z] [W] a interjeté appel de la décision.
L'affaire a été instruite selon la procédure prévue par les articles 905 et suivants du code de procédure civile.
Selon conclusions visées le 11 février 2019, M. [Z] [W] a repris les demandes formulées en première instance en y ajoutant une somme de 2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Selon dernières conclusions du 16 janvier 2019, la Sa C&K Components a conclut à la nullité de l'acte de signification de la déclaration d'appel du 3 janvier 2019 et à la caducité de la déclaration d'appel, à titre subsidiaire à la confirmation de l'ordonnance entreprise et en tout état de cause à la condamnation de M. [Z] [W] à lui payer la somme de 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
A l'audience les parties ont été invitées à conclure sur le moyen tiré de la régularité de la procédure d'appel, M. [Z] [W], défenseur syndical étant représenté par lui-même.
Selon note du 24 mai 2019, la Sa C&K Components demande de prononcer la nullité de l'acte d'appel et ainsi que celle des actes subséquents au motif que M. [Z] [W] ne pouvait se représenter lui-même.
Selon notes des 23 mai et 4 juin 2019, M. [Z] [W] fait valoir que rien n'empêche un défenseur syndical de se représenter lui-même.
Pour l'exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux dernières conclusions précédemment visées en application de l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DECISION
Selon l'article 29 du décret n° 2016-660 du 26 mai 2016, modifiant l'article R 1461-2 du code du travail, l'appel est porté devant la chambre sociale de la cour d'appel et il est formé, instruit et jugé suivant la procédure avec représentation obligatoire, les défenseurs syndicaux étant habilités à représenter les parties en application de l'article R 1461-1 du même code.
Le défenseur syndical exerce donc un mandat de représentation au sens de l'article 411 du code de procédure civile.
Le mandat est défini par l'article 1984 du code civil, comme l'acte par lequel une personne donne à l'autre le pouvoir de faire quelque chose pour le mandant en son nom.
Cette définition exclut que les personnes du mandant et du mandataire soient confondues, l'application de l'ensemble des dispositions du titre XII du code de procédure civile relatives à la représentation en justice étant par ailleurs impossible dans ce cas.
Il en est de même de l'exigence d'un pouvoir spécial pour interjeter appel, dès lors que le représentant n'est pas avocat, M. [Z] [W] n'en ayant d'ailleurs produit aucun.
Ce dernier s'appuie essentiellement sur les dispositions des articles L 1453-1 à L 1453-9 et R 1453-2 et suivants du code du travail, qui définissent notamment le statut du défenseur syndical mais ne contiennent aucune disposition pertinente applicable au litige et il en est de même quant à ses développements relatifs à l'absence d'application aux défenseurs syndicaux des règles relatives à la déontologie des avocats.
M. [Z] [W] ne peut par ailleurs soutenir que la cour a d'ores et déjà validé une déclaration d'appel formée dans les mêmes conditions, l'instance à laquelle il se réfère s'étant terminée par le constat de la caducité de l'appel.
Selon l'article 117 du code de procédure civile constitue une irrégularité de fond affectant la validité de l'acte, le défaut de capacité ou de pouvoir d'une personne assurant la représentation d'une partie en justice et il en résulte que la déclaration d'appel est nulle.
Il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge des parties les frais non compris dans les dépens qu'elles ont exposés.
PAR CES MOTIFS
La Cour, Chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,
DECLARE nulle la déclaration d'appel de M. [Z] [W] à l'encontre de l'ordonnance rendue par le conseil de prud'hommes de Besançon le 16 novembre 2018;
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile;
CONDAMNE M. [Z] [W] aux dépens de la procédure d'appel.
Ledit arrêt a été prononcé par mise à disposition au greffe le dix huit juin deux mille dix neuf et signé par Mme Christine K-DORSCH, Président de la Chambre Sociale, et Mme Magali FERREC, Greffier.
LE GREFFIER,LE PRESIDENT DE CHAMBRE,