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27/11/2018 | FRANCE | N°18/00903

France | France, Cour d'appel de Besançon, Chambre sociale, 27 novembre 2018, 18/00903


ARRET N° 18/722

CKD/KM



COUR D'APPEL DE BESANCON



ARRET DU 27 NOVEMBRE 2018



CHAMBRE SOCIALE





Contradictoire

Audience publique

du 16 octobre 2018

N° de rôle : N° RG 18/00903 - N° Portalis DBVG-V-B7C-D6S7



Saisine de la Cour suite à l'arrêt de la Cour de Cassation de PARIS rendu le 04 avril 2018

Code affaire : 88A - Contestation d'une décision d'un organisme portant sur l'immatriculation, l'affiliation ou un refus de reconnaissance d'un droit



Code affaire : 89

Z

Autres demandes en matière de risques professionnels





APPELANTE



CPAM DE LA HAUTE-MARNE, 18 Bld du Maréchal De Lattre - De Tassigny - [...]



représentée...

ARRET N° 18/722

CKD/KM

COUR D'APPEL DE BESANCON

ARRET DU 27 NOVEMBRE 2018

CHAMBRE SOCIALE

Contradictoire

Audience publique

du 16 octobre 2018

N° de rôle : N° RG 18/00903 - N° Portalis DBVG-V-B7C-D6S7

Saisine de la Cour suite à l'arrêt de la Cour de Cassation de PARIS rendu le 04 avril 2018

Code affaire : 88A - Contestation d'une décision d'un organisme portant sur l'immatriculation, l'affiliation ou un refus de reconnaissance d'un droit

Code affaire : 89Z

Autres demandes en matière de risques professionnels

APPELANTE

CPAM DE LA HAUTE-MARNE, 18 Bld du Maréchal De Lattre - De Tassigny - [...]

représentée par Me Julie X..., avocat au barreau de BESANCON

INTIMEE

SOCIETE FERRO FRANCE, Lieudit Haut Tremblot - [...]

représentée par Me Y... Z..., avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats du 16 Octobre 2018 :

Mme Christine K-DORSCH, Président de Chambre

M. Jérôme COTTERET, Conseiller

Monsieur Patrice BOURQUIN, Conseiller

qui en ont délibéré,

Mme Karine MAUCHAIN, Greffier lors des débats

Les parties ont été avisées de ce que l'arrêt sera rendu le 27 Novembre 2018 par mise à disposition au greffe.

**************

Exposé du litige

Monsieur Jean-Louis B... a travaillé au sein de la SARL Ferro France du 1er mars 1978 au 07 novembre 2002 notamment en tant qu'électricien à l'entretien.

Le 16 janvier 2012 Monsieur B... a soumis à la caisse primaire d'assurance-maladie de la Haute Marne une déclaration de maladie professionnelle susceptible de relever du tableau N° 30, et fondée sur l'existence de plaques pleurales médicalement constatées pour la première fois le 30 mai 2011.

La caisse a pris en charge cette maladie consécutive à l'inhalation de poussières d'amiante, au titre de la législation professionnelle. Elle a le 22 mai 2012 fait connaître sa décision à l'employeur. Celui-ci a contesté cette décision. Un jugement du 18 septembre 2013, confirmé par arrêt de la cour d'appel de Dijon du 26 février 2015, lui a déclaré opposable la décision de prise en charge.

***

Le 3 décembre 2013 le docteur A... médecin traitant a établi un certificat médical de rechute visant d'une part les plaques pleurales bilatérales avec micro calcifications relevant du tableau 30 A, et d'autre part une fibrose pulmonaire relevant du tableau 30 B.

Divers échanges ont eu lieu entre l'assuré et la caisse.

Le 7 janvier 2014 la caisse a informé l'assuré que son médecin conseil estimait que «la rechute du 3 décembre 2013 est imputable à votre maladie professionnelle du 12 décembre 2011», et qu'il pouvait utiliser la feuille d'accident du travail ou maladie professionnelle lui permettant d'éviter l'avance est pour les soins relatifs à cette rechute.

Par courrier du 10 février 2014 l'assuré interrogeait la caisse sur la réitération de sa demande car le médecin traitant n'aurait pas dû cocher la case «rechute».

La caisse lui répondait le 12 février 2014 que le dossier a été instruit en rechute de la maladie professionnelle du 12/12/2011, et l'invitait s'il voulait invoquer une nouvelle maladie professionnelle à fournir un certificat médical initial, et compléter un formulaire de demande.

***

En conséquence Monsieur B... a présenté le 20 février 2014 une nouvelle demande visant une fibrose pulmonaire accompagné d'un autre certificat également daté du 3 décembre 2013 dans lequel était coché la case «initial».

La caisse a par lettre du 12 juin 2014 notifié à la société Ferro France sa décision de prendre en charge au titre du tableau N° 30 l'asbestose avec fibrose pulmonaire déclarée par son ancien salarié.

***

Le 09 septembre 2014 la commission de recours amiable saisi par l'employeur a confirmé la décision de prise en charge de la caisse.

L'employeur a dès lors saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Haute-Marne qui par jugement du 22 avril 2015 a:

- Infirmé la décision de la commission de recours amiable du 09 septembre 2014,

- Déclaré inopposable à la société Ferro France la décision de prise en charge notifiée le 12 juin 2014.

La Caisse Primaire d'Assurance-Maladie de Haute-Marne a relevé appel de cette décision.

Par arrêt du 16 février 2017 la cour d'appel de Dijon a infirmé le jugement et statuant à nouveau a:

- Confirmé la décision prise le 9 septembre 2014 par la commission de recours amiable,

- Déclaré opposable à la société Ferro France la décision de la CPAM de Haute-Marne prise le 12 juin 2014 de prendre en charge au titre de la législation professionnelle la fibrose pulmonaire déclarée par Monsieur Jean-Louis B...,

- Débouté la société Ferro France de sa demande de frais irrépétibles.

La SARL Ferro France a interjeté un pourvoi en cassation à l'encontre de cette décision.

Par arrêt du 04 avril 2018 la Cour de Cassation a cassé et annulé l'arrêt de la cour d'appel de Dijon, en toutes ses dispositions, a remis en conséquence la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt, et a ordonné le renvoi devant la cour d'appel de Besançon, condamnant par ailleurs la caisse à payer une somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure.

La Cour de Cassation relève que pour débouter la société de son recours, la cour d'appel retient que contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, l'autorité de chose décidée attachée à la décision du 7 janvier 2014 ne s'applique qu'à l'appréciation de l'existence d'une rechute des plaques pleurales sans y inclure la fibrose, et que loin d'avoir statué deux fois sur la même maladie, fusse de façon implicite, la caisse a examiné pour la première fois la demande de prise en charge de la fibrose pulmonaire à l'occasion de sa dernière décision du 12 juin 2014.

Or la Cour de cassation juge qu'en se déterminant ainsi, sans caractériser l'existence de modifications dans l'état de la victime, alors qu'il résultait de ses propres constatations que la pathologie selon elle prise en charge au titre de la rechute était identique à celle initialement prise en charge, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

* **

La caisse primaire d'assurance maladie de Haute-Marne a saisi la cour d'appel de renvoi le 18 mai 2018 (RG N°18/903).

La SARL Ferro France a saisi la cour d'appel de renvoi le 28 mai 2018 (RG N° 18/967).

Par arrêt du 27 novembre 2018 la cour d'appel de céans a ordonné la jonction des deux procédures sous le numéro 18/903.

Par conclusions enregistrées le 19 septembre 2018, et reprises oralement à l'audience de plaidoirie du 16 octobre 2018, la Caisse demande à la cour de:

A titre principal

- Infirmer le jugement du 22 avril 2015 en toutes ses dispositions,

- Constater que la décision de prise en charge du 7 janvier 2014 concerne la rechute de la pathologie «plaques pleurales»,

- Constater que la pathologie «fibrose pulmonaire»a fait l'objet d'une décision de prise en charge au titre de la législation professionnelle le 12 juin 2014,

En conséquence

- Dire et juger que la décision de prise en charge de la pathologie «fibrose pulmonaire»au titre de la législation professionnelle 12 juin 2014 est opposable à la société Ferro France SARL,

- Condamner la société Ferro France SARL à lui payer 5.000 € au titre de l'article 700 code de procédure civile.

Par conclusions reçues au greffe le 1er octobre 2018, et reprises oralement à l'audience de plaidoirie du 16 octobre 2018, la SARL Ferro France demande à la cour:

À titre principal de:

- Confirmer le jugement du 22 avril 2015 en toutes ses dispositions,

- Dire et juger que Monsieur B... a déclaré deux fois la même pathologie, une première fois dans le cadre d'une demande de rechute, et une seconde fois dans le cadre d'une demande de maladie professionnelle,

- Dire et juger que la CPAM a indûment pris en charge deux fois la même pathologie (fibrose pulmonaire) une première fois en tant que rechute, puis une seconde fois en tant que maladie professionnelle par le biais décision implicite de prise en charge,

- Par conséquent infirmer la décision de la CRA, et dire et juger que la décision de prise en charge de la CPAM est inopposable à la société Ferro France.

À titre subsidiaire:

- Dire et juger que Monsieur B... n'a pas été exposé à des poussières d'amiante lorsqu'il était en poste de la société Ferro France,

- Par conséquent infirmer la décision de la CRA et dire et juger que la décision de prise en charge de la CPAM est inopposable à la société Ferro France.

En toute hypothèse

- Condamner la CPAM à verser à Ferro France SARL la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il est en application de l'article 455 du CPC renvoyé aux conclusions des parties pour plus ample exposé des faits, moyens, et prétentions.

MOTIFS DE LA DECISION

Attendu que l'article L. 443-1alinéa 1er du code de la sécurité sociale dispose quesous réserve des dispositions du deuxième alinéa du présent article, toute modification dans l'état de la victime, dont la première constatation médicale est postérieure à la date de guérison apparente ou de consolidation de la blessure, peut donner lieu à une nouvelle fixation des réparations.';

Que l'article L. 443-2 du même code ajoute que si l'aggravation de la lésion entraîne pour la victime la nécessité d'un traitement médical, qu'il y ait ou non nouvelle incapacité temporaire, la caisse primaire d'assurance maladie statue sur la prise en charge de la rechute;

Attendu enfin que le salarié victime d'une rechute ne bénéficie pas de la présomption d'imputabilité de l'article L.411-1 du code du travail, et qu'il doit démontrer que l'aggravation ou l'apparition de la lésion a un lien de causalité direct et exclusif avec l'accident sans intervention d'une cause extérieure;

***

Attendu ainsi qu'aux termes de l'article L.443-1 susvisé, la rechute s'entend de toute modification dans l'état de la victime, dont la première constatation médicale est postérieure à la date de guérison apparente ou de consolidation de la blessure, et qu'elle peut donner lieu à une nouvelle fixation des réparations;

Que la rechute suppose donc un fait pathologique nouveau, qui peut être une aggravation

de la lésion initiale après sa consolidation, ou bien l'apparition d'une nouvelle lésion

avant guérison;

Attendu qu'il résulte en l'espèce de la procédure que l'assuré a effectué 3 déclarations :

1°) Le 15 janvier 2012 une déclaration de maladie professionnelle accompagné d'un certificat médical du 12 décembre 2011 faisant état de plaques pleurales bilatérales avec micro calcification, prise en charge par la caisse au titre de la législation professionnelle du tableau 30 par décision du 22 mai 2012;

2°) Une déclaration de rechute sur la base d'un certificat médical de rechute du 3 décembre 2013 visant:

- les plaques pleurales bilatérales avec micro calcification,

- une fibrose pulmonaire,

ayant bien abouti à une prise en charge par la caisse le 7 janvier 2014 au titre de la rechute;

3°) Une déclaration de maladie professionnelle du 20 février 2014 accompagnée d'un nouveau certificat médical également datée du 3 décembre 2013 mentionnant:

- les plaques pleurales bilatérales avec micro calcification,

- une fibrose pulmonaire,

ayant conduit à la prise en charge implicite par la caisse au titre de la législation professionnelle du tableau 30, suivie d'une notification à l'employeur le 12 juin 2014;

Attendu qu'il est ainsi établi que Monsieur B... est pris en charge au titre d'une maladie professionnelle résultant de plaques pleurales bilatérales avec micro calcification conformément à la décision du 22 mai 2012;

Attendu qu'il apparaît que la caisse a bien considéré, et instruit, la seconde déclaration comme une rechute, ce qui était légitime s'agissant du fait nouveau que constitue la fibrose pulmonaire;

Attendu en revanche qu'il n'y a pas dans la troisième déclaration du 20 février 2014 de mention d'une nouvelle maladie professionnelle, ni d'une rechute au sens de l'article L 443-1, le certificat médical initial produit à l'appui de cette demande étant en tout point identique à celui produit lors de la seconde déclaration;

Attendu en effet qu'il n'est pas établi d'une part que les plaques pleurales bilatérales avec micro calcification prises en charge au titre de la maladie professionnelle du tableau 30 aient évolué;

Que d'autre part la fibrose pulmonaire, si elle constitue un fait pathologique nouveau a bien été pris en charge au titre de la rechute conformément à la notification de prise en charge de la rechute adressée par la caisse à M. B... le 7 janvier 2014;

Attendu qu'il résulte de ce qui précède que c'est par des motifs pertinents que le tribunal a conclu que la décision de prise en charge notifiée par la caisse à la société Ferro le 12 juin 2014 est inopposable à cet employeur, et qu'il a infirmé la décision de la commission de recours amiable du 9 septembre 2014;

Que le jugement est par conséquent confirmé en toutes ses dispositions

Attendu qu'il est rappelé que la procédure est sans frais;

Attendu que l'équité commande de condamner la CPAM de Haute Marne qui succombe à payer à la SARL Ferro France une somme de 3.000 € au titre de la 700 du code de procédure civile, et de la débouter de sa propre demande sur ce fondement ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR, chambre sociale, statuant publiquement et contradictoirement mis à disposition au greffe, après débats en audience et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Vu l'arrêt de la Cour de cassation du 04 avril 2018;

Vu l'arrêt de la Cour d'appel de céans du 27 novembre 2018 ordonnant la jonction des procédures 18/903 et 18/967 sous le N° 18/903;

Confirme le jugement prononcé le 22 avril 2015 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de la Haute-Marne en toutes ses dispositions;

Y ajoutant

Condamne la CPAM de Haute Marne à payer à la SARL Ferro France la somme de 3.000€ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de la CPAM de Haute Marne.

LEDIT ARRÊT a été prononcé par mise à disposition au greffe le vingt sept novembre deux mille dix huit et signé par Mme Christine K-DORSCH, Présidente de la Chambre Sociale, et Mme Karine MAUCHAIN, Greffier.

LE GREFFIER,LE PRESIDENT DE CHAMBRE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Besançon
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 18/00903
Date de la décision : 27/11/2018

Références :

Cour d'appel de Besançon 03, arrêt n°18/00903 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-11-27;18.00903 ?
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