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16/10/2018 | FRANCE | N°17/00127

France | France, Cour d'appel de Besançon, Chambre sociale, 16 octobre 2018, 17/00127


ARRET N° 18/

PB/MF



COUR D'APPEL DE BESANCON

- 172 501 116 00013 -

ARRET DU 16 OCTOBRE 2018



CHAMBRE SOCIALE





Contradictoire

Audience publique

du 07 Septembre 2018

N° de rôle : N° RG 17/00127 - N° Portalis DBVG-V-B7B-DX3B



S/appel d'une décision

du CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE BESANCON

en date du 15 décembre 2016

code affaire : 80A

Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécuti

on





APPELANTE



Madame Solveig X..., demeurant [...]



assistée par Me Y... Z..., avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant et Me Yacine A..., avocat au barreau de B...

ARRET N° 18/

PB/MF

COUR D'APPEL DE BESANCON

- 172 501 116 00013 -

ARRET DU 16 OCTOBRE 2018

CHAMBRE SOCIALE

Contradictoire

Audience publique

du 07 Septembre 2018

N° de rôle : N° RG 17/00127 - N° Portalis DBVG-V-B7B-DX3B

S/appel d'une décision

du CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE BESANCON

en date du 15 décembre 2016

code affaire : 80A

Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution

APPELANTE

Madame Solveig X..., demeurant [...]

assistée par Me Y... Z..., avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant et Me Yacine A..., avocat au barreau de BESANCON, avocat postulant,

INTIMEE

SNC LABORATOIRE COTRAL agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice, dont le siège social est sis [...] SUR NOIREAU

représentée par Me Philippe B..., avocat au barreau de CAEN, avocat plaidant et Me Patrice C..., avocat au barreau de BESANCON, avocat postulant,

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile l'affaire a été débattue le 07 Septembre 2018, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur BOURQUIN Patrice, Conseiller, entendu en son rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Christine K-DORSCH, Président de Chambre

M. Jérôme COTTERET, Conseiller

Monsieur Patrice BOURQUIN, Conseiller

qui en ont délibéré,

Mme Magali FERREC et Mme Gaëlle BIOT, Greffiers lors des débats

Les parties ont été avisées de ce que l'arrêt sera rendu le 16 Octobre 2018 par mise à disposition au greffe.

**************

FAITS ET PROCÉDURE

Mme Solveig X... a été embauchée par la Snc Laboratoire Cotral le 7 novembre 2011 en qualité de technicien de prévention

Elle était chargée de promouvoir la marque et les produits de la Snc Laboratoire Cotral sur les départements du Doubs, Jura, Territoire de Belfort ainsi qu'un arrondissement de Saône et Loire et de l'Ain.

La Snc Laboratoire Cotral commercialise des protections auditives et dispose d'un réseau de commerciaux sur le territoire français, qui ont une activité d'une part commerciale de prospection de la clientèle et, d'autre part, technique en prenant les empreintes de conduit auditif permettant la réalisation des protections.

Mme Solveig X... a été placée en arrêt maladie à compter du 15 octobre 2014.

Elle a été convoquée à un entretien préalable fixé au 17 décembre 2014 puis a été licenciée par courrier en date du 29 décembre 214, pour absence prolongée perturbant le fonctionnement de l'entreprise et nécessitant son remplacement définitif.

Contestant son licenciement, Mme Solveig X... a saisi le conseil de prud'hommes de Besançon aux fins que le licenciement soit déclaré sans cause réelle et sérieuse ainsi qu'obtenir le paiement d'heures supplémentaires.

Par jugement en date du 15 décembre 2016, le conseil de prud'hommes a :

-débouté Mme Solveig X... de sa demande tendant à prononcer la nullité de la convention de forfait jours ,

- dit que le licenciement de Mme Solveig X... est sans cause réelle et sérieuse,

- condamné la Snc Laboratoire Cotral à lui payer les sommes suivantes :

*25.000€ à titre de dommages et intérêts,

*1000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Par déclaration enregistrée au greffe de la cour le 16 janvier 2017, Mme Solveig X... a interjeté appel de la décision.

Selon dernières conclusions du 4 août 2017, Mme Solveig X... sollicite l'infirmation du jugement entrepris et demande de :

- dire que la Snc Laboratoire Cotral a manqué à son obligation de sécurité et la condamner à lui payer la somme de 50.264,28€ nets en réparation du préjudice subi ,

-dire que le licenciement est pris sur le fondement de son état de santé,

- condamner la Snc Laboratoire Cotral à lui payer la somme de 100'528,56€ en réparation du préjudice subi ,

- prononcer la nullité de la convention de forfait jours ,

- condamner la Snc Laboratoire Cotral à lui payer les sommes suivantes,

[...] maximum hebdomadaire,

*47'312,37€ bruts à titre de rappel supplémentaire outre 4731,24€ au titre des congés payés afférents

*25'132,12€ nets au titre de l'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé.

-condamner la Snc Laboratoire Cotral à lui payer la somme de 4500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-dire que toutes les indemnités s'entendent nettes de cotisations sociales, de CSG et de CRDS.

Selon dernières conclusions du 24 novembre 2017, la Snc Laboratoire Cotral conclut à la confirmation du jugement entrepris en ce que Mme Solveig X... a été déboutée de ses prétentions au titre de l'exécution du contrat de travail, de la demande de nullité du forfait jours et des demandes subséquentes au titre des heures supplémentaires, à sa réformation pour le surplus et au débouté des demandes au titre de la contestation du licenciement.

Elle sollicite par ailleurs la somme de 2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour l'exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux dernières conclusions précédemment visées en application de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 2 mars 2018.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1 - Sur la demande formée au titre des heures supplémentaires

1-1 Sur la validité du contrat de forfait jour

Les articles L 3121-43 et suivants du code du travail, relatifs aux forfaits en jour sur l'année doivent être interprétés à la lumière des directives 1993-104 CE du Conseil du 23 novembre 1993, des articles 17 et 19 de la directive 2003-88 CE du Conseil du 4 novembre 2003 ainsi que de l'article 31 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne en ce sens qu'il ne peut être dérogé aux dispositions relatives à la durée du temps de travail que dans le respect des principes généraux relatifs à la protection de la sécurité et de la santé du travailleur.

Toute convention de forfait en jours doit donc être prévue par un accord collectif dont les stipulations assurent la garantie du respect des durées maximales de travail ainsi que des repos, journaliers et hebdomadaires.

Le contrat de travail précise que compte tenu de son degré d'autonomie de son emploi du temps Mme Solveig X... est soumise au forfait annuel en jours dans les conditions prévues par l'accord sur l'aménagement du temps de travail en vigueur au sein de l'entreprise.

Ledit accord précise, après avoir indiqué le nombre maximal de jours travaillés:

'2 Entretien annuel

En outre, le salarié ayant conclu une convention de forfait défini en jours bénéficie chaque année lors de l'entretien individuel d'un point avec son supérieur hiérarchique au cours duquel seront évoquées l'organisation et la charge de travail de l'intéressé et l'amplitude de ses journées d'activité. Cette amplitude et cette charge de travail devront rester raisonnables et assurer une bonne répartition dans le temps du travail des intéressés'.

Il n'existe aucune autre disposition, hormis cet entretien annuel, dont les modalités ne sont pas précisées par le contrat de travail.

Or, il appartient à l'employeur de justifier qu'il exerce un contrôle, notamment en prévoyant des documents de contrôle, afin d'assurer un suivi régulier de l'organisation du travail et de la réalisation effective de l'entretien annuel dont il est fait mention par l'accord collectif.

La Snc Laboratoire Cotral se borne à affirmer qu'elle organise des entretiens lors d'un séminaire d'hiver, un séminaire d'été et deux sessions régionales, sans toutefois apporter aucun élément de preuve quant à la nature de ces réunions.

Les modalités prévues par l'accord collectif apparaissent donc insuffisantes pour assurer le respect des principes généraux relatifs à la protection de la sécurité et de la santé du travailleur, leur application effective n'étant par ailleurs pas justifiée et il en résulte que la clause de forfait est nulle et à tout le moins inopposable à la salariée.

1- 2 Sur la demande relative aux heures supplémentaires

Aux termes de l'article L 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence et au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier des horaires effectivement réalisés par le salarié ; le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Mme Solveig X... produit ses agendas des années 2012,2013 et 2014, ainsi qu'un décompte, réalisé semaine par semaine des heures supplémentaires qu'elle indique avoir réalisées.

L'employeur soutient que l'étude des agendas fait apparaître une distorsion évidente entre les dires de Mme Solveig X... et les informations portées dans les agendas, et notamment que en prenant pour point de départ l'heure mentionnée comme étant le premier rendez vous et l'heure du début du dernier rendez vous majoré d'une heure, le calcul ne concorde nullement avec les relevés horaires hebdomadaires réalisés par la salariée.

Les agendas ne comportent toutefois que les rendez vous avec les clients mais ne comportent pas le télétravail, pas plus que les temps de déplacement.

L'employeur indique par ailleurs que sur une semaine durant laquelle la salariée indique avoir réalisé 48h30 de travail, elle n'a pas eu d'activité durant une matinée, ce qui n'est toutefois pas incompatible.

Il produit en outre des demandes de congés et de RTT adressées à la direction, ce qui démontrerait que Mme Solveig X... a bénéficié de repos dont elle ne tient pas compte dans ses décomptes, ce qui est inexact dès lors que les cinq congés accordés produits par l'employeur figurent sur les agendas et sont pris en compte dans les décomptes hebdomadaires.

L'employeur fait valoir que selon l'accord d'entreprise du 2 novembre 2011, la réalisation d'heures supplémentaires est soumise à l'autorisation expresse du supérieur hiérarchique.

En l'absence de toute procédure et de tout document permettant d'assurer le moindre contrôle sur la durée du travail, il existait toutefois un accord implicite de l'employeur à l'accomplissement d'heures supplémentaires, qui suffit au salarié pour en obtenir le paiement.

L'employeur fait également valoir que le calcul des heures supplémentaires ne peut être fait que sur le salaire de base et non en tenant compte de la rémunération variable.

Toutefois, étant la contrepartie directe du travail du salarié, les éléments variables de la rémunération, et notamment les commissions entrent dans l'assiette de calcul des heures supplémentaires.

Il résulte des éléments qui précèdent que Mme Solveig X... a apporté des éléments de nature à étayer sa demande et il appartenait donc à l'employeur de produire des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés, la simple critique des décomptes étant insuffisante.

La cour trouve dans les pièces produites les éléments suffisants pour fixer à la somme de 15000€ brut le montant des heures supplémentaires réalisées, outre 1500€ au titre des congés payés afférents.

1- 3 Sur l'indemnité pour travail dissimulé

Aux termes de l'article L 8223-1 du code du travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

En application de l'article L 8221-5 du code du travail est réputé travail par dissimulation d'emploi salarié le fait pour un employeur de mentionner sur le bulletin de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli.

Toutefois la dissimulation d'emploi salarié prévue par ces textes n'est caractérisée que s'il est établi que l'employeur a agi de manière intentionnelle.

Si le caractère intentionnel ne peut se déduire de la simple application d'une clause de forfait illicite, il doit être constaté qu'en l'espèce, la Sa Laboratoire Cotral n'est pas en mesure de fournir de justificatif d'un quelconque suivi, alors que compte-tenu de sa taille, elle ne pouvait ignorer les règles qui s'imposaient à elle.

Cette absence de suivi était donc destinée à dissimuler l'existence d'heures supplémentaires et il sera en conséquence fait droit à la demande, contestée dans son principe mais non dans son montant à hauteur de 25.132,14€.

2- Sur la demande au titre du dépassement des maxima journaliers et hebdomadaires

Compte-tenu de l'absence d'application de la convention de forfait jour, Mme Solveig X... se trouve soumise aux dispositions des articles L 3121-34 et suivants du code du travail, dans leur version applicable au litige , soit une durée de travail effectif ne pouvant excéder dix heures par jour et quarante-huit heures au cours d'une même semaine et quarante-quatre heures sur douze semaines consécutives.

La Snc Laboratoire Cotral se borne à observer que Mme Solveig X... ne communique pas le détail de son temps de travail et qu'il n'est donc pas permis de vérifier si elle a ou non bénéficié d'un repos hebdomadaire conforme aux prescriptions du code du travail alors que la preuve du respect des plafonds prévus par ces dispositions incombe à l'employeur.

Les tableaux des heures réalisées produits par la salarié, et qui n'ont pas été contredits par des éléments précis produits par l'employeur font apparaître de multiples reprises des dépassements de seuils légaux, tant journaliers qu'hebdomadaires, de nature à porter atteinte à la atteinte à sa santé et il lui sera alloué à ce titre la somme de 3000€.

Les sommes allouées à titre de dommages et intérêts seront fixées par la présente décision sans qu'il y ait lieu à prévoir qu'elles seront nettes de CSG et CRDS .

3 - Sur le licenciement

Mme Solveig X... fait valoir que lorsque l'absence prolongée du salarié pour cause de maladie résulte d'un manquement de l'employeur à l'obligation de sécurité de résultat, ses conséquences sur le fonctionnement de l'entreprise ne peuvent être invoquées pour justifier un licenciement, frappé de nullité et il convient donc d'examiner son argumentation préalablement aux justifications de l'employeur quant au bien fondé de la mesure.

3-1 Sur le manquement de l'employeur de veiller à la sécurité et à la santé de la salariée

Il résulte de l'article L 4121-1 du code du travail que l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et la santé physique et mentale des travailleurs et ces mesures comprennent notamment la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.

Mme Solveig X... justifie par la production d'un document intitulé 'règles de l'activité commerciale' qu'il lui était imposé d'établir 35 contacts utiles par jour au téléphone, avec compte rendu obligatoire pour chaque appel ces contacts devant déboucher sur 15 courrier par semaine, qui sont transférés au laboratoire. Il lui est imposé 'plus de quatre rendez-vous par jour s'il n'y pas de prise d'empreintes', et il est indiqué que toute journée de travail doit être justifiée que ce soit au niveau des appels téléphoniques, des rendez vous.

Par ailleurs, son secteur d'activité est étendu sur plusieurs départements et il n'est pas contesté, et par ailleurs établi par le procès-verbal de restitution de sa voiture de service, qu'entre le mois de mars 2013 et le mois d'octobre 2014, elle a parcouru plus de 60.000km.

Pour établir le rythme sur lequel se déroule son activité, Mme Solveig X... produit trois attestations, d'anciens salariés de la Snc Laboratoire Cotral ayant exercé les mêmes fonctions :

M. Mohamed D... indique que 'la pression était quotidienne'. Mme Vanessa E... fait état d'une 'cadence de travail soutenue' et indique que 'afin d'atteindre mes objectifs, il était indispensable de tenir cette cadence et malgré cela des remarques régulières de la hiérarchie étaient faites, ce qui m'a conduite à demander une rupture conventionnelle'.

M. Fabien F... indique avoir' constaté le poids et la pression que le laboratoire Cotral faisait peser sur les épaules des salariés et notamment les commerciaux(...) Les augmentations systématiques des objectifs chaque année qu'ils aient été ou non atteints l'année précédente, des indicateurs de performance ne pouvant être discutés. L'absence de dialogue rendait l'atmosphère pesante et le turn- over de 8 à 12 commerciaux sur les 50 en France ne semblait pas les alerter sur le stress, problème de sommeil ou de santé'.

Mme Solveig X... produit en outre une décision du directeur départemental du travail du Calvados du 12 février 2010 mettant en demeure la Snc Laboratoire Cotral de procéder à l'évaluation des risques de souffrance mentale existant dans l'entreprise et de prendre d'urgence toute mesure utile à l'égard du personnel dans le but de préserver leur santé mentale, ces mesures étant prises au visa d'un rapport de l'inspection du travail 'faisant état de faits de souffrance au travail notamment du personnel concerné ' et de ce que 'plusieurs salariés ont été dirigés vers des consultations de souffrance psychologique au travail, à l'initiative du médecin traitant ou de leur médecin traitant'.

A la suite de cette mise en demeure, la Snc Laboratoire Cotral a fait intervenir un organisme extérieur, qui sur la base d'un questionnaire de Karasek, ne conclut toutefois pas à l'existence de risques psychosociaux avérés.

Toutefois les données les plus récentes, et en dernier lieu le questionnaire social 2015, font toutefois apparaître que 72% des commerciaux ressentent du stress inhabituel lié à leur activité professionnelle et pour 66% estiment que les horaires de travail ne sont pas compatibles avec leur vie personnelle.

Il doit donc être retenu que la Snc Laboratoire Cotral, avertie des constats de l'inspection du travail et de cas avérés de souffrance au travail, même si une étude ultérieure a relativisé ce constat, ainsi que des facteurs de stress existant notamment chez les commerciaux, a soumis Mme Solveig X... à un régime de forfait jours en ne prenant aucune mesure qui aurait permis de vérifier que sa durée du travail était compatible avec sa santé et elle n'a donc pas respecté l'obligation de résultat qui s'imposait à elle.

Sur le lien entre la violation de l'obligation de résultat et les arrêts de travail, la Snc Laboratoire Cotral fait valoir que Mme Solveig X... n'a entamé aucune reconnaissance du caractère professionnel de la maladie, les arrêts de travail étant délivrés au titre de l'assurance maladie.

Mme Solveig X... produit le courrier par lequel son médecin généraliste l'a adressée à un psychiatre le 17novembre 2014, soit un mois après le début de l'arrêt de travail.

Il fait état d'un syndrôme anxio-dépressif 'en raison des conditions de travail' et d'un état de surmenage ainsi que de harcèlement au travail.

Si, ainsi que le note l'employeur, le médecin ne peut reprendre que les propos de Mme Solveig X..., il n'en reste pas moins que le constat du surmenage est cohérent tant avec l'examen des conditions de travail de la salariée que des études menées par l'employeur lui-même auprès de ses salariés.

Il doit donc être retenu que la violation de ses obligations par l'employeur a conduit à l'arrêt de travail.

3- 2 Sur les demandes de Mme Solveig X...

Compte-tenu des conséquences subies par la salariée qui a été victime d'un syndrome anxio- dépressif, avec un arrêt de travail justifié au moins jusqu'au 4 mars 2015, il sera alloué à Mme Solveig X... la somme de 5.000€ à titre de dommages et intérêts, au titre de la violation des obligations de l'employeur.

Par ailleurs le licenciement étant fondé sur l'état de santé de la salariée, il devra être déclaré nul en application de l'article L 1132-1 du code du travail, le jugement étant infirmé en ce qu'il a uniquement retenu un licenciement sans cause réelle et sérieuse et a alloué une indemnité à ce titre.

Mme Solveig X... bénéficiait d'une ancienneté de trois ans dans l'entreprise à la date du licenciement et son salaire moyen sur les douze derniers mois était de 4188€. Elle justifie ne pas avoir retrouvé d'emploi et ne plus être indemnisée par Pôle Emploi.

Au vu de ces éléments, il lui sera alloué la somme de 25.132,14€.

4 - Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile

Le jugement sera confirmé en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles exposés par Mme Solveig X....

Par ailleurs, il lui sera alloué la somme de 2000€ au titre des frais exposés à hauteur d'appel, la demande formée au même titre par la Snc Laboratoire Cotral étant rejetée.

PAR CES MOTIFS

La Cour, Chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré conformément à la loi,

INFIRME le jugement entrepris sauf en ce qui concerne la somme allouée au titre de l'article 700 du code de procédure civile et la charge des dépens ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés ;

DIT que le licenciement de Mme Solveig X... est nul ;

CONDAMNE la Snc Laboratoire Cotral à payer à Mme Solveig X... les sommes suivantes :

- 15.000€ bruts au titre du rappel des heures supplémentaires,

-1500€ bruts au titre des congés payés afférents,

[...] dissimulé,

- 5.000€ à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice consécutif à à la violation de l'obligation de sécurité de l'employeur,

- 3000€ à titre de dommages et intérêts pour dépassement du maximum journalier et hebdomadaire de travail ;

[...] pour licenciement nul ;

CONDAMNE la Snc Laboratoire Cotral à payer à Mme Solveig X... la somme de 2000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la Snc Laboratoire Cotral aux dépens de la procédure d'appel.

Ledit arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe le seize octobre deux mille dix huit et signé par Mme Christine K-DORSCH, Président de la Chambre Sociale, et Mme Karine MAUCHAIN, Greffière.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT DE CHAMBRE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Besançon
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17/00127
Date de la décision : 16/10/2018

Références :

Cour d'appel de Besançon 03, arrêt n°17/00127 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-10-16;17.00127 ?
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