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04/09/2018 | FRANCE | N°17/02131

France | France, Cour d'appel de Besançon, Chambre sociale, 04 septembre 2018, 17/02131


ARRET N° 18/523

JC/KM



COUR D'APPEL DE BESANCON



ARRET DU 04 SEPTEMBRE 2018



CHAMBRE SOCIALE





Contradictoire

Audience publique

du 29 mai 2018

N° de rôle : 17/02131



S/appel d'une décision

du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de LONS LE SAUNIER

en date du 18 septembre 2017

Code affaire : 89B

Demande en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur ou d'une personne substituée dans la direction, ou en réparation complémentaire pour faute

inexcusable



APPELANTE



SOCIETE JURA BOISSONS, [...]



représentée par Me Juliette X..., avocat au barreau de PARIS substitué par Me Guillaume Y..., avocat au barrea...

ARRET N° 18/523

JC/KM

COUR D'APPEL DE BESANCON

ARRET DU 04 SEPTEMBRE 2018

CHAMBRE SOCIALE

Contradictoire

Audience publique

du 29 mai 2018

N° de rôle : 17/02131

S/appel d'une décision

du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de LONS LE SAUNIER

en date du 18 septembre 2017

Code affaire : 89B

Demande en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur ou d'une personne substituée dans la direction, ou en réparation complémentaire pour faute inexcusable

APPELANTE

SOCIETE JURA BOISSONS, [...]

représentée par Me Juliette X..., avocat au barreau de PARIS substitué par Me Guillaume Y..., avocat au barreau de PARIS

INTIMES

Monsieur Laurent Z..., demeurant [...]

représenté par Me Arnaud A..., avocat au barreau du JURA substitué par Me Marie-Laure F..., avocat au barreau du JURA

SOCIETE MANPOWER, [...]

représentée par Me Laurence G..., avocat au barreau de PARIS substitué par Me B..., avocat au barreau de PARIS

SARL LE BACCARA, [...]

Compagnie d'assurances GROUPAMA GRAND EST, [...]

représentées par Me Jean-Marie C..., avocat au barreau du JURA substitué par Me Adrien D..., avocat au barreau du JURA

CPAM DU JURA, [...]

dispensée de comparaître, en vertu des dispositions des articles446-1 et 946 [rédaction du décret 2010 - 1165 du 1er octobre 2010] du code de procédure civile.

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats du 29 Mai 2018 :

Mme Christine K-DORSCH, Présidente de Chambre

M. Jérôme COTTERET, Conseiller

M. Patrice BOURQUIN, Conseiller

qui en ont délibéré,

Mme Karine MAUCHAIN, Greffier lors des débats

Les parties ont été avisées de ce que l'arrêt sera rendu le 04 Septembre 2018 par mise à disposition au greffe.

**************

FAITS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

M. Laurent Z..., salarié intérimaire de la S.A.S. MANPOWER FRANCE mis à disposition de la S.A.S. JURA BOISSONS, a été victime d'un accident du travail le 28 mai 2014 lors d'une livraison chez une cliente de cette dernière, la S.A.R.L. LE BACCARA qui exploite un bar sous l'enseigne 'la Brasserie de l'Étoile' à Lons-le-Saunier.

La déclaration d'accident établie par la S.A.S. MANPOWER FRANCE indique: 'Selon les informations de la police et d'un représentant de la S.A.S. JURA BOISSONS, alors qu'elle était en livraison et acheminait un casier à bouteilles à l'aide d'un monte charge, ce dernier se serait bloqué, la victime aurait tenté de le débloquer en tirant sur la chaîne et sa main gauche aurait été entraînée par les pignons'.

Le caractère professionnel de l'accident a été reconnu le 3 juin 2014 et M. Laurent Z... a été déclaré consolidé des suites de ses lésions le 30 avril 2015, avec attribution d'un taux d'incapacité permanente partielle de 10 %.

Par jugement du 1er décembre 2015, le tribunal correctionnel de Lons-le-Saunier a prononcé la relaxe des gérants de la S.A.S. JURA BOISSONS et de la S.A.R.L. LE BACCARA qui étaient poursuivis pour mise à disposition à un travailleur d'un équipement de travail ne permettant pas de préserver sa sécurité, et sans information ou formation préalables.

Suite à un procès-verbal de non-conciliation, M. Laurent Z... a saisi par déclaration reçue au secrétariat le 18 octobre 2016 le tribunal des affaires de sécurité sociale de Lons-le-Saunier afin de faire reconnaître la faute inexcusable de son employeur, faisant valoir avoir été affecté sur un poste à risque sans recevoir préalablement de formation renforcée.

Par jugement rendu le 18 septembre 2017, le tribunal des affaires de sécurité sociale a dit qu'il convenait de garder la S.A.R.L. LE BACCARA dans la cause, a dit que la S.A.S. MANPOWER FRANCE et la S.A.S. JURA BOISSONS ont commis une faute inexcusable à l'origine de l'accident du travail et a fixé le taux de majoration de la rente d'accident du travail allouée à la victime à 100 %.

Le jugement a octroyé à M. Laurent Z... une provision de 2 000 € à charge pour la Caisse primaire d'assurance maladie du Jura de lui en faire l'avance et a ordonné une expertise médicale pour déterminer le préjudice de la victime.

*

Par déclaration enregistrée au greffe de la Cour le 27 octobre 2017, la S.A.S. JURA BOISSONS a interjeté appel de cette décision.

Elle fait valoir dans ses écrits déposés le 3 mai 2018 que le tribunal ne pouvait imputer l'accident à une faute inexcusable pour des manquements pour lesquels l'employeur a été définitivement relaxé.

Elle ajoute que le poste sur lequel la victime était affectée n'était pas à risque si bien que la faute inexcusable n'est pas présumée et qu'il appartient au salarié de rapporter la preuve qu'elle l'a affecté à un poste présentant des risques particuliers pour sa santé ou sa sécurité sans lui faire bénéficier de la formation à la sécurité renforcée.

Or, elle explique que le salarié était déjà intervenu à plusieurs reprises au sein de l'établissement de la S.A.R.L. LE BACCARA et qu'il n'a jamais fait part d'une quelconque dangerosité du monte-charge.

Elle ajoute que la vérification du monte-charge incombait à la seule S.A.R.L. LE BACCARA et que les non-conformités relevées sur l'appareil sont sans lien avec l'accident. Elle rappelle que contre toute attente, la victime a accédé à la chaîne du monte-charge en s'accroupissant sur le trottoir et en mettant son bras, jusqu'à l'épaule, dans la trémie.

La S.A.S. JURA BOISSONS conclut en conséquence à l'infirmation du jugement et à l'absence de faute inexcusable.

*

Pour sa part, dans ses écrits déposés le 30 avril 2018, la S.A.S. MANPOWER FRANCE conclut également à l'infirmation du jugement.

Elle fait observer qu'en l'absence d'affectation sur un poste à risque, la faute inexcusable n'est pas présumée et qu'il appartient au salarié de rapporter la preuve que l'employeur aurait dû avoir conscience du danger et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour assurer sa sécurité.

En l'espèce, elle considère comme la S.A.S. JURA BOISSONS que M. Laurent Z... n'établit pas cette double preuve, faisant remarquer que la non-conformité du monte-charge appartenant à la S.A.R.L. LE BACCARA n'est pas imputable à l'employeur d'une part et qu'elle est par ailleurs sans rapport avec l'accident d'autre part.

Elle explique que l'accident dont a été victime M. Laurent Z... est consécutif à une imprudence de sa part.

À titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la faute inexcusable serait reconnue, la S.A.S. MANPOWER FRANCE entend que la mission d'expertise soit limitée à l'évaluation des préjudices énumérés par l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale ainsi qu'à ceux qui ne sont pas couverts par les dispositions du livre IV de ce code, à l'exclusion de la perte de possibilités de promotion professionnelle.

Dans ce cas, elle entend voir jugé que la faute inexcusable a été commise par la S.A.S. JURA BOISSONS, substituée dans sa direction, et sollicite en conséquence la condamnation de la S.A.S. JURA BOISSONS à la garantir de l'ensemble des condamnations qui seraient prononcées à son encontre.

Elle sollicite également que l'arrêt à intervenir soit déclaré commun à la S.A.R.L. LE BACCARA et à sa compagnie d'assurances GROUPAMA GRAND EST.

Elle demande enfin que seule la S.A.S. JURA BOISSONS soit condamnée au frais irrépétibles.

*

Dans leurs écrits déposés le 6 avril 2018, la S.A.R.L. LE BACCARA et son assureur la compagnie GROUPAMA GRAND EST concluent à leur mise hors de cause et à la condamnation de la S.A.S. JURA BOISSONS à leur payer une indemnité de 2 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Elles font valoir être tiers au litige et que la S.A.S. JURA BOISSONS les ont appelées à tort dans la cause par requête du 25 janvier 2017.

*

Dans ses écrits déposés le 7 avril 2018, M. Laurent Z... conclut à la confirmation du jugement, y ajoutant à la charge de la S.A.S. JURA BOISSONS une indemnité de 3 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile .

À titre liminaire, il fait remarquer que la décision de relaxe rendue par la juridiction correctionnelle est sans emport sur la procédure de reconnaissance de faute inexcusable.

Il maintient qu'il doit bénéficier de la présomption de faute inexcusable, affirmant avoir été affecté sur un poste à risque en raison de la multiplicité des lieux sur lesquels il intervenait ainsi que des différents matériels utilisés.

Il rappelle que le monte-charge à l'origine de l'accident était de conception complexe et ancienne et que l'entreprise utilisatrice avait mis en place un protocole afin de répertorier les différents incidents pouvant survenir lors des livraisons effectuées.

À titre subsidiaire, il considère rapporter la preuve d'une faute inexcusable dans la mesure où tant son employeur que la société utilisatrice avaient connaissance du danger auquel il était exposé et où elles n'ont pris aucune mesure pour le protéger.

Il fait valoir que l'Inspection du travail a relevé que la S.A.S. JURA BOISSONS et la S.A.S. MANPOWER FRANCE n'ont pas effectué les vérifications obligatoires dont elles auraient pu constater la nécessité en effectuant une simple visite dans les locaux de la S.A.R.L. LE BACCARA. Il ajoute que le rapport de l'agence SOCOTEC a mis en évidence sur le monte-charge la présence d'anomalies et de défectuosités mettant en danger les utilisateurs. Il fait observer que c'est d'ailleurs une panne de l'appareil qui l'a contraint à intervenir et à effectuer la man'uvre au cours de laquelle il s'est grièvement blessé.

*

En ce qui la concerne, dans ses écrits enregistrés au greffe le 16 avril 2018, la Caisse primaire d'assurance maladie du Jura s'en remet à Justice sur la reconnaissance d'une éventuelle faute inexcusable.

Elle entend, dans l'hypothèse où cette faute serait reconnue, que soit fixé le montant des préjudices et que l'ensemble des indemnités soit mis à la charge de l'employeur afin de lui permettre de recouvrer auprès de lui les sommes qu'elle serait amenée à verser au salarié.

Elle entend également que soit constatée une erreur matérielle dans le jugement déféré, le juge ne pouvant que fixer au maximum le montant de la majoration de la rente et non pas le taux de la rente elle-même.

*

En application de l'article 455 du code de procédure civile, la Cour se réfère, pour l'exposé des moyens des parties, à leurs conclusions visées par le greffe, étant précisé que la Caisse primaire d'assurance maladie du Jura a été dispensée de comparaître à l'audience de plaidoirie du 29 mai 2018 en application des articles 446-1 et 946 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

1° ) Sur la reconnaissance de la faute inexcusable :

a - sur la présomption de la faute inexcusable :

Il résulte des articles L. 452-1 du code de la sécurité sociale, L. 4 154-2 et L. 4 154-3 du code du travail que l'existence de la faute inexcusable de l'employeur est présumée établie pour les salariés mis à disposition d'une entreprise utilisatrice par une entreprise de travail temporaire, victimes d'un accident du travail alors qu'affectés à des postes de travail présentant des risques particuliers pour leur sécurité, ils n'ont pas bénéficié d'une formation renforcée à la sécurité ainsi que d'un accueil et d'une information adaptée dans l'entreprise dans laquelle ils sont employés.

En l'espèce, il est constant que M. Laurent Z..., selon contrat de travail conclu le 25 mai 2014 avec la S.A.S. MANPOWER FRANCE, a été mis à disposition de la S.A.S. JURA BOISSONS du 27 mai au 3 juin 2014 en raison d'un accroissement temporaire d'activité lié au retard pris en raison d'un jour férié pour effectuer des travaux de manutention pour la préparation de commande et pour la mise en caisse de bouteilles.

Son poste ne consistait donc pas à effectuer les travaux habituellement reconnus dangereux comme conduire des engins, assurer les travaux de maintenance sur des machines dangereuses, ou ne lui imposait pas d'être en contact avec des matières présentant un risque particulier comme des produits chimiques. De même, l'activité consistant à mettre des bouteilles dans une caisse et à les manipuler ne présente a priori aucun risque particulier.

La mission de M. Laurent Z... se limitait, ce qui n'est pas contesté, à être assistant livreur et à charger et décharger des caisses de bouteilles.

Ainsi, en l'absence d'affectation sur un poste de travail présentant un risque particulier, M. Laurent Z... ne peut invoquer la présomption de la faute inexcusable et doit donc rapporter la preuve, en application de l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale, que l'employeur a manqué à l'obligation contractuelle de sécurité de résultat dont il est débiteur au motif que celui-ci avait ou aurait dû avoir conscience du danger et n'a pas pris les mesures de prévention et de protection nécessaires pour en préserver son personnel.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a dit que la faute inexcusable commise par la S.A.S. MANPOWER FRANCE bénéficie du régime de la présomption légale.

b - sur la preuve de la faute inexcusable :

Il est constant que la déclaration d'accident établie par la S.A.S. MANPOWER FRANCE indique : 'Selon les informations de la police et d'un représentant de la S.A.S. JURA BOISSONS, alors qu'elle était en livraison et acheminait un casier à bouteilles à l'aide d'un monte charge, ce dernier se serait bloqué, la victime aurait tenté de le débloquer en tirant sur la chaîne et sa main gauche aurait été entraînée par les pignons'.

À la suite de l'accident, l'Inspection du travail a diligenté une enquête à l'issue de laquelle il a été relevé, selon rapport du 28 mai 2014, que les engrenages qui entraînent la chaîne ne sont pourvus d'aucune protection destinée à éviter tout contact avec les éléments en rotation. Le responsable de la brasserie a pour sa part précisé à l'inspecteur du travail que cette installation est présente depuis très longtemps dans son établissement et qu'il n'était pas informé de l'obligation de procéder à des vérifications annuelles de conformité par un organisme agréé.

De même, il résulte du rapport de l'agence SOCOTEC qui a procédé à un contrôle de l'appareil le 16 juillet 2014, soit également postérieurement à l'accident, que la fin de course de la machinerie et de la poulie est mal réglée, que le câble de levage est détérioré au niveau du tambour, que la fixation du câble de levage est à revoir. Ce rapport conclut que l'appareil présente un danger pour les utilisateurs et que l'installation n'a jamais été vérifiée.

Il ressort de l'ensemble de ces observations qu'une simple visite préalable de la S.A.S. JURA BOISSONS chez son client lui aurait permis de constater l'ancienneté et la vétusté de l'appareil, et de demander la vérification de sa conformité.

En conséquence, la faute inexcusable est établie, étant précisé qu'est sans emport dans le présent litige la relaxe des gérants de la S.A.R.L. LE BACCARA et de la S.A.S. JURA BOISSONS qui étaient poursuivis devant le tribunal correctionnel de Lons-le-Saunier pour avoir mis à disposition de travailleurs un équipement de travail ne permettant pas de préserver sa sécurité et sans information ou formation préalables.

La reconnaissance de la faute inexcusable entraîne de plein droit la majoration à son maximum de la rente servie à la victime, sans qu'il appartienne toutefois au juge de fixer celle-ci, si bien que le jugement déféré devra être infirmé sur ce point.

2° ) Sur l'expertise judiciaire :

Dans la mesure où la faute inexcusable est établie, il convient de confirmer les dispositions du jugement ayant ordonné une expertise médicale afin de connaître l'étendue des préjudices subis par la victime.

Concernant la mission de l'expert, il résulte de l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale tel qu'interprété par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2010-8QPC du 18 juin 2010 qu'en cas de faute inexcusable de l'employeur et indépendamment de la majoration de rente servie à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, celle-ci peut demander à l'employeur devant la juridiction de sécurité sociale, la réparation non seulement des chefs de préjudice énumérés par le texte susvisé, mais aussi de l'ensemble des dommages non couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale.

Ne sont écartés que les compléments d'indemnisation pour les préjudices déjà couverts par les prestations versées en application du livre IV du code de la sécurité sociale.

En revanche, la victime peut prétendre à être indemnisée du déficit fonctionnel temporaire dont les indemnités journalières versées par la sécurité sociale n'assurent pas la réparation. Ce poste de préjudice répare l'invalidité subie dans la sphère personnelle de l'assuré jusqu'à consolidation, soit la perte de qualité de vie et celles de joies usuelles de la vie courante du fait, par exemple, de l'hospitalisation. De même, elle peut demander la réparation de l'aménagement de son logement et de l'acquisition d'un véhicule adapté, ainsi que les frais d'assistance par tierce personne temporaire même si cette assistance a été assurée par un proche.

Elle peut enfin prétendre à obtenir l'indemnisation des préjudices résultant de la perte ou de la diminution des possibilités professionnelles.

Toutefois, l'appréciation de celle-ci n'étant pas de nature médicale, c'est donc à tort que le jugement déféré, qui sera infirmé sur ce point, a confié à l'expert la mission de la déterminer.

3° ) Sur les demandes de la Caisse primaire d'assurance maladie :

La S.A.S. MANPOWER FRANCE sera condamnée à rembourser à la Caisse primaire d'assurance maladie du Jura l'ensemble des sommes qu'elle sera amenée à verser, dont les frais d'expertise, conformément à l'article L 452-3 du code de la sécurité sociale.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

4° ) Sur la demande de garantie de la S.A.S. MANPOWER FRANCE à l'encontre de la S.A.S. JURA BOISSONS :

La faute inexcusable, telle qu'elle a été reconnue par la présente décision, est imputable à la S.A.S. JURA BOISSONS, dès lors qu'il appartient à l'entreprise utilisatrice, et non à l'entreprise de travail temporaire, de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité du salarié intérimaire, en application de l'article L. 1251-21 du code du travail.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a fait droit à la demande de garantie de la S.A.S. MANPOWER FRANCE.

5° ) Sur la mise hors de cause de la S.A.R.L. LE BACCARA et de son assureur la compagnie GROUPAMA GRAND EST :

Il convient de rappeler que la victime d'un accident du travail ne peut agir en reconnaissance d'une faute inexcusable que contre l'employeur, la Caisse n'ayant pour sa part un recours que contre la personne ayant la qualité juridique d'employeur.

L'action en recherche de l'éventuelle responsabilité de la S.A.R.L. LE BACCARA ne peut donc être exercée que dans le cadre du droit commun.

La juridiction sociale étant incompétente pour en connaître, il convient d'infirmer le jugement en ce qu'il a dit qu'il convenait de garder la S.A.R.L. LE BACCARA dans la cause.

Pour le même motif, il n'y a pas lieu de déclarer opposable la présente décision à son assureur, la compagnie GROUPAMA GRAND EST.

6° ) Sur les dépens et les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile:

L'équité commande d'allouer à M. Laurent Z... d'une part et à la S.A.R.L. LE BACCARA et à son assureur la compagnie GROUPAMA GRAND EST d'autre part une indemnité de 1 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Il sera enfin rappelé que la présente procédure est gratuite et sans frais.

PAR CES MOTIFS

La Cour, Chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

INFIRME le jugement rendu le 18 septembre 2017 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Lons-le-Saunier en ce qu'il a dit maintenir dans la cause la S.A.R.L. LE BACCARA, en ce qu'il a dit que la faute inexcusable commise par la S.A.S. MANPOWER en ce qui concerne l'accident de travail survenu au préjudice de M. Laurent Z... bénéficie du régime de la présomption légale, en ce qu'il a dit que le taux de majoration de la rente d'accident du travail allouée à la victime sera fixé à 100 % et en ce qu'il a confié à l'expert judiciaire la mission de déterminer les préjudices résultant de la perte ou de la diminution des possibilités professionnelles ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

MET hors de cause la S.A.R.L. LE BACCARA et son assureur, la compagnie GROUPAMA GRAND EST ;

DIT que l'accident survenu à M. Laurent Z... le 28 mai 2014 est dû à une faute inexcusable de la S.A.S. JURA BOISSONS, entreprise utilisatrice, substituée à l'employeur la S.A.S MANPOWER FRANCE ;

FIXE à son maximum la rente d'accident du travail qui sera versée à M. Laurent Z... ;

CONFIRME le jugement en ses autres dispositions ;

Y ajoutant,

DIT n'y avoir lieu à déclarer la présente décision commune à la S.A.R.L. LE BACCARA et à son assureur la compagnie GROUPAMA GRAND EST ;

RENVOIE la procédure devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Lons-le-Saunier aux fins de mise à exécution de l'expertise médicale de M. Laurent Z... confiée au docteur E..., et aux fins de poursuite de la procédure, au regard de la confirmation de la décision déférée quant à la reconnaissance de la faute inexcusable ;

CONDAMNE la S.A.S. JURA BOISSONS à verser à M. Laurent Z... une indemnité de mille cinq cents euros (1 500 €) en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la S.A.S. JURA BOISSONS à verser à la S.A.R.L. LE BACCARA et à la compagnie GROUPAMA GRAND EST une indemnité de mille cinq cents euros (1 500 €) en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

RAPPELLE que la présente procédure est gratuite et sans frais.

LEDIT ARRÊT a été rendu par mise à disposition au greffe le quatre septembre deux mille dix-huit et signé par Mme Christine DORSCH, Présidente de Chambre, et par Mme Karine MAUCHAIN, Greffier.

LE GREFFIER,LE PRESIDENT DE CHAMBRE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Besançon
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17/02131
Date de la décision : 04/09/2018

Références :

Cour d'appel de Besançon 03, arrêt n°17/02131 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-09-04;17.02131 ?
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