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22/05/2018 | FRANCE | N°16/00245

France | France, Cour d'appel de Besançon, 1ère chambre, 22 mai 2018, 16/00245


ARRÊT N°



EM/CB



COUR D'APPEL DE BESANÇON

- 172 501 116 00013 -



ARRÊT DU 22 MAI 2018



PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE







Contradictoire

Audience publique

du 10 avril 2018

N° de rôle : 16/00245



S/appel d'une décision

du TRIBUNAL DE COMMERCE DE VESOUL

en date du 25 juillet 2014 [RG N° 2008/0026]

Code affaire : 36A

Demande en nullité de la désignation d'un dirigeant du groupement





Philippe X... C/ Li

onel Y... Z... & ASSOCIES





PARTIES EN CAUSE :





Maître X... ès qualités d'Administrateur judiciaire et de commissaire à l'exécution du plan de cession de la SA TREFILERIE DE CONFLANDEY et de la SA CON...

ARRÊT N°

EM/CB

COUR D'APPEL DE BESANÇON

- 172 501 116 00013 -

ARRÊT DU 22 MAI 2018

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

Contradictoire

Audience publique

du 10 avril 2018

N° de rôle : 16/00245

S/appel d'une décision

du TRIBUNAL DE COMMERCE DE VESOUL

en date du 25 juillet 2014 [RG N° 2008/0026]

Code affaire : 36A

Demande en nullité de la désignation d'un dirigeant du groupement

Philippe X... C/ Lionel Y... Z... & ASSOCIES

PARTIES EN CAUSE :

Maître X... ès qualités d'Administrateur judiciaire et de commissaire à l'exécution du plan de cession de la SA TREFILERIE DE CONFLANDEY et de la SA CONFLANDEY

demeurant [...]

APPELANT

Représenté par Me Ludovic A... de la B..., avocat au barreau de BESANCON et Me Patrice C..., avocat au barreau de PARIS

ET :

Monsieur Lionel Y...

né le [...] à [...],

demeurant [...]

INTIMÉ

Représenté par Me Bruno D..., avocat au barreau de BESANCON

et Me Christophe E..., avocat au barreau de PARIS

PARTIE INTERVENANTE

Z... & ASSOCIES, ès qualités de mandataire judiciaire ad hoc de la SA TREFILERIES DE CONFLANDEY

dont le siège est [...]

Représentée par Me Ludovic A... de la B..., avocat au barreau de BESANCON et Me Patrice C..., avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats :

PRÉSIDENT : Monsieur Edouard MAZARIN (magistrat rapporteur) , Président de chambre.

ASSESSEURS : Madame A. CHIARADIA et Monsieur L. MARCEL, Conseillers.

GREFFIER : Madame D. BOROWSKI , Greffier.

lors du délibéré :

PRÉSIDENT : Monsieur Edouard MAZARIN, Président de chambre

ASSESSEURS :Madame A. CHIARADIA et Monsieur L. MARCEL, Conseillers.

L'affaire, plaidée à l'audience du 10 avril 2018 a été mise en délibéré au 22 mai 2018. Les parties ont été avisées qu'à cette date l'arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe.

**************

Faits et prétentions des parties

Par jugements en date des 28 juin 2005 et 31 janvier 2006, le tribunal de commerce de Vesoul a d'abord prononcé le redressement judiciaire des SA Conflandey et Tréfileries de Conflandey et désigné M. Philippe X... en qualité d'administrateur judiciaire puis a arrêté le plan de cession des ces deux sociétés et désigné M. Philippe X... en qualité de commissaire à leur exécution.

Entretemps, par ordonnance rendue le 16 décembre 2005, le juge commissaire de ces procédures collectives avait autorisé la SA Tréfileries de Conflandey en sa qualité d'actionnaire majoritaire de la société américaine Conflandey Inc. à consentir aux projets de contrats, d'une part d'achat d'actifs par une société Bekaert et, d'autre part, d'agent commercial confiant à cette société pendant une durée minimale de trois ans l'exclusivité de la vente des produits Conflandey aux États Unis et au Canada.

À cette occasion, M. Lionel Y..., à la fois chairman de la société américaine Conflandey Inc. et dirigeant des sociétés Conflandey du groupe français, a adressé au juge commissaire une lettre ainsi rédigée:

'Dans le cadre de la réalisation des actifs de la Conflandey Inc. je vous confirme que je me porte fort que le produit de ces réalisations après paiement des créanciers à l'exception des sommes dues au titre du prêt IRB et à Tréfileries de Conflandey dégageront (sic) des ressources de 8.000.000US$ minimum par rapport au 8.796.000 US$ prévus, pour permettre de désintéresser le solde du prêt IRB (6.000.000 US$) selon tableau ci-joint et les sommes dues à Tréfileries de Conflandey / Conflandey'.

Un tableau annexé présentait une analyse de bilan de liquidation prévoyant le versement d'un disponible de 2.000.000 US$ pour les créanciers non privilégiés et actionnaires Tréfileries de Conflandey.

Ces objectifs n'ayant pas été atteints, M. Philippe X... ès qualités d'administrateur judiciaire et de commissaire à l'exécution du plan de cession des SA Conflandey et Tréfileries de Conflandey a fait assigner M. Lionel Y... en paiement de :

- la somme de 2.000.000 US$,

- la différence de contre-valeur en euros de la somme de 2.000.000 US$ au cas cette contre-valeur au jour du paiement s'avérerait inférieure à celle à la date de l'assignation,

- la somme complémentaire de 200.000 €,

- les intérêts de retard sur les condamnations à intervenir, au taux légal à compter de la mise en demeure jusqu'à paiement effectif avec capitalisation,

- la somme de 15.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Par jugement rendu le 5 juillet 2014, le tribunal de commerce de Vesoul a débouté la F..., représentée par M. X... ès qualités d'administrateur judiciaire et de commissaire à l'exécution du plan de cession des SA Trefileries de Conflandey et Conflandey de toutes ses demandes et l'a condamnée aux dépens liquidés à la somme de 70,20€ ainsi qu'à payer à M. Lionel Y... la somme de 5.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

M. X..., ès qualités d'administrateur judiciaire et de commissaire à l'exécution du plan de cession des SA Trefileries de Conflandey et Conflandey a, selon déclaration parvenue au greffe de la cour le 27 février 2015, interjeté appel de ce jugement lequel a été déclaré irrecevable en raison de sa tardiveté par ordonnance d'incident rendue le 19 janvier 2016 par le conseiller de la mise en état de cette chambre.

Sur déféré, la cour a, par arrêt rendu le 5 juillet 2016 :

- infirmé l'ordonnance rendue le 19 janvier 2016 mais seulement en ce qu'elle avait déclaré irrecevable l'appel formé le 27 février 2015 par M. Philippe X..., ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de cession de la SA Trefileries de Conflandey et de la SA Conflandey, à l'encontre du jugement du tribunal de commerce de Vesoul en date du 25 juillet 2014 et l'a condamné aux dépens de l'incident et statuant à nouveau de ces seuls chefs,

- déclaré recevable l'appel formé le 27 février 2015 par M. Philippe X..., ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de cession de la SA Trefileries de Conflandey et de la SA Conflandey à l'encontre du jugement du tribunal de commerce de Vesoul en date du 25 juillet 2014,

- joint au fond les dépens de l'incident,

- confirmé l'ordonnance déférée pour le surplus et y ajoutant,

- rejeté les demandes formées à hauteur de cour sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et joint au fond les dépens du déféré.

Par ultimes conclusions transmises le 19 mars 2018, M. Philippe X... en ses qualités d'administrateur judiciaire (sic) et de commissaire à l'exécution du plan de cession de la SA Trefileries de Conflandey et de la SA Conflandey, et la SELARL AJRS, venant aux droits de la G... par voie de fusion et absorption, agissant en qualité de mandataire ad'hoc de la SA Trefileries de Conflandey intervenant volontairement à la procédure, demandent à la cour de :

- rectifier le jugement entrepris s'agissant de l'identité du demandeur, à savoir M. Philippe X... ès qualités aux lieu et place de la F...,

- rejeter le moyen d'irrecevabilité d'appel pour tardiveté maintenu par M. Y...,

- déclarer M. Philippe X... ès qualités d'administrateur judiciaire (sic) et de commissaire à l'exécution du plan de cession des SA Conflandey et Tréfileries de Conflandey recevable et bien fondé en son appel du jugement rendu le 24 juillet 2014 par le tribunal de commerce de Vesoul,

- donner acte à la SELARL AJRS venant aux droits de la G... de son intervention volontaire ès qualités de mandataire ad'hoc de la SA Trefileries de Conflandey afin de poursuivre les instances en cours, procéder aux éventuelles répartitions et d'une manière générale poursuivre les actions relatives à la mission du commissaire à l'exécution du plan,

- la déclarer également recevable et bien fondée en son intervention,

- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et statuant à nouveau,

- condamner M. Lionel Y... à payer à la SELARL AJRS venant aux droits de la G... ès qualités de mandataire ad'hoc de la SA Trefileries de Conflandey :

* la somme de 2.000.000 US$,

* la différence de contre-valeur en euros de la somme de 2.000.000 US$ au cas où cette contre-valeur au jour du paiement s'avérerait inférieure à celle à la date de l'assignation,

* les intérêts de retard sur les condamnations à intervenir, au taux légal à compter de la mise en demeure jusqu'à paiement effectif avec capitalisation,

* la somme de 15.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens distraits au profit de son conseil,

- débouter M. Lionel Y... de toutes ses demandes dirigées à l'encontre de M. X... ès qualités.

Ils font principalement valoir que :

- l'instance a été initié par M. Philippe X... ès qualités et non par la F...,

- la recevabilité de l'appel a été définitivement tranchée par arrêt de cette cour du 5 juillet 2016,

- M. Philippe X... ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de cession a qualité pour agir et aucune fin de non recevoir tirée de l'estoppel ne saurait lui être opposée,

- M. Lionel Y... est privé du droit d'agir en ce que ses demandes et moyens de fait ou de droit reposent sur des documents rédigés en langue étrangère non traduits en français par un traducteur assermenté,

- l'engagement de M. Y... est constitutif d'une promesse de porte-fort laquelle n'est pas soumise aux conditions de forme exigées par l'article 1326 du code civil,

- à défaut, il s'agit d'un engagement unilatéral source d'obligations,

- le préjudice est égal à 2.000.000 US$ correspondant au solde disponible pour les actionnaires de la SA Trefileries de Conflandey promis par le porte-fort de M. Y....

M. Lionel Y... a répliqué en dernier lieu le 15 mars 2018 pour demander à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que sa lettre du 16 juin 2005 ne valait pas promesse de porte-fort et a rejeté toutes les demandes formées contre lui,

- déclarer M. Philippe X... ès qualités d'administrateur judiciaire (sic) et de commissaire à l'exécution du plan de cession et la Z... ès qualités irrecevables pour défaut de qualité à agir et parce qu'ils méconnaissent le principe de l'interdiction de se contredire au détriment d'autrui,

- juger qu'il a produit et régulièrement communiqué des pièces traduites de l'anglais en français par un traducteur assermenté,

et vu les montants rapportés effectivement à la procédure par son action personnelle, soit la somme de 6,15 millions de dollars environ entre décembre 2005 et décembre 2007,

- juger que, comme l'a qualifié M. X..., son engagement était accessoire et ne l'obligeait pas à atteindre un résultat,

- dire que le prix de cession d'actifs qui devait être versé par Bekaert n'a pas été payé en raison de la violation par la société Saarstahl de l'accord d'exclusivité conclu au profit de Bekaert et que si les sociétés Conflandey et Tréfileries de Conflandey ne perçoivent pas les sommes qu'elles attendent de la cession de la totalité des actifs de Conflandey Inc. cela résulterait de l'effondrement du prix de l'immobilier aux Etats-Unis et du coût non prévu de la gestion de la société et du site aux Etats-Unis depuis 10 ans,

- à titre infiniment subsidiaire, juger que M. X..., ne rapporte pas la preuve d'un préjudice et qu'il a commis une faute en négligeant de vérifier, au moment où ont été définis les engagements du repreneur, que celui-ci avait accepté l'accord d'exclusivité consenti au profit de la société Bekaert et qu'il s'engageait à le respecter,

- condamner dans ce cas M. X... ès qualités et la H... ès qualités à lui payer une somme équivalente à celle qui pourrait être mise à sa charge,

- condamner M. X... ès qualités et la H... ès qualités à lui payer 15.000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens distraits au profit de son conseil.

Il développe principalement l'argumentation suivante :

- M. X... ès qualités et la H... ès qualités tant d'administrateur judiciaire (re-sic) que de commissaire à l'exécution du plan de cession n'ont pas qualité à agir,

- la H... ès qualités de mandataire ad'hoc n'a pas davantage qualité à poursuivre une instance qui était initialement irrecevable,

- en soutenant successivement que son engagement était accessoire puis qu'il ne l'était pas et constituait une obligation de résultat, M. X... a méconnu le principe de l'estoppel,

- au fond, son engagement ne respecte pas le formalisme exigé par l'article 1326 du code civil et ne constitue pas une promesse de porte-fort car il n'a conclu aucun acte juridique, n'a rien promis à un tiers identifié, n'a pas promis que la société Conflandey Inc. accomplirait un fait matériel donné ni n'exécuterait un engagement déterminé mais il s'est borné a rédiger un courrier adressé au juge commissaire qui n'est ni le cocontractant, ni le bénéficiaire,

- subsidiairement, l'opération principale n'a pas abouti à la suite d'un cas fortuit et la procédure collective n'a pas subi de préjudice puisque s'il n'avait pas délivré l'engagement querellé le juge commissaire n'aurait pas autorisé la cession d'actifs,

- en tout état de cause, M. X... a commis une faute.

Pour l'exposé complet des prétentions et moyens des parties, la Cour se réfère à leurs dernières conclusions ci-dessus rappelées conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 20 mars 2018.

Motifs de la décision

1-sur la demande en rectification du jugement déféré,

Il résulte des jugements rendus par le tribunal de commerce de Vesoul-Gray les 28 juin 2005 et 31 janvier 2006 que M. Philippe X... a été désigné successivement en qualité d'administrateur judiciaire des SA Conflandey et Tréfileries de Conflandey puis de commissaire à l'exécution du plan de cession de ces mêmes sociétés et que c'est en cette double qualité qu'il a, le 16 décembre 2008, fait délivrer assignation à M. Lionel Y... d'avoir à comparaître devant le tribunal de commerce de Vesoul.

Il s'ensuit que si l'article L.812-2-III du code de commerce dispose que 'lorsque le tribunal nomme une personne morale [pour exercer les fonctions de mandataire judiciaire], il désigne en son sein une ou plusieurs personnes physiques pour la représenter dans l'accomplissement du mandat qui lui est confié' et si l'article R. 814-83 du même code précise que 'le mandat de justice est exercé par la société d'administrateurs judiciaires ou de mandataires judiciaires...', il n'en demeure pas moins qu'en l'espèce la F... n'a jamais été désignée en ces qualités de sorte que c'est par erreur que le tribunal de commerce de Vesoul, dans le jugement déféré, l'a fait figurer 'représentée par Me X...' en qualité de demanderesse.

Le jugement querellé sera rectifié en ce sens.

2 -sur la recevabilité de l'appel et des conclusions prises par M. Philippe X..., ès qualités d'administrateur judiciaire,

Par arrêt en date du 5 juillet 2016 passé en force de chose jugée, cette cour a infirmé l'ordonnance rendue le 19 janvier 2016 par le conseiller de la mise en état des causes mais seulement en ce qu'elle avait déclaré irrecevable l'appel formé le 27 février 2015 par M. Philippe X..., ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de cession de la SA Trefileries de Conflandey et de la SA Conflandey, à l'encontre du jugement du tribunal de commerce de Vesoul en date du 25 juillet 2014 et l'a condamné aux dépens de l'incident et, statuant à nouveau, a déclaré recevable ledit appel et a confirmé l'ordonnance déférée pour le surplus de sorte que l'irrecevabilité de celui interjeté par M. Philippe X..., ès qualités d'administrateur judiciaire de la SA Trefileries de Conflandey et de la SA Conflandey est définitive.

Il s'ensuit que sont irrecevables, d'une part, les conclusions de M. Philippe X... demandant à la cour de le déclarer 'ès qualités d'administrateur judiciaire et de commissaire à l'exécution du plan de cession de la SA Trefileries de Conflandey et de la SA Conflandey recevable en son appel' et, d'autre part, les longs développements de M. Y... consacrés à l'irrecevabilité des demandes de M. Philippe X..., ès qualités d'administrateur judiciaire pour défaut de qualité à agir.

3 -sur la qualité à agir de M. Philippe X..., ès qualités de commissaire à l'exécution du plan et de la SELARL AJRS ès qualités de mandataire ad hoc de la SA Trefileries de Conflandey,

Il est de jurisprudence constante que le jugement arrêtant le plan de cession de l'entreprise mettant fin, dès son prononcé, à la période d'observation, le débiteur retrouve la totalité de ses pouvoirs mais sous réserve de ceux qui sont attribués à l'administrateur pour la mise en oeuvre du plan, et au commissaire à l'exécution du plan pour veiller à l'exécution de celui-ci.

Or, l'action engagée par M. Philippe X..., ès qualités d'administrateur judiciaire et poursuivie par lui ès qualités de commissaire à l'exécution du plan n'est pas une action en recouvrement d'une créance née postérieurement à l'ouverture de la procédure collective mais une action tendant, par l'exécution de l'engagement pris par M. Y..., à la perfection du plan de cession homologué par le tribunal pour l'exercice de laquelle le commissaire à l'exécution du plan et, à sa suite l'administrateur ad'hoc, la SELARL AJRS, venant elle-même aux droits de la G..., ont qualité, et sont par conséquent, recevables à agir.

4 - sur la fin de non recevoir tirée de l'estoppel,

Le simple fait pour M. X... ès qualités d'avoir soutenu devant les premiers juges que l'engagement de M. Y... était un engagement de porte fort d'exécution accessoire, puis devant la cour qu'il n'était pas accessoire et mettait à la charge de ce dernier une obligation de résultat, entre dans le cadre des prérogatives reconnues aux parties par l'article 563 du code de procédure civile et ne méconnaît donc pas le principe de l'estoppel (Com. 10/02/2015, n° 13-28262).

Les premiers juges n'ayant pas été saisis de ces fins de non recevoir, il sera ajouté au jugement déféré en ce sens.

5 -sur la fin de non recevoir opposée par M. Philippe X... et la SELARL AJRS ès qualités tirée de l'absence de traduction en français de pièces produites en langue anglaise,

Un tel fait ne constitue pas une fin de non recevoir au sens de l'article 122 du code de procédure civile mais peut tout au plus être qualifié d'exception de nullité permettant au juge d'écarter des pièces produites aux débats en langue étrangère.

Sont ainsi visées les pièces adverses n° 3, 4, 5, 11, 15, 17, 18, 19, 20, 22, 24, 28, 34, 35, 37 et 41.

Or, au moins à hauteur de cour :

- les pièces n° 3, 4, 5, 11, 15, 22, 24, 34, 35, 37 et 41 ont été traduites en français par Lena Christina I..., traducteur assermenté auprès du tribunal de grande instance de Grasse et de la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

- l'annexe n° 18 est une pièce de procédure en français,

- l'annexe n° 20 est une traduction libre en langue française de l'annexe n°19,

- l'annexe n° 29 est une traduction libre en langue française de l'annexe n°28.

Il s'ensuit que la cour écartera des débats les seules annexes n° 19 et 28.

6 -au fond, sur la qualification de porte fort,

Monsieur Y... a signé l'engagement suivant :

'Dans le cadre de la réalisation des actifs de la Conflandey Inc. je vous confirme que je me porte fort que le produit de ces réalisations après paiement des créanciers à l'exception des sommes dues au titre du prêt IRB et à Tréfileries de Conflandey dégageront (sic) des ressources de 8.000.000US$ minimum par rapport au 8.796.000 US$ prévus, pour permettre de désintéresser le solde du prêt IRB (6.000.000 US$) selon tableau ci-joint et les sommes dues à Tréfileries de Conflandey / Conflandey'.

Il appartient au juge de qualifier juridiquement un acte sans s'arrêter à la lettre que des personnes non professionnelles du droit ont pu utiliser.

L'engagement de porte fort qui constitue un engagement de faire, n'est pas soumis aux conditions de forme exigées par l'article 1326 devenu 1376 du code civil.

C'est en engagement personnel autonome d'une personne qui promet à son cocontractant d'obtenir l'engagement d'un tiers à son égard.

Celui qui se porte fort de l'exécution d'un engagement par un tiers s'engage accessoirement à l'engagement principal souscrit par le tiers à y satisfaire si le tiers ne l'exécute pas lui-même.

Contractant ainsi une obligation de résultat autonome, il est tenu envers le bénéficiaire de la promesse des conséquences de l'inexécution de l'engagement promis (Cass. com. 1/04/2014, n°13-10629).

Mais une promesse de porte-fort ne peut résulter que d'actes manifestant l'intention certaine du promettant de s'engager pour un tiers.

En l'espèce, le document litigieux n'est pas un contrat : il est signé du seul M. Lionel Y..., M. X... n'y apparaissant pas, et il est adressé au juge commissaire des procédures collectives des SA Conflandey et Tréfileries de Conflandey qui n'est pas le représentant de celles-ci.

M. Lionel Y... n'est donc partie à aucun contrat conclu avec M. X... ès qualités de commissaire à l'exécution du plan, ni d'ailleurs avec quiconque, et l'engagement qu'il a pris n'est l'accessoire d'aucun engagement principal pris par un tiers, la société américaine Conflandey Inc. n'ayant elle-même pris aucun engagement de vendre ses actifs pour un prix non inférieur à 8.000.000US$.

M. Lionel Y... n'a notamment pas promis que si le produit des réalisations d'actifs après paiement des créanciers à l'exception des sommes dues au titre du prêt IRB et à Tréfileries de Conflandey dégageaient des ressources inférieures à 8.000.000US$, il paierait à M. X... ès qualités, soit une somme de 2.000.000US$, soit la différence entre la somme de 8.000.000US$ et le prix finalement obtenu par la réalisation des-dits actifs que d'ailleurs personne n'indique, ni a fortiori ne justifie.

Ainsi, dès lors que le document litigieux ne comporte pas d'engagement exprès de se porter fort pour autrui et ne constitue donc pas un acte manifestant l'intention certaine et non équivoque de M. Y... de s'engager pour la société américaine Conflandey Inc., c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré qu'il ne pouvait pas être qualifié de promesse de porte-fort au sens de l'article 1120 devenu l'article 1204 du code civil de sorte que leur décision sera confirmée sur ce point.

7 -au fond, sur la qualification d'engagement unilatéral, source d'obligations,

Faute de respect des conditions de forme exigées par l'article 1326 devenu l'article 1376 du code civil, ce document ne peut pas davantage constituer en lui-même un engagement unilatéral source d'obligations pour M. Y....

Mais le non respect de ces conditions de forme affecte non la validité de l'engagement mais la preuve de sa portée et de son étendue.

Ainsi, à supposer qu'il puisse être considéré que l'inexécution de cet engagement pris par M.Y... a fait perdre une chance à la procédure collective d'apurer son passif dans de meilleures conditions, encore faudrait-il démontrer qu'en l'absence de signature de ce document, le juge commissaire n'aurait pas autorisé la SA Tréfileries de Conflandey en sa qualité d'actionnaire majoritaire de la société américaine Conflandey Inc. à consentir aux projets de contrats d'achat d'actifs par la société Bekaert, et qu'une autre alternative était possible pour la réalisation de ces derniers.

Or M. X... ne produit aucune pièce permettant de démontrer que la société américaine Conflandey Inc. aurait pu céder ses actifs à une autre société que Bekaert à des conditions plus avantageuses de sorte que la chance prétendument perdue n'étant pas certaine, elle ne peut pas fonder une demande de dommages-intérêts.

Il résulte de ce qui précède que le jugement déféré, rectifié de son erreur matérielle, mérite confirmation en toutes ses dispositions et que la SELARL AJRS ès qualités de mandataire ad hoc de SA Trefileries de Conflandey, doit être déboutée de l'ensemble de ses prétentions.

7 -sur les frais irrépétibles et les dépens,

L'appelant, qui succombe en son recours, sera condamné aux dépens d'appel et les demandes formées à hauteur de cour sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile seront rejetées.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant contradictoirement, après débats en audience publique et en avoir délibéré conformément à la loi,

Constate que l'irrecevabilité de l'appel interjeté par M. Philippe X..., ès qualités d'administrateur judiciaire de la SA Trefileries de Conflandey et de la SA Conflandey, et que la recevabilité de celui interjeté M. Philippe X..., ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de la SA Trefileries de Conflandey et de la SA Conflandey, ont été définitivement jugées par arrêt de cette cour en date du 5 juillet 2016 passé en force de chose jugée.

Déclare en conséquence irrecevables toutes conclusions des parties tendant à remettre en cause la chose jugée par le-dit arrêt.

Déclare M. Philippe X..., ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de la SA Trefileries de Conflandey et de la SA Conflandey recevable en son action et la SELARL AJRS ès qualités de mandataire ad hoc de SA Trefileries de Conflandey, recevable en son intervention.

Ecarte des débats les pièces annexes n° 19 et 28 produites par M. Lionel Y....

Rectifie le jugement rendu le 25 juillet 2014 par le tribunal de commerce de Vesoul en disant qu'il convient de substituer pages 1 et 6 aux termes 'la F... représentée par Me X...' ceux de 'M. Philippe X...'.

Confirme en toutes ses dispositions le jugement ainsi rectifié.

Déboute la SELARL AJRS ès qualités de l'ensemble de ses prétentions.

Rejette les demandes formées en cause d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne la SELARL AJRS ès qualités aux dépens d'appel, avec droit pour Maître D..., avocat, de se prévaloir des dispositions de l'article 699 du même code.

Ledit arrêt a été signé par M. Edouard Mazarin, président de chambre, magistrat ayant participé au délibéré, et par Mme Christine Billot, Adjoint Administratif faisant fonction de Greffier.

Le Greffier,le Président de chambre


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Besançon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 16/00245
Date de la décision : 22/05/2018

Références :

Cour d'appel de Besançon 01, arrêt n°16/00245 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-05-22;16.00245 ?
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