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12/12/2017 | FRANCE | N°17/00120

France | France, Cour d'appel de Besançon, Chambre sociale, 12 décembre 2017, 17/00120


ARRET N° 17/

JC/GB



COUR D'APPEL DE BESANCON



ARRET DU 12 DECEMBRE 2017



CHAMBRE SOCIALE





Contradictoire

Audience publique

du 31 octobre 2017

N° de rôle : 17/00120



S/appel d'une décision

du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BELFORT

en date du 15 décembre 2016

Code affaire : 88B

Demande d'annulation d'une mise en demeure ou d'une contrainte





SA LISI, [Adresse 1]



APPELANTE



représentée par Me

Thierry ROMAND, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, substitué par Me Virginie SEQUIER, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE





URSSAF DE FRANCHE-COMTE, [Adresse 2]



INTIMEE



représentée par Me Séverine WER...

ARRET N° 17/

JC/GB

COUR D'APPEL DE BESANCON

ARRET DU 12 DECEMBRE 2017

CHAMBRE SOCIALE

Contradictoire

Audience publique

du 31 octobre 2017

N° de rôle : 17/00120

S/appel d'une décision

du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BELFORT

en date du 15 décembre 2016

Code affaire : 88B

Demande d'annulation d'une mise en demeure ou d'une contrainte

SA LISI, [Adresse 1]

APPELANTE

représentée par Me Thierry ROMAND, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, substitué par Me Virginie SEQUIER, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE

URSSAF DE FRANCHE-COMTE, [Adresse 2]

INTIMEE

représentée par Me Séverine WERTHE, avocat au barreau de BESANCON, substitué par Me Hélène GUILLIER, avocat au barreau de BESANCON

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats du 31 Octobre 2017 :

Mme Christine K-DORSCH, Présidente de Chambre

M. Jérôme COTTERET, Conseiller

M. Patrice BOURQUIN, Conseiller

qui en ont délibéré,

Mme Gaëlle BIOT, Greffier lors des débats

Les parties ont été avisées de ce que l'arrêt sera rendu le 12 Décembre 2017 par mise à disposition au greffe.

**************

FAITS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Suite à un contrôle portant sur les années 2010 à 2012, l'URSSAF de Franche-Comté a adressé à la S.A. LISI le 11 octobre 2013 une lettre d'observations lui notifiant un rappel de cotisations de 297'862 €.

Suite aux observations de la S.A. LISI, l'URSSAF de Franche-Comté a annulé par courrier du 15 novembre 2013 plusieurs chefs de redressement et a ramené le montant des rappels de cotisations à la somme de 256'608 € en principal.

L'URSSAF de Franche-Comté a notifié à la S.A. LISI une mise en demeure datée du 28 novembre 2013 pour un montant total de 280'683 €, majorations de retard comprises.

La S.A. LISI s'est acquittée à titre conservatoire de ce redressement et a saisi le 13 décembre 2013 la Commission de recours amiable d'une demande d'annulation de l'ensemble du redressement.

La Commission, par décision du 9 septembre 2014 notifiée le 13 janvier 2015, a constaté une irrégularité de forme de la mise en demeure mais a dit que celle-ci n'affectait pas la procédure de contrôle. Elle a donc rejeté la requête en remboursement de la S.A. LISI laquelle a alors saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale du Territoire de Belfort par lettre recommandée du 16 février 2015.

Par jugement rendu le 15 décembre 2016, le tribunal a constaté la nullité de la mise en demeure du 28 novembre 2013 pour irrégularité de forme mais a validé la procédure de contrôle et la procédure contradictoire antérieures.

Il a ainsi débouté la S.A. LISI de sa demande de remboursement des sommes versées à titre conservatoire ainsi que de ses contestations subsidiaires relatives au chef de redressement n° 13. Le tribunal a validé le redressement notifié à hauteur de 256'608 € au titre des cotisations et de 24'091 € au titre des majorations de retard, pour les années 2010 à 2012.

Le jugement a enfin condamné la S.A. LISI en deniers ou quittance au paiement de ces sommes.

*

Par déclaration enregistrée au greffe de la Cour le 16 janvier 2017, la S.A. LISI a interjeté appel de cette décision.

Dans ses écrits récapitulatifs déposés le 26 octobre 2017, elle conclut à l'infirmation du jugement et à titre principal à la nullité de la mise en demeure du 28 novembre 2013 ainsi que des redressements afférents. Elle entend voir ordonner le remboursement de la somme de 264'872 € avec les intérêts légaux à compter du 13 décembre 2013 avec capitalisation de ces derniers.

Elle fait valoir que la mise en demeure ne satisfait pas aux exigences de l'article R. 244-1 du code de la sécurité sociale dans la mesure où les montants y figurant ne correspondent pas à ceux indiqués dans la lettre d'observation ou dans la correspondance du 15 novembre 2013 de l'URSSAF ayant ramené le montant des redressements à la somme de 256'608 €.

Elle considère ainsi que cette incohérence d'une part ne lui permet pas de déterminer précisément la nature et le quantum des sommes faisant objet du redressement et d'autre part qu'elle caractérise une violation du principe du contradictoire.

À titre subsidiaire, la S.A. LISI sollicite l'annulation du redressement n° 13 de la lettre d'observation pour un montant de 238'572 € et le remboursement de cette somme avec les intérêts légaux à compter du 13 décembre 2013, avec capitalisation de ces derniers.

Elle explique que ce chef de redressement n'est accompagné d'aucun détail de calcul ni d'aucune explication lui permettant de connaître l'état de sa dette.

Sur le fond, la S.A. LISI fait valoir que l'URSSAF ne peut lui reprocher de ne pas lui avoir indiqué l'identité de ses salariés ou mandataires sociaux ayant bénéficié d'actions gratuites, ainsi que le nombre et la valeur desdites actions.

Elle prétend en effet avoir notifié à l'URSSAF ces informations par lettre simple, aucune disposition légale ne lui imposant le formalisme de la lettre recommandée ou de la DADS (déclaration annuelle de données sociales).

En toute hypothèse, la S.A. LISI conclut à la condamnation de l'URSSAF de Franche-Comté à lui payer une indemnité de 5 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

*

Pour sa part, dans ses écrits déposés le 29 septembre 2017, l'URSSAF de Franche-Comté conclut à la confirmation du jugement, y ajoutant une indemnité de 1 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle soutient que la nullité de la mise en demeure du 28 novembre 2013, qu'elle ne conteste pas, ne peut avoir pour effet d'affecter la procédure de contrôle antérieure dès lors que celle-ci s'est déroulée, comme en l'espèce, de manière contradictoire et dans les délais requis par les textes.

Concernant le chef de redressement n° 13, l'URSSAF maintient que celui-ci est fondé au motif que la S.A. LISI ne rapporte pas la preuve de lui avoir notifié dans les délais prévus par les textes la valeur des actions données à ses salariés ou mandataires sociaux et le nom de ces derniers. Elle dit ainsi ne pas être en mesure de vérifier la période d'indisponibilité des actions. Elle précise qu'en l'absence de formalisme relative à cette notification, le risque de la preuve pèse sur la S.A. LISI.

Enfin, elle soutient que l'appelante a disposé de toutes les informations nécessaires concernant ce chef de redressement sur lequel elle n'a au surplus jamais formulé la moindre observation.

*

En application de l'article 455 du code de procédure civile, la Cour se réfère, pour l'exposé des moyens des parties, à leurs conclusions visées par le greffe et développées lors de l'audience de plaidoirie du 31 octobre 2017.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

1° ) Sur la validité de la mise en demeure :

Aux termes de l'article R. 244-1 du code de la sécurité sociale, la mise en demeure précise la cause, la nature et le montant des sommes réclamées, les majorations et pénalités qui s'y appliquent ainsi que la période à laquelle elles se rapportent.

La mise en demeure doit mentionner au titre des différentes périodes annuelles contrôlées les montants notifiés par la lettre d'observations corrigés le cas échéant à la suite des échanges entre la personne contrôlée et l'agent chargé du contrôle. La référence et les dates de la lettre d'observations et le cas échéant du dernier courrier établi par l'agent en charge du contrôle lors des échanges mentionnés au III de l'article R. 243-59 figurent sur le document. Les montants indiqués tiennent compte des sommes déjà réglées par la personne contrôlée.

Ainsi, la mise en demeure, invitation impérative adressée au débiteur d'avoir à régulariser sa situation, doit lui permettre de connaître la nature, la cause et l'étendue de son obligation, et à cette fin, elle doit préciser à peine de nullité, outre la nature et le montant des cotisations réclamées la période à laquelle elle se rapporte.

En l'espèce, il n'est pas sérieusement contesté par l'URSSAF que la mise en demeure du 28 novembre 2013 ne satisfait pas aux exigences de l'article susvisé dans la mesure où les montants y figurant ne correspondent pas à ceux indiqués dans la lettre d'observations ou dans la lettre du 15 novembre 2013 ayant ramené le montant des redressements à la somme de 256'608 €.

Dès lors que la S.A. LISI se trouvait ainsi dans l'incapacité de connaître avec précision la nature, la cause et l'étendue de son obligation, c'est donc à juste titre que le jugement déféré a constaté la nullité de la mise en demeure.

2° ) Sur les conséquences de l'annulation de la mise en demeure :

En application de l'article L. 244-2 du code de la sécurité sociale, toute action en recouvrement est obligatoirement précédée d'une mise en demeure adressée par lettre recommandée à l'employeur.

Il en résulte qu'en matière de sécurité sociale, la mise en demeure est la condition préalable de l'action civile en recouvrement forcé.

En l'espèce, il est constant que tout en s'acquittant du montant du redressement le 13 décembre 2013, la S.A. LISI a saisi le même jour la Commission de recours amiable d'une demande d'annulation de l'ensemble du redressement, notamment suite à l'irrégularité de la mise en demeure du 28 novembre 2013.

De plus, par courrier adressé à l'URSSAF le 13 décembre 2013, l'appelante indique expressément : 'Nous donnons suite par la présente à la mise en demeure du 28 novembre 2013 faisant suite aux résultats du contrôle effectué par l'URSSAF (...) qui nous réclame la somme de 280'683 € (...) Par ailleurs, nous rappellerons que si nous entendons contester les redressements entrepris, nous nous sommes acquittés, à titre conservatoire, du montant du redressement prononcé et ceci auprès de l'URSSAF par un virement de ce jour (...)'.

La S.A. LISI en conclut, sur le visa du texte précité, que le paiement litigieux n'a donc été effectué qu'à titre conservatoire et qu'à défaut de notification d'une mise en demeure préalable régulière, elle peut en demander à l'URSSAF de Franche-Comté le remboursement avec les intérêts légaux à compter du 13 décembre 2013, avec capitalisation de ces derniers.

Or, l'action en remboursement nécessite que les sommes litigieuses aient acquis de manière définitive un caractère indu, ce qui impose à la Cour de procéder à la vérification du bien fondé du redressement.

Sur ce point, force est de constater que la S.A. LISI ne conteste que le chef de redressement n° 13 pour un montant de 238'572 € pour l'exercice 2012 qui correspond à des cotisations sociales afférentes à des actions gratuites qui ont été définitivement acquises en 2011 et qui, selon l'URSSAF, n'auraient pas fait l'objet d'une déclaration au cours de l'exercice suivant.

Aux termes de l'article L. 242-1 al. 13 du code de la sécurité sociale, parmi les conditions de l'exclusion de l'assiette des cotisations sociales des attributions gratuites d'actions figure l'obligation pour l'employeur de notifier à l'URSSAF l'identité de ses salariés ou mandataires sociaux auxquels des actions gratuites ont été attribuées définitivement au cours de l'année civile précédente, ainsi que le nombre et la valeur des actions attribuées à chacun d'entre eux.

Il est constant que la S.A. LISI a mis en place un plan d'attribution d'actions gratuites le 28 juillet 2009 dont la fin de la période d'acquisition était le 29 juillet 2011 et qu'elle était en conséquence tenue de notifier à l'URSSAF l'identité de ses salariés ou mandataires sociaux bénéficiaires de ces attributions définitivement acquises en 2011 avant la fin de l'exercice 2012.

La S.A. LISI prétend avoir effectué cette notification par lettre simple du 3 février 2012 dont elle produit une copie au débat.

De son côté, l'URSSAF conteste avoir reçu ce courrier.

S'il est exact, comme le fait remarquer l'intimée, que le texte susvisé n'impose aucune forme pour procéder à la notification, il n'en demeure pas moins que la charge et le risque de la preuve de celle-ci pèsent sur l'assujettie.

La S.A. LISI prétend encore que le chef de redressement n° 13 n'est accompagné d'aucun détail de calcul, ni d'explications claires, ce qui ne lui permet pas de connaître l'étendue de son obligation.

Or, force est d'observer que la S.A. LISI n'a jamais fait la moindre observation, ni demandé à l'URSSAF un état détaillé des calculs relatifs au point n° 13, la Cour constatant pour sa part que la lettre d'observations indique de manière très claire que le montant du redressement est calculé sur le montant global du plan d'attribution d'actions gratuites du 28 juillet 2009, soit la somme de 528'983 €, ce qui n'est pas contesté par l'intimée. Celle-ci était donc en mesure de connaître avec exactitude la mesure et l'étendue de son obligation.

À défaut de pouvoir rapporter la preuve de la notification de son obligation déclarative et d'une quelconque imprécision lui causant grief en ce qui concerne le chef de redressement n° 13 sur la lettre d'observations, la S.A. LISI n'établit pas le caractère indu des sommes versées à titre conservatoire si bien qu'elle doit être déboutée de sa demande de remboursement.

Il convient en conséquence d'infirmer en ce sens le jugement entrepris.

3° ) Sur les dépens et les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile:

Contrairement à ce que demande l'URSSAF de Franche-Comté, il n'y a pas lieu de statuer sur les dépens, la présente procédure étant gratuite et sans frais.

Dans la mesure où il a été fait droit à l'appel, l'équité ne commande pas de faire application au bénéfice de la S.A. LISI des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Il convient en revanche d'octroyer à ce même titre la somme de 1 500 € à l'URSSAF de Franche-Comté.

PAR CES MOTIFS

La Cour, Chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

INFIRME le jugement rendu le 15 décembre 2016 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Belfort sauf en ce qu'il a déclaré recevable le recours de la S.A. LISI contre la décision de la commission de recours amiable du 9 septembre 2014 et en ce qu'il a constaté la nullité de la mise en demeure du 28 novembre 2013 ;

Statuant à nouveau,

CONFIRME la décision de la Commission de recours amiable du 9 septembre 2014 en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à remboursement des sommes versées à titre conservatoire ;

DÉBOUTE la S.A. LISI de sa demande de remboursement de la somme de deux cent soixante quatre mille huit cent soixante douze euros (264'872 €) réglée à titre conservatoire, assortie des intérêts légaux à compter du 13 décembre 2013, avec capitalisation de ces derniers ;

DÉBOUTE la S.A. LISI de sa demande au titre des frais irrépétibles ;

CONDAMNE la S.A. LISI à payer à l'URSSAF de Franche-Comté une indemnité de mille cinq cents euros (1 500 €) en application de l'article 700 du code de procédure civile;

RAPPELLE que la présente procédure est gratuite et sans frais.

LEDIT ARRÊT a été rendu par mise à disposition au greffe le douze décembre deux mille dix sept et signé par Mme Christine K-DORSCH, Président de la Chambre Sociale, et Mme Karine MAUCHAIN, Greffier.

LE GREFFIER,LE PRESIDENT DE CHAMBRE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Besançon
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17/00120
Date de la décision : 12/12/2017

Références :

Cour d'appel de Besançon 03, arrêt n°17/00120 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-12-12;17.00120 ?
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