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19/02/2016 | FRANCE | N°15/01203

France | France, Cour d'appel de Besançon, Chambre sociale, 19 février 2016, 15/01203


ARRET N° 16/117

CP/KM



COUR D'APPEL DE BESANCON

- 172 501 116 00013 -

ARRET DU 19 FEVRIER 2016



CHAMBRE SOCIALE





Contradictoire

Audience publique

du 08 Janvier 2016

N° de rôle : 15/01203



S/appel d'une décision

du CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE BELFORT

en date du 15 mars 2015

code affaire : 80A

Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution





Association LES FRANCAS TERRITOIRE DE B

ELFORT

C/

[Z] [ZK],

MAIRIE DE BELFORT

SYNDICAT CFDT S3C DE FRANCHE-COMTE



PARTIES EN CAUSE :



Association LES FRANCAS TERRITOIRE DE BELFORT, [Adresse 2]



APPELANTE



représen...

ARRET N° 16/117

CP/KM

COUR D'APPEL DE BESANCON

- 172 501 116 00013 -

ARRET DU 19 FEVRIER 2016

CHAMBRE SOCIALE

Contradictoire

Audience publique

du 08 Janvier 2016

N° de rôle : 15/01203

S/appel d'une décision

du CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE BELFORT

en date du 15 mars 2015

code affaire : 80A

Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution

Association LES FRANCAS TERRITOIRE DE BELFORT

C/

[Z] [ZK],

MAIRIE DE BELFORT

SYNDICAT CFDT S3C DE FRANCHE-COMTE

PARTIES EN CAUSE :

Association LES FRANCAS TERRITOIRE DE BELFORT, [Adresse 2]

APPELANTE

représentée par Me Valérie AIDENBAUM, avocat au barreau de PARIS

ET :

Monsieur [Z] [ZK], demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Anne PROST-GROSJEAN, avocat au barreau de JURA

MAIRIE DE BELFORT, demeurant [Adresse 4]

Représentée par Me Claire RICHER, avocat au barreau de PARIS

INTIMES

SYNDICAT CFDT S3C DE FRANCHE-COMTE, [Adresse 3]

INTERVENANT VOLONTAIRE

représenté par Me Anne PROST-GROSJEAN, avocat au barreau de JURA

COMPOSITION DE LA COUR :

lors des débats 08 Janvier 2016 :

CONSEILLER RAPPORTEUR : Madame Chantal PALPACUER, Présidente de chambre, conformément aux dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, en l'absence d'opposition des parties

GREFFIER : Madame Aurélie DRUAIS

lors du délibéré :

Madame Chantal PALPACUER, Présidente de chambre, a rendu compte conformément à l'article 945-1 du code de procédure civile à Monsieur Patrice BOURQUIN, Conseiller et M. Jérôme COTTERET, Conseiller.

Les parties ont été avisées de ce que l'arrêt sera rendu le 19 Février 2016 par mise à disposition au greffe.

**************

FAITS PRETENTIONS DES PARTIES:

L'association départementale des Francas du Territoire de Belfort associe les personnes physiques et les personnes morales qui favorisent ou participent à l'action éducative, sociale, culturelle en faveur des enfants (tels que définis par la convention internationale des droits de l'Enfant).

Elle a pour objet:

-de promouvoir la place que les enfants et les jeunes doivent avoir dans la société, et de développer des projets d'accueil et d 'activités à l'attention des enfants,

-de regrouper les activités et les structures notamment les centres de loisirs répondant aux besoins des familles, d'en assumer au besoin la gestion,

-d'inciter à l'élaboration et à la mise en 'uvre de projets éducatifs comme de participer à leur réalisation,

-d'informer et de former les personnes concernées par les enfants, les jeunes et leur éducation,

-d'étudier et de promouvoir les méthodes et outils d'animation et d'information adaptés aux structures et aux publics.

Elle est adhérente de la Fédération nationale des Francas. Mouvement d'éducation populaire, la Fédération nationale des Francas créée en 1944 est une association complémentaire de l'école, reconnue d'utilité publique et agréée par les ministères de l'Éducation nationale,de l'enseignement supérieur et de la recherche, de celui des Affaires sociales, de la Santé et des droits des femmes, ainsi que de celui de la Ville, de la Jeunesse et des sports, qui travaille en liaison avec 77 organisations non gouvernementales présentes dans 45 pays.

Les Francas sont une fédération nationale laïque de structures et d'activités dont la vocation est indissociablement éducative, sociale et culturelle.

***

Le 18 décembre 2013, l'association départementale des Francas du Territoire de Belfort, a signé avec la Mairie de Belfort, une convention de gestion de sept centres de loisirs et de quatre centres périscolaires, pour une période initiale d'un an avec possibilité de tacite reconduction.

Par courrier du 16 octobre 2014, la mairie de Belfort lui a fait savoir qu'elle ne reconduisait pas la convention de gestion et que le contrat prenait fin le 31 décembre 2014.

Par courrier du 28 octobre 2014, l'association a rappelé à la ville de Belfort les dispositions d'ordre public de l'article L 1224-3 du code du travail en matière de transfert des contrats de travail et lui a adressé la liste des 36 salariés affectés aux activités reprises et a informé les salariés de la situation.

*

M. [Z] [ZK] a été embauché par l'association Les Francas le 08 septembre 2014 en qualité d'animateur au «Club adolescents belfortains» dans le cadre d'un contrat à durée déterminée prenant fin le 30 juin 2015 en remplacement de Mme [S], et moyennant un salaire mensuel moyen de 1542,84 euros.

Suivant constat en date du 2 janvier 2015 dressé par maître [F] [X], huissier de justice à [Localité 1], il s'est présenté à la Mairie de [Localité 1] pour prendre son poste et connaître ses nouvelles conditions de travail mais n'a pas été reçu par les services de la Mairie.

Par la suite, il s'est présenté le 5 janvier 2015 sur son lieu de travail où il n'a pas pu reprendre son poste.

L'association Les Francas ayant quant à elle, considéré que le contrat de travail avait été transféré à la ville de Belfort, a refusé de lui fournir du travail et de lui payer ses salaires.

M.[Z] [ZK] comme quatorze autres salariés de l'association, a saisi le conseil de prud'hommes de Belfort, statuant en référé, sollicitant la poursuite de son contrat de travail à compter du 1er janvier 2015 par la Ville de Belfort et la condamnation de cette dernière à lui verser les salaires dus depuis cette date et à titre subsidiaire, de constater la rupture de leur contrat de travail et d'ordonner la remise des documents sociaux.

M.[Z] [ZK] comme quatorze autres salariés de l'association, a saisi le conseil de prud'hommes de Belfort, statuant en référé, sollicitant la poursuite de son contrat de travail à compter du 1er janvier 2015 par la Ville de Belfort et la condamnation de cette dernière à lui verser les salaires dus depuis cette date et à titre subsidiaire, de constater la rupture de leur contrat de travail et d'ordonner la remise des documents sociaux.

Par ordonnance du 26 janvier 2015, le conseil des prud'hommes a:

- dit que l'examen de l'exception d'incompétence soulevée par la Ville de Belfort excédait les pouvoirs du juge des référés du fait de l'existence d'une contestation sérieuse au fond,

- dit que les demandes présentées excédaient les pouvoirs du bureau des référés du fait de l'existence d'une contestation sérieuse au fond,

-renvoyé les parties à se pourvoir au fond.

*

M. [Z] [ZK] a alors comme la plupart des autres salariés pris acte de la rupture de son contrat de travail le 12 février 2015.

*

L'association Les Francas ayant interjeté appel de l'ordonnance de référé, la cour d'appel, par arrêt du 22 décembre 2015 a:

-confirmé l'ordonnance entreprise sauf en ce qu'elle a dit que l'exception d'incompétence excédait les pouvoirs du juge des référés ;

Statuant à nouveau,

-S'est déclarée compétente pour statuer ;

y ajoutant, a,

-condamné l'Association les Francas à payer à la Ville de Belfort la somme de 1200€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

-condamné l'Association les Francas à payer aux salariés la somme de 1200€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

-condamné l'Association les Francas aux dépens.

*

M. [Z] [ZK] comme douze autres salariés à savoir M.[VH] [B], Mme [Y] [I], Mme [J] [P], M. [R] [T] Mme [K] [U], M. [V] [L], Mme [G] [N], Mme [E] [W], Mme [D] [C], Mme [MD] [Q], Mme [O] [H], Mme [M] [A], avait entre temps saisi au fond, le Conseil de Prud'hommes de Belfort, le 16 février 2015, qui par jugement du 13 mai 2015 s'est déclaré compétent et a:

-dit que la prise d'acte de la rupture du contrat travail devait produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamné l'association départementale les Francas à lui verser les sommes suivantes:

'2190,83 euros au titre des salaires du 1er janvier 2015 au 12 février 2015,

'7066,21 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat à durée déterminée,

'925,70 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés,

'1542,84 euros à titre d'indemnité de fin de contrat,

'500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-dit que les montants précités porteront intérêts au taux légal à compter du jour de la saisine s'agissant des créances salariales et à compter du jour du jugement pour les dommages et intérêts ,

-ordonné la délivrance par l'association départementale les Francas, des bulletins de salaire de janvier et février 2015, d'un certificat de travail conforme, d'une attestation Pôle emploi ainsi que les documents nécessaires à la prise en charge de son arrêt de travail du 07 janvier au 06 février 2015,

-débouté M. [ZK] du surplus de ses demandes,

-débouté l'association départementale les Francas et la Ville de Belfort de leurs demandes formulées au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-débouté la ville de Belfort de sa demande reconventionnelle,

-condamné l'association départementale les Francas aux dépens ainsi qu'à rembourser au trésor Public les frais avancés par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle en application des dispositions de l'article 43 de la loi du 10 juillet 1991 et 123 du décret du 19/12/1991,

Le Conseil de Prud'hommes rejette l'exception d'incompétence aux motifs qu'il n'était pas demandé de se faire juge d'un contrat administratif puisqu'aucun contrat administratif n'avait été proposé aux salariés mais de se déterminer sur l'application des dispositions de l'article L 1224-3 du code du travail dans le cadre d'un contrat de travail de droit privé, et qu'au regard de la jurisprudence du Tribunal des conflits, les contrats de travail demeurent des contrats de droit privé tant que le nouvel employeur n' a pas placé le salarié dans un régime de droit public, et que le juge judiciaire est par suite seul compétent pour statuer sur les litiges.

Au fond, le conseil des prud'hommes retient qu'il n'y a pas eu transfert des contrats de travail considérant qu'il n'y avait pas d'entité économique mais une simple perte d'un marché de service public qui ne rentre pas dans l'application des dispositions de l'article L 1224-3 du code du travail. Il relève que l'association n'a signé qu' une convention de gestion reconductible, qu'elle ne dispose d'aucune structure propre pour accueillir les enfants et n'a qu'une activité de gestionnaire, que les locaux étaient mis à disposition par la ville de Belfort qui en était propriétaire et enfin, qu'elle ne faisait que «proposer une mise à disposition de personnels polyvalents dont de nombreux sont embauchés en contrats à durée déterminée pour le compte de collectivités» et qu'il ne peut être retenu «qu'il y a en l'espèce, une clientèle de constituée, au sens commercial du terme, de par son activité d'animation.»

L'association Les Francas a alors interjeté appel de la décision le 08 juin 2015.

*

Dans ses conclusions déposées le 14 décembre 2015, complétées oralement lors de l'audience du 8 janvier 2016, l'association Les Francas demande à la cour de:

-se déclarer compétent pour connaître du litige,

-dire qu'il y avait lieu de faire application de l'article L1224-3 du code du travail au 1er janvier 2015,

-dire qu'à compter du 1er janvier 2015, l'employeur est bien la Mairie de Belfort,

-condamner en conséquence, la Mairie de Belfort au paiement des salaires à compter du 1er janvier 2015 et des indemnités de rupture;

-condamner M. [ZK] à rembourser à l'association Les Francas les montants réglés par celle-ci dans le cadre de l'exécution provisoire du jugement du Conseil de Prud'hommes,

-à titre subsidiaire, fixer à 150 euros le montant dû éventuellement à Pôle Emploi au titre des dispositions de l'article L1235-4 du code du travail,

-condamner M. [ZK] et la Ville de Belfort à lui verser une somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

A l'audience du 05 janvier 2016, l'association Les Francas a formé une nouvelle demande tendant sur le fondement de l'article 1382 du code civil à voir la Ville de Belfort condamnée au versement d'une somme de 1000 euros par dossier en réparation du préjudice subi rappelant sa situation difficile et précaire sur le plan financier.

Sur l'exception d'incompétence soulevée par la Ville de Belfort au profit des juridictions administratives, elle réplique:

-que le juge judiciaire est compétent pour statuer sur tout litige relatif à l'exécution et à la rupture du contrat de travail tant que le nouvel employeur n'a pas placé le salarié dans un régime de droit public,

-qu'il n'est pas demandé à la cour de se faire juge d'un quelconque contrat administratif puisque par hypothèse une telle convention n'a pas été proposée aux salariés.

A l'audience, elle s'est référée à un arrêt du tribunal des conflits du 09 mars 2015.

Sur l'application de l'article L 1224'3 du code du travail, elle soutient qu'il résulte de la jurisprudence de la cour de justice européenne que lorsqu'une association est organisée de manière stable avec un ensemble structuré de personnes et d'éléments permettant l'exercice d'une activité économique, celle-ci constitue une entité économique qui poursuit un but propre.

Dès lors qu'il apparaît que cette entité économique, qui conserve son identité, est transférée dans un établissement public administratif telle une commune, les contrats sont transférés au nouvel exploitant.

La Cour de Cassation applique également ces principes, que le repreneur de l'entité économique soit une personne privée ou morale de droit public.

Elle rappelle que l'entité économique autonome est constituée par un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels permettant l'exercice d'une activité économique qui poursuit un objectif propre.

Elle considère qu'en l'espèce l'existence d'une activité économique est évidente en raison de l'existence d'une clientèle au sens commercial du terme, constituée des familles.

Par ailleurs, elle souligne la réalité d'une organisation spécifique avec du personnel spécialement affecté et bénéficiant d'une formation en lien direct avec l'activité exercée.

De plus, elle fait valoir qu'elle était propriétaire du matériel qu'elle avait affecté à chaque centre, matériel pédagogique comme de l'électro ménager qui est resté sur place et qui est aujourd'hui exploité par la mairie de sorte qu'elle démontre bien l'existence d' éléments corporels et incorporels.

Enfin, il est établi que l'activité de l'entité économique a été poursuivie et qu'elle a bien conservé son identité.

Elle se réfère au courrier du 17 novembre 2014 adressé aux parents des enfants accueillis qui démontre que la mairie a repris l'activité qu'elle exerçait précédemment dans le cadre de la convention dénoncée, ayant décidé la « municipalisation des activités extra scolaires ».

En outre, la Mairie de Belfort ne pouvait limiter la reprise à 14 salariés alors qu'elle avait pour obligation de reprendre tous ceux figurant sur la liste qu'elle lui avait transmise.

Elle conteste l'analyse de la Ville de Belfort qui considère que la résiliation ne caractérise qu'une simple perte de marché et non un transfert d'une entité économique autonome.

*

M. [ZK] demande à la Cour dans ses conclusions déposées le 21 décembre 2015 de:

-confirmer le jugement sur la compétence,

-dire que le contrat de travail a été transféré à la Ville de Belfort depuis le 1er janvier 2015,

-dire que la prise d'acte de rupture du contrat de travail doit produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ,

-condamner la Ville de Belfort à lui payer les sommes suivantes:

'2190,83 euros au titre des salaires du 1er janvier 2015 au 12 février 2015,

'7066,21 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat à durée déterminée,

'925,70 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés,

'1542,84 euros à titre d'indemnité de fin de contrat,

'6000 euros au titre du préjudice distinct,

'2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

-condamner la Ville de Belfort à lui remettre les bulletins de salaire de janvier et février 2015, un certificat de travail conforme, l'attestation Pôle Emploi,

ainsi que les documents nécessaires à la prise en charge de son arrêt de travail du 07 janvier au 06 février 2015 ainsi qu'aux dépens.

-Subsidiairement, dans le cas où la cour ne retiendrait pas le transfert d'une entité économique ayant poursuivi son activité, et que dès lors, le contrat de travail ne serait pas transféré , de condamner l' association départementale les Francas à lui payer les montants réclamés ci-dessus,

-condamner l' association départementale les Francas à lui verser une somme de 2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Il soutient que son contrat de travail a bien été transféré à la Ville de Belfort, l'activité des centres où il travaillait s'étant poursuivie selon la même organisation mais avec des salariés de la Ville.

Il fait observer que l'association avait organisé une activité visant à s'occuper des enfants de [Localité 1] moyennant paiement par les parents, élément qui caractérise l'existence d'une clientèle.

Il souligne que l'activité fonctionnait avec des salariés spécialement formés pour l'accueil des enfants et avec des biens corporels, propriété de l'association tels que les ballons, ordinateurs, jouets..., biens qui ont tous été transférés à la Ville de Belfort de sorte qu'il existait bien une activité économique autonome.

Il rappelle que la Ville de Belfort a annoncé par voie de presse la reprise des activités périscolaires par ses services et a informé les parents de ce transfert leur assurant qu'elles continueraient à se dérouler dans les mêmes locaux, selon les mêmes horaires et avec pour partie les mêmes animateurs de l'association Les Francas.

Considérant que son contrat de travail avait été transféré et en application des dispositions de l'article L1224-3 du code du travail, la Ville de Belfort aurait dû lui fournir du travail et verser son salaire alors qu'il s'est trouvé dans une situation de blocage, ne pouvant pas être pris en charge par Pôle Emploi, ni retrouver un emploi , son contrat n'étant pas rompu de sorte qu'il a été amené à prendre acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l'employeur en raison des manquements commis par la Ville de Belfort à ses obligations essentielles, la fourniture du travail et le paiement des salaires.

Cette prise d'acte doit s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et ouvre droit au paiement des indemnités de rupture et à l'indemnisation de ses préjudices.

Sur ce point, il souligne le caractère extrêmement difficile de sa situation financière, étant privée de revenus depuis le 1er janvier 2015 et estime qu'au regard des circonstances particulièrement éprouvantes et difficiles de la rupture, il est en droit d'obtenir une indemnisation pour ce préjudice distinct.

En dernier lieu, il demande et à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où il ne serait pas retenu que le contrat de travail ait été transféré, de condamner l' association départementale les Francas à lui verser les sommes réclamées à l'encontre de la Ville de Belfort.

*

Dans ses conclusions déposées le 4 janvier 2016, la Ville de Belfort demande à la Cour de:

-se déclarer incompétente s'agissant des demandes formées à son encontre,

-déclarer irrecevable l'intervention volontaire de la CFDT,

à défaut,

- confirmer le jugement du conseil des prud'hommes,

- constater que la Ville de Belfort n'a jamais été l'employeur des salariés de l'association les Francas,

- en conséquence, débouter l'association Les Francas, les salariés et la CFDT de l'intégralité de leurs demandes dirigées à son encontre,

-condamner l'association les Francas et la CFDT à lui verser la somme de 300 € par dossier pour procédure abusive, 1000 € par dossier au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Elle soulève l'irrecevabilité de la demande en raison de l'incompétence de la cour du fait que l'association, en se référant aux dispositions de l'article L 1224-3 du code du travail qui prévoient que «lorsque l'activité d'une entité économique employant des salariés de droit privé est, par transfert de cette entreprise, reprise dans le cadre d'un service public administratif , il appartient à cette personne publique de proposer à ces salariés des contrats de droit public..», sollicite la reconnaissance de relations contractuelles de droit public.

Elle se réfère à une décision du conseil constitutionnel du 23 janvier 1987 rappelant le principe de la séparation des autorités administratives et judiciaires et consacrant une réserve de compétence à la juridiction administrative en matière contractuelle, pour affirmer que dans la mesure où est potentiellement en cause un contrat administratif, seule la juridiction administrative est compétente pour y statuer.

Elle ajoute qu'en raison du principe de la séparation des pouvoirs, la cour ne pourra pas faire injonction à la Ville de Belfort de proposer des contrats de droit public.

Au fond, elle fait observer que les dispositions de l'article L1224-3 du code du travail s'appliquent en cas de transfert d'une entité économique autonome conservant son identité en vue de la poursuite de l'activité, à condition que soit démontrée la réalité des deux conditions cumulatives, l'existence d'une entité économique autonome et le maintien de l'identité et de la poursuite de l'activité de celle-ci.

Elle précise que l'entité économique ne saurait être réduite à la seule activité dont l'association était chargée, rappelant que c'est sur cette considération que la jurisprudence européenne et celle de la cour de cassation se fondent pour affirmer que cet article n'est pas applicable dans le cas de la seule perte de marché.

Elle fait valoir que le seul changement de prestataires dans le cadre de l'exécution d'un marché n'emporte pas transfert d'une entité économique autonome.

Elle rappelle que l'association Les Francas n'exerçait qu'une activité de gestionnaire, et qu'elle ne disposait d'aucune autonomie et indépendance dans l'exécution de sa mission.

Elle ajoute que l'association emploie du personnel polyvalent et qu'elle est présente sur toute la France et se réfère à la clause contenue dans les contrats de travail des salariés de l'association qui prévoit des affectations susceptibles d'être modifiées à tout moment.

Par ailleurs , elle soutient que la prestation n'a pas conservé son identité puisque la municipalisation consistait en une simple reprise de l'activité en direct sans porter sur ses moyens de réalisation.

Elle en déduit que l'association n'ayant fait que mettre son personnel polyvalent à la disposition de la Ville, en est restée l'employeur , rappelant que de nombreux salariés ne revendiquaient pas leur transfert à la Ville estimant être restés salariés de l'association.

Elle estime qu'il est faux de soutenir comme le fait l'association qu'il y a eu maintien de la clientèle. En effet, en l'espèce, l'association ne saurait se servir de la notion de clientèle à l'instar des marchés de nettoyage dès lors qu'elle ne réservait pas le service périscolaire aux seuls enfants et adolescents qui fréquentaient les sites gérés par l'association mais à tous les enfants et adolescents belfortains . Ainsi la clientèle familiale évoquée ne saurait être retenue comme un élément incorporel significatif dès lors qu'elle ne bénéficiait pas d'un droit de priorité.

Elle considère que la condition portant sur un ensemble organisé de moyens et notamment d'éléments corporels fait défaut et que le seul fait que les activités de la ville soient exercées dans les mêmes locaux qu'elle avait mis à la disposition de l'association, ne peut démontrer un transfert d'éléments corporels, étant en outre précisé qu'elle avait établi par huissier de justice une liste des biens appartenant à l'association et que cette dernière devait venir récupérer.

Elle se réfère aussi à la décision du directeur adjoint du travail qui a refusé l'autorisation demandée de transférer les contrats de travail de trois salariés protégés et au courrier du Préfet du territoire de [Localité 1] du 05/12/2014, considérant qu'il ne pouvait être retenue l'existence d'une entité économique autonome.

Enfin, elle fait observer que l'association Les Francas a maintenu et poursuivi les contrats de travail avec les salariés protégés.

En outre, elle précise ne pas avoir repris 14 contrats mais avoir souscrit des nouveaux contrats de travail avec d'anciens salariés de l'association, dans le cadre d'un appel à candidatures.

A l'audience du 05 janvier 2016, elle a conclu au rejet de la demande formée à hauteur d'appel sur le fondement des dispositions de l'article 1382 du code civil.

Sur l'intervention volontaire de la CFDT, la Ville de Belfort soulève son irrecevabilité au motif que le syndicat ne démontre pas en quoi le contentieux porterait une atteinte directe ou indirecte à l'intérêt collectif de la profession qu'il représente.

*

Le syndicat CFDT S3C de Franche Comté représenté par son secrétaire est intervenu volontairement dans la présente procédure et demande de déclarer son intervention recevable, de constater le transfert des contrats de travail à la Ville de Belfort à compter du 1er janvier 2015 et dire que la rupture desdits contrats est imputable à la Ville de Belfort et de la condamner à lui verser une somme de 5000 euros à titre de dommages et intérêts et celle de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile .

Il fait valoir qu'il se doit d'intervenir pour faire trancher une question de droit fondamentale au regard de la sécurité et de la stabilité des emplois.

Il souligne le caractère inique de la situation des salariés et entend faire respecter les droits fondamentaux des salariés

Il soutient qu'il existe en l'espèce un faisceau d'indices caractérisant le transfert d'une entité autonome conservant son identité. L'entreprise est toujours la même puisque les activités sont similaires, toujours exercées dans les mêmes lieux, dans les mêmes centres d'activités, et qu'il y a eu transfert des éléments corporels et incorporels comme de la clientèle.

Il affirme avoir subi un préjudice moral et matériel en raison du temps consacré aux salariés qui étaient affiliés à sa section locale, des actions et des recherches qu'il a dû entreprendre.

*

En application de l'article 455 du code de procédure civile, la Cour se réfère pour l'exposé des moyens des parties à leurs conclusions visées par le greffe et développées lors de l'audience du 08 janvier 2016.

MOTIFS DE LA DECISION:

A titre liminaire, il convient de rappeler que le conseil de la Ville de Belfort a sollicité que soient écartées des débats les conclusions de l'association les Francas reçues la veille de l'audience.

En déposant de nouvelles conclusions la veille de l'audience, l'association Les Francas, appelante dans la présente instance, qui avait déjà adressé ses premières conclusions tardivement soit le 14 décembre alors qu'elle devait le faire pour le 05 novembre 2015 au regard du calendrier que le greffe lui avait adressé, réduisant d'autant les délais accordés aux intimés pour y répliquer, ne permet pas d'assurer le respect du contradictoire de sorte qu'il convient dans ces conditions d'écarter lesdites conclusions.

1°) Sur l'exception d'incompétence:

La Ville de Belfort fait valoir qu'en application de l'article L 1224-3 du code du travail lorsque l'activité d'une entité économique employant des salariés de droit privé est, par transfert de cette entreprise, reprise dans le cadre d'un service public administratif, il appartient à cette personne publique de proposer à ces salariés des contrats de droit public, et que, dans la mesure où est donc potentiellement en cause un contrat administratif, c'est la juridiction administrative qui est compétente pour statuer sur la demande de l'association.

Toutefois, il s'évince de ce texte que tant que les salariés concernés n'ont pas été placés sous un régime de droit public, leurs contrats demeurent des contrats de droit privé de sorte que le juge judiciaire est seul compétent pour statuer sur les litiges relatifs à l'exécution et à la rupture du contrat de travail tant que le nouvel employeur n'a pas placé les salariés dans un régime de droit public.

Tel est le cas en l'espèce, la ville de Belfort n'ayant pas placé les salariés dans un tel régime, puisque, soit les salariés n'ont pas été repris, soit pour ceux qui ont été intégrés dans ses effectifs, elle indique elle- même qu'il ne s'agit pas d'une application de l'article L 1224-3 code du travail mais d'un recrutement distinct.

En conséquence, le litige relatif à la reprise de contrats de travail par une collectivité publique opposant cette dernière à l'employeur privé des salariés relève de la compétence de la juridiction de l'ordre judiciaire.

Il convient en conséquence de rejeter l'exception d'incompétence soulevée et de confirmer la décision du Conseil de Prud'hommes sur ce point.

2°) Sur le transfert des contrats de travail:

Il résulte des dispositions de l'article L1224-3 du code du travail que :

«lorsque l'activité d'une entité économique employant des salariés de droit privé est, par transfert de cette entreprise, reprise dans le cadre d'un service public administratif , il appartient à cette personne publique de proposer à ces salariés des contrats de droit public..».

L'association Les Francas se fonde sur ce texte pour soutenir que du fait du non renouvellement de la convention, les contrats de travail ont été transférés à la Ville de Belfort qui est devenue le nouvel employeur des salariés ainsi repris.

Il convient donc de déterminer s'il y a eu transfert d'une entité économique autonome conservant son identité et dont l'activité se poursuit étant précisé que ces deux conditions doivent être réunies d'une manière cumulative.

L'entité économique se définit comme étant un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels permettant l'exercice d'une activité économique qui poursuit un objectif propre.

Pour déterminer l'existence d'une telle entité, la jurisprudence a recours à un faisceau d'indices tels que la présence d'éléments corporels et incorporels, une clientèle identifiée, une hiérarchie autonome, l'affectation d'un personnel dédié, des pouvoirs de décision et d'organisation propres.

Il résulte des pièces que les parties étaient liées par une convention de gestion de 7 centres de loisirs et de 4 centres périscolaires dont l'objet est ainsi libellé:

«la Ville de Belfort confie au titulaire du marché, la gestion administrative et l'organisation pédagogique et matérielle des 7 structures, propriétés de la Ville ouvertes aux enfants et adolescents de 3 à 16 ans et de 4 centres périscolaires propriétés de la Ville, ouvertes aux enfants des écoles maternelles et élémentaires.

La ville confie au titulaire du marché, les trois missions de contribuer à l'épanouissement de l'enfant..... offrir aux enfants, une gamme variée de loisirs éducatifs à moindre coût pour les familles et veiller à adapter les structures d'accueil éducatif à l'évolution des attentes de la population .

Il y est mentionné que le titulaire du marché fournit à l'appui de sa demande, un projet pédagogique par structure qui s'inscrit dans les orientations de la ville en matière de politique éducative, sociale et culturelle.

Il y est précisé que «l'ensemble des immeubles, des locaux des installations est mis à la disposition du titulaire du marché selon un inventaire contresigné par les parties.»

Pour les locaux scolaires, le titulaire a l'usage des locaux strictement nécessaires à l'exécution du marché. A l'expiration de la convention ...l'ensemble des ouvrages et installations devra être remis en bon état de conservation et d'entretien.

Tous les frais de fonctionnement de l'exploitation sont à la charge de la Ville de Belfort: dépenses d'éclairage..., consommations d'eau, d'électricité , de gaz, de chauffage.

Enfin, la Ville de Belfort verse au titulaire une participation financière annuelle pour réaliser les missions confiées qui s'ajoute aux participations des familles et aides des autres financeurs.

Les statuts indiquent que l'association des Francas du Territoire de Belfort exerce son activité par notamment «la création, organisation, animation, gestion d'activités et de structures d'accueil destinées aux enfants...» de sorte qu'il entrait bien dans ses missions, la gestion de l'activité périscolaire, étant observé que ce n'est que la gestion qui a été confiée à l'association avec mise à sa disposition de biens immobiliers, de locaux avec leurs équipements, l'association n'apportant que le matériel spécifique à l'exercice de l'activité comme le matériel de jeux ou un petit matériel tel qu'une bouilloire ou une cafetière, à quelques exceptions près comme un réfrigérateur ou un buffet au vu de l'inventaire fait à la sortie des lieux le 31décembre 2014 .

Par ailleurs, et comme le retient le Conseil de Prud'hommes, l'association ne disposait pour l'exercice de cette activité, d'aucune structure particulière pour accueillir les enfants et exercer ses missions, travaillant dans des locaux mis à sa disposition par la Ville de Belfort qui en était le propriétaire.

De plus, si effectivement, il peut être admis l'existence «d'une clientèle familiale» dédiée, représentée par les parents qui y inscrivaient leurs enfants et quand bien même, ces derniers versaient directement leur contribution à l'association les Francas, s'agissant des administrés de la Ville de Belfort , ils ne peuvent pas constituer une véritable clientèle attachée à une activité économique, n'étant pas la clientèle spécifique de l'association de sorte qu'elle ne peut pas être considérée comme un élément incorporel significatif .

En outre, l'association, de par la convention signée, se devait d'exercer l'activité conformément au projet pédagogique de la Ville.

L'association ne justifie pas d'une autonomie ni d'indépendance dans l'exécution de sa mission parfaitement encadrée dans ses objectifs et orientations. Elle ne présente aucun élément démontrant l'existence sur ce point, d'un pouvoir de décision et d'organisation propre dans l'exercice de cette mission.

Il ressort de la lecture des contrats de travail que, d'une part, les salariés se voyaient imposer une clause aux termes de laquelle l'association se réservait le droit de modifier à tout moment leur lieu d'affectation, d'autre part, certains salariés bénéficiaient seulement de contrat à durée déterminée et enfin, qu'ils n'étaient pour certains que partiellement affectés à l'exercice de cette activité .

Il en résulte que le personnel employé par l'association Les Francas était polyvalent et qu'il ne s'agissait pas d'un personnel dédié.

Il n'est pas non plus établi que la Ville de Belfort ait repris 14 salariés alors qu'en réalité, elle a conclu avec d'anciens salariés de l'association, de nouveaux contrats de travail.

Enfin, la simple «municipalisation» des activités périscolaires qui n' a consisté pour la Ville de Belfort qu'à exercer en direct une activité qu'elle avait déléguée à l'association dans un cadre bien défini ne saurait prouver à elle seule l'existence d'une entité économique.

Ainsi l'association Les Francas ne démontre pas l'existence d'une entité économique autonome, l'exercice de l' activité périscolaire reprise par La Ville de Belfort, ne pouvant pas être considérée au regard des éléments ci dessus analysés comme une activité économique poursuivant un objectif propre et dont l'identité a été maintenue.

En conséquence, il ne saurait être retenu l'existence d'une entité économique autonome conservant son identité en vue de la poursuite de l'activité.

Il convient donc de confirmer la décision du Conseil de Prud'hommes et de dire qu'il n'y a pas eu de transfert des contrats de travail au profit de la Ville de Belfort aux termes de l'article L1224-3 du code du travail.

3°) Sur la prise d'acte de la rupture et l'indemnisation

M. [ZK] a pris acte de la rupture de son contrat de travail le 12 février 2015 n'ayant plus de travail ni de salaire depuis le 1er janvier 2015.

Dès lors que l'employeur l'association Les Francas a manqué à ses obligations essentielles à savoir fournir du travail et verser le salaire, il convient de retenir que la prise d'acte s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse .

En application des dispositions de l'article L1243-4 du code du travail , la rupture anticipée d'un contrat à durée déterminée qui intervient à l'initiative de l'employeur, en dehors des cas de faute grave, de force majeure, ou d'inaptitude constatée par le médecin du travail ouvre droit pour le salarié à des dommages et intérêts d'un montant égal aux rémunérations qu'il aurait perçues jusqu'au terme de son contrat sans préjudice de l'indemnité de fin de contrat prévue à l'article L1243-8 du code du travail.

En conséquence, il convient de confirmer les montants alloués à M. [ZK] par le Conseil de Prud'hommes soit:

- au titre des salaires du 1er janvier 2015 au 12 février 2015, la somme de 2190,83 euros ainsi que les congés payés y afférents de 219,08 euros,

-au titre de l'indemnité de fin de contrat prévue à l'article L1243-8 du code du travail et équivalente à 10% de la rémunération totale brute : 1542,84 euros,

Sur les dommages et intérêts pour rupture anticipée abusive, il convient de confirmer la décision du Conseil de Prud'hommes allouant la somme de 7066,21 euros ( salaires dus du 12 février jusqu'au 30 juin 2015), en rappelant que cette somme n'ouvre pas droit à des congés payés, aucune disposition légale n'assimilant cette période à une période de travail effectif de sorte qu'il y a lieu d'infirmer la décision en ce qu'elle a accordé une indemnité de congés payés sur ce montant.

Sur l'indemnité pour préjudice distinct, eu égard à la situation qui a laissé le salarié sans salaire et dans l'incertitude au regard de la poursuite de son contrat de travail mais compte tenu du fait qu'il a pu retrouver du travail dès septembre 2015 dans le Sud de la France, il convient de lui allouer une somme de 750 euros à titre de dommages et intérêts .

4°) Sur l'intervention volontaire du syndicat CFDT S3C de Franche Comté:

Si les syndicats sont en application des dispositions de l'article L2132-3 du code du travail autorisés à agir en justice, ils ne peuvent le faire que lorsqu'il s'agit de faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession qu'ils représentent.

Il est admis que la violation des dispositions de l'article L1224-3 du code du travail prévoyant le transfert des contrats de travail porte atteinte à l'intérêt collectif de la profession représentée par le syndicat. Dès lors l'intervention de celui-ci aux côtés des salariés à l'occasion d'un litige portant sur l'application de ce texte doit être déclarée recevable.

Toutefois, en l'espèce, le syndicat n'a dirigé sa demande qu'à l'encontre de la Ville de Belfort dont la cour a estimé qu'elle n'était pas devenue l'employeur des salariés en l'absence de transfert des contrats de travail. En conséquence, il convient de rejeter les demandes du Syndicat.

Sur la demande de la Ville de Belfort pour procédure abusive:

Ces demandes sont dirigées à l'encontre de l'Association Les Francas du Territoire de Belfort et du Syndicat CFDT de Franche Comté à hauteur de 300 euros par dossier.

Or, le seul fait pour l'Association des Francas d'avoir usé d'un droit légitime à contester une décision qui lui est défavorable, ne saurait à lui seul revêtir un caractère abusif alors que la Ville de Belfort ne présente aucun élément de nature à caractériser un abus de ce droit.

Dès lors sa demande doit être rejetée.

Il en est de même de l'intervention du syndicat dont il n'est pas démontré que l'utilisation en l'espèce de son droit d'ester en justice soit constitutive d'un abus .

La demande doit également être rejetée.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile:

L'Association Les Francas du Territoire de Belfort qui succombe dans la présente procédure, sera condamnée au paiement des dépens de la procédure d'appel, ce qui entraîne le rejet de sa demande formulée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité commande d'allouer à M. [ZK] une somme de 1000 euros et à la Ville de Belfort, celle de 300 euros, au titre de l'article 700 du code de procédure civile, étant rappelé que la condamnation à une indemnité emporte automatiquement intérêts au taux légal à compter de l'arrêt.

PAR CES MOTIFS:

La Cour, chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe et après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

DÉCLARE l'appel de l'Association Les Francas du Territoire de Belfort mal fondé ;

CONFIRME le jugement du Conseil de Prud'hommes du 13 mai 2015 en toutes ses dispositions sauf sur le rejet du préjudice distinct et le montant alloué au titre l'indemnité de congés payés sur l'indemnité de rupture anticipée du contrat à durée déterminée,

Statuant sur ces points,

CONDAMNE l'Association Les Francas du Territoire de Belfort à verser à M. [Z] [ZK]:

-750 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice distinct,

DIT que les dommages et intérêts alloués au titre de la rupture anticipée du contrat à durée déterminée n'ouvrent pas droit à une indemnité compensatrice de congés payés,

DÉBOUTE M. [ZK] du surplus de ses demandes ;

DECLARE l'intervention volontaire du Syndicat CFDT S3C de Franche- Comté recevable ;

DEBOUTE celui-ci de toutes ses demandes ;

Y ajoutant :

CONDAMNE l'Association Les Francas du Territoire de Belfort aux dépens de la procédure d'appel sauf ceux de l'intervention du Syndicat CFDT qui resteront à la charge de ce dernier ;

LA CONDAMNE à payer à M. [ZK] une somme de 1000 euros et à la Ville de Belfort celle de 300 euros, au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

DEBOUTE la Ville de Belfort de ses demandes pour procédure abusive.

LEDIT ARRÊT a été prononcé par mise à disposition le 19 février 2016 et signé par Mme Chantal PALPACUER, Présidente de Chambre, Magistrat et par Mme Karine MAUCHAIN, Greffier.

LE GREFFIER LE PRESIDENT DE CHAMBRE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Besançon
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15/01203
Date de la décision : 19/02/2016

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-02-19;15.01203 ?
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