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24/11/2015 | FRANCE | N°14/00842

France | France, Cour d'appel de Besançon, Chambre sociale, 24 novembre 2015, 14/00842


ARRET N° 15/

PB/KM



COUR D'APPEL DE BESANCON

- 172 501 116 00013 -

ARRET DU 24 NOVEMBRE 2015



CHAMBRE SOCIALE





Contradictoire

Audience publique

du 06 octobre 2015

N° de rôle : 14/00842



S/appel d'une décision

du Conseil de Prud'hommes de BELFORT

en date du 17 mars 2014

Code affaire : 80A

Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution





[Q] [D] épouse [M]

C/

SAR

L POINT D'ENCRE







PARTIES EN CAUSE :



Madame [Q] [D] épouse [M], demeurant [Adresse 1]





APPELANTE



représentée par Me André SLATKIN, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES





ET :



...

ARRET N° 15/

PB/KM

COUR D'APPEL DE BESANCON

- 172 501 116 00013 -

ARRET DU 24 NOVEMBRE 2015

CHAMBRE SOCIALE

Contradictoire

Audience publique

du 06 octobre 2015

N° de rôle : 14/00842

S/appel d'une décision

du Conseil de Prud'hommes de BELFORT

en date du 17 mars 2014

Code affaire : 80A

Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution

[Q] [D] épouse [M]

C/

SARL POINT D'ENCRE

PARTIES EN CAUSE :

Madame [Q] [D] épouse [M], demeurant [Adresse 1]

APPELANTE

représentée par Me André SLATKIN, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES

ET :

SARL POINT D'ENCRE, ayant son siège social [Adresse 2]

INTIMEE

représentée par Me Robert BAUER, avocat au barreau de MONTBELIARD

COMPOSITION DE LA COUR :

lors des débats du 06 Octobre 2015 :

PRESIDENT DE CHAMBRE : Madame Chantal PALPACUER

CONSEILLERS : M. Jérôme COTTERET et Monsieur Patrice BOURQUIN

GREFFIER : Mme Karine MAUCHAIN

Lors du délibéré :

PRESIDENT DE CHAMBRE : Madame Chantal PALPACUER

CONSEILLERS : M. Jérôme COTTERET et Monsieur Patrice BOURQUIN

Les parties ont été avisées de ce que l'arrêt sera rendu le 24 Novembre 2015 par mise à disposition au greffe.

**************

FAITS ET PROCEDURE

L'Eurl l'Encre Eco dont le gérant est Mme [Q] [D] épouse [M] a signé le 25 janvier 2011 un contrat de concession d'enseigne avec une société Holding Ecb Finances , aux droits de laquelle se trouve la Sarl Point d'Encre, dont le siège social est situé à [Localité 1] en vue d'exploiter un point de vente sous la marque 'Point d'Encre' à [Localité 2].

L'activité du concessionnaire consiste à offrir aux particuliers et aux entreprises la possibilité de recharger les cartouches d'encre d'imprimantes et de photocopieurs.

Mme [Q] [D] épouse [M], comme dix-sept autres gérants de sociétés situées sur le territoire national, a saisi le conseil de prud'hommes de Belfort aux fins de faire requalifier les relations contractuelles en contrat de gérance de succursale sur le fondement de l'article L 7321-2 du code du travail.

Par jugement du 17 mars 2014, le conseil de prud'hommes a débouté Mme [Q] [D] épouse [M] de l'intégralité de ses demandes.

Par déclaration du 10 avril 2014, Mme [Q] [D] épouse [M] a interjeté appel de la décision.

Selon conclusions visées le 1er juin 2015, elle demande de :

- requalifier les relations contractuelles en contrat de gérant de succursale sur le fondement de l'article L 7321-1 2ème du code du travail,

- en conséquence condamner la Sarl Point d'Encre à lui payer les sommes de:

*128.948,50€ à titre de rappel de salaire,

*12.894,85€ au titre des congés payés afférents,

*16.198,74€ sur le fondement de l'article L 8223-1 du code du travail,

-dire que la rupture du contrat est imputable à la Sarl Point d'Encre et s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-en conséquence condamner la Sarl Point d'Encre au paiement des sommes de :

*2.204,83€ au titre de l'indemnité de licenciement,

*8.099,37€ au titre du préavis,

*809,94€ au titre des congés payés sur préavis,

*50.000€ à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-la condamner à délivrer sous astreinte de 50€ par jour de retard une attestation Pôle Emploi, un certificat de travail et des bulletins de salaires conformes à la décision à intervenir,

-condamner la Sarl Point d'Encre au paiement de la somme de 5000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Selon conclusions visées le 28 septembre 2015, la Sarl Point d'Encre demande de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [Q] [D] épouse [M] de l'intégralité de ses demandes,

- constater que l'article L 7321-2 du code du travail n'est pas applicable et se déclarer incompétent rationae materiae au profit du tribunal arbitral,

- plus subsidiairement, déclarer l'appelante irrecevable en ses demandes,

-plus subsidiairement encore la déclarer mal fondée,

- à titre infiniment subsidiaire, constater le caractère excessif et non fondé des demandes,

En toutes hypothèses,

- condamner l'appelante au paiement d'une somme de 10.000€ de dommages et intérêts pour procédure abusive et vexatoire,

-condamner l'appelante à lui payer la somme de 5000€ au titre de l'article 700€ du code de procédure civile,

En application de l' article 455 du code de procédure civile, la Cour se réfère, pour l'exposé des moyens des parties, à leurs conclusions visées par le greffe et développées lors de l'audience de plaidoirie du 6 octobre 2015.

MOTIFS DE LA DECISION

Selon l'article L7321-2 2ème du code du travail est gérant de succursale toute personne dont la profession consiste essentiellement à vendre des marchandises de toute nature qui leur sont fournies exclusivement ou presque exclusivement par une seule entreprise, lorsque ces personnes exercent leur profession dans un local fourni ou agréé par cette entreprise et aux conditions et prix imposés par cette entreprise.

La Sarl Point d'Encre fait valoir en premier lieu que la personne visée par ces dispositions ne peut être qu'une personne physique, alors qu'en l'espèce le contrat a été passé avec l'Eurl l'Encre Eco.

C'est notamment sur ce fondement que le conseil de prud'hommes a rejeté la demande en estimant que Mme [Q] [D] épouse [M] ne démontrait pas l'existence d'un lien personnel l'unissant à la Sarl Point d'Encre.

Toutefois, la convention signée le 7 octobre 2010 prévoit en son article 11 que:

'La holding Ecb Finances pourra si elle le juge préférable, mettre fin au présent contrat par lettre recommandée avec accusé de réception et sans indemnité dans les cas suivants : (...)

Si le concessionnaire est une personne morale :

-en cas de modification de tout ou partie de la société entraînant un changement de majorité, de fusion avec une autre société, scission, absorption ou apport partiel d'actif.,

-en cas de changement de la personne dirigeant la société'.

Même si le contrat a été passé avec une personne morale, ces dispositions font apparaître le lien direct existant entre le gérant personne physique et la Sarl Point d'Encre, dès lors que cette dernière se réserve la possibilité de résilier le contrat en cas de changement de la personne du gérant.

C'est donc en réalité la personne physique de celui qui gère la personne morale qui est prépondérante dans l'activité et conformément à une jurisprudence constante les dispositions de l'article L 73212-2 sont susceptibles de trouver application.

S'agissant de la vente de marchandises fournies exclusivement ou presque exclusivement par une seule entreprise, le contrat comporte les clauses suivantes :

'Par sa double position de centrale d'achat et d'enseigne Point d'Encre, la société holding Ecb Finances dispose de la capacité de proposer une gamme de produit à des prix compétitifs assortis d'une assistance technique en contrepartie d'un approvisionnement exclusif'

ll précise par ailleurs que 'le concessionnaire s'engage à ne vendre ou à recharger dans son magasin Point d'Encre que des produits acquis auprès de la société Holding Ecb Finances ou auprès de fournisseurs agréés par celle-ci. Ces produits concernent tous les types de cartouches, ainsi que tous les articles de même nature, ainsi que tous produits dérivés et autres'.

Mme [Q] [D] épouse [M] fournit divers échanges de courriels faisant apparaître qu'une société agréée, la Sarl Refill France a en réalité pour gérant, M. [I] [O], également gérant de la Sarl Point d'Encre, les commandes passées par les exploitants des magasins sur le site Point d'Encre étant traitées par la Sarl Refill France.

Un courrier du gérant de la Sarl Point d'Encre à l'un des exploitants en date du 28 juin 2013 précise en outre que 'notre marque Point d'Encre a donné son agrément, uniquement, aux encres de la centrale d'achat Point d'Encre et aucune autre (...) Toute cartouche remanufacturée et vendue par votre magasin doit être vendue avec des encres fournies par la centrale d'achat Point d'Encre... dès lors votre non-respect de cette obligation d'approvisionnement exclusif doit cesser sans délai'.

La Sarl Point d'Encre produit toutefois l'inventaire des achats réalisés auprès d'elle par l'Eurl l'Encre Eco. Il apparaît que si elle a acheté régulièrement des marchandises auprès de la Sarl Point d'Encre jusqu'au mois de mars 2013, tout achat a ensuite cessé alors que la société a poursuivi son activité jusqu'en février 2015.

Mme [Q] [D] épouse [M] produit pour l'essentiel un dossier commun à l'ensemble des dix-sept autres contractants ayant engagé un recours identique et ne fournit aucune pièce liée spécifiquement à sa propre activité. Si elle s'appuie sur l'analyse des clauses du contrat, elle ne conteste pas pour autant les chiffres produits par la Sarl Point d'Encre, établissant que depuis le début de l'année 2013, elle n'a plus procédé à une quelconque achat auprès de la Sarl Point d'Encre et ne fournit aucune donnée qui aurait pu permettre d'établir que, conformément aux dispositions susvisées, elle vendait des marchandises qui lui étaient fournies exclusivement ou presque exclusivement par une seule entreprise.

Mme [Q] [D] épouse [M] fait certes valoir que même s'il n'avait pas respecté le contrat scrupuleusement, le manquement pourrait faire l'objet d'une condamnation devant la juridiction commerciale, mais que le fait pour un contractant de ne pas respecter ses obligations ne modifie pas pour autant la nature du contrat.

Il n'en reste pas mois que l'application des dispositions précitées nécessite que puisse être concrètement appréciée la proportion des produits fournis par le contractant afin d'établir l'existence ou non d'une fourniture exclusive ou quasi exclusive.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a estimé que les conditions de l'article L7321-2 2ème du code du travail n'étaient pas remplies et a en conséquence débouté Mme [Q] [D] épouse [M] de l'intégralité de ses demandes.

La Sarl Point d'Encre sollicite la somme de 10.000€ à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et vexatoire, au motif que l'appelant a présenté une demande qu'il savait radicalement mal fondée, en procédant à une dénaturation des faits et de la règle de droit.

En l'espèce, l'action intentée ne saurait toutefois être abusive dès lors que l'examen des clauses contractuelles pouvait amener l'appelant à envisager l'hypothèse d'un succès, à supposer qu'il ait effectivement fourni les éléments de faits propres à son dossier. L'appel ne pouvait pas plus être abusif dès lors que la décision de première instance est confirmée mais sur un fondement différent de celui retenu par le premier juge.

La somme de 300€ sera allouée à la Sarl Point d'Encre au titre de l'article 700 du code de procédure civile, la demande formée par l'appelant au même titre étant rejetée.

PAR CES MOTIFS

La Cour, Chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

CONFIRME le jugement entrepris,

Y ajoutant,

DEBOUTE Mme [Q] [D] épouse [M] de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Mme [Q] [D] épouse [M] à payer à la Sarl Point d'Encre la somme de 300€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Mme [Q] [D] épouse [M] aux dépens.

Ledit arrêt a été prononcé par mise à disposition au greffe le vingt quatre novembre deux mille quinze et signé par Mme Chantal PALPACUER, Présidente de chambre, et Mme Karine MAUCHAIN, Greffière.

LE GREFFIER,LE PRESIDENT DE CHAMBRE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Besançon
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14/00842
Date de la décision : 24/11/2015

Références :

Cour d'appel de Besançon 03, arrêt n°14/00842 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-11-24;14.00842 ?
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