ARRET N°
PB/KM
COUR D'APPEL DE BESANCON
- 172 501 116 00013 -
ARRET DU 06 OCTOBRE 2015
CHAMBRE SOCIALE
Contradictoire
Audience publique
du 30 juin 2015
N° de rôle : 14/00668
S/appel d'une décision
du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de LONS LE SAUNIER
en date du 11 février 2014
Code affaire : 88A
Demande d'annulation d'une décision d'un organisme
URSSAF DE [Localité 2]
C/
ADMR DU JURA
PARTIES EN CAUSE :
URSSAF DE [Localité 2], [Adresse 2]
APPELANTE
représentée par Madame [N] [K], responsable du service contentieux, selon pouvoir spécial daté du 05 janvier 2015 et signé par Madame [Q] [W], directrice de l' U.R.S.S.A.F. de FRANCHE-COMTE
ET :
ADMR DU JURA, [Adresse 1]
INTIMEE
représentée par Me Christian MARQUES, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
lors des débats du 30 Juin 2015 :
PRESIDENT DE CHAMBRE : Madame Chantal PALPACUER
CONSEILLERS : Monsieur Jérôme COTTERET et Monsieur Patrice BOURQUIN
GREFFIER : Mme Karine MAUCHAIN
Lors du délibéré :
PRESIDENT DE CHAMBRE : Madame Chantal PALPACUER
CONSEILLERS : Monsieur Jérôme COTTERET et Monsieur Patrice BOURQUIN
Les parties ont été avisées de ce que l'arrêt sera rendu le 06 Octobre 2015 par mise à disposition au greffe.
**************
L'Admr du Jura gère plusieurs services de soins infirmiers à domicile (SSIAD) sur le département du Jura.
Les 31 juillet 2012, 4 et 14 septembre 2012, elle a sollicité le remboursement des cotisations patronales sur les rémunérations des aides soignants pour chacun de ses SSIAD, dans la limite de la prescription, en se prévalant des dispositions de l'article L 241-10 III du code de la sécurité sociale.
Par courrier du 13 décembre 2012, l'Urssaf du Jura a informé les SSIAD hormis celui de [Localité 3] qu'ils ne pouvaient prétendre à cette exonération, l'établissement de [Localité 3] se voyant quant à lui retirer le bénéfice de l'exonération par un courrier ultérieur.
L'Admr du Jura a saisi la commission de recours amiable de l'Urssaf le 12 février 2013.
En l'absence de décision, elle a saisi le 10 mai 2013 le tribunal des affaire de sécurité sociale de Lons le Saunier en contestant le rejet implicite de son recours.
Par jugement du 11 février 2014, le Tribunal a :
-infirmé la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable
de l'Urssaf du Jura,
- dit que l'Admr du Jura peut bénéficier des exonérations patronales prévues
par l'article L 241-10 III du code de la sécurité sociale sur les rémunérations des aides soignants qui réalisent au domicile des personnes âgées et handicapées des soins de base et relationnels,
-dit que l'Urssaf fera droit aux mêmes demandes pour les SSIAD du [Localité 1], [Localité 4], [Localité 5], [Localité 7], [Localité 8], [Localité 6], [Localité 9] et [Localité 10],
-condamné l'Urssaf du Jura au remboursement des sommes correspondant aux cotisations patronales versées indûment au titre de ses agents aides-soignants exerçant des tâches d'aide aux actes de la vie courante auprès des personnes âgées sur la période faisant l'objet du contrôle.
Par déclaration du 20 mars 2014, l'Urssaf de Besançon a interjeté appel de la décision.
Selon conclusions visées le 10 avril 2015, elle conclut à l'infirmation de la décision et demande de dire que les SSSIAD n'entrent pas dans le champ des structures éligibles à l'exonération 'aide à domicile' de l'article L 241-10 III du code de la sécurité sociale et que les actes réalisés par les aides soignants ne sont pas de nature à ouvrir droit à exonération, que par conséquent les sommes correspondant aux cotisations patronales ont été déduites à tort pour les différents établissement de l'Admr du jura.
Selon conclusions visées le 8 juin 2015, l' Admr du Jura conclut à la confirmation du jugement et à la condamnation de l'appelant à lui payer la somme de 2500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
En application de l' article 455 du code de procédure civile, la Cour se réfère, pour l'exposé des moyens des parties, à leurs conclusions visées par le greffe et développées lors de l'audience de plaidoirie du 30 juin 2015.
MOTIFS DE LA DECISION
A l'appui de son recours l'Urssaf du Jura fait valoir que les SSIAD ne sont, d'une part, pas des structures éligibles aux exonérations prévues par l'article L 214-10 III du code de la sécurité sociale et que, d'autre part, leur activité n'entre pas dans le champ d'application de ces dispositions.
I) Sur l'éligibilité des SSIAD à l'exonération
L'article L 241-10 III du code de la sécurité sociale dans sa rédaction applicable à l'espèce dispose que sont exonérées de cotisations patronales d'assurances sociales et d'allocations familiales les rémunérations versées aux aides à domicile (...) par les structures suivantes :
1° Les associations et entreprises déclarées dans les conditions fixées à l'article L 7232-1-1 du code du travail pour l'exercice des activités concernant la garde d'enfants ou l'assistance des personnes âgées ou handicapées.
L'article L 7232-1-1 renvoie lui-même à l'article D 7231-1 du code du travail précisant que les activités à la personne soumises à agrément sont celles qui ont trait à l'assistance de personnes ayant besoin d'une aide personnelle à leur domicile, à l'exclusion d'actes de soins relevant d'actes médicaux.
Il en résulte que les SSIAD, dont l'objet est l'assistance de personnes ayant besoin d'une aide à leur domicile, ne sont, en tant que tels, pas exclus des organismes susceptibles de bénéficier de l'exonération.
L'Urssaf fait certes valoir que les SSIAD ne disposent pas d'une autorisation délivrée au titre de ces dispositions.
L'article R 7232-6 du code du travail dispose toutefois que l'autorisation prévue par l'article L 313-1 du code de l'action sociale et de la famille obtenue par les services prestataires organisant l'aide et l'accompagnement à domicile relevant des 1°, 6° et 7° du I de l'article L 321-1 du même code emporte agrément dans la limite des activités et de la zone géographique que prévoit l'autorisation.
Or les SSIAD relèvent bien du 6° de l'article L 321-1 et l'Urssaf, qui ne conteste pas que le service est régulièrement autorisé à ce titre, ne peut donc soutenir qu'il n'existe pas d'équivalence entre cette autorisation et celle visée par l'article R 7232-6 du code du travail.
Les SSIAD sont donc susceptibles d'être éligibles à ces exonérations à supposer toutefois que leur activité entre dans le cadre de ces dispositions.
II) Sur le champ d'application de l'exonération
Aux termes de l'article D 312-1 du code de l'action sociale et des familles, les services de soins infirmiers à domicile (SSIAD) assurent sur prescription médicale, des prestations de soins infirmiers sous la forme de soins techniques ou de soins de base et relationnels, auprès de personnes âgées de soixante ans et plus malades ou dépendantes, de personnes présentant un handicapées, ou atteintes de pathologie chronique.
Ces interventions sont assurées, selon l'article D 213-2 notamment par des infirmiers et des aides-soignants qui réalisent, sous la responsabilité des infirmiers, les soins de base et relationnels et concourent à l'accomplissement des actes essentiels de la vie correspondant à leur formation.
Les aides soignants interviennent donc à domicile uniquement sur prescription médicale et ce quels que soient les actes qu'ils réalisent. Il n'y a donc pas lieu de distinguer au sein de ces actes ceux qui peuvent être également assurés par des personnes chargées de l'aide aux actes de la vie courante et notamment par des services d'accompagnement à domicile qui n'interviennent pas sur prescription médicale.
Au surplus l'ensemble de soins réalisées par les SSIAD sont cotés en AMI (actes médico-infirmier) ou AIS (actes infirmiers de soins) conformément à la nomenclature générale des actes professionnels et donnent lieu à prise en charge par l'assurance maladie.
Il en résulte donc que les SSIAD ne peuvent bénéficier des exonérations au titre des services à domicile pour les rémunérations versées aux aides soignants. Le jugement sera en conséquence infirmé en ce sens.
La demande de l'Admr du Jura, qui succombe, formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile sera rejetée.
PAR CES MOTIFS
La Cour, Chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,
INFIRME le jugement entrepris,
Statuant à nouveau,
DIT que l'ADMR du Jura, au titre son activité de service de soins infirmiers à domicile (SSIAD) ne peut bénéficier de l'exonération 'aide à domicile' de l'article L 241-10 III du code de la sécurité sociale, ;
DIT en conséquence que les sommes correspondant aux cotisations patronales ont été déduites à tort pour les différents établissement de l'Admr du Jura ;
DEBOUTE l'Admr du Jura de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Ledit arrêt a été prononcé par mise à disposition au greffe le six octobre deux mille quinze et signé par Madame Chantal PALPACUER, Présidente de chambre et Mme Karine MAUCHAIN, Greffier.
LE GREFFIER,LA PRESIDENTE DE CHAMBRE,