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15/05/2015 | FRANCE | N°14/00306

France | France, Cour d'appel de Besançon, Chambre sociale, 15 mai 2015, 14/00306


ARRET N°

JC/GM



COUR D'APPEL DE BESANCON

- 172 501 116 00013 -

ARRET DU 15 MAI 2015



CHAMBRE SOCIALE





Contradictoire

Audience publique

du 13 mars 2015

N° de rôle : 14/00306



S/appel d'une décision

du Conseil de prud'hommes de DOLE

en sa formation paritaire

en date du 17 janvier 2014

code affaire : 80A

Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution





[X] [F] [S]

C

/

Association SOCIETE DIJONNAISE DE L'ASSISTANCE PAR LE TRAVAIL (SDAT)









PARTIES EN CAUSE :



Monsieur [X] [F] [S], demeurant [Adresse 1]





APPELANT



REPRESENTE par Maître Michel DEF...

ARRET N°

JC/GM

COUR D'APPEL DE BESANCON

- 172 501 116 00013 -

ARRET DU 15 MAI 2015

CHAMBRE SOCIALE

Contradictoire

Audience publique

du 13 mars 2015

N° de rôle : 14/00306

S/appel d'une décision

du Conseil de prud'hommes de DOLE

en sa formation paritaire

en date du 17 janvier 2014

code affaire : 80A

Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution

[X] [F] [S]

C/

Association SOCIETE DIJONNAISE DE L'ASSISTANCE PAR LE TRAVAIL (SDAT)

PARTIES EN CAUSE :

Monsieur [X] [F] [S], demeurant [Adresse 1]

APPELANT

REPRESENTE par Maître Michel DEFOSSE, Avocat au barreau de DIJON

ET :

L' Association SOCIETE DIJONNAISE DE L'ASSISTANCE PAR LE TRAVAIL (SDAT), dont le siège social est sis [Adresse 2]

INTIMEE

REPRESENTEE par Maître Loïc DUCHANOY, Avocat au barreau de DIJON

COMPOSITION DE LA COUR :

lors des débats du 13 mars 2015 :

CONSEILLER RAPPORTEUR : M. Jérôme COTTERET, Conseiller, conformément aux dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, en l'absence d'opposition des parties

GREFFIER : Madame Karine BLONDEAU

lors du délibéré :

M. Jérôme COTTERET, Conseiller a rendu compte conformément à l'article 945-1 du code de procédure civile à Madame Chantal PALPACUER, et Monsieur Patrice BOURQUIN, Conseiller.

Les parties ont été avisées de ce que l'arrêt sera rendu le 15 mai 2015 par mise à disposition au greffe.

**************

FAITS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

M. [X] [F] [S] a été embauché par l'Association SDAT (Société Dijonnaise de l'Assistance par le Travail) comme responsable logistique par contrat de travail à durée déterminée du 10 mai au 12 juin 2012 afin d'assurer le remplacement d'un salarié absent pour cause de maladie.

Il a été de nouveau embauché selon contrat de travail à durée déterminée du 25 juin au 14 août 2012, pour permettre à l'Association SDAT de faire face a un accroissement temporaire d'activité.

M. [X] [F] [S] exerce par ailleurs depuis 2003 les fonctions de conseiller prud'homal à Dijon.

Par requête enregistrée le 11 octobre 2013, M. [X] [F] [S] a saisi le conseil de prud'hommes de Dole afin d'obtenir la requalification du second contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée et la condamnation de son employeur à lui payer les sommes suivantes :

- 9 500 € net au titre de la rupture abusive du contrat de travail,

- 40'760,10 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement survenu en violation de son statut protecteur de conseiller prud'homal,

- 1 558,67 € au titre de l'indemnité de requalification,

- 155,86 € au titre des congés payés afférents,

- 2 200 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement rendu le 17 janvier 2014, le conseil de prud'hommes de Dole a débouté M. [X] [F] [S] de l'intégralité de ses prétentions et l'a condamné aux dépens.

*

Par déclaration enregistrée au greffe de la Cour le 7 février 2014, M. [X] [F] [S] a interjeté appel de cette décision.

Dans ses écrits déposés le 23 février 2015, il maintient que le second contrat de travail à durée déterminée a été conclu sans que l'employeur justifie d'un réel accroissement temporaire d'activité et que le contrat doit en conséquence être requalifié en contrat à durée indéterminée.

En tout état de cause, il affirme que l'employeur, qui avait connaissance de sa qualité de conseiller prud'homal, ne pouvait mettre un terme à la relation contractuelle sans avoir saisi préalablement l'inspection du travail.

Il conclut ainsi à la condamnation de l'Association SDAT à lui verser les sommes suivantes :

- 9 500 € net au titre de la rupture abusive du contrat de travail,

- 40'760,10 € net à titre de dommages et intérêts pour licenciement survenu en violation de son statut protecteur de conseiller prud'homal,

- 1 560 € au titre de l'indemnité de requalification,

- 1 558,67 € au titre de l'indemnité de préavis,

- 155,86 € au titre des congés payés afférents,

- 2 200 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

*

Pour sa part, dans ses écrits déposés le 12 février 2015, l'Association SDAT affirme que le recours à un second contrat de travail à durée déterminée était justifié par un accroissement temporaire d'activité.

Elle ajoute que M. [X] [F] [S] n'a pas exécuté le contrat de travail de manière loyale en ne l'ayant pas informée de sa qualité de conseiller prud'homal, raison pour laquelle elle considère que l'intéressé n'a pas fait l'objet d'une mesure discriminatoire, faisant au surplus remarquer qu'il n'est justifié d'aucun préjudice.

À titre subsidiaire, elle fait remarquer que l'indemnisation réclamée par M. [X] [F] [S] ne peut se cumuler avec les indemnités déjà versées par Pôle Emploi.

L'Association SDAT conclut donc à la confirmation du jugement déféré, y ajoutant une demande de dommages et intérêts à hauteur de 5 000 € pour procédure abusive et d'une indemnité de 1 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, la Cour se réfère, pour l'exposé des moyens des parties, à leurs conclusions visées par le greffe et développées lors de l'audience de plaidoirie du 13 mars 2015.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

1° ) Sur la requalification du contrat de travail :

En application des articles L. 1242-12, L. 1242-13 et L. 1245-1 du code du travail, le contrat de travail à durée déterminée est établi par écrit et comporte la définition précise de son motif. À défaut, il est réputé conclu pour une durée indéterminée.

En l'espèce, il résulte du tableau récapitulatif de l'évolution du chiffre d'affaires et des heures travaillées par salarié produit par l'Association SDAT que celle-ci a effectivement connu un réel accroissement temporaire d'activité en juillet et en août 2012. En effet, le chiffre d'affaires, compris entre 4 400 et 8 400 € entre janvier et juin 2012 est passé en juillet 2012 à près de 9 700 € et en août 2012 à plus de 14'800 €, chiffres confirmés par les extraits du grand livre comptable analytique par compte.

Il convient ainsi de juger que l'Association SDAT a recouru à juste titre à un contrat à durée déterminée pour embaucher M. [X] [F] [S] entre le 25 juin et le 14 août 2012.

2° ) Sur la régularité de la rupture contractuelle :

M. [X] [F] [S] prétend que l'employeur a méconnu les dispositions protectrices des articles L. 2411-1-17° et L. 2411-22 du code du travail en n'ayant pas saisi préalablement à la rupture de son contrat de travail l'inspection du travail alors qu'il est conseiller prud'homal depuis 2003.

Or, la protection assurée au salarié par les articles précités - ainsi que par les articles L. 2412-1-13° et L. 2412-13 pour le salarié sous contrat à durée déterminée - découle d'un mandat extérieur à l'entreprise dont l'employeur n'a pas nécessairement connaissance.

Le Conseil constitutionnel, par décision du 14 mai 2012, a en conséquence dit que ces dispositions ne sauraient, sans porter une atteinte disproportionnée à la liberté d'entreprendre et à la liberté contractuelle, permettre au salarié de se prévaloir d'une telle protection dès lors qu'il est établi qu'il n'en a pas informé son employeur au plus tard, s'il s'agit d'une rupture ne nécessitant pas un entretien préalable, avant la notification de l'acte de rupture. Il appartient au salarié de rapporter la preuve que l'employeur avait connaissance de son mandat prud'homal.

En l'espèce, M. [X] [F] [S] produit les demandes de remboursement des salaires maintenus pour l'exercice des fonctions prud'homales en application de l'article D. 1423-59 du code du travail adressées à l'employeur les 5 juin, 12 juillet et 2 août 2012, certifiées par le greffier en chef du conseil de prud'hommes de Dijon, et comportant tant une signature que le tampon de l'Association SDAT.

Cette dernière ne peut ainsi prétendre qu'elle ignorait l'existence du mandat prud'homal exercé par M. [X] [F] [S], un éventuel dysfonctionnement interne de l'employeur n'étant en effet pas opposable au salarié.

3° ) Sur les conséquences financières :

À défaut de saisine de l'inspection du travail avant le terme prévu du contrat de travail à durée déterminée, la Cour de cassation considère que le contrat n'est pas rompu à l'arrivée du terme. Le contrat ne peut donc se poursuivre que sous la forme d'un contrat à durée indéterminée.

Aux termes d'une jurisprudence constante de la Cour de Cassation, le salarié protégé qui ne demande pas sa réintégration a droit'à titre de sanction de la méconnaissance par l'employeur du statut protecteur :

- au versement de la rémunération qu'il aurait perçue depuis son éviction jusqu'à l'expiration de la période de protection s'il présente sa demande d'indemnisation avant cette date, soit en l'espèce du 14 août 2012 au 30 juin 2016, étant rappelé que cette indemnité est due indépendamment de la réparation d'un éventuel préjudice et qu'elle est forfaitaire,

- aux indemnités de rupture et à une indemnité réparant intégralement le préjudice résultant du caractère illicite du licenciement, dont le montant doit être au moins égal à celui prévu par l'article L. 1235-3 du Code du travail et ce, quelle que soit l'ancienneté du salarié.

De même, le contrat à durée déterminée s'étant poursuivi en raison d'une irrégularité commise par l'employeur, en l'espèce, l'absence de saisine de l'inspection du travail, le salarié a également droit à l'indemnité de requalification prévue à l'article L. 1245-2 du code du travail.

Ainsi, c'est à juste titre que M. [X] [F] [S] sollicite la condamnation de son employeur aux sommes suivantes :

- 9 500 € net au titre de la rupture abusive du contrat de travail,

- 40'760,10 € net à titre de dommages et intérêts pour licenciement survenu en violation de son statut protecteur de conseiller prud'homal,

- 1 558,67 € brut au titre de l'indemnité de requalification,

- 1 558,67 € brut au titre de l'indemnité de préavis,

- 155,86 € brut au titre des congés payés afférents.

Il convient donc d'infirmer le jugement déféré en ce sens.

4° ) Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive :

Dans la mesure où il a été fait droit aux prétentions de M. [X] [F] [S], l'Association SDAT doit être déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.

5° ) Sur les dépens et les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile :

L'Association SDAT, qui succombe à hauteur d'appel, sera condamnée aux entiers dépens de l'instance sans pouvoir prétendre elle-même à l'indemnisation de ses frais irrépétibles.

L'équité commande en revanche d'allouer à M. [X] [F] [S] une indemnité de 1 200 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, Chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire et mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré conformément à la loi,

DÉCLARE l'appel de M. [X] [F] [S] bien fondé ;

INFIRME le jugement rendu le 17 janvier 2014 par le conseil de prud'hommes de Dole en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

DÉCLARE nulle la rupture du contrat de travail de M. [X] [F] [S] ;

CONDAMNE l'Association SDAT à verser à M. [X] [F] [S] les sommes suivantes :

- neuf mille cinq cents euros (9 500 €) net au titre de la rupture abusive du contrat de travail,

- quarante mille sept cent soixante euros dix centimes (40'760,10 €) net à titre de dommages et intérêts pour licenciement survenu en violation de son statut protecteur de conseiller prud'homal,

- mille cinq cent cinquante huit euros soixante sept centimes (1 558,67 €) brut au titre de l'indemnité de requalification,

- mille cinq cent cinquante huit euros soixante sept centimes (1 558,67 €) brut au titre de l'indemnité de préavis,

- cent cinquante cinq euros quatre vingt six centimes (155,86 €) brut au titre des congés payés afférents ;

DÉBOUTE l'Association SDAT de sa demande d'indemnité pour procédure abusive et pour frais irrépétibles ;

CONDAMNE l'Association SDAT à verser à M. [X] [F] [S] la somme de mille deux cents euros (1 200 €) en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

LEDIT ARRÊT a été prononcé par mise à disposition au greffe le quinze mai deux mille quinze et signé par Mme Chantal PALPACUER, Présidente de Chambre, Magistrat ayant participé au délibéré et par Mlle Ghyslaine MAROLLES, Greffier.

LE GREFFIER, LA PRESIDENTE DE CHAMBRE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Besançon
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14/00306
Date de la décision : 15/05/2015

Références :

Cour d'appel de Besançon 03, arrêt n°14/00306 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-05-15;14.00306 ?
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