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14/04/2015 | FRANCE | N°13/01763

France | France, Cour d'appel de Besançon, Chambre sociale, 14 avril 2015, 13/01763


ARRET N°

PB/GM



COUR D'APPEL DE BESANCON

- 172 501 116 00013 -

ARRET DU 14 AVRIL 2015



CHAMBRE SOCIALE





contradictoire

Audience publique

du 17 février 2015

N° de rôle : 13/01763



S/appel d'une décision

du Conseil de prud'hommes de BESANCON

en sa formation paritaire

en date du 23 juillet 2013

Code affaire : 80A

Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution





[W] [Y]>
C/

S.A.S. ATEM SOLUTIONS

INSTITUTION NATIONALE PUBLIQUE PÔLE EMPLOI de FRANCHE-COMTE





PARTIES EN CAUSE :



Monsieur [W] [Y], demeurant [Adresse 1]



APPELANT



COMPARANT EN PERSONNE as...

ARRET N°

PB/GM

COUR D'APPEL DE BESANCON

- 172 501 116 00013 -

ARRET DU 14 AVRIL 2015

CHAMBRE SOCIALE

contradictoire

Audience publique

du 17 février 2015

N° de rôle : 13/01763

S/appel d'une décision

du Conseil de prud'hommes de BESANCON

en sa formation paritaire

en date du 23 juillet 2013

Code affaire : 80A

Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution

[W] [Y]

C/

S.A.S. ATEM SOLUTIONS

INSTITUTION NATIONALE PUBLIQUE PÔLE EMPLOI de FRANCHE-COMTE

PARTIES EN CAUSE :

Monsieur [W] [Y], demeurant [Adresse 1]

APPELANT

COMPARANT EN PERSONNE assisté par Maître Emmanuelle HUOT, Avocat au barreau de BESANCON

ET :

La S.A.S. ATEM SOLUTIONS, dont le siège social est sis [Adresse 3]

INTIMEE

REPRESENTEE par Maître Philippe ROUSSELIN-JABOULAY, Avocat au barreau de LYON

INSTITUTION NATIONALE PUBLIQUE PÔLE EMPLOI de FRANCHE- COMTE dont le siège social du service contentieux est sis [Adresse 2]

PARTIE INTERVENANTE

NON COMPARANTE - NON REPRESENTEE

COMPOSITION DE LA COUR :

lors des débats du 17 février 2015 :

PRESIDENT DE CHAMBRE : Madame Chantal PALPACUER

CONSEILLERS : M. Jérôme COTTERET et Monsieur Patrice BOURQUIN

GREFFIER : Mademoiselle Ghyslaine MAROLLES

Lors du délibéré :

PRESIDENT DE CHAMBRE : Madame Chantal PALPACUER

CONSEILLERS : M. Jérôme COTTERET et Monsieur Patrice BOURQUIN

Les parties ont été avisées de ce que l'arrêt sera rendu le 14 avril 2015 par mise à disposition au greffe.

**************

M. [W] [Y] a été embauché par contrat de travail à durée indéterminée le 19 décembre 2005 au sein de la société Résorserv, en qualité de technicien de maintenance.

L'activité de maintenance a été cédée à la société Eryma, qui a été placée en liquidation judiciaire en 2010 et son activité de prestation bancaire a été reprise par la Sas Atem Solutions.

En octobre 2011, la Sas Atem Solutions a signé un contrat de sous-traitance avec une société IES, assurant des prestations de maintenance informatique pour les établissements bancaires.

La Sas Atem Solutions a alors demandé aux techniciens de maintenance, en sus de leurs tâches habituelles, de réaliser des opérations de gestion, consistant en particulier à alimenter en billets certains distributeurs automatiques.

M. [W] [Y] ayant refusé d'effectuer ces opérations, il a été licencié pour faute grave le 25 mai 2012.

Il a saisi le conseil de prud'hommes de Besançon aux fins d'obtenir la condamnation de la Sas Atem Solutions à lui payer un indemnité pour licenciement abusif, une indemnité de préavis ainsi qu'une indemnité de licenciement.

Par jugement du 23 juillet 2013, il a été débouté de l'intégralité de ses demandes et condamné à payer à la Sas Atem Solutions la somme de 150€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration du 19 août 2013, M. [W] [Y] a interjeté appel de la décision.

Selon conclusions notifiées en dernier lieu le 1er décembre 2014, il demande de dire que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse et de condamner la Sas Atem Solutions à lui payer les sommes suivantes :

- 7.705,96 € brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 770,60 € au titre de l'indemnité de congés payés afférents,

- 3.852,98 € au titre de l'indemnité de licenciement,

-46.235,00 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause

réelle et sérieuse,

- 2 500,00 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Selon conclusions visées le 9 février 2015, la Sas Atem Solutions conclut au débouté de la demande ainsi qu'à la condamnation de M.[W] [Y] à lui payer la somme de 3000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Régulièrement convoquée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception signé le 20 septembre 2014, l'institution nationale Pôle Emploi n'a pas comparu.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, la Cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens des parties à leurs conclusions visées par le greffe et développées lors de l'audience de plaidoirie du 17 février 2015.

MOTIFS DE LA DECISION

1° Sur le licenciement

M. [W] [Y] a été licencié pour faute grave pour avoir refusé d'effectuer des prestations de gestion, dont le salarié soutient qu'elles constituaient une modification de son contrat de travail, qui ne pouvait lui être imposée par l'employeur.

Il y a lieu de rappeler que dans le cadre de son pouvoir de direction, l'employeur peut changer les conditions de travail d'un salarié et notamment de lui donner des tâches différentes de celles qu'il exerçait antérieurement, dès lors que ces tâches correspondent à sa qualification. Un simple changement de tâches dès lors que ne sont pas modifiés la qualification, la rémunération et le niveau hiérarchique du salarié ne constitue pas une modification du contrat de travail.

En revanche, l'employeur ne peut, sans l'accord du salarié, procéder à une modification du contrat de travail et à défaut d'un tel accord, la modification du contrat constitue un manquement justifiant que la rupture soit prononcée aux torts de l'employeur.

En l'espèce, M.[W] [Y] a été recruté en qualité de technicien de maintenance.

La Sas Atem Solutions soutient en premier lieu que la fiche de fonctions relative aux techniciens est claire sur la possibilité pour l'employeur de solliciter de leur part la réalisation occasionnelle de tâches de gestion.

Elle produit une fiche de poste faisant état de ce que le technicien 'peut se voir confier ponctuellement des activités résultant de la famille gestion'.

M.[W] [Y] fait valoir que cette fiche ne lui a jamais été communiquée, qu'il ne l'a pas acceptée au moment de la conclusion de son contrat de travail et qu'elle n'est pas reprise par la convention collective de la métallurgie du Rhône à laquelle il est soumis.

Il est exact que la Sas Atem Solutions ne précise pas l'origine de cette fiche de poste, qui est fournie sans aucune référence, de sorte qu'il ne peut être considéré qu'elle est opposable au salarié.

Au surplus, il résulte des 'tableaux de suivi des indicateurs de la région par centre' fournis par l'employeur lui même que les interventions de gestion ne revêtent plus un caractère ponctuel, mais constituent une activité accessoire des techniciens.

Ainsi pour le mois d'avril2013 chacun des trois salariés présents sur le site de [Localité 1] effectue en moyenne chaque jour 2,47 , 2,86 et 2,51 interventions techniques pour 0.60, 0,87 et 0,69 interventions de gestion. Ces dernières représentent donc plus de 20% des interventions et l'employeur ne peut soutenir que les opérations de gestion ne sont que ponctuelles.

L'employeur fait par ailleurs valoir que les conditions dans lesquelles sont réellement exercées les opérations de gestion et de maintenance permettent de constater qu'elles relèvent du même secteur d'activité , qu'elles sont réalisées selon les mêmes procédés et que les salariés sont tenus au respect des mêmes règles de sécurité.

Il est exact qu'il s'agit dans les deux cas d'intervenir sur les guichets automatiques de banque dans le but d'assurer leur bon fonctionnement.

M. [W] [Y] fait toutefois valoir qu'elles ne sont pas soumises aux même règles de sécurité puisque le technicien ne manipule pas les billets de banque et travaille avec des vignettes afin d'effectuer les tests, le gestionnaire de la banque ayant préalablement enlevé les billets.

La Sas Atem soutient que cette procédure est utilisée uniquement dans les cas où la société n'a pas la responsabilité de la gestion comptable de l'automate, pour déterminer les responsabilités en cas de disparition de billets, ce que confirme la note d'information produite faisant apparaître qu'elle s'applique aux 'interventions niveau 2 sur les sites où Atem Solutions n 'a pas la responsabilité de la gestion comptable de l'automate'.

Il n'en reste pas moins qu'il n'est pas contesté que l'activité de technicien de maintenance ne conduit pas à la perception d'une prime de risque alors qu'elle existe pour le personnel chargé de l'alimentation des distributeurs de billet.

La perception de cette prime implique nécessairement que cette dernière fonction présente un risque plus élevé, d'autant plus important que l'examen des interventions réalisées a permis d'établir qu'elle n'était pas réalisée ponctuellement mais à titre de tâche accessoire.

L'attribution d'une nouvelle tâche comportant un risque accru, même si la qualification professionnelle à mettre en oeuvre était voisine, constituait bien une modification du contrat de travail, à laquelle l'employeur ne pouvait procéder sans l'accord du salarié.

Il en résulte que la rupture du contrat de travail est imputable à l'employeur et le licenciement est en conséquence sans cause réelle et sérieuse, le jugement devant être réformé.

2° Sur les demandes formées par M.[W] [Y]

M. [W] [Y] calcule le montant des indemnité qu'il sollicite sur la base d'un document portant le sigle de la Sas Atem Solutions intitulé 'règles d'organisation du travail applicable'.

La Sas Atem Solutions produit quant à elle un accord d'entreprise, signé le 10 janvier 2012 précisant expressément que 'le statut conventionnel d'Atem Solutions sera constitué de la convention nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 2012, de l'accord national sur les problèmes généraux de l'emploi du 12 juin 1987 et enfin de la convention collective de la métallurgie du Rhône'.

Par ailleurs cet accord ne reprend pas les règles figurant sur le document fourni par M. [W] [Y] dont l'origine n'est donc pas déterminée.

Il conviendra en conséquence d'appliquer les dispositions de la convention collective de la métallurgie du Rhône.

a) Sur l'indemnité de préavis

En application de l'article 48 de cette convention le délai de préavis est d'une durée de deux mois pour les salariés occupant un emploi classé de niveau IV.

Le montant de l'indemnité s'élève donc à 1.924,82€ x 2 soit 3.969,64€, outre 396,96€ au titre de l'indemnité de congés payés afférente.

b) Sur l'indemnité de licenciement

L'ancienneté de M. [W] [Y] étant comprise entre six et sept ans, il a droit à une indemnité de licenciement correspondant à 1,4 mois de salaire en application de l'article 47 de la convention collective, plus favorable que l'application des dispositions légales, soit 1.924,82€ x 1,4 = 2.694,74€.

c) Sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

En application de l'article L 1235-3 du code du travail et compte-tenu de l'ancienneté du salarié ainsi que des circonstances de la rupture, il lui sera alloué la somme de 15.000€.

3° Sur le remboursement des indemnités de chômage

Aux termes de l'article L. 1235-4 du code du travail, dans les cas prévus à l'article L. 1235-3, le juge ordonne le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage par salarié intéressé.

Ce remboursement est ordonné d'office lorsque les organismes intéressés ne sont pas intervenus à l'instance ou n'ont pas fait connaître le montant des indemnités versées, ce qui est le cas en l'espèce.

Les éléments produits par M. [W] [Y] sur la perception d'allocations de ce type n'étant que partiels, il y a lieu en l'espèce d'ordonner le cas échéant ce remboursement, dans la limite légale prévue.

La Sas Atem Solutions sera condamnée à payer à M.[W] [Y] la somme de 2500€ au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et à hauteur d'appel. Cette condamnation emporte rejet de la demande de l'intimée formée au même titre.

P A R C E S M O T I F S

La Cour, Chambre sociale, statuant par arrêt réputé contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré conformément à la loi,

INFIRME le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de Besançon en date du 23 juillet 2013 ;

Statuant à nouveau,

DIT que le licenciement de M. [W] [Y] est sans cause réelle et sérieuse ;

CONDAMNE la Sas Atem Solutions à payer à M.[W] [Y] les sommes suivantes :

*3.969,64 € (trois mille neuf cent soixante neuf euros et soixante quatre centimes) brut à titre d'indemnité de préavis,

* 396,96 € (trois cent quatre vingt seize euros et quatre vingt seize centimes) au titre de l'indemnité de congés payés afférente,

* 2.694,74 € (deux mille six cent quatre vingt quatorze euros et soixante quatorze centimes) au titre de l'indemnité de licenciement,

* 15.000 € (quinze mille euros) au titre de l'indemnité pour licenciement

sans cause réelle et sérieuse ;

Y ajoutant,

DIT que la Sas Atem Solutions devra le cas échéant rembourser aux organismes intéressés les indemnités de chômage versées au salarié dans la limite de six mois à compter de la rupture sur le fondement des dispositions de l' article L. 1235-4 du code du travail ;

CONDAMNE la Sas Atem Solutions à payer à M. [W] [Y] la somme de 2500 € (deux mille cinq cents euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

DEBOUTE la Sas Atem Solutions de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la Sas Atem Solutions aux dépens de première instance et d'appel.

Ledit arrêt a été prononcé par mise à disposition au greffe le quatorze avril deux mille quinze et signé par Madame Chantal PALPACUER, Présidente de chambre et Mademoiselle Ghyslaine MAROLLES, Greffier.

LE GREFFIER,LA PRESIDENTE DE CHAMBRE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Besançon
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13/01763
Date de la décision : 14/04/2015

Références :

Cour d'appel de Besançon 03, arrêt n°13/01763 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-04-14;13.01763 ?
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