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26/03/2013 | FRANCE | N°12/00071

France | France, Cour d'appel de Besançon, Chambre sociale, 26 mars 2013, 12/00071


ARRET N°

HB/IH



COUR D'APPEL DE BESANCON

- 172 501 116 00013 -

ARRET DU 26 MARS 2013



CHAMBRE SOCIALE



Contradictoire

Audience publique

du 27 novembre 2012

N° de rôle : 12/00071



S/appel d'une décision

du Conseil de prud'hommes de DOLE

en date du 19 décembre 2011

Code affaire : 80A

Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution





S.A.S. TECHNI SERVICE INDUSTRIE (T.S.I.)

C/ >
[G] [V]

INSTITUTION NATIONALE PUBLIQUE PÔLE EMPLOI de FRANCHE-COMTE





PARTIES EN CAUSE :



S.A.S. TECHNI SERVICE INDUSTRIE (T.S.I.), ayant son siège social [Adresse 3] - comparante en ...

ARRET N°

HB/IH

COUR D'APPEL DE BESANCON

- 172 501 116 00013 -

ARRET DU 26 MARS 2013

CHAMBRE SOCIALE

Contradictoire

Audience publique

du 27 novembre 2012

N° de rôle : 12/00071

S/appel d'une décision

du Conseil de prud'hommes de DOLE

en date du 19 décembre 2011

Code affaire : 80A

Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution

S.A.S. TECHNI SERVICE INDUSTRIE (T.S.I.)

C/

[G] [V]

INSTITUTION NATIONALE PUBLIQUE PÔLE EMPLOI de FRANCHE-COMTE

PARTIES EN CAUSE :

S.A.S. TECHNI SERVICE INDUSTRIE (T.S.I.), ayant son siège social [Adresse 3] - comparante en la personne de Monsieur [Y] [I], président directeur général de la société

APPELANTE

REPRESENTEE par Me Brigitte DEMONT-HOPGOOD, avocat au barreau de CHALON-SUR-SAONE

ET :

Monsieur [G] [V], demeurant [Adresse 2]

INTIME

COMPARANT EN PERSONNE, assisté par Me Pierre MATHIEU substitué par Me Jean-Charles MEUNIER, avocats au barreau de CHALON-SUR-SAONE

INSTITUTION NATIONALE PUBLIQUE PÔLE EMPLOI de FRANCHE- COMTE, dont le siège social du service contentieux est sis - [Adresse 1]

PARTIE INTERVENANTE

NON COMPARANTE - NON REPRESENTEE

COMPOSITION DE LA COUR :

lors des débats du 27 Novembre 2012 :

PRESIDENT DE CHAMBRE : Monsieur Jean DEGLISE

CONSEILLERS : Madame Hélène BOUCON et Madame Véronique LAMBOLEY-CUNEY

GREFFIER : Mademoiselle Ghyslaine MAROLLES

Lors du délibéré :

PRESIDENT DE CHAMBRE : Monsieur Jean DEGLISE

CONSEILLERS : Madame Hélène BOUCON et Madame Véronique LAMBOLEY-CUNEY

Les parties ont été avisées de ce que l'arrêt serait rendu le 22 janvier 2013 et prorogé au 26 mars 2013 par mise à disposition au greffe.

**************

Monsieur [G] [V] a été embauché le 4 décembre 2006 par la SARL Maes en qualité de technicien contrôle.

L'activité de ladite société ayant été reprise par la société Techni Service Industrie (TSI) le 1er décembre 2008, son contrat de travail a été transféré à celle-ci.

Un avenant a été régularisé à cette date, attribuant à Monsieur [G] [V] la qualification de chef d'équipe, niveau IV, échelon I, coefficient 255 de la convention collective de la métallurgie de Saône et Loire et un salaire brut mensuel de 2 400,12 € pour 169 heures de travail.

A la suite d'un arrêt maladie prolongé du 18 janvier 2010 au 6 février 2011 pour tendinopathie cervico-brachiale, il a été déclaré inapte à son poste de meuleur chef d'équipe et à tout poste comportant le port de charges lourdes et des gestes répétitifs, après deux examens médicaux en date des 7 et 21 février 2011 auprès de la médecine du travail.

Le 18 mars 2011 il a été licencié pour inaptitude d'origine non professionnelle et impossibilité de reclassement.

Considérant que l'employeur n'avait pas satisfait à son obligation de reclassement, il a saisi le conseil de prud'hommes de Châlon sur Saône aux fins d'obtenir paiement de dommages et intérêts et d'une indemnité compensatrice de préavis.

Celui-ci a renvoyé l'examen de ses demandes devant le conseil de prud'hommes de Dole, en application des dispositions de l'article 47 du code de procédure civile.

Par jugement en date du 19 décembre 2011, auquel il est référé pour un plus ample exposé des faits et de la procédure ainsi que pour les motifs, ledit conseil a :

- dit que le licenciement de Monsieur [G] [V] était sans cause réelle et sérieuse,

- condamné la société TSI à payer à celui-ci les sommes de :

* 19 200 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 4 800 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

* 480 € à titre de congés payés afférents,

* 1 000 €au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

- condamné la société TSI aux dépens.

La SAS TSI a régulièrement interjeté appel de ce jugement le 10 janvier 2012.

Elle demande à la cour d'infirmer celui-ci, de dire le licenciement de Monsieur [G] [V] fondé sur une cause réelle et sérieuse, de débouter celui-ci de l'ensemble de ses prétentions et de le condamner à lui verser une somme de 1 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Elle fait valoir à l'appui de son recours :

- qu'à la suite de l'avis d'inaptitude, elle s'est mise en relation avec le médecin du travail qui lui a répondu le 1er mars 2011 qu'aucun des postes de l'entreprise y compris avec aménagement ne pouvait convenir à Monsieur [G] [V] du fait de son état de santé ; que l'avis du médecin du travail n'a pas été contesté et s'impose aux parties ;

- que Monsieur [G] [V] n'a émis aucune suggestion de poste ni d'aménagement compatible avec ses restrictions d'aptitude ;

- que le reclassement ne doit être recherché que parmi les emplois disponibles et que l'employeur ne peut imposer à un salarié une modification de son contrat de travail à l'effet de libérer un poste de reclassement.

Elle ajoute :

- que les premiers juges ont commis une erreur sur les fonctions exercées par Monsieur [G] [V] ; que celui-ci exerçait des fonctions de technicien contrôle au sein de la société Maes dans le cadre de son activité CNP, laquelle n'a pas été reprise par elle en 2008 ; que seule a été reprise l'activité métallurgique de parachèvement, au sein de laquelle Monsieur [G] [V] a été affecté à un poste de chef d'équipe, qui implique une participation aux opérations de production sur les sites clients, auxquelles il a été déclaré inapte ;

- qu'à la date du licenciement, tous les postes administratifs étaient occupés, de même que ceux de technicien qualité et technicien méthode ; qu'un reclassement sur l'un de ces postes exigeait en tout état de cause une formation initiale de base et non pas une simple adaptation ;

- que les recrutements ultérieurs ne concernaient que des postes de meuleurs, monteurs, chaudronniers, opérateurs de production.

Elle estime en conséquence avoir satisfait à ses obligations.

Monsieur [G] [V] a conclu à la confirmation du jugement, sauf en ce qui concerne l'indemnité de procédure qu'il demande à la cour de fixer à la somme de 4 600 €.

Il soutient pour sa part :

- que l'employeur ne peut se retrancher derrière les courriers du médecin du travail des 14 février et des 1er mars 2011, alors que celui-ci ne s'est pas déplacé et qu'il ignorait l'existence des postes de responsable d'atelier et de chantier compatibles avec son état de santé et ses compétences professionnelles ;

- que s'agissant d'une entreprise occupant une centaine de salariés, elle ne peut soutenir de bonne foi qu'aucun poste n'était susceptible d'aménagement, en sorte d'exclure le port de charges lourdes et les gestes répétitifs ;

- qu'à tout le moins le poste de technicien, qui était le sien, devait lui être proposé et soumis à l'appréciation du médecin du travail ;

- que l'employeur ne justifie pas avoir recherché de bonne foi et de manière effective son reclassement.

MOTIFS DE LA DECISION

Il résulte des dispositions de l'article L 1223.2 du code du travail et d'une jurisprudence constante que l'obligation de reclassement qui pèse sur l'employeur à l'égard du salarié déclaré physiquement inapte à son poste est une obligation de moyens et non une obligation de résultat.

Elle ne s'impose à l'employeur que dans la mesure où il existe dans l'entreprise un poste disponible compatible avec les restrictions d'aptitude physique posées par le médecin du travail, ou tout au moins susceptible d'un aménagement en ce sens, mais également compatible avec le niveau de qualification du salarié, l'employeur n'ayant pas l'obligation d'assurer à celui-ci la formation initiale de base requise pour le poste mais seulement une formation d'adaptation.

En l'espèce Monsieur [G] [V] occupait dans l'entreprise, en vertu de l'avenant régularisé le 1er décembre 2008 un poste de chef d'équipe au service maintenance et/ou parachèvement qui l'amenait à participer avec son équipe aux opérations de production sur les sites clients et par voie de conséquence aux opérations de manutention de charges lourdes (pièces hydrauliques - roues - turbines) et de meulage incompatibles avec la pathologie dont il est atteint.

Le fait qu'il ait exercé antérieurement des fonctions de technicien contrôle au sein de la société Maes, dans le cadre d'une activité de contrôle non destructif (CND) qui n'a pas été poursuivie et reprise par la société Techni-service est sans incidence dans le débat, dès lors qu'il n'est nullement contesté qu'il n'existait aucun poste de technicien disponible dans l'entreprise au moment de la déclaration d'inaptitude le concernant en date du 21 février 2011.

Les premiers juges ne pouvaient faire grief à l'employeur de n'avoir pas permis au salarié, dans l'attente d'un poste disponible, d'acquérir la formation nécessaire à son reclassement sur l'un desdits postes, alors qu'en l'état de la législation et de la jurisprudence, l'employeur n'a pas l'obligation de dispenser au salarié inapte à son poste une formation destinée à lui permettre d'acquérir une nouvelle qualification dans la perspective d'occuper un poste dont la disponibilité future est aléatoire, pas plus qu'il n'a l'obligation de créer un poste en vue du reclassement du salarié inapte si ce poste n'a pas d'utilité pour l'entreprise.

A l'examen des pièces du dossier, il apparaît que la société Techni-service à réception du 1er avis d'inaptitude en date du 7 février 2011, prohibant tout port de charges et gestes répétitifs, s'est mise immédiatement en relation avec le médecin du travail le 9 février 2011 afin de l'inviter à étudier sur site les postes susceptibles d'être proposés au reclassement et à nouveau le 22 février 2011, après l'avis d'inaptitude définitif du 21 février 2011, déclarant Monsieur [G] [V] 'inapte à son poste de travail de meuleur, chef d'équipe et à tout poste comportant le port de charges lourdes, geste répétitifs et tous les postes vus en entreprise (maintenance, chauffeur VL)' lors de sa visite des ateliers le 15 février 2010.

Dans ce dernier courrier l'employeur sollicitait des préconisations du médecin du travail concernant un éventuel aménagement de poste, il invitait également Monsieur [G] [V] à lui faire part de ses réflexions à ce sujet.

Le médecin du travail a répondu le 1er mars 2011 :

'Monsieur [G] [V] ne peut pas occuper les postes dont vous disposez en entreprise y compris après aménagement cela en raison de sa santé'.

Monsieur [G] [V] a alors suggéré à l'employeur le 2 mars 2011 de le reclasser à un poste de conduite, ainsi qu'il est indiqué dans la lettre de licenciement.

L'employeur a écarté cette solution, ne pouvant prendre le risque d'outre-passer les restrictions d'aptitude posées par le médecin du travail, lequel avait étendu son avis d'inaptitude au poste de chauffeur VL.

L'employeur ajoute qu'en tout état de cause, aucun poste de conducteur n'était disponible ni susceptible d'être créé.

Monsieur [G] [V] soutient encore que son niveau de qualification correspondait à un poste d'encadrement, qu'il occupait au sein de la société Maes la fonction de responsable d'atelier, responsable qualité et production et qu'il était possible de lui proposer un tel poste, qui ne comporte pas habituellement l'exécution de tâches manuelles, physiquement contraignantes.

Or il n'allègue pas qu'un tel poste était disponible et le médecin du travail n'a nullement évoqué cette possibilité.

De plus la société fait valoir dans la lettre de licenciement qu'un poste de responsable d'atelier implique une participation aux tâches de maintenance et meulage qui lui sont interdites et ne peut se limiter à une activité purement intellectuelle d'encadrement.

De fait la liste des emplois dans l'entreprise communiquée par l'employeur comporte très peu d'emplois exempt de contraintes physiques, 3 de type administratif ou commercial (assistante de direction - deux chargés d'affaires) 2 emplois de techniciens (qualité - méthodes), un seul emploi de responsable d'atelier, 2 responsables de chantier et un conducteur de travaux, le reste étant constitué de chefs d'équipe, chaudronniers, charpentiers, monteurs, meuleurs, soudeurs, tuyauteurs, mécaniciens, électromécanicien, travaillant pour la plupart en déplacement sur les sites clients.

Il apparaît donc bien en définitive, au regard des restrictions d'aptitude physiques du salarié, de ses qualifications de base (monteur - ajusteur - soudeur - meuleur), de l'activité spécifique de l'entreprise impliquant une majorité de postes de travail à fortes contraintes physiques (port de charges - vibrations - postures de travail) et de l'absence de poste disponible ou susceptible d'un aménagement adéquat, que l'impossibilité de reclassement est établie.

Il convient en conséquence d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a considéré que l'employeur n'avait pas effectué une recherche sérieuse et loyale de reclassement et fait droit aux demandes du salarié en paiement d'une indemnité compensatrice de préavis et de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Il y a lieu de rejeter les demandes de Monsieur [G] [V] et de le condamner aux dépens.

L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de la société appelante.

P A R C E S M O T I F S

La cour, chambre sociale, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Dit la société Techni Service Industrie recevable et fondée en son appel ;

Infirme dans toutes ses dispositions le jugement rendu le 19 décembre 2011 par le conseil de prud'hommes de Dole entre les parties ;

Statuant à nouveau,

Dit que le licenciement de Monsieur [G] [V] est fondé sur une cause réelle et sérieuse ;

Dit non fondées et rejette ses demandes en paiement d'indemnité de préavis et de dommages et intérêts ;

Le condamne aux dépens ;

Dit n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Ledit arrêt a été prononcé par mise à disposition au greffe le vingt six mars deux mille treize et signé par Monsieur Jean DEGLISE, président de chambre et Mademoiselle Ghyslaine MAROLLES, greffier.

LE GREFFIER,LE PRESIDENT DE CHAMBRE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Besançon
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12/00071
Date de la décision : 26/03/2013

Références :

Cour d'appel de Besançon 03, arrêt n°12/00071 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-03-26;12.00071 ?
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