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16/09/2011 | FRANCE | N°10/03046

France | France, Cour d'appel de Besançon, Chambre sociale, 16 septembre 2011, 10/03046


ARRET N°

LM/IH



COUR D'APPEL DE BESANCON

- 172 501 116 00013 -

ARRET DU 16 SEPTEMBRE 2011



CHAMBRE SOCIALE





Contradictoire

Audience publique

du 10 Juin 2011

N° de rôle : 10/03046



S/appel d'une décision

du CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE DOLE

en date du 08 novembre 2010

Code affaire : 80A

Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution





Madame [V] [F], exerçan

t sous l'enseigne 'CREATIF COIFFURE'

C/

[O] [J]







PARTIES EN CAUSE :



Madame [V] [F], demeurant [Adresse 2] ' exerçant sous l'enseigne 'CREATIF COIFFURE'



APPELANTE



REPRESE...

ARRET N°

LM/IH

COUR D'APPEL DE BESANCON

- 172 501 116 00013 -

ARRET DU 16 SEPTEMBRE 2011

CHAMBRE SOCIALE

Contradictoire

Audience publique

du 10 Juin 2011

N° de rôle : 10/03046

S/appel d'une décision

du CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE DOLE

en date du 08 novembre 2010

Code affaire : 80A

Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution

Madame [V] [F], exerçant sous l'enseigne 'CREATIF COIFFURE'

C/

[O] [J]

PARTIES EN CAUSE :

Madame [V] [F], demeurant [Adresse 2] ' exerçant sous l'enseigne 'CREATIF COIFFURE'

APPELANTE

REPRESENTEE par Me Patrick UZAN, avocat au barreau de LONS-LE-SAUNIER

ET :

Mademoiselle [O] [J], demeurant [Adresse 1]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2011/000514 du 18/02/2011 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BESANCON)

INTIMEE

REPRESENTEE par Me Maud VUILLEMIN, avocat au barreau de LONS-LE-SAUNIER

COMPOSITION DE LA COUR :

lors des débats 08 Octobre 2010 :

CONSEILLERS RAPPORTEURS : Monsieur Jean DEGLISE, Président de chambre, en présence de Monsieur Laurent MARCEL, Vice-président placé, délégué dans les fonctions de Conseiller par ordonnance de Monsieur le Premier Président, conformément aux dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, en l'absence d'opposition des parties

GREFFIER : Mademoiselle Ghyslaine MAROLLES

lors du délibéré :

Monsieur Jean DEGLISE, Président de chambre, et Monsieur Laurent MARCEL, Vice-président placé, délégué dans les fonctions de Conseiller par ordonnance de Monsieur le Premier Président, ont rendu compte conformément aux dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile à Madame Hélène BOUCON, Conseiller

Les parties ont été avisées de ce que l'arrêt sera rendu le 16 Septembre 2011 par mise à disposition au greffe.

**************

Mme [V] [F], exerçant sous l'enseigne "Créatif Coiffure" et Mlle [O] [J] ont conclu le 16 octobre 2009 un contrat d'apprentissage destiné à permettre à la salariée de passer à terme les épreuves d'un B.T.S. de coiffure.

Imputant la rupture du contrat d'apprentissage à son employeur, Mlle [O] [J] a saisi le conseil de prud'hommes de Dole aux fins d'obtenir le paiement de diverses sommes dues tant en exécution du contrat qu'en raison de sa rupture.

Par jugement du 8 novembre 2010, la juridiction prud'homale saisie a :

- prononcé la résiliation judiciaire du contrat d'apprentissage aux torts de l'employeur,

- condamné Mme [V] [F] à payer à la salariée les sommes de :

* 8 962,80 € brut correspondant aux 10 mois de salaire précédant la résiliation du contrat,

* 321,06 € brut constituant un rappel de salaire au titre du mois d'octobre 2009,

* 300,00 € en réparation du préjudice subi résultant de la rupture anticipée du contrat d'apprentissage,

- rejeté la demande faite au titre des heures supplémentaires,

- ordonné la remise par l'employeur des bulletins de salaire de janvier à octobre 2010, ainsi que des documents afférents à la rupture rectifiés.

Le 6 décembre 2010 Mme [V] [F] a régulièrement interjeté appel de la décision.

Dans ses écritures reprises oralement lors de l'audience Mme [V] [F] demande à la cour de céans d'infirmer le jugement déféré sauf en ce qu'il a débouté la salariée de sa demande en paiement d'heures supplémentaires, de débouter la salariée de l'ensemble de ses prétentions et de condamner l'intimée à lui verser la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

À l'appui de ses prétentions l'appelante fait valoir :

Que Mlle [O] [J] a pris l'initiative de la rupture du contrat d'apprentissage à la suite d'une démarche faite en ce sens par son père auprès de l'employeur le 30 décembre 2009 ; que le 5 janvier 2010 la salariée a demandé à la chambre des métiers des projets de rupture du contrat ; que les ayant reçus, Mlle [O] [J] les a soumis à son employeur, qui, après avoir apposé sa signature, avait invité l'apprentie à les adresser à la chambre des métiers ;

Que par la suite elle a adressé à la salariée les documents afférents à la rupture du contrat accompagné d'un chèque de 800 € ; que ledit effet bancaire a été encaissé par sa bénéficiaire le 28 janvier 2010 ; qu'à son grand étonnement elle a reçu le 19 mars 2010 de Mlle [O] [J] un courrier lui réclamant les documents de fin de contrat ; que dans un souci d'apaisement elle a de nouveau adressé les documents demandés par lettre recommandée ;que toutefois cette lettre n'a jamais été retirée par sa destinataire ;

Que la salariée n'a contesté que tardivement la rupture de son contrat ; que dans sa lettre du 19 mars 2010 elle ne conteste ni l'existence de la rupture de son contrat d'apprentissage ni le fait qu'elle soit intervenue d'un commun accord ; que si Mlle [O] [J] avait estimé que son contrat n'était pas rompu elle se serait présentée au salon de coiffure pour reprendre sa formation ;

Que l'ensemble des faits ci-dessus relatés démontre que la rupture du contrat d'apprentissage est intervenue d'un commun accord entre les parties ; que si les documents n'ont pas été adressés à la chambre des métiers, c'est uniquement en raison de la défaillance fautive de l'apprentie ;

Que s'agissant de la demande de dommages et intérêts il y a lieu de la considérer comme excessive dès lors que Mlle [O] [J] a retrouvé rapidement un emploi dans un autre salon de coiffure ; que par ailleurs les autres préjudices invoqués par la salariée ne sont pas en lien direct avec la rupture du contrat ;

Qu'en ce qui concerne la demande faite au titre des heures supplémentaires, il convient de relever le caractère laconique du décompte produit par la salariée ; que par ailleurs durant l'exécution du contrat il n'a jamais été demandé à Mlle [O] [J] d'effectuer des heures supplémentaires ; que le salaire du mois d'octobre 2009 a été intégralement réglé ; que les documents de fin de contrat ont déjà été adressés à la salariée.

Pour sa part, dans ses conclusions développées lors de l'audience des débats, Mlle [O] [J] sollicite la confirmation partielle du jugement entrepris sauf à modifier les sommes octroyées. Elle réitère également sa demande en paiement des heures supplémentaires. Elle réclame donc l'allocation des sommes de :

- 12'463,26 € à titre de dommages et intérêts toutes causes de préjudices confondues pour rupture abusive du contrat d'apprentissage,

- 321,06 € correspondant au solde du salaire du mois d'octobre 2009,

- 35,09 € brut pour les heures supplémentaires effectuées au cours du mois de novembre 2009,

- 260,80 € brut pour les heures supplémentaires effectuées au mois de décembre 2009,

- 1500,00 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Mlle [O] [J] demande enfin que son ex-employeur soit condamné à lui remettre le certificat de travail, les documents Assedic et le bulletin de salaire du mois de décembre 2009 rectifiés, et ce, sous astreinte de 50 € par jour de retard.

Au soutien de ses prétentions, Mlle [O] [J] expose :

Que peu de temps après le début d'exécution du contrat d'apprentissage, elle avait dû essuyer des critiques permanentes de Mme [V] [F] sur la qualité de son travail ; que la situation créée par ce comportement de l'employeur avait incité ses parents à intervenir ; que Mme [V] [F] ne voulait en réalité qu'une chose :la rupture du contrat d'apprentissage ;

Que pour l'exécution du contrat qui devait durer deux ans, elle avait dû prendre un certain nombre d'engagements ; qu'elle avait en particulier souscrit un contrat de bail ; qu'elle n'avait donc ni l'intérêt ni l'intention de rompre le contrat d'apprentissage ;

Qu'au cours du mois de janvier 2010 elle s'était rendue à plusieurs reprises au salon de coiffure ; qu'elle avait également téléphoné ; qu'il est donc totalement faux d'affirmer qu'à aucun moment elle n'a contesté les conditions de la rupture ;

Que la rupture du contrat d'apprentissage a généré pour elle divers préjudices dont elle réclame réparation : frais d'inscription et de scolarité, loyers, frais d'inscription du permis de conduire, préjudice moral.

MOT IVATION

Sur la rupture du contrat d'apprentissage

Attendu qu'aux termes de l'article L.6222-18 du code du travail, le contrat d'apprentissage peut être rompu par l'une ou l'autre des parties durant les deux premiers mois de l'apprentissage ; que passé ce délai, la rupture du contrat ne peut intervenir que sur accord écrit signé des deux parties ; qu'à défaut, la rupture ne peut être prononcée que par le conseil de prud'hommes en cas de faute grave ou de manquements répétés de l'une des parties à ses obligations ou en raison de l'inaptitude de l'apprenti à exercer le métier auquel il voulait se préparer.

Attendu qu'il est constant que Mlle [O] [J] a été embauchée le 16 octobre 2009 par Mme [V] [F] en qualité d'apprentie ; qu'il est d'autre part établi que le contrat d'apprentissage a été interrompu à compter du 31 décembre 2009 ; que dans la présente instance les parties s'opposent sur l'imputabilité de la rupture ; que la salariée invoque une rupture unilatérale du contrat à l'initiative de l'employeur ; que ce dernier fait état d'une rupture d'un commun accord ;

Attendu qu'il s'évince d'une attestation rédigée par une employée du salon de coiffure que peu de temps après son embauche par Mme [V] [F], Mlle [O] [J] a rencontré des problèmes personnels qui l'ont conduit à prendre un traitement antidépresseur ; qu'il en est résulté, selon l'auteur de l'attestation, une dégradation tant du comportement général de la salariée que de la qualité de son travail ; que ce dernier point est avéré par les déclarations écrites et circonstanciées d'une cliente du salon de coiffure ;

Que les difficultés auxquelles Mlle [O] [J] a dû faire face ne sauraient être imputées au comportement de son employeur; qu'en effet les allégations de la salariée, faisant état de brimades et de dénigrements dont elle aurait été victime de la part de par Mme [V] [F], sont en totale contradiction avec les témoignages tant d'une ancienne salariée du salon de coiffure qui décrit l'employeur comme une personne attentive à ses apprentis et à ses employés que d'une cliente qui certifie n'avoir jamais entendu ni critiques, ni remontrances à l'adresse de Mlle [O] [J] ; que s'agissant des attestations en sens contraire versées aux débats par l'intimée, elles ne peuvent être regardées qu'avec la plus grande circonspection dès lors qu'elles sont l'oeuvre de ses parents et d'un ami mécanicien dont la présence régulière au salon de coiffure n'est pas établie ;

Attendu qu'il résulte ensuite d'un courrier de la chambre des métiers du Jura en date du 22 avril 2011 que Mlle [O] [J] a été destinataire le 5 janvier 2010 de projets de rupture du contrat d'apprentissage après que sa mère en a fait la demande et ce à la suite d'un entretien qui s'est tenu le 30 décembre 2009 entre le père de Mlle [O] [J], à la demande de celui-ci, et l'employeur ; que s'il n'est pas contesté que seule Mme [V] [F] a signé lesdits projets qui lui avaient été remis par son apprentie, le principe d'une rupture d'un commun accord du contrat d'apprentissage se trouve cependant démontré non seulement par les démarches antérieures, mais également par les termes d'une correspondance adressée à l'employeur par Mlle [O] [J] le 19 mars 2010 ; qu'en effet celle-ci débute son courrier en ces termes " A l'expiration de mon contrat de travail au 31 décembre 2009, vous auriez dû me délivrer...." ; qu'il échet d'ajouter que dans sa lettre Mlle [O] [J] ne fait pas état d'une rupture unilatérale ou abusive de son contrat d'apprentissage et qu'elle ne menace son ancien employeur d'une instance prud'homale que pour obtenir dans les meilleurs délais la délivrance des documents afférents à la rupture ;

Attendu que les éléments de la cause permettent de conclure que les parties ont décidé de rompre d'un commun accord le contrat d'apprentissage, et ce, au 31 décembre 2009; que cette commune intention se trouve consignée dans deux écrits distincts mais aux termes concordants ;

Sur la demande faite au titre du salaire du mois d'octobre 2009

Attendu que le contrat d'apprentissage a débuté le 13 octobre 2009, d'une part, qu'il fixait le salaire mensuel de Mlle [O] [J] à une somme correspondant à 60 % du SMIC (896,28 €), d'autre part ; qu'il s'ensuit que la salariée devait percevoir au titre du mois considéré une rémunération de 620,51 € brut ;

Qu'il est avéré que Mme [O] [F] a établi une première fiche de paye, au titre du mois d'octobre 2009, comportant un salaire de base erroné; qu'il est établi par les pièces produites aux débats que par la suite elle a rectifié l'erreur commise ; qu'il existe cependant une contestation sur le versement effectif de la différence revenant à la salariée (222,31 €) ; qu'il convient dès lors de condamner l'employeur à verser à [O] [J] en deniers ou quittances ladite somme ;

Sur la demande faite au titre des heures supplémentaires

Attendu que Mlle [O] [J] soutient également ne pas avoir été payée de toutes les heures supplémentaires effectuées dans le salon de coiffure de Mme [F] ; qu'elle produit à l'appui de cette allégation un décompte rendant plausible cette prétention ; qu'en réponse l'employeur conteste le décompte et met en avant son imprécision ;

Attendu que pour combattre efficacement la demande de la salariée, Mme [V] [F] se devait de verser aux débats le planning des heures de travail réalisées par la salariée au cours des mois de novembre et décembre 2009 ; qui il échet en effet de considérer que la mention du paiement d'heures supplémentaires sur les fiches de paye des deux mois concernés est insuffisante à démontrer que la salariée a été intégralement remplie de ses droits ;

Qu'au vu des éléments apportés par chacune des parties, il y a lieu de faire droit à la demande de Mlle [O] [J] et de condamner Mme [V] [F] à lui verser la somme de 295, 89 € brut ;

Sur la demande de remise du bulletin de salaire de décembre 2009 ainsi que des documents afférents à la rupture rectifiés

Attendu qu'il convient d'ordonner à Mme [V] [F] de remettre à la salariée le bulletin de paie du mois de décembre 2009 ainsi que des documents afférents à la rupture rectifiés en conséquence de la présente décision; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette condamnation d'une astreinte ;

P A R C E S M O T I F S

La cour, chambre sociale, statuant en audience publique, par arrêt rendu contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 8 novembre 2010 par le conseil de prud'hommes de Dole ;

Dit que le contrat d'apprentissage conclu entre Mme [V] [F] et Mlle [O] [J] a été rompu d'un commun accord ;

Déboute en conséquence Mlle [O] [J] de l'ensemble de ses demandes d'indemnisation faites au titre de la résiliation du contrat d'apprentissage:

Condamne Mme [V] [F] à payer en deniers ou quittances à Mlle [O] [J] la somme de deux cent vingt deux euros et trente et un centimes (222,31 €) brut correspondant au solde restant dû du salaire du mois d'octobre de 2009 ;

Condamne également Mme [V] [F] à verser à Mlle [O] [J] la somme de deux cent quatre vingt quinze euros et quatre vingt neuf centimes (295,89 €) brut au titre des heures supplémentaires ;

Ordonne à Mme [V] [F] de remettre à Mlle [O] [J] les documents afférents à la rupture rectifiés, conséquence de la présente décision ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Dit que chacune des parties supportera définitivement la charge des dépens dont elle a fait l'avance.

Ledit arrêt a été prononcé par mise à disposition au greffe le seize septembre deux mille onze et signé par Monsieur Jean DEGLISE, président de chambre, et Mademoiselle Ghyslaine MAROLLES, greffier.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT DE CHAMBRE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Besançon
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10/03046
Date de la décision : 16/09/2011

Références :

Cour d'appel de Besançon 03, arrêt n°10/03046 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-09-16;10.03046 ?
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