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12/04/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000006949945

France | France, Cour d'appel de Besançon, Chambre civile 1, 12 avril 2006, JURITEXT000006949945


ARRÊT No BP/MD COUR D'APPEL DE BESANOEON - 172 501 116 00013 - ARRÊT DU 12 AVRIL 2006 PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE SECTION A Contradictoire Audience publique du 15 mars 2006 No de rôle : 04/02634 S/appel d'une décision du tribunal de grande instance de LONS-LE-SAUNIER en date du 26 octobre 2004 Code affaire : 29B Demande en révocation d'une libéralité ou en caducité d'un legs Christian X... C/ Alain X... PARTIES EN CAUSE :

Monsieur Christian X...

né le 22 mai 1952 à GRANDE-RIVIERE (39150)

demeurant Golf de Beaune - 21200 BEAUNE APPELANT Ayant la SCP LEROUX pour Av

oué et Me Jean-Michel GHINSBERG pour Avocat ET :

Monsieur Alain X...

né ...

ARRÊT No BP/MD COUR D'APPEL DE BESANOEON - 172 501 116 00013 - ARRÊT DU 12 AVRIL 2006 PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE SECTION A Contradictoire Audience publique du 15 mars 2006 No de rôle : 04/02634 S/appel d'une décision du tribunal de grande instance de LONS-LE-SAUNIER en date du 26 octobre 2004 Code affaire : 29B Demande en révocation d'une libéralité ou en caducité d'un legs Christian X... C/ Alain X... PARTIES EN CAUSE :

Monsieur Christian X...

né le 22 mai 1952 à GRANDE-RIVIERE (39150)

demeurant Golf de Beaune - 21200 BEAUNE APPELANT Ayant la SCP LEROUX pour Avoué et Me Jean-Michel GHINSBERG pour Avocat ET :

Monsieur Alain X...

né le 03 mai 1948 à GRANDE-RIVIERE (39150)

demeurant hameau de l'Abbaye - 39150 GRANDE-RIVIERE INTIMÉ Ayant Me Jean-Michel ECONOMOU pour Avoué et la SCP FAVOULET-BILLAUDEL pour Avocat

COMPOSITION DE LA COUR : lors des débats : PRÉSIDENT : Monsieur B. GAUTHIER, Conseiller, faisant fonction de Président de chambre. ASSESSEURS : Madame M. Y... et Monsieur B. POLLET, Conseillers. GREFFIER : Mademoiselle C. Z..., Greffier. lors du délibéré :

PRÉSIDENT : Monsieur B. GAUTHIER, Conseiller, faisant fonction de Président de chambre. ASSESSEURS : Madame M. Y... et Monsieur B. POLLET, Conseillers. L'affaire, plaidée à l'audience du 15 mars 2006,

a été mise en délibéré au 12 avril 2006. Les parties ont été avisées qu'à cette date, l'arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe. ************** FAITS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Les époux Marcel X... - Alberte BOUVET sont décédés :

- l'épouse : le 3 février 1992,

- le mari : le 27 mai 2002.

Ils ont laissé pour recueillir leurs successions leurs deux enfants, Christian et Alain X...

Aux termes d'un testament en date du 18 juin 1998, Marcel X... avait légué certains biens immobiliers à son fils Christian X... à charge pour celui-ci de verser à son frère Alain une somme de 300 000 F.

Les deux héritiers étant en désaccord notamment sur l'interprétation de ce testament, le tribunal de grande instance de LONS-LE-SAUNIER, par jugement en date du 26 octobre 2004, a :

- dit que les legs dont bénéficie Christian X... aux termes du testament du 18 juin 1998 ne sont pas faits par préciput et hors part, et qu'ils doivent être rapportés à la succession,

- ordonné une expertise à l'effet d'évaluer le Lac de l'Abbaye, dont une partie dépend de l'indivision successorale. *

Ayant régulièrement interjeté appel de ce jugement, Christian X... demande tout d'abord qu'il soit jugé que les legs lui profitant ont

été effectués à titre préciputaire et hors part. Il fait valoir sur ce point qu'il bénéficie de la présomption légale édictée par l'article 843, alinéa 2, du code civil et que l'intimé ne renverse pas cette présomption, faute de rapporter la preuve que le testateur ait voulu soumettre le legs à rapport. En effet, selon l'appelant, le souci du testateur de tempérer les effets du legs en prévoyant une compensation de 300 000 F en faveur de son autre fils ne suffit pas à démontrer son intention de respecter une stricte égalité entre ses deux héritiers, ce qui n'aurait été le cas que si la valeur des biens légués avait été de 600 000 F, alors que, aux dires mêmes de l'intimé, elle était supérieure.

Subsidiairement, l'appelant demande que le legs dont il a bénéficié ne soit déclaré rapportable que pour partie.

Affirmant en outre que son frère Alain a été avantagé par ses parents, notamment à l'occasion d'une donation-partage en date du 13 décembre 1989 en vertu de laquelle il a été gratifié d'un hôtel-restaurant, et que ces avantages sont susceptibles de constituer des donations indirectes soumises à rapport, Christian X... demande par ailleurs que la mission de l'expert soit étendue à l'estimation :

- de l'avantage tiré par Alain X..., pour l'exploitation dudit hôtel-restaurant, de la proximité du Lac de l'Abbaye,

- des redevances dues par Alain X... à ses parents, de 1981 à 1989, pour la location-gérance de l'hôtel précité,

- de la valeur de cet hôtel à la date de la donation-partage. *

Alain X... conclut à la confirmation du jugement déféré et à la condamnation de l'appelant à lui payer une somme de 1 500 ç, sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Concernant l'interprétation du testament, il fait valoir que l'intention de son père a toujours été de respecter l'égalité entre ses deux fils, comme ce fut le cas en particulier lors des donations-partages antérieures au testament. Il en déduit que le legs prévu dans le testament du 18 juin 1998 doit être déclaré rapportable.

S'agissant de la mission de l'expert, l'intimé s'oppose à l'extension sollicitée par l'appelant, aux motifs que celui-ci cherche à remettre en cause l'économie de la donation-partage de 1989, et qu'il n'apporte aucun début de preuve de donations indirectes. *

La clôture de l'instruction de l'affaire a été prononcée par ordonnance en date du 7 mars 2006. MOTIFS DE LA DÉCISION Sur l'interprétation du testament

Attendu qu'aux termes de l'article 843, alinéa 2, du code civil, les legs bénéficiant à un héritier sont réputés faits par préciput et hors part, à moins que le testateur n'ait exprimé la volonté contraire, auquel cas le légataire ne peut réclamer son legs qu'en moins prenant ;

Attendu qu'en l'espèce, le testament litigieux ne comporte aucune manifestation de volonté expresse du testateur quant au caractère préciputaire ou non des legs faits à son fils Christian ;

Attendu qu'il peut certes être observé que, lors des donations-partages effectuées en 1984 et 1989 en faveur de leurs enfants, le testateur et son épouse avaient gratifié leurs deux fils à égalité ;

Attendu que l'obligation faite par le testateur à Christian, bénéficiaire des legs, de payer à son frère, à titre de compensation, une somme de 300 000 F, traduit elle aussi la volonté du testateur de maintenir un certain équilibre entre ses héritiers;

Attendu toutefois que l'intimé se contredit lorsqu'il soutient, d'une part que l'intention du testateur était de préserver une stricte égalité entre ses héritiers, et d'autre part que la valeur des biens légués à son frère excédait largement 600 000 F; qu'en effet les dispositions testamentaires ne peuvent être considérées comme égalitaires qu'à la condition que la valeur des biens légués ait été de 600 000 F ;

Attendu par ailleurs que, si le testateur avait voulu respecter une stricte égalité entre ses deux fils, il lui aurait suffi de préciser que les legs faits à Christian seraient rapportables ; qu'il n'a pas procédé ainsi, mais s'est borné à prévoir une compensation de 300 000 F en faveur de son fils Alain ; que, ce faisant, il a voulu non seulement dédommager celui-ci, mais aussi éviter toute discussion ultérieure entre les héritiers sur la valeur des legs faits à Christian ;

Attendu qu'en fixant forfaitairement à 300 000 F le montant du dédommagement dû à Alain, le testateur a entendu limiter à cette

somme l'obligation de Christian, bénéficiaire des legs, envers son frère ; qu'il serait contraire à cette volonté de déclarer les legs rapportables, puisque, dans ce cas, Christian X... serait redevable envers son frère non pas de la somme de 300 000 F, mais d'une somme égale à la moitié de la valeur des legs ;

Attendu enfin que, pour le cas où subsisterait une incertitude sur l'intention du testateur, la présomption légale en faveur du caractère préciputaire des legs devrait recevoir application ;

Attendu qu'il s'ensuit que les legs doivent être considérés comme préciputaires ; que le jugement déféré sera donc réformé quant à l'interprétation du testament ; Sur l'étendue de la mission de l'expert

Attendu que, suivant donation-partage en date du 13 septembre 1989, les parents des parties ont donné à leur fils Alain, à charge pour celui-ci de verser une soulte à son frère Christian, l'hôtel-restaurant dit "de l'Abbaye", que le donataire exploitait auparavant dans le cadre d'une location-gérance consentie par ses parents; que Christian X..., partie à l'acte de donation-partage, a approuvé la valeur de l'hôtel-restaurant portée dans l'acte, et n'a émis aucune prétention, ni au titre de l'avantage procuré à cet hôtel par la proximité du lac restant appartenir aux donateurs, ni au titre d'une prétendue insuffisance des redevances payées par son frère durant la période de location-gérance ; que, par conséquent, en réclamant une expertise pour évaluer de prétendues donations indirectes dont son frère aurait profité, l'appelant cherche à remettre en cause l'économie de la donation-partage égalitaire qu'il avait acceptée ;

Attendu qu'au surplus, l'appelant ne produit aucun justificatif de la valeur de l'hôtel-restaurant en 1989, ni de la valeur locative du fonds exploité en location-gérance par son frère de 1981 à 1989 ; qu'une expertise ne saurait suppléer sa carence dans l'administration de la preuve d'une sous-évaluation de ces éléments ;

Attendu que le jugement déféré sera donc confirmé en ce qui concerne la mission de l'expert ; Sur les dépens et les frais non compris dans les dépens

Attendu que, dès lors que chaque partie succombe partiellement en ses prétentions, il convient de laisser à chacune d'elle la charge de ses propres dépens, ainsi que des frais non compris dans les dépens exposés en cause d'appel ; PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant contradictoirement, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

DÉCLARE l'appel de Christian X... recevable et partiellement fondé ; RÉFORME le jugement rendu, le 26 octobre 2004, par le tribunal de grande instance de LONS-LE-SAUNIER, en ses dispositions afférentes à l'interprétation du testament du 18 juin 1998 ;

Statuant à nouveau sur ce point ;

DIT que les legs en faveur de Christian X..., résultant du testament précité, ont été faits par préciput et hors part ;

CONFIRME le jugement déféré pour le surplus ;

Ajoutant audit jugement ;

REJETTE les demandes de chaque partie fondées sur l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

DIT que chacune des parties supportera la charge de ses dépens d'appel.

LEDIT ARRÊT a été signé par Monsieur B. GAUTHIER, Conseiller, faisant fonction de Président de Chambre, Magistrat ayant participé au délibéré, et Mademoiselle C. Z..., Greffier. LE GREFFIER,

LE PRÉSIDENT LE GREFFIER,

LE PRÉSIDENT DE CHAMBRE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Besançon
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006949945
Date de la décision : 12/04/2006
Type d'affaire : Civile

Analyses

TESTAMENT

Un testateur a légué à l'un de ses fils certains biens immobiliers à charge pour lui de verser à son frère une somme forfaitaire et n'a pas manifesté expressément la volonté de donner à ces legs un caractère préciputaire ou non, au sens de l'article 843 alinéa 2 du code civil ; l'obligation faite par le testateur au bénéficiaire des legs , de payer à son frère à titre de compensation une somme forfaitaire, traduit la volonté du testateur de maintenir un certain équilibre entre ses héritiers, néanmoins le testateur ayant fixé forfaitairement le montant du dédommagement, il a entendu limiter à cette somme l'obligation du bénéficiaire des legs ; ainsi, il serait contraire à sa volonté de déclarer les legs rapportables, puisque dans ce cas, le bénéficiaire des legs serait redevables d'une somme égale à la moitié de la valeur des legs.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.besancon;arret;2006-04-12;juritext000006949945 ?
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