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24/01/2006 | FRANCE | N°65

France | France, Cour d'appel de Besançon, Chambre sociale, 24 janvier 2006, 65


ARRET No CTP/CJ COUR D'APPEL DE BESANCON - 172 501 116 00013 - ARRET DU 24 JANVIER 2006 CHAMBRE SOCIALE Contradictoire Audience publique du 22 novembre 2005 No de rôle : 04/02556 S/appel d'une décision du C.P.H. de Saint-Claude en date du 22 septembre 2004 Code affaire :

80C Demande d'indemnités ou de salaires Thonglor X... C/ S.A. MANZONI BOUCHOT FONDERIE PARTIES EN CAUSE :

Monsieur Thonglor X..., ... APPELANT

REPRESENTE par Me Marie-Lucile ANGEL, Avocat au barreau de DOLE ET :

S.A. MANZONI BOUCHOT FONDERIE, ayant son siège social, zone industrielle le plan d

'acier, à 39200 SAINT-CLAUDE INTIMEE

REPRESENTEE par Me Frédéric RENAUD, ...

ARRET No CTP/CJ COUR D'APPEL DE BESANCON - 172 501 116 00013 - ARRET DU 24 JANVIER 2006 CHAMBRE SOCIALE Contradictoire Audience publique du 22 novembre 2005 No de rôle : 04/02556 S/appel d'une décision du C.P.H. de Saint-Claude en date du 22 septembre 2004 Code affaire :

80C Demande d'indemnités ou de salaires Thonglor X... C/ S.A. MANZONI BOUCHOT FONDERIE PARTIES EN CAUSE :

Monsieur Thonglor X..., ... APPELANT

REPRESENTE par Me Marie-Lucile ANGEL, Avocat au barreau de DOLE ET :

S.A. MANZONI BOUCHOT FONDERIE, ayant son siège social, zone industrielle le plan d'acier, à 39200 SAINT-CLAUDE INTIMEE

REPRESENTEE par Me Frédéric RENAUD, Avocat au barreau de LYON

COMPOSITION DE LA COUR : lors des débats : PRESIDENT DE CHAMBRE : Mme I. REY CONSEILLERS : Madame H. BOUCON et Madame Ch. THEUREY-PARISOT GREFFIER : Madame M. GRANDJEAN Lors du délibéré : PRESIDENT DE CHAMBRE : Mme I. REY

CONSEILLERS : Madame H. BOUCON et Madame Ch. THEUREY-PARISOT LA COUR FAITS ET PRETENTIONS DES PARTIES

Un mouvement de grève est intervenu les 16 et 17 juillet 2003 au sein de l'entreprise MANZONI BOUCHOT FONDERIE, en raison du non paiement du solde de la prime d'intéressement pour l'année 2002.

Estimant les revendications des grévistes illégitimes et les actes commis au cours de la grève illicites, la société MANZONI BOUCHOT FONDERIE a sollicité leur expulsion auprès du juge des référés du Tribunal de grande instance de Lons-le-Saunier qui, par ordonnance du 23 juillet 2003, a constaté que l'activité avait repris et que le trouble illicite n'existait plus.

Elle a dès la fin du mois de juillet 2003 prononcé des mises à pied

conservatoires et engagé une procédure de licenciement pour faute lourde à l'encontre de 58 de ses salariés ; une demande d'autorisation de licencier les salariés représentant du personnel ou délégués syndicaux ayant participé à cette grève a été présentée auprès de l'inspecteur du travail qui l'a refusée par décision du 20 août 2003 confirmée le 20 février 2004 par le Ministre du travail.

M. Thonglor X... a été licencié pour faute lourde par lettre recommandée avec avis de réception du 31 juillet 2003.

Agissant selon requête du 8 décembre 2003, M. Thonglor X... a saisi le Conseil de prud'hommes de Saint-Claude afin d'entendre prononcer la nullité de son licenciement, et ordonner sa réintégration assortie du paiement de ses salaires depuis le mois d'août 2003 ainsi que du versement d'un rappel de salaires pour la période de mise à pied conservatoire et la durée de l'entretien préalable.

Par jugement du 22 septembre 2004, le Conseil de prud'hommes de Saint-Claude a dit que le licenciement pour faute lourde de M. Thonglor X... était justifié et débouté le requérant de toutes ses prétentions.

M. Thonglor X... a interjeté appel de cette décision le 21 octobre 2004.

Il demande à la Cour de : - dire que son licenciement pour faute lourde et sa mise à pied sont nuls ; - ordonner sa réintégration dans l'entreprise ; - condamner la société MANZONI BOUCHOT FONDERIE à lui verser :

. la somme de 53,54 euros en remboursement de la mise à pied conservatoire déduite sur le salaire de juillet 2003 pour la période du 22 au 31 juillet 2003 ;

. la somme de 9,68 euros au titre du temps passé en entretien

préalable ;

. l'intégralité de ses salaires à partir du mois d'août 2003 jusqu'à sa réintégration effective ; le tout assorti du bénéfice de l'exécution provisoire et sous astreinte de 1.000,00 euros par jour de retard à dater de la notification de la décision.

A titre subsidiaire et uniquement dans l'hypothèse où lui seul ne souhaiterait pas être réintégré à l'issue de la procédure prud'homale, il demande le versement de :

. l'indemnité compensatrice de congés payés : 966,10 euros,

. l'indemnité compensatrice de préavis (2 mois de salaire) : 4.086,77 euros,

. l'indemnité de licenciement : 4.904,13 euros,

. l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (18 mois de

salaire) : 36.780,96 euros.

Il sollicite enfin le versement d'une somme de 600,00 euros au titre de ses frais irrépétibles.

La S.A. MANZONI BOUCHOT FONDERIE demande en réplique à la Cour : - de constater le caractère peu sérieux, voire l'absence d'objet, des revendications à l'origine de la grève, l'entrave à la liberté du travail des salariés non grévistes, la désorganisation totale de l'entreprise et le préjudice en découlant ; - de confirmer en conséquence le jugement déféré en toutes ses dispositions ; - de condamner M. Thonglor X... à lui verser la somme de 150,00 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. MOTIFS DE LA DECISION

I - Sur la licéité de la grève :

Attendu que la S.A. MANZONI BOUCHOT FONDERIE, pour démontrer le caractère selon elle illicite du mouvement de grève déclenché le

mercredi 16 juillet 2003 vers 13 heures sur le site de la zone industrielle le plan d'acier, et auquel M. Thonglor X... a participé, soutient que la revendication des grévistes était sans objet, la prime d'intéressement litigieuse étant exigible en vertu de l'accord d'intéressement au plus tard le 31 juillet 2003, qu'elle avait effectivement accepté le 2 juillet 2003 le principe d'un versement anticipé pour le 10 juillet suivant, et que si son premier ordre de virement a été rejeté par la banque suite à un retard d'échéance de trésorerie, elle avait annoncé à ses salariés un second ordre de virement selon note du 16 juillet 2003 immédiatement confirmé par affichage d'une attestation du Crédit agricole de Franche-Comté ;

Mais attendu en droit que la grève se définit comme une cessation collective et concertée du travail en vue d'appuyer des revendications professionnelles ;

Or attendu en l'espèce que les salariés concernés ont participé au mouvement de grève des 16 et 17 juillet 2003 en raison du non paiement du solde de la prime d'intéressement 2002 que la direction s'était initialement engagée à verser avec la paie du mois de juin 2003 ; que si le règlement de cette prime a été retardé pour des motifs administratifs ou de trésorerie et était selon l'employeur sur le point d'aboutir au moment du déclenchement de la grève, il n'en demeure pas moins que les revendications exprimées par les salariés grévistes, après plusieurs reports de son versement, étaient bien d'ordre professionnel ;

Attendu que leur mouvement de grève auquel a participé M. Thonglor X... était dans ces conditions parfaitement licite ;

II - Sur les fautes reprochées à M. Thonglor X... :

Attendu que la S.A. MANZONI BOUCHOT FONDERIE reproche en substance à son salarié d'avoir porté atteinte à la liberté du travail en

empêchant les non-grévistes d'accéder aux fours de fusion, d'avoir délibérément désorganisé la production dans l'intention de nuire à l'entreprise et d'avoir tenté de dégrader l'outil de production, créant ainsi un préjudice financier et une atteinte indéniable à son image de marque, tant auprès de sa clientèle que de l'opinion publique ;

Attendu que M. Thonglor X... réplique en substance que le faible nombre de personnes présentes dans la zone des fours ne permettait pas d'empêcher toute circulation des non grévistes, que Me Y..., Huissier de justice, ne caractérise d'ailleurs aucunement en ses procès-verbaux des 16 et 17 juillet 2003 l'existence d'une quelconque situation de blocage et qu'il n'a pas été en capacité d'identifier personnellement les grévistes désignés par les responsables, que le ralentissement de la production n'est pas dû à une entrave mais résulte directement de l'absence à leur poste d'une centaine de salariés en grève, notamment tous les salariés permanents travaillant aux fours, ce qui n'est pas illicite, et que rien ne permet de démontrer que certains grévistes auraient volontairement bloqué le travail pour laisser "geler" le métal et dégrader l'outil de production dans le but de nuire à leur employeur ;

Attendu en droit, selon les dispositions des articles L.122-45 alinéa 2 et L.521-1 du code du travail qu'un salarié ne peut sauf faute lourde être licencié à raison de l'exercice du droit de grève ; que la faute lourde est constituée lorsque le gréviste participe à des actions illicites commises dans l'intention de nuire à son employeur et qu'il incombe à ce dernier de caractériser au cas par cas la participation active et personnelle du salarié qu'il entend licencier ;

Et attendu qu'il résulte très précisément des "constatations particulières" effectuées par Me Y... le 17 juillet 2003 vers 0 H 35

au niveau du hall no 2 que M. Thonglor X... se tenait assis à terre entre les deux fours en compagnie d'un autre salarié et que voyant arriver un chariot de métal, il s'est levé pour lui barrer le passage et l'empêcher d'accéder aux fours ;

Attendu que ces faits sont bien constitutifs d'une entrave à la liberté du travail, dès lors que M. Thonglor X... a manifestement participé, en violation des consignes élémentaires de sécurité au sein des zones de fusion, à une action concertée destinée à empêcher le passage des caristes métal non grévistes ; qu'il ne pouvait ignorer en outre, en raison même de son ancienneté au sein de l'entreprise (embauche à compter du 3 juin 1991 en qualité d'opérateur de fabrication moulage) les conséquences de son comportement sur le fonctionnement des fours ainsi que le préjudice matériel et financier pouvant en résulter pour l'entreprise ;

Attendu qu'il apparaît ainsi, après examen des pièces du dossier, que M. Thonglor X... a bien commis la faute lourde qui lui est reprochée par son employeur et que son licenciement était en conséquence justifié ; que cette constatation commande le rejet de toutes les prétentions exprimées par l'appelant et que le jugement rendu en ce sens par le Conseil de prud'hommes de Saint-Claude le 22 septembre 2004 doit être confirmé ;

III - Sur les demandes annexes :

Attendu qu'il n'est pas contraire à l'équité de laisser la S.A. MANZONI BOUCHOT FONDERIE supporter seule la charge de ses frais irrépétibles ; PAR CES MOTIFS PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,

CONFIRME le jugement rendu le 22 septembre 2004 par le Conseil de prud'hommes de Saint-Claude ;

Y AJOUTANT :

DEBOUTE la S.A. MANZONI BOUCHOT FONDERIE de sa demande fondée sur l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

CONDAMNE M. Thonglor X... aux dépens.

LEDIT arrêt a été prononcé par mise à disposition au greffe le VINGT QUATRE JANVIER DEUX MILLE SIX et signé par Mme I. REY, Président de chambre et Madame M. GRANDJEAN, Greffier. LE GREFFIER,

LE PRESIDENT DE CHAMBRE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Besançon
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 65
Date de la décision : 24/01/2006
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Composition du Tribunal
Président : Mme Rey, président

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.besancon;arret;2006-01-24;65 ?
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