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28/06/2023 | FRANCE | N°22/00756

France | France, Cour d'appel de Bastia, Chambre civile section 2, 28 juin 2023, 22/00756


Chambre civile

Section 2



ARRÊT N°



du 28 JUIN 2023



N° RG 22/00756

N° Portalis DBVE-V-B7G-CFKF JJG - C



Décision déférée à la Cour :

Jugement Au fond, origine Tribunal de Commerce de BASTIA, décision attaquée en date du 25 Novembre 2022, enregistrée sous le n° 22/00314



[V] [I]-[Y]

[Y]

S.A.R.L. MARE E STAGNU



C/



Consorts [Y]











Copies exécutoires délivrées aux avocats le






r>

























COUR D'APPEL DE BASTIA



CHAMBRE CIVILE



ARRÊT MIXTE DU



VINGT-HUIT JUIN DEUX-MILLE-VINGT-TROIS







APPELANTS :



Mme [H] [V] [I]-[Y]

née le [Date naissance 10] 1988 à [Localité 4]

[Adresse 2]

202...

Chambre civile

Section 2

ARRÊT N°

du 28 JUIN 2023

N° RG 22/00756

N° Portalis DBVE-V-B7G-CFKF JJG - C

Décision déférée à la Cour :

Jugement Au fond, origine Tribunal de Commerce de BASTIA, décision attaquée en date du 25 Novembre 2022, enregistrée sous le n° 22/00314

[V] [I]-[Y]

[Y]

S.A.R.L. MARE E STAGNU

C/

Consorts [Y]

Copies exécutoires délivrées aux avocats le

COUR D'APPEL DE BASTIA

CHAMBRE CIVILE

ARRÊT MIXTE DU

VINGT-HUIT JUIN DEUX-MILLE-VINGT-TROIS

APPELANTS :

Mme [H] [V] [I]-[Y]

née le [Date naissance 10] 1988 à [Localité 4]

[Adresse 2]

20200 BASTIA

Représentée par Me Pascale MELONI, avocate au barreau de BASTIA, Me André GUILLEMAIN de la SCP GUILLEMAIN SAINTURAT PANEPINTO, avocat au barreau de PARIS

M. [R], [A], [G] [Y]

né le [Date naissance 7] 1952 à [Localité 4]

[Adresse 1]

20000 BASTIA

Représenté par Me Pascale MELONI, avocate au barreau de BASTIA, Me André GUILLEMAIN de la SCP GUILLEMAIN SAINTURAT PANEPINTO, avocat au barreau de PARIS

S.A.R.L. MARE E STAGNU

prise en la personne de son représentant légal en exercice, demeurant et domicilié ès qualités audit siège.

[Adresse 12]

[Localité 5]

Représentée par Me Pascale MELONI, avocate au barreau de BASTIA,

Me André GUILLEMAIN de la SCP GUILLEMAIN SAINTURAT PANEPINTO, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉS :

Mme [K], [F] [Y]

née le [Date naissance 9] 1984 à [Localité 4]

[Adresse 3]

20200 BASTIA

Représentée par Me Lyria OTTAVIANI, avocate au barreau de BASTIA

M. [Z], [N] [Y]

né le [Date naissance 8] 1988 à [Localité 4]

[Adresse 11]

[Localité 6]

Représenté par Me Lyria OTTAVIANI, avocate au barreau de BASTIA

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 6 avril 2023, devant la cour composée de :

Jean-Jacques GILLAND, président de chambre

Judith DELTOUR, conseillère

Stéphanie MOLIES, conseillère

qui en ont délibéré.

GREFFIER LORS DES DÉBATS :

Vykhanda CHENG.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 28 juin 2023

ARRÊT :

Contradictoire,

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Jean-Jacques GILLAND, président de chambre, et par Vykhanda CHENG, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DES FAITS

Par actes des 1er et 2 février 2022, Mme [K] [Y] et M. [Z] [Y] ont assigné Mme [H] [V] [I]-[Y], M. [R] [Y] et la S.A.R.L. Mare e stagnu par-devant le tribunal de commerce de Bastia aux fins entendre :

- prononcer l'annulation de la cession de parts sociales de la S.A.R.L. Mare e stagnu intervenue le 31/09/2018 en fraude des droits des associés au profit de M. [R] [Y],

- prononcer l'annulation de l'acte de rétrocession de ce dernier en date du 05/02/2019 à [H] [V] [I],

- ordonner la restitution en nature aux requérants et sans contrepartie au regard du préjudice matériel et moral subi du fait des parts sociales cédées à leur père,

- ordonner la restitution par Mme [V] [I] des parts sociales acquises à vil prix,

À titre subsidiaire et à défaut de restitution ordonnée en nature mais sans contrepartie

- ordonner la restitution des parts sociales aux requérants,

- condamner les requis in solidum à payer à chacun des requérants la somme de 50 000 € de dommages et intérêts pour le préjudicie matériel et moral subi,

- dire qu'il sera procédé dans le délai d'un mois à compter de la signification du jugement à intervenir à une modification des statuts de la S.A.R.L. Mare e stagnu par le calcul des droits des requérants dans le capital social au prorata des parts sociales restituées par Mme [V] [I] à M. [Y], et par M. [R] [Y] à eux-mêmes, le tout, sous astreinte de 300 € par jour de retard,

- dire que les frais de modification des statuts seront à la charge des requis,

- condamner également les requis au paiement de la somme de 5 000 € en application des dispositions de l'article 700 du C.P.C. outre entiers dépens,

- ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir.

Par jugement du 25 novembre 2022, le tribunal de commerce de Bastia a :

VU L'ORDONNANCE N°9 EN DATE DU 14/10/2022 RENDUE PAR MADAME LA PREMIÈRE PRÉSIDENTE DE LA COUR D'APPEL,

REJETÉ L'EXCEPTION D4INCOMPÉTENCVE SOULEVÉE PAR MADAME [H] [V] [I] [Y], MONSIEUR [R] [Y] ET LA SOCIÉTÉ MARE E STAGNU (SARL)

SE DÉCLARE COMPÉTENT,

DIT N'Y AVOIR LIEU À SURSIS À STATUER,

PRONONCÉ L'ANNULATION DE LA CESSION DE PARTS SOCIALES DE LA SARL MARE E STAGNU INTERVENUE LE 31/08/2018 EN FRAUDE DES DROITS DES ASSOCIÉS AU PROFIT DE MONSIEUR [R] [Y].

PRONONCÉ L'ANNULATION DE L'ACTE DE RÉTROCESSION PAR CE DERNIER EN DATE DU 05/02/2019 À MADAME [H] [V] [I]

ORDONNÉ LA RESTITUTION DES PARTS SOCIALES À MADAME [K] [F] [Y] ET MONSIEUR [J] [N] [Y]

CONDAMNÉ SOLIDAIREMENT MADAME [H] [V] [I] [Y], MONSIEUR [R] [Y] ET LA SOCIÉTÉ MARE E STAGNU (SARL) À PAYER À MONSIEUR [Z] [N] [Y] LA SOMME DE CINQUANTE MILLE (50.000 €) À TITRE DE DOMMAGES ET INTÉRÊTS

ORDONNÉ LA MISE EN CONFORMITÉ DES STATUTS DE LA SOCIÉTÉ MARE E STAGNU (SARL) AVEC LA PRÉSENTE DÉCISION DANS LE DÉLAI D'UN MOIS À COMPTER DE SA SIGNIFICATION PAR LE CALCUL DES DROITS DES REQUÉRANTS DANS LE CAPITAL SOCIAL, AU PRORATA DES PARTS SOCIALES RESTITUÉES PAR MME. [V] [I] À MONSIEUR [Y], ET PAR M. [R] [Y] À MADAME [K] [F] [Y] ET MONSIEUR [J] [N] [Y], AVEC ASTREINTE DE 300 € PAR JOUR DE RETARD PASSÉ CE DÉLAI

DIT QUE LES FRAIS DE MODIFICATION DES STATUTS SERONT À LA CHARGE DE LA SOCIÉTÉ MARE E STAGNU (SARL)

CONDAMNÉ SOLIDAIREMENT MADAME [H] [V] [I] [Y], MONSIEUR [R] [Y] ET LA SOCIÉTÉ MARE E STAGNU (SARL) À PAYER A MADAME [K] [F] [Y] ET MONSIEUR [J] [N] [Y] LA SOMME DE DEUX MILLE ( 2.000 €) PAR APPLICATION DES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 700 DU C.P.C.

CONDAMNÉ SOLIDAIREMENT MADAME [H] [V] [I] [Y], MONSIEUR [R] [Y] ET LA SOCIÉTÉ MARE E STAGNU (SARL) AUX ENTIERS DÉPENS

REJETÉ POUR LE SURPLUS TOUTES AUTRES DEMANDES CONTRAIRES À LA PRÉSENTE DÉCISION

LIQUIDÉ LES DÉPENS À RECOUVRER PAR LE GREFFE À LA SOMME DE 129,82

EUROS TTC (DONT 20 % DE TVA).

Par déclaration au greffe du 13 décembre 2022, Mme [H] [V] [I]-[Y], M. [R] [Y] et la S.A.R.L. Mare e stagnu ont interjeté appel du jugement prononcé en ce qu'il a :

- rejeté l'exception d'incompétence soulevée par Madame [H] [V] [I] [Y], Monsieur [R] [Y] et la SARL MARE E STAGNU

- s'est déclaré compétent

- dit n'y avoir lieu à surseoir à statuer

- prononcé l'annulation de la cession de parts sociales de la SARL MARE ET STAGNU intervenue le 31/08/2018 en fraude des droits des associés au profit de Monsieur [R] [Y]

- prononcé l'annulation de l'acte de rétrocession par ce dernier en date du 05/02/2019 à Madame [H] [V] [I]

- ordonné la restitution des parts sociales à Madame [K] [F] [Y] et Monsieur [Z] [N] [Y]

- condamné solidairement Madame [H] [V] [I] [Y] Monsieur [R] [Y] et la SARL MARE ET STAGNU à payer à Madame [K] [F] [Y] la somme de 50 000 Euros à titre de dommages et intérêts

- condamné solidairement Madame [H] [V] [I] [Y], Monsieur [R] [Y] et la SARL MARE ET STAGNU à payer à Monsieur [Z] [N] la somme de 50 000 Euros à titre de dommages et intérêts

- ordonné le mise en conformité de statuts de la société MARE E STAGNU avec la présente décision dans le délai d'un mois à compter de sa signification par le calcul des droits des requérants dans le capital social, au prorata des parts sociales restituées par Madame [V] [I] à Monsieur [Y] et par Monsieur [R] [Y] à Madame [K] [F] [Y] et Monsieur [Y] [Z] [N], avec astreinte de 300 Euros par jour de retard passé ce délai.

- dit que les frais de modification des statuts seront à la charge de la société MARE E STAGNU

- condamné solidairement Madame [H] [V] [I] [Y], Monsieur [R] [Y] et la SARL MARE E STAGNU à payer à Madame [K] [F] [Y] et à Monsieur [Z] [N] [Y] LA SOMME DE 2 000 Euros par application de l'article 700 du CPC

- condamné solidairement Madame [H] [V] [I] [Y], Monsieur [R] [Y] et la SARL MARE E STAGNU aux entiers dépens

- rejeté pour le surplus toutes autres demandes contraires à la présente décision et notamment la fin de non recevoir tiré de l'irrecevabilité de l'action prescrite et celle tendant à voir écarter l'exécution provisoire.

- liquidé les dépens à recouvrer par le Greffe à la somme de 129.82 Euros TTC.

Par requête du 21 décembre 2022, Mme [H] [V] [I] [Y], M. [R] [Y] et la S.A.R.L. Mare e stagnu ont demandé à Mme la première présidente de la cour d'appel de Bastia d'être autorisés à assigner M. [Z] [Y] et Mme [K] [Y] à jour fixe.

Par ordonnance du 2 janvier 2023, Mme la première présidente de la cour d'appel a autorisé Mme [H] [V] [I]-[Y], M. [R] [Y] et la S.A.R.L. Mare e stagnu à assigner, à jour fixe, M. [Z] [Y] et Mme [K] [Y] pour l'audience collégiale du 6 avril 2023 à 8 heures 30.

Par acte du 5 janvier 2023, Mme [H] [V] [I]-[Y], M. [R] [Y] et la S.A.R.L. Mare e stagnu ont assigné M. [Z] [Y] et Mme [K] [Y] par-devant le 2° section de la chambre civile de la cour d'appel de Bastia aux fins de :

DÉCLARER l'appel recevable et bien fondé

INFIRMER le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf le rejet de la prétention d'incompétence pour suspicion légitime devenue sans objet,

Vu l'article L 235-9 du C. Com.

DÉCLARER IRRECEVABLES comme prescrites, les actions de Madame [K] [Y] et Monsieur [Z] [Y] en annulation des actes de cession des parts sociales intervenues le 31 août 2018 et 5 février 2019, la connaissance de l'adoption étant avérée et l'absence de renonciation non établie,

DÉCLARER IRRECEVABLES comme prescrites les actions de Madame [K] et Monsieur [Z] [Y] en paiement de dommages et intérêts,

DÉCLARER que [K] [F] et [Z] [Y] avaient parfaite connaissance de la procédure d'adoption simple pour s'y être opposés, le jugement du tribunal de grande instance de Bastia du 16 février 2017 ne pouvant avoir été ignoré pendant près de deux années,

DÉCLARER que ce jugement leur est parfaitement opposable au visa des articles 361 et 362 du C. Civ., Madame [K] [F] [Y] et Monsieur [Z] [Y] échouant à rapporter la preuve que Monsieur [R] [Y] aurait renoncé à l'adoption et au surplus leur aurait dit qu'il renonçait à cette adoption simple, cinq témoignages au surplus attestant de leur connaissance de l'adoption et de l'absence de toute renonciation à l'adoption,

DÉCLARER dans ces conditions que Madame [K] [Y] et Monsieur [Z]

[Y] avaient nécessairement connaissance de l'adoption avant le 1er février 2019 et a fortiori avant le 31 août 2021,

LES DÉBOUTER de l'ensemble de leur demande, fins et conclusions.

Vu les articles L.223-I4 du C. com, 378 du CPC

Subsidiairement et pour1e cas où la Cour estimerait nécessaire de connaître la décision de la Cour sur l'adoption simple de Madame [H] [V] [I]-[Y], en l'état de l'appel interjeté à l'encontre de la décision rendue sur tierce-opposition par le tribunal judiciaire de Bastia le 19 novembre 2021,

INFIRMER le jugement,

Y ajoutant,

SURSEOIR à statuer jusqu'au prononcé par la Cour de son délibéré, la date prévue étant celle du 1er février 2023,

et en toute hypothèse,

Infirmer le jugement,

REJETER la demande de nullité fondée sur le Dol dans la mesure où aucun dol n'est intervenu à l'occasion de la cession des parts entre Monsieur [R] [Y] et Madame [H] [Y], Madame [K] [Y] et Monsieur [Z] [Y] échouant à démontrer qu'ils n'avaient pas connaissance de l'adoption simple intervenue dès l'année 2017,

En conséquence,

REJET'ER la demande de nullité de l'acte de cession et de l'acte de rétrocession de parts,

REJETER la demande de restitution des parts sociales formulée par Madame [K] [F] [Y] et Monsieur [Z] [N] [Y],

REJETER la demande de mise en conformité des statuts de la société MARE E STAGNU dans le délai d'un mois de la signification de la décision dont appel,

REJETER la demande de dommages et intérêts de Madame [K] [Y] et Monsieur [Z] [Y], prétentions qui ne sont fondées ni en leur principe ni, a fortiori, en leur quantum,

DÉBOUTER Madame [K] [Y] et Monsieur [Z] [Y] de toutes leurs demandes, fins et prétentions, y incluses celles prononcées à leur profit par le tribunal au titre de l'article 700,

Et en conséquence,

RÉFORMER la décision déférée, en ce qu'il leur a été alloué à chacun la somme de 50.000 € à titre de dommages et intérêts, et celle de 2.000 € par application de l'article 700,

CONDAMNER solidairement Madame [O] [Y] et Monsieur [Z] [Y] à payer a Madame [H] [V] [I]-SANTINL, à Monsieur [R] [Y] et à la société MARE E STAGNU, la somme à chacune des parties,,de c15.000 € par application de l'artiicle700.

LES CONDAMNER solidairement aux entiers dépens.

SOUS TOUTES RÉSERVES.

Par ordonnance du 7 mars 2022, la première présidente de la cour d'appel de Bastia, statuant en référé, a :

- ORDONNÉ l'arrêt de l'exécution provisoire attachée au jugement du tribunal de commerce de Bastia en date du 25 novembre 2022 ;

- DÉBOUTÉ les parties de toutes autres demandes plus amples ou contraires ;

- DIT que chaque partie supportera la charge de ses propres dépens ;

- DÉBOUTÉ [K]-[F] [Y] et [Z]-[N] [Y] de leur demande formulée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions déposées au greffe le 4 avril 2023, Mme [K] [Y] et M. [Z] [Y] ont demandé à la cour de :

- Confirmer le jugement du Tribunal de Commerce de Bastia du 25 novembre 2022 en ce qu'il a annulé les actes de cession de parts en date du 31 août 2018 et du 5 février 2019 ;

- Prononcer, l'annulation de ces actes à titre principal sur le fondement du dol et subsidiairement sur le fondement de l'absence de cause, et dans cette hypothèse, organiser en tant que de besoin et avant dire droit une expertise, le technicien commis recevant mission d'évaluer les parts sociales de la SARL MARE E STAGNU au 31 août 2018, en faisant application des méthodes usuellement mises en 'uvre ;

- Prononcer par voie de conséquence l'annulation des délibérations de la SARL MARE E STAGNU en date du 31 août 2018 et du 3 avril 2019 ;

- Confirmer le jugement en ce qu'il a :

o ordonné la restitution des parts sociales à Madame [K] [F] [Y]

et à Monsieur [Z] [N] [Y] ;

o ordonné la mise en conformité des statuts de la SARL MARE E STAGNU avec le jugement dans un délai d'un mois suivant la signification, par le calcul des droits de

Madame [K] [F] [Y] et Monsieur [Z] [N] [Y] dans le capital social, au prorata des parts sociales restituées par Madame [V] [I] à Monsieur [R] [Y], et par Monsieur [R] [Y] à Madame [K] [F] [Y] et à Monsieur [Z] [N] [Y], ce chef de dispositif étant assorti d'une astreinte de 300 €uros passé ce délai ;

o mis à la charge de la SARL MARE E STAGNU les frais de modification des statuts.

- Confirmer le jugement en ce qu'il a alloué à Madame [K] [F] [Y] et à Monsieur [Z] [Y] des dommages intérêts en indemnisation de leurs préjudices moral et matériel ;

- Réformer le jugement en ce qu'il a fixé le montant des dommages intérêts à 50.000,00 €uros pour Madame [K] [F] [Y] et à 50.000,00 €uros pour Monsieur [Z] [N] [Y] et en ce qu'il a mis le règlement à la charge solidaire de Monsieur [R] [Y], de Madame [H] [V] [I] et de la SARL MARE E STAGNU ;

- En conséquence :

' Allouer à Madame [K] [F] [Y] la somme de 50.000,00 €uros au titre du préjudice moral et la somme de 50.000,00 €uros au titre du préjudice matériel ;

' Condamner solidairement Monsieur [R] [Y] et Madame [H] [V] [I] à paiement à Madame [K] [F] [Y] de la somme de 100.000,00 €uros (cent mille €uros) ;

' Allouer à Monsieur [Z] [N] [Y] la somme de 50.000,00 €uros au titre du préjudice moral et la somme de 50.000,00 €uros au titre du préjudice matériel ;

' Condamner solidairement Monsieur [R] [Y] et Madame [H] [V] [I] à paiement à Monsieur [Z] [N] [Y] de la somme de 100.000,00 €uros (cent mille €uros) .

- Débouter en tant que de besoin Monsieur [R] [Y], Madame [H] [V] [I] [Y] et la SARL MARE E STAGNU de leurs demandes, fins et conclusions ;

- Condamner solidairement Monsieur [R] [Y] et Madame [H] [V] [I] [Y] aux dépens, sur le fondement de l'article 696 du Code de procédure civile, et à paiement à chacun des appelants de la somme de 5.000,00 €uros en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

SOUS TOUTES RÉSERVES.

Par conclusions déposées au greffe le 5 avril 2023, Mme [H] [V] [I]-[Y], M. [R] [Y] et la S.A.R.L. Mare e stagnu ont demandé à la cour de :

DÉCLARER l'appel recevable et bien fondé,

INFIRMER le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a rejeté l'exception d'incompétence, devenu sans objet,

Y ajoutant,

IN LIMINES LITIS et avant toute défense au fond, en ce qu'aucun conseiller de la mise en état n'est saisi en raison de la retenue à jour fixe,

ORDONNER le sursis à statuer sur le seul chef de disposition du jugement qui statue sur la validité de la cession de parts sociales intervenue le 05 février 2019 en lien direct avec le sort de l'adoption tranché par l'arrêt de la cour d'appel de Bastia rendu le 16 février 2023 dont l'effet est suspensif jusqu'à expiration des délais de recours ou décision définitive,

En conséquence, sur le fond,

À titre principal

Et la Cour, statuant à nouveau sur les prétentions de Madame [H] [V] [I] [Y] ET de Monsieur [R] [Y], devant

Vu l'article L.235-9 du C. com

Vu l'article L.235-1 du C. com

INFIRMER le jugement entrepris sur les chefs de jugement non affecté par le sursis à statuer,

Y ajoutant,

DÉCLARER IRRECEVABLES comme prescrites les actions de Madame [K]-[F] [Y] et Monsieur [Z] [N] [Y] en annulation de l'acte de réduction du capital social par achat de parts, intervenus le 31 août 2018, leur connaissance de I'adoption à la date du 31 août 2018 étant avérée et l'absence d'une renonciation à I'adoption n'étant pas établie,

DÉCLARER IRRECEVABLES comme prescrites, les actions de Madame [K]- [F] et Monsieur [Z] [N] [Y] en paiement de dommages et intérêts fondées, sur des demandes d'annulation prescrites,

À titre subsidiaire, si I'action en nullité n'était pas prescrite,

DÉCLARER que [K]-[F] et [Z] [N] [Y] avaient parfaite connaissance de la procédure d'adoption simple pour s'y être opposés, le jugement du tribunal de grande instance de Bastia du 16 février 2017 ne pouvant avoir été ignoré pendant près de deux années,

DÉCLARER que ce jugement, infirmé par la Cour le 1er février 2023, leur est parfaitement opposable au visa des articles 361 et 362 du C. civ., Madame [K]-[F] [Y] et Monsieur [Z] [N] [Y] échouant à rapporter la preuve que Monsieur [R] [Y] aurait renoncé à I'adoption et leur aurait dit qu'il renonçait à cette adoption simple, cinq témoignages au surplus attestant de leur connaissance de I'adoption et de l'absence de toute renonciation à I'adoption, laquelle au surplus a été transcrite sur les actes d'Etat Civil dès le mois d'avril 2017.

DÉCLARER dans ces conditions que Madame [K]-[F] [Y] et Monsieur [Z] [N] [Y] avaient nécessairement connaissance de I'adoption avant le 1er février 2019et a fortiori, avant le 31 août 2021,

LES DÉBOUTER de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

REJETER la demande de nullité fondée sur le dol dans la mesure où la preuve d'un dol n'est pas établie, aucun mensonge ne pouvant être imputé à Monsieur [R] [Y] à l'occasion de la réduction de capital par rachat de parts intervenue le 31 août 2018, au bénéfice de Madame [K]-[F] [Y] et Monsieur [Z] [N] [Y] qui chacun ont perçu la somme de 62.500 €, lesquels a fortiori n'établissent nullement l'existence d'un dol qui serait cause de leur acceptation de cette réduction,

REJETER la demande en nullité fondée sur l'article 1131 du C. civ abrogé, et 1136 du C. civ, l'erreur sur l'appréciation économique inexacte n'étant pas cause de nullité, aucun prix dérisoire n'étant au surplus prouvé,

En conséquence,

REJETER la demande de nullité de l'acte de réduction du capital du 31 août 2018,

REJETER la demande de restitution des parts sociales formulée par [K]-[F] [Y] et [Z] [N] [Y],

REJETER la demande de mise en conformité des statuts,

Et en toute hypothèse,

DÉCLARER irrecevable comme nouvelle en cause d'appel la demande d'expertise et la déclarer en tout état de cause infondée

DÉBOUTER Madame [K]-[F] [Y] et Monsieur [Z] [N] [Y] de toutes leurs demandes, fins et prétentions, y incluses celles prononcées à leur profit par le tribunal au titre de l'article 700,

Et dans ces conditions,

REJETER la demande de dommages et intérêts de Madame [K]-[F] [Y] et Monsieur [Z] [N] [Y], en réparation du préjudice moral et du préjudice matériel qu'ils prétendent avoir subi, prétentions qui ne sont fondées ni en leur principe ni, a fortiori, en leur quantum.

RÉFORMER la décision déférée, en ce qu'il leur a été alloué à chacun la somme de 50.000 € à titre de dommages et intérêts, et celle de 2.000 € par application de l'article 700 ainsi que les dépens.

PRONONCER la mise hors de cause sans peine ni dépens de la société MARE E STAGNU,

CONDAMNER solidairement Madame [K]-[F] [Y] et Monsieur [Z] [N] [Y] à payer à Madame [H] [V]-[I] [Y], à Monsieur [R] [Y] et à la société MARE E STAGNU, la somme à chacune de ces parties, de 15.000 € par application de l'article 700,

LES CONDAMNER aux entiers dépens

À TITRE SUBSIDIAIRE, si la Cour devait statuer sur l'ensemble des dispositions du jugement,

INFIRMER le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf le rejet de la prétention d'incompétence pour suspicion légitime devenue sans objet et la demande de sursis à statuer,

Et la Cour, statuant de nouveau sur les prétentions des appelants, devant

Vu l'article L.235.9 du C. com

Vu l'article L.235-1 du C. com

Vu l'arrêt du 1er février 2023, chambre civile 2ème section, RG 21100857,

DÉCLARER que l'issue de la procédure de rétractation de I'adoption de Madame [V] [I] [Y] n'est pas déterminante

En conséquence,

DÉCLARER IRRECEVABLES comme prescrites les actions de Madame [K]-[F] [Y] et Monsieur [Z] [N] [Y] en annulation des actes de réduction du capital social intervenus le 31 août 2018 et de cession des parts intervenue le 5 février 2019, leur connaissance de I'adoption à la date du 31 août 2018 étant avérée et l'absence d'une renonciation à I'adoption n'étant pas établie,

DÉCLARER IRRECEVABLES comme prescrites, les actions de Madame [K]~[F] et Monsieur [Z] [N] [Y] en paiement de dommages et intérêts fondées, sur des demandes d'annulation prescrites,

À titre subsidiaire. si l'action en nullité n'était pas prescrite,

DÉCLARER que [K]-[F] et [Z] [N] [Y] avaient parfaite connaissance de la procédure d'adoption simple pour s'y être opposés, le jugement du tribunal de grande instance de Bastia du 16 février 2017 ne pouvant avoir été ignoré pendant près de deux années,

DÉCLARER que ce jugement, infirmé par la Cour le 1er février 2023, leur est parfaitement opposable au visa des articles 361 et 362 du C. civ., Madame [K]-[F] [Y] et Monsieur [Z] [N] [Y] échouant à rapporter la preuve que Monsieur [R] [Y] aurait renoncé à I'adoption et leur aurait dit qu'il renonçait à cette adoption simple, cinq témoignages au surplus attestant de leur connaissance de I'adoption et de l'absence de toute renonciation à I'adoption, laquelle au surplus a été transcrite sur les actes d'Etat Civil dès le mois d'avril 2017,

DÉCLARER dans ces conditions que Madame [K]-[F] [Y] et Monsieur [Z] [N] [Y] avaient nécessairement connaissance de I'adoption avant le 1er février 2019 et a fortiori, avant le 31 août 2021,

LES DÉBOUTER de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

REJETER la demande de nullité fondée sur le dol dans la mesure où la preuve d'un dol n'est pas établie, aucun mensonge ne pouvant être imputé à Monsieur [R] [Y] à l'occasion de la réduction de capital par achat de parts intervenue le 31 août 2018, au bénéfice de Madame [K]-[F] [Y] et Monsieur [Z] [N] [Y] qui chacun ont perçu la somme de 62.500 €, lesquels a fortiori n'établissent nullement l'existence d'un dol qui serait cause de leur acceptation de cette réduction,

REJETER la demande de nullité fondée sur le dol dans la mesure où aucun dol n'est intervenu à l'occasion de la cession des parts, le 5 février 2019, entre Monsieur [R] [Y] et Madame [H] [Y], Madame [K]-[F] [Y] et Monsieur [Z] [N] [Y] échouant à démontrer qu'ils n'avaient pas connaissance de I'adoption simple intervenue dès Pannée 2017,

REJETER la demande en nullité fondée sur l'article 1131 du C. civ abrogé, et 1136 du C. civ, l'erreur sur l'appréciation économique inexacte n'étant pas cause de nullité, aucun prix dérisoire n'étant au surplus prouvé,

En conséquence,

REJETER la demande de nullité de Pacte de réduction du capital du 31 août 2018 et de l'acte qualifié de rétrocession de parts du 5 février 2019,

REJETER la demande de restitution des parts sociales formulée par [K]-[F] [Y] et [Z] [N] [Y],

REJETER la demande de mise en conformité des statuts,

Et en toute hypothèse,

DÉBOUTER Madame [K]-[F] [Y] et Monsieur [Z] [N] [Y] de toutes leurs demandes, fins et prétentions, y incluses celles prononcées à leur profit par le tribunal au titre de l'article 700,

Et dans ces conditions,

REJETER la demande de dommages et intérêts de Madame [K]-[F] [Y] et Monsieur [Z] [N] [Y], en réparation du préjudice moral et du préjudice matériel qu'ils prétendent avoir subi, prétentions qui ne sont fondées ni en leur principe ni, a fortiori, en leur quantum.

RÉFORMER la décision déférée, en ce qu'il leur a été alloué à chacun la somme de 50.000 € à titre de dommages et intérêts, et celle de 2.000 € par application de l'article 700,

PRONONCER la mise hors de cause sans peine ni dépens de la société MARE E STAGNU,

CONDAMNER solidairement Madame [K]-[F] [Y] et Monsieur [Z] [N] [Y] à payer à Madame [H] [V]-[I] [Y], à Monsieur [R] [Y] et à la société MARE E STAGNU, la somme à chacune de ces parties, de 15.000 € par application de l'article 700,

LES CONDAMNER aux entiers dépens.

SOUS TOUTES RÉSERVES.

Le 6 avril 2023, la présente procédure a été mise en délibéré pour être rendue par mise à disposition au greffe le 28 juin 2023.

La cour, pour plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, fait, en application de l'article 455 du code de procédure civile, expressément référence à la décision entreprise ainsi qu'aux dernières conclusions notifiées par les parties.

SUR CE,

Pour statuer comme ils l'ont fait les premiers juges ont considéré qu'il n'y avait pas lieu à se déclarer incompétent, la composition de la juridiction étant impartiale, qu'il 'y avait pas lieu à sursis à statuer par rapport à un appel portant sur le jugement d'adoption de Mme [V] [I]-[Y], la demande présentée portant sur l'existence d'un dol entachant leur consentement dans le cadre de la réduction de la part des intimés dans le capital de la S.A.R.L. Mare e stagnu en cachant la réalité de la procédure d'adoption, que cette action n'était pas prescrite le délai légal ne commençant à courir qu'au jour de la découverte du projet d'adoption soit le 5 février 2019, que la réalité du dol retenue par la juridiction de première instance, résulte d'une dissimulation d'informations relatives à l'adoption envisagée, à laquelle s'ajoute, selon le jugement entrepris, l'absence de démonstration du caractère sérieux d'une mise en location-gérance de la société objet de la réduction de parts sociales, retenant la réalité du dol invoqué au motif que les intimés n'auraient jamais accepté la réduction réalisée s'ils avaient connu le projet de leur père d'adopter la fille de sa nouvelle épouse pour lui céder ses parts à un prix largement sous-évalué compte tenu du chiffre d'affaires annuel de la société concernée, leur allouant à chacun la somme de 50 000 euros de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice moral et matériel, tout en rejetant leur demande de non-restitution du prix de vente perçu à hauteur de 62 500 euros chacun.

* Sur la prescription de l'action en contestation de la réduction du capital

Les parties étaient toutes d'accord en première instance sur l'existence d'une prescription triennale de l'action engagée, s'opposant uniquement sur la date de décompte dudit délai.

En appel les intimés font valoir que seule la prescription quinquennale de l'article 2224 du code civil est applicable au cas d'espèce,

Les appelants font valoir que les intimés avaient connaissance du projet d'adoption et de sa concrétisation depuis le mois de février 2017 alors que ces derniers expliquent que ce n'est que dans le cadre de la convocation d'une assemblée générale du 3 avril 2019 qu'ils ont eu connaissance de la date de la cession des parts sociales, le 5 février 2019, au profit de Mme [V] [I]-[Y] et qu'ils ont appris la réalité de l'adoption, date à compter de laquelle a commencé à courir le délai quinquennal de prescription.

Il est constant que la prescription triennale de l'article 1844-14 du code civil relative aux actes et délibérations postérieures à la constitution d'une société ne s'applique que quand l'irrégularité revendiquée est fondée sur une décision sociale et non comme en l'espèce sur un vice du consentement dans le cadre duquel la délibération peut être remise en cause dans un délai de cinq ans à compter de la découverte du vice

Il ressort du dossier que la cession de parts est intervenue le 5 février 2019 et a été enregistrée le 11 mars 2019 au service de la publicité foncière et de l'enregistrement de Bastia, date à laquelle il est certain que les intimés en ont eu connaissance et ont, à la suite,

engagé l'action présente en contestation de la réduction de capital de la S.A.R.L. Mare e stagnu intervenue le 31 août 2018 et, par conséquent, l'action en contestation de ladite cession de parts réalisée, selon eux en violation de leurs droits résultant d'un vice du consentement dans le cadre de la réduction de capital consentie le 31 août 2018, ne peut être prescrite, le dol revendiqué n'ayant été selon eux découvert qu'à cette occasion.

Ainsi, il est manifeste que la dite cession de parts ayant été portée à leur connaissance, sans contestation possible, par sa publicité le 11 mars 2019 et qu'en intentant la procédure par actes de 1er et 2 février 2022, ils étaient encore dans le délai légal pour le faire, la prescription quinquennale de leur action revendiquée n'étant pas acquise.

Il y a lieu de confirmer le jugement entrepris sur ce point.

* Sur la réalité du dol revendiqué par M. [Z] [Y] et Mme [K] [Y]

Il ressort des pièces du dossier que tant M. [Z] [Y] que Mme [K] [Y] font valoir qu'ils n'auraient jamais consenti à la réduction du capital de la S.A.R.L. Mare e stagnu dans lequel ils étaient, en additionnant leurs parts, majoritaires s'ils avaient été informés du prononcé de l'adoption par leur père de Mme [H] [V] [I], fille de son épouse, et par la suite, profitant des dispositions des statuts de ladite société, qu'il avait cédé à celle-ci l'intégralité de ses parts en sa qualité de descendante par le prononcé du jugement d'adoption. Ce positionnement est contesté par les appelants qui précisent que les intimés avaient eu connaissance, dès son prononcé, du jugement d'adoption et qu'ils ne peuvent pas faire valoir la réalité d'un dol, leur père ayant eu un projet de location-gérance qui n'a pas abouti en raison de l'absence de garantie du locataire-gérant présenté et du refus de M. [Z] [Y] de reprendre la gérance quand cela lui a été proposé.

Pour appuyer leur action fondée sur le dol, M. [Z] [Y] et Mme [K] [Y] produisent les attestations de Mme [P] [W], leur mère et ancienne épouse de M. [R] [Y], et de Mme [E] [Y], leur tante paternelle, qui toutes deux relatent que, dans leur famille, on ne parle pas de l'appelante et que les intimés n'auraient jamais accepté la réduction de capital suivi de la cession de parts sociales à Mme [H] [V] [I]-[Y] s'ils n'avaient pas été persuadés que le projet d'adoption de Mme [H] [V] [I] par leur père avait été abandonné.

Il convient de rappeler que contrairement au positionnement des premiers juges, la charge de la preuve du dol pèse sur la partie qui s'en prévaut soit en l'espèce les intimés.

Pour ce faire, seules ces deux attestations sont produites. Or, les appelants par la production d'attestations émanant de membre de leur famille, fille aînée et frères et s'urs de M. [R] [Y] démontrent que les intimés étaient parfaitement informés du maintien de la procédure d'adoption de Mme [H] [V] [I] par leur père et de leur connaissance du prononcé du jugement d'adoption du 16 février 2017.

En effet, la s'ur aînée des appelants, Mme [M] [B] précise dans son attestation du 30 mai 2022 -pièce n°26 du bordereau des appelants- que son frère et sa s'ur «étaient informés que [H] a été adoptée dès que le jugement d'adoption a été prononcée en février 2017, pour en avoir discuté avec eux», ce qui n'est pas le rapport des propos d'un tiers mais la relation d'un fait constaté par elle contrairement à ce que laissent entendre dans leurs écritures les intimés. Cette réalité de l'information est confirmée aussi par MM. [X] et [D] [Y], oncles paternels des intimés -pièces n°28 et 29-, et Mme [L] [Y], tante paternelle des intimés -pièce n°27-, ainsi qu'une autre de leur tante paternelle, Mme [RA] [Y], pièce n° 27bis- qui précise que son «frère [R] [Y] avait bien informé tous ses enfants Biologiques ainsi que sa famille de l'Adoption de [H] en février 2017».

Mme [K] [Y] et M. [Z] [Y] ajoutent qu'ils n'étaient pas méfiants quant à la réalité de la situation de leur père, ce dernier invoquant sa fatigue comme justification de son projet d'arrêt d'activité, recherchant à vendre sa société puis cherchant un locataire-gérant étant en pourparlers avec M. [S] [C] à ce titre.

M. [S] [C], dans deux attestations des 10 septembre 2020 et 5 juillet 2022, indique avoir entamé, durant l'hiver 2017-2018, des pourparlers pour la signature d'un contrat de location-gérance avec vente future, étant assisté d'un avocat, et contre toute attente, selon lui, les pourparlers n'ont pas été menés à termes, ayant été informé par la suite de la cession des parts de la société à Mme [H] [V] [I]-[Y] -pièces n°11 et 13 du bordereau des intimés- et que c'est uniquement M. [R] [Y] qui a renoncé à finaliser leur projet alors qu'il avait fourni les justificatifs prouvant sa solvabilité demandés par ce dernier, précisant être toujours disposé à acquérir le dit «fond de commerce Mare e Stagnu».

La réalité des pourparlers engagés n'est pas contestée par les appelants et ressort d'ailleurs de la pièce n°12 des intimés qui relate des échange avec un certain [U], non dénommé, et M. [S] [C] entre le 12 février 2018 et le 4 juillet 2018, échanges dont il ressort que «[R] [M. [R] [Y]] voudrait une attestation bancaire» le 4 juillet 2018, exigence ancienne déjà mentionnée le 12 février 2018 par la phrase adressée à M. [C] «Il faut entre temps la promesse bancaire», promesse ou attestation qu'apparemment M. [S] [C] n'a pu obtenir en cinq mois et qui n'est pas plus produite dans le cadre de l'actuelle procédure.

La réalité de l'absence de garantie découle aussi de l'attestation de Mme [T] [WA], épouse de M. [R] [Y] et mère de Mme [H] [V] [I]-[Y], qui indique, dans un écrit du 9 juin 2022, que M. [S] [C] est venu les rencontrer à de nombreuses reprises relativement à la vente de la S.A.R.L. Mare e stagnu, qu'il les «a baladé durant des MOIS, AVEC des discours INCENSES...nous n'avons jamais eu les garanties DEMANdées et POUR TERMINER il a proposé une location gérance à MON MARI» ; Me Barthélémy Leonelli, avocat chargé de rédiger le projet de contrat de

location-gérance avec M. [S] [C], précisant dans un courrier du 16 décembre 20222 -pièce n°37 des appelants- qu'il n'avait jamais «reçu de la banque l'attestation d'accord de principe pour l'octroi d'un prêt destiné au financement de l'acquisition du fonds de commerce MARE E STAGNU».

Il est aussi établi par l'attestation de M. [D] [Y] du 3 juin 2022 que M. [R] [Y] a, dans un premier temps, proposé à son fils unique [Z], un des intimés, de reprendre son activité, épuisé qu'il était par vingt années de labeur à la construire, que ce dernier a répondu par la négative, ce que Mmes [T] [WA] et [L] [Y] confirment elles aussi dans leur attestation en y incluant aussi Mme [K] [Y], que devant ces refus la proposition de M. [C] a été analysée avant d'être abandonnée et que l'idée d'une reprise par sa fille [H], devenue sa descendante à la suite du jugement du 16 février 2017, a été retenue.

La cour relève en reprenant la chronologie de cette affaire que le jugement d'adoption a été prononcé le 16 février 2017, les pourparlers pour la vente de la S.A.R.L. Mare e stagnu se sont étalés de l'hiver 2017 au 4 juillet 2018, la réduction de capital contestée est intervenue le 31 août 2018 et la cession des parts entre M. [R] [Y] et sa fille Mme [H] [V] [I]-[Y] le 5 février 2019, publiée le 11 mars 2019, pour une introduction d'instance en contestation engagée les 1er et 22 février 2022, ce qui renforce la version donnée par les appelants d'autant plus que Mme [P] [W], mère des intimés, précise dans son attestation du 6 mars 2020 -pièce n° 15 des intimés- qu'elle avait mis en garde ses enfants par rapport au projet de réduction de capital proposée par leur père et qu'un avocat, qui est selon les termes mêmes de la Cour de cassation un professionnel avisé du droit, avait été consulté avant qu'ils ne donnent leur accord ; et qu'il n'est pas crédible, compte tenu des sommes en jeu qu'ils n'aient pas analysé et vérifié tous les paramètres induits par cette réduction et, notamment, ceux résultant de l'adoption par leur père de la fille de sa nouvelle épouse.

Le fait que les attestations produites par les deux parties proviennent pratiquement exclusivement de la sphère familiale n'entache aucunement leur valeur probante s'agissant de la relation d'événements relevant de la sphère familiale privée et intime, et ce ,d'autant plus que ces attestations sont nombreuses, similaires dans leur rapport de la réalité attestée et que n'ayant pas été contestée dans leur véracité en justice, elles ont une valeur probante complète.

En conséquence, le dol invoqué n'est pas démontré et la dissimulation de l'adoption de Mme [H] [V] [I]-[Y] n'est pas avérée, bien au contraire ; en conséquence, il convient de réformer le jugement entrepris sur ce point.

* Sur le caractère vil du prix perçu en contrepartie

Les intimés indiquent que la réduction de capital aurait dû être identique pour chacun des trois porteurs, y compris leur père, et qu'ils n'ont consenti à une réduction ne les

concernant qu'eux deux en raison du projet de contrat de location-gérance que leur père négociait.

Ils fondent aussi leur action sur les articles 1131 et 1169 du code civil estimant que le prix perçu pour la réduction du capital n'était pas sérieux ne correspondant pas à la valeur réelle des parts chiffrant l'actif net de la société à 725 115 euros en 2016 et 709 990 euros en 2015, soit, pour le nombre de parts cédées, à 7 165 euros la part, une somme à percevoir de 179 125 euros et non de 62 500 euros réellement perçue -et non de 6 250 euros comme indiqué à tort en page n°29 de leurs écritures. Ils précisent que même en ayant recours à la méthode de valorisation par la recherche de la valeur de productivité le prix reçu n'est pas sérieux avec une valeur de part sociale à 6 427,64 euros.

L'article 1131 du code civil sur lequel les intimés fondent leur action était libellé de la sorte «L'obligation sans cause, ou sur une fausse cause, ou sur une cause illicite, ne peut avoir aucun effet» et a été abrogé au 1er octobre 2016 et n'est donc pas applicable en l'espèce

L'article 1169 du code civil dispose qu'«Un contrat à titre onéreux est nul lorsque, au moment de sa formation, la contrepartie convenue au profit de celui qui s'engage est illusoire ou dérisoire», il convient donc d'analyser le prix reçu par les intimés en échange de la réduction du capital.

Sur le fait que la réduction de parts sociales n'a concerné que les parts des intimés en non celles de leur père, M. [R] [Y], si la règle de l'égalité est celle qui est appliquée le plus souvent, rien n'interdit comme en l'espèce d'y déroger dans le cadre d'une négociation, et ce, d'autant plus que la réalité des négociations portant sur une location-gérance a été retenue. Ce moyen est rejeté

En ce qui concerne l'analyse du prix reçu à la suite de la réduction de capital, le chiffre d'affaires des trois années précédant la réduction du capital s'établit ainsi :

¿ 2015, le montant total de l'actif s'établissait à 709 990 euros avec un passif à hauteur de 322 937 euros soit un solde de 387 053 euros et une part sociale d'une valeur de 3 870,53 euros,

¿ 2016, actif d'un montant de 725 115 euros pour un passif de 371 248 euros, soit un solde de 353 867 euros correspondant aux capitaux propres, et une valeur de part sociale à 3 538,67 euros,

¿ 2017, actif à 716 524 euros pour un passif de 367 431 euros, soit un solde de 349 093 euros et une part sociale s'établissant à 3 490,93 euros.

La moyenne sur les trois années antérieures à la réduction de capital établit la valeur moyenne de la part sociale à 3 633,38 euros (3 870,53 + 3 538,67 + 3 490,93 : 3).

Le calcul de cette moyenne permet de retenir que pour une réduction pour chacun des intimés de 25 parts sociales, ces derniers, qui ont perçu dans ce cadre une somme de

62 500 euros chacun, auraient pu percevoir avec la valeur moyenne retenue la somme de 90 834,50 euros, soit un différentiel de 28 334,50 euros représentant d'un peu plus d'un tiers de la valeur réelle des parts réduites.

Toutefois, l'existence ou la validité d'une réduction de parts n'est pas subordonnée à l'existence d'un prix correspondant à la valeur réelle du bien sur laquelle la réduction est faite. Ce qui serait contraire à la liberté contractuelle et la sécurité juridique.

Les intimés font valoir que le prix reçu est dérisoire ce qui entacherait de nullité l'acte réalisé.

Cependant il est constant que le prix dérisoire est assimilé à l'absence de prix et pour cela il faut que le prix reçu soit sans commune mesure avec la valeur du bien cédé.

La différence entre la somme perçue 62 500 euros par chacun des intimés et la somme qu'ils auraient pu percevoir, à savoir 90 834,50 euros, ne permet pas de qualifier le prix arrêté de dérisoire et par-là même de retenir que la réduction contractuellement consentie n'est pas causée comme le concluent les deux intimés.

Il convient donc, sans nécessité d'organiser une expertise dont le but n'est pas de pallier la carence des parties, d'infirmer le jugement entrepris sur ce point.

* Sur la cession de part et la qualité de descendante de Mme [H] [V] [I]-[Y] par rapport à M. [R] [Y]

Dans leurs dernières écritures les appelants sollicitent qu'il soit sursis à statuer sur cette demande un pourvoi en cassation ayant été déposé à l'encontre de l'arrêt rejetant la demande de rétractation de l'adoption de Mme [H] [V] [I] par M. [R] [Y], avec pour effet, dans le cadre d'un litige concernant l'état des personnes, la suspension de ses effets.

La cession des parts sociales entre M. [R] [Y] et Mme [H] [V] [I]-[Y] n'étant possible que si un lien filial existait entre eux, il est incontournable qu'il est nécessaire d'entendre le résultat du pourvoi en cassation déposé, la cassation éventuelle de l'arrêt prononcé ayant pour effet, sauf résistance de la juridiction de renvoi, de rendre irrégulière et impossible la dite cession de parts sociales entre deux personnes devenues étrangères aux yeux de la loi.

En conséquence, il convient de surseoir à statuer sur cette demande, celles y afférentes présentée en paiement de dommages et intérêts, des frais irrépétibles et de réserver les dépens.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir fondée sur la prescription de l'action intentée par M. [Z] [Y] et Mme [K] [Y],

Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a retenu l'existence d'un dol et annulé la réduction de capital de la S.A.R.L. Mare e stagnu du 31 août 2018,

Y ajoutant,

Rejette la demande d'annulation de la réduction de capital de la S.A.R.L. Mare e stagnu pour prix vil ou dérisoire,

Sursoit à statuer sur le surplus des demandes compte tenu du pourvoi en cassation déposé le 3 avril 2023 par M. [Z] [Y] et Mme [K] [Y] déférant l'arrêt du 1er février 2023 portant rejet de la rétractation de l'adoption de Mme [H] [V] [I] par M. [R] [Y],

Réserve les dépens.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Formation : Chambre civile section 2
Numéro d'arrêt : 22/00756
Date de la décision : 28/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-28;22.00756 ?
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