ARRET N°
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03 Mai 2023
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N° RG 21/00261 - N° Portalis DBVE-V-B7F-CCUL
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[Z] [G] épouse [K]
C/
S.A.R.L. GOLFO DI SOGNO
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Décision déférée à la Cour du :
09 novembre 2021
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AJACCIO
20/00024
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Copie exécutoire délivrée le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE SOCIALE
ARRET DU : TROIS MAI DEUX MILLE VINGT TROIS
APPELANTE :
Madame [Z] [G] épouse [K]
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représentée par Me David HONORAT, avocat au barreau de PARIS et par Me Anna-Livia GUERRINI, avocat au barreau de BASTIA
INTIMEE :
S.A.R.L. GOLFO DI SOGNO
N° SIRET : 046 120 176
[Adresse 2],
[Localité 1]
Représentée par Me David HAZZAN, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Julie BOUCHAREU, avocat au barreau de MARSEILLE
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 février 2023 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame BETTELANI, conseillère chargée du rapport,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Monsieur JOUVE, Président de chambre,
Madame COLIN, Conseillère
Madame BETTELANI, Conseillère
GREFFIER :
Madame CARDONA, Greffière lors des débats.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 03 mai 2023
ARRET
- CONTRADICTOIRE
- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe
- Signé par Monsieur JOUVE, Président de chambre et par Madame CARDONA, Greffière présente lors de la mise à disposition de la décision.
EXPOSE DU LITIGE
Madame [Z] [G] épouse [K] a été liée à la S.A.R.L. Golfo di Sogno, en qualité de directrice administrative suivant contrat de travail à durée indéterminée à effet du 15 juin 2019, tandis qu'elle exerçait les fonctions de gérante de la société depuis le 13 juillet 1994. Une révocation de ses fonctions de gérante est intervenue, selon procès-verbal d'assemblée générale de la S.A.R.L. Golfo di Sogno, en date du 6 octobre 2019.
Selon courrier en date du 23 décembre 2019, la S.A.R.L. Golfo di Sogno a convoqué Madame [Z] [G] épouse [K] à un entretien préalable à un licenciement fixé au 6 janvier 2020, et celle-ci s'est vu notifier son licenciement pour faute grave par lettre du 16 janvier 2020. signifiée par acte d'huissier le 20 janvier 2020.
Madame [Z] [G] épouse [K] a saisi le conseil de prud'hommes d'Ajaccio, par requête reçue le 11 février 2020, de diverses demandes.
Selon jugement du 9 novembre 2021, le conseil de prud'hommes d'Ajaccio a :
-dit que Madame [Z] [G] épouse [K] n'apporte pas la preuve de l'existence d'un contrat de travail la liant à la Société Golfo di Sogno pour la période du 1er octobre 2014 au 15 juin 2019,
-constaté l'absence de lien contractuel entre Madame [Z] [G] épouse [K] et la Société Golfo di Sogno sur la période du 1er octobre 2014 au 15 juin 2019,
-constaté que la procédure de licenciement est régulière,
-dit et jugé que la rupture du contrat de travail de Madame [K] repose sur une faute grave,
en conséquence,
-débouté Madame [Z] [G] épouse [K] de ses demandes, fins et conclusions,
-débouté la Société Golfo di Sogno de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
-condamné Madame [Z] [G] épouse [K] aux entiers dépens.
Par déclaration du 14 décembre 2021 enregistrée au greffe, Madame [Z] [G] épouse [K] a interjeté appel de ce jugement, en ce qu'il a : dit que Madame [Z] [G] épouse [K] n'apporte pas la preuve de l'existence d'un contrat de travail la liant à la Société Golfo di Sogno pour la période du 1er octobre 2014 au 15 juin 2019, constaté l'absence de lien contractuel entre Madame [Z] [G] épouse [K] et la Société Golfo di Sogno sur la période du 1er octobre 2014 au 15 juin 2019, constaté que la procédure de licenciement est régulière, dit et jugé que la rupture du contrat de travail de Madame [K] repose sur une faute grave, débouté Madame [Z] [G] épouse [K] de ses demandes, fins et conclusions, condamné Madame [Z] [G] épouse [K] aux entiers dépens.
Aux termes des dernières écritures de son conseil, transmises au greffe en date du 3 mars 2022, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens de la partie, Madame [Z] [G] épouse [K] a sollicité :
-d'infirmer le jugement prononcé par le conseil de prud'hommes d'Ajaccio le 9 novembre 2021 en ce qu'il a : dit que Madame [Z] [G] épouse [K] n'apporte pas la preuve de l'existence d'un contrat de travail la liant à la Société Golfo di Sogno pour la période du 1er octobre 2014 au 15 juin 2019, constaté l'absence de lien contractuel entre Madame [Z] [G] épouse [K] et la Société Golfo di Sogno sur la période du 1er octobre 2014 au 15 juin 2019, constaté que la procédure de licenciement est régulière, dit et jugé que la rupture du contrat de travail de Madame [K] repose sur une faute grave, débouté Madame [Z] [G] épouse [K] de ses demandes, fins et conclusions, débouté la Société Golfo di Sogno de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile, condamné Madame [Z] [G] épouse [K] aux entiers dépens,
-statuant à nouveau :
*de débouter la Société Golfo di Sogno de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
*de fixer la moyenne de rémunération de Madame [Z] [K] au titre des mois précédant son licenciement à la somme de 12.732,89 euros, de dire et juger que Madame [K] bénéficie d'une ancienneté remontant au 1er octobre 2014 en application de son contrat de travail, de dire et juger en tout état de cause que le licenciement opéré ne repose sur aucune cause réelle et sérieuse, en conséquence, de condamner la Société Golfo di Sogno à verser à Madame [K] la somme de 76.397,34 euros, à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse la somme de 16.711,92 euros à titre d'indemnité légale de licenciement, la somme de 38.198,67 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, la somme de 3.819,87 euros bruts, au titre des congés payés y afférents, la somme de 26.874,55 euros à titre de rappels de salaires, outre la somme de 2.687,45 euros au titre des congés payés y afférents, la somme de 12.732,89 euros à titre d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement, de condamner la Société Golfo di Sogno à remettre à Madame [Z] [K], sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter du prononcé de l'arrêt à intervenir, son attestation Pôle emploi ainsi que son certificat de travail, à remettre sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter du prononcé de l'arrêt à intervenir, ses bulletins de paie conformes à son contrat de travail, avec une reprise de son ancienneté, pour la période allant du mois de juin 2019 au mois de janvier 2020, de condamner la Société Golfo di Sogno à verser la somme de 5.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Aux termes des dernières écritures de son conseil, transmises au greffe en date du 16 mai 2022, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens de la partie, la S.A.R.L. Golfo di Sogno a demandé :
-de confirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes d'Ajaccio le 9 novembre 2021,
-ce faisant, de constater l'absence de contrat de travail et de lien de subordination sur la période du 1er octobre 2014 au 15 juin 2019, de juger que la procédure de licenciement est régulière, de juger que le licenciement de Madame [K] repose sur une faute grave, de débouter Madame [K] de ses diverses fins et conclusions,
-en tout état de cause, de la condamner à payer à la Société Golfo di Sogno la somme de 6.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure.
La clôture de l'instruction a été ordonnée le 6 septembre 2022, et l'affaire fixée à l'audience de plaidoirie du 8 novembre 2022, puis un renvoi a été ordonné à l'audience du 14 février 2023.
A l'audience du 14 février 2023, l'affaire a été appelée et la décision mise en délibéré par mise à disposition au greffe le 3 mai 2023.
MOTIFS
Madame [G] épouse [K] critique en premier lieu le jugement en ce qu'il a dit qu'elle n'apporte pas la preuve de l'existence d'un contrat de travail la liant à la Société Golfo di Sogno pour la période du 1er octobre 2014 au 15 juin 2019. Elle fait valoir ne pas invoquer l'existence d'un contrat de travail pour cette période, mais simplement solliciter une fixation de son ancienneté au 1er octobre 2014, conformément au contrat de travail à durée indéterminée, signé en date du 15 juin 2019, la liant à la S.A.R.L. Golfo di Sogno. La S.A.R.L. Golfo di Sogno sollicite à rebours la confirmation pure et simple du jugement.
La cour ne peut que constater, au vu de l'exposé du litige opéré par le conseil de prud'hommes, que Madame [G] épouse [K] ne formait pas de demande au titre d'une relation de travail à effet du 1er octobre 2014, mais une demande tendant dire et juger que Madame [K] bénéficie d'une ancienneté remontant au 1er octobre 2014 en application de son contrat de travail, demande sur laquelle n'ont pas statué en réalité les premiers juges, et qui est réitérée en cause d'appel. Réparant l'omission de statuer des premiers juges, il convient de constater que, comme l'affirme l'appelante, le contrat de travail à effet du 15 juin 2019 -dont la validité n'est pas contestée- liant Madame [G] épouse [K] à la S.A.R.L. Golfo di Sogno, prévoyait en son article 1 que 'La salariée bénéficiera de l'ancienneté acquise dans l'entreprise depuis le 01 octobre 2014'. Le fait que les parties n'aient pas été liées par une relation de travail à effet du 1er octobre 2014 n'a aucune incidence sur le jeu de cette clause contractuelle, non contestée par la S.A.R.L. Golfo di Sogno. Il y a donc lieu de dire qu'ensuite du contrat de travail liant les parties à effet du 15 juin 2019, Madame [G] épouse [K] bénéficie d'une ancienneté remontant au 1er octobre 2014.
En l'absence de demande relative à l'existence d'un contrat de travail liant les parties à effet du 1er octobre 2014, il n'était pas nécessaire pour les premiers juges de dire que Madame [G] épouse [K] n'apportait pas la preuve de l'existence d'un contrat de travail la liant à la Société Golfo di Sogno pour la période du 1er octobre 2014 au 15 juin 2019, chef du jugement qui sera ainsi réformé comme sans objet.
En revanche, rien n'interdisait aux premiers juges de constater l'absence de lien contractuel entre Madame [Z] [G] épouse [K] et la Société Golfo di Sogno sur la période du 1er octobre 2014 au 15 juin 2019, point qui n'est pas contesté aux débats, de sorte que ce chef sera confirmé.
Pour ce qui est des demandes afférentes aux rappels de salaire et congés payés afférents pour la période du 1er décembre 2019 au 20 janvier 2020, Madame [G] épouse [K] se prévaut d'une absence de paiement de l'employeur selon elle non justifié puisque suivant ses écritures d'appel, l'absence à son poste n'a été due qu'au changement de serrures de son employeur, qui a voulu s'opposer par ce bais au fait qu'elle exécute son contrat de travail, ce que dénie la S.A.R.L. Golfo di Sogno, qui se fonde, pour s'opposer aux demandes en paiement adverses, sur l'absence injustifiée de la salariée à son poste de travail, et donc ainsi, implicitement mais nécessairement, sur l'absence de tenue à disposition de la salariée. Force est de constater que s'agissant des deux attestations évoquées, au soutien de l'existence d'un changement de serrure opéré par l'employeur, celle émanant de Monsieur [V] ne peut être prise en compte par la cour, appréciant souverainement la valeur et la portée des éléments qui lui sont soumis, faute de certitude sur l'impartialité de cet attestant, se plaignant d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse de son employeur et ainsi manifestement en contentieux avec celui-ci, tandis que celle de Madame [N] ne fait pas état d'un changement de serrures réalisé par l'employeur, indiquant par contre que Madame [G] épouse [K] était présente à son poste de travail à compter du 13 janvier 2020, ce qui est cohérent avec les énonciations de la lettre de licenciement évoquant une reprise de la salariée, en réaction avec la procédure de licenciement engagée. Il ne peut donc être retenu que l'absence de la salariée à son poste était motivée par l'attitude de l'employeur.
Au vu des éléments soumis, l'employeur justifie que la salariée, absente de son poste jusqu'au 13 janvier 2020, ne s'est ainsi pas tenue à disposition effective, de sorte que l'absence de paiement de salaires du 1er décembre 2019 jusqu'au 12 janvier 2020 est fondée. En revanche sur la période courant du 13 janvier 2020 jusqu'à la rupture, une absence de tenue à disposition de la salariée ou un refus d'exécuter son travail n'est pas mis en évidence par l'employeur. Dès lors, après avoir observé que le salaire contractuel mensuel de Madame [G] épouse [K] était de 10.281,91 euros brut et qu'il n'est pas argué d'un quelconque paiement opéré par l'employeur pour la période de janvier 2020, est dû un rappel de salaires à hauteur de 2.399,11 euros brut pour la période courant du 13 janvier 2020 jusqu'à la rupture, outre des congés payés afférents à hauteur de 239,91 euros brut.
Pour ce qui est des demandes afférentes à la prime de décembre 2019 et congés payés afférents, Madame [G] épouse [K] se prévaut des termes de l'attestation Pôle emploi délivrée par l'employeur, faisant état d'une 'prime non liée à l'activité' d'un montant de '9959,00' euros ayant comme 'Date de paiement' , le '31/12/2019' et expose qu'aucun paiement n'a été en réalité effectué. L'employeur n'invoque pas d'erreur dans l'attestation Pôle emploi, mais uniquement une absence injustifiée de la salariée, pour s'opposer à la demande adverse; or, de par les mentions de l'attestation Pôle emploi, mentions dont le caractère fondé n'est pas contesté, il a reconnu qu'une prime, non liée à l'activité de la salariée donc non liée à sa présence dans l'entreprise, était existante, prime dont il ne justifie pas du paiement, en l'absence de tout élément, notamment comptable, en ce sens. Consécutivement, la S.A.R.L. Golfo di Sogno ne pourra qu'être condamnée au paiement d'une somme de 9.959 euros au titre de la prime de décembre 2019, non liée à l'activité de la salariée. Pour le surplus, Madame [G] épouse [K], qui doit apporter les éléments de fait et de droit nécessaires au succès de ses prétentions, ne met pas en évidence que des congés payés puissent être réclamés sur cette prime, non liée à l'activité de la salariée.
Après infirmation du jugement à ces égards, sera ainsi prévue la condamnation de la S.A.R.L. Golfo di Sogno à verser Madame [G] épouse [K] les sommes de 2.399,11 euros brut à titre de rappel de salaires pour la période courant du 13 janvier 2020 jusqu'à la rupture, outre une somme 239,91 euros brut au titre des congés payés afférents, ainsi qu'une somme de 9.959 euros au titre d'une prime de décembre 2019, non liée à l'activité de la salariée. Madame [G] épouse [K] sera déboutée du surplus de ses demandes, non fondé. Les demandes en sens contraire seront rejetées.
Concernant les demandes afférentes à la régularité du licenciement, Madame [G] épouse [K] critique vainement le jugement. En effet, l'employeur démontre, au vu des pièces soumises à la juridiction, de l'existence d'une convocation à entretien préalable effectivement adressée par lettre recommandée le 23 décembre 2019. Il n'est donc pas mis en évidence d'irrégularité de la procédure de licenciement, telle qu'arguée par Madame [G] épouse [K], et le jugement entrepris ne pourra ainsi qu'être confirmé en ce qu'il a constaté que la procédure de licenciement est régulière et débouté Madame [G] épouse [K] de sa demande d'indemnité pour non respect de la procédure de licenciement. Les demandes en sens contraire seront rejetées.
S'agissant des demandes afférentes au bien-fondé du licenciement, il y a lieu de rappeler que l'article L1232-1 du code du travail subordonne la légitimité du licenciement à une cause réelle et sérieuse. En application de l'article L1235-1 du code du travail, lorsqu'il est saisi du bien fondé d'une mesure de licenciement, le juge se détermine au vu des éléments qui lui sont fournis par les parties, le doute devant profiter au salarié. Il est néanmoins admis qu'il appartient à l'employeur d'établir de façon certaine la réalité des faits et de fournir au juge des éléments permettant de caractériser leur caractère suffisamment sérieux pour légitimer le licenciement. Il convient donc, en premier lieu, d'apprécier la réalité des faits énoncés par la lettre de licenciement, précisée le cas échéant par l'employeur, fixant de manière irrévocable les limites du litige, puis le sérieux du motif invoqué. Il appartient aux juges du fond de qualifier les faits et de décider s'il constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement. Dans ce cadre, la juridiction peut être amenée à restituer leur exacte qualification aux faits invoqués par l'employeur, sans dénaturation de la lettre de licenciement; elle n'est ainsi pas liée par une qualification erronée donnée au licenciement, ni par une impropriété de termes figurant dans la lettre de licenciement. Ce n'est que dans un second temps, lorsque la légitimité du licenciement est tenue pour acquise que l'employeur peut chercher à s'exonérer des indemnités de rupture en invoquant la faute grave du salarié, étant précisé que la charge de la preuve de la gravité de la faute incombe exclusivement à l'employeur. La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la durée du préavis.
En application de l'article L1332-4 du code du travail, aucun fait fautif ne peut donner lieu, à lui seul, à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales.
Toutefois, un comportement fautif de plus de deux mois pourra être sanctionné, si, dans l'intervalle, l'employeur a engagé des poursuites pénales, ou si ce comportement fautif s'inscrit dans un phénomène répétitif, la dernière faute devant, elle, se situer à moins de deux mois de l'engagement de poursuites disciplinaires à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance.
La lettre de licenciement, datée du 16 janvier 2020, qui fixe les limites du litige (faute pour l'employeur d'avoir fait usage de la possibilité d'en préciser les motifs en application de l'article R1232-13 du code du travail), ne sera pas reprise in extenso au présent arrêt, compte tenu de sa longueur.
En dépit des imperfections de formulation de la lettre de rupture qui constituent clairement des maladresses rédactionnelles, il ressort de celle-ci, sans dénaturation, que l'employeur, qui se place sur le terrain disciplinaire, reproche à Madame [G] épouse [K] des faits afférents à :
-une attribution, sans consultation de ses associés et sans respect des procédures de consultation des institutions représentatives du personnel, ni de la procédure civile, d'un contrat à durée indéterminée à Monsieur [V] en tant que responsable entretien, alors même que son contrat à durée déterminée est arrivé à son terme le 31 octobre 2019, poursuite de la relation contractuelle de nature à entraîner probablement un contentieux prud'homal,
-une absence de la salariée, malgré l'existence d'un contrat de travail à effet du 15 juin 2019 la liant à la S.A.R.L. Golfo di Sogno et des obligations y étant liées (dont celle de fourniture d'une prestation de travail), avec une reprise et un retour de la salariée dans les locaux de la société uniquement en réaction à la convocation à entretien préalable.
Il y a lieu de constater que Madame [G] épouse [K] ne produit pas de pièces à même de démontrer que les faits invoqués ne correspondent pas aux motifs réels du licenciement et que le licenciement a en réalité une cause distincte.
Dans le même temps, avoir rappelé que les faits invoqués dans la lettre de licenciement n'ont pas nécessairement à être datés, il convient d'observer que les motifs énoncés dans la lettre de licenciement sont suffisamment précis pour permettre au juge d'en apprécier le caractère réel et sérieux, contrairement à ce que énonce l'appelante.
Si Madame [G] épouse [K] invoque une prescription des différents faits reprochés, il y a lieu de constater, qu'au regard des pièces produites aux débats :
-s'agissant des faits reprochés afférents à l'attribution d'un contrat à durée indéterminée à Monsieur [V], ceux-ci se situent à moins de deux mois de l'engagement des poursuites disciplinaires, le 23 décembre 2019, et ne sont pas donc prescrits,
-pour ce qui est des faits afférents à l'absence de la salariée, l'employeur justifie n'avoir eu connaissance exacte de la réalité, de la nature et de l'ampleur des faits que moins de deux mois avant la date d'engagement de la procédure disciplinaire, le 23 décembre 2019, étant rappelé que Madame [S] épouse [K], gérante de la société jusqu'à sa révocation par procès-verbal d'assemblée générale du 6 octobre 2019, n'a justifié de l'existence d'un contrat de travail à durée indéterminée la liant à la S.A.R.L. Golfo di Sogno à effet du 15 juin 2019, que par lettre adressée le 18 novembre 2019, en réponse aux courriers successifs du nouveau gérant de ladite S.A.R.L. des 21 octobre et 6 novembre 2019 l'informant notamment n'avoir à ce jour 'aucune connaissance d'un contrat de travail [...] qui vous lie à la société' et la priant pour le courrier du 21 octobre 2019 'de bien vouloir me faire parvenir les éléments nécessaires à la régularisation de votre dossier', tandis que celui du 6 novembre 2019 l'invitait à 'régulariser au plus vite la situation' à cet égard. Les faits reprochés afférents à l'absence de la salariée ne peuvent donc être considérés comme prescrits, étant en sus observé à toutes fins utiles, qu'ils se situaient au moins partiellement moins de deux mois de l'engagement des poursuites disciplinaires, le 23 décembre 2019, étant rappelé qu'un fait fautif dont l'employeur a eu connaissance plus de deux mois avant l'engagement des poursuites peut être pris en considération lorsque le même comportement fautif du salarié s'est poursuivi ou répété dans ce délai.
Sur le fond, à l'appui des faits reprochés dans la lettre de licenciement, l'employeur se réfère à différentes pièces (notamment une lettre de la S.A.R.L. Golfo di Sogno adressée à Monsieur [V] le 12 novembre 2019 ayant pour objet la 'Notification du terme de votre contrat à durée déterminée' ; les courriers adressés par le nouveau gérant de la S.A.R.L. Golfo di Sogno à Madame [G] épouse [K] en date des 21 octobre et 6 novembre 2019 ; diverses pièces adverses, dont des courriers de Madame [G] épouse [K] des 12 et 18 novembre 2019 et le contrat de travail à durée indéterminée à effet du 15 juin 2019 liant Madame [G] épouse [K] à la S.A.R.L. Golfo di Sogno).
Toutefois, il ne se déduit pas de ces éléments que la matérialité des faits reprochés afférents à l'attribution, sans consultation et sans respect des procédures, par Madame [G] épouse [K] d'un contrat à durée indéterminée à Monsieur [V] est établie. En réalité comme souligné de manière fondée par l'appelante, qui ne reconnaît pas ces faits, aucun des éléments soumis à l'appréciation de la juridiction ne vient confirmer cette attribution par Madame [G] épouse [K] d'un contrat à durée indéterminée à Monsieur [V] (dont le contrat à durée déterminée est arrivé à terme le 31 octobre 2019, soit plusieurs semaines après la prise de fonctions du nouveau gérant le 6 octobre 2019), ni a fortiori une attribution irrégulière d'un tel contrat, à rebours de ce qu'a énoncé le conseil de prud'hommes. La réalité des faits, objets du premier grief énoncé dans la lettre de licenciement, ne peut donc être retenue.
Pour ce qui est des faits afférents à l'absence de la salariée, si les pièces visées par l'employeur, (qui ne font pas mention d'une mise en demeure de reprendre le travail ou de justifier de son absence à son poste de travail, aucun courrier en ce sens n'étant produit, en ce inclus les courriers des 21 octobre et 6 novembre 2019) ne sont pas déterminantes pour démontrer de leur matérialité, l'employeur se fonde par contre, de manière fondée, sur une reconnaissance de la matérialité de cette absence par Madame [G] épouse [K], ressortant des propres écritures de l'appelante. Si Madame [G] épouse [K] fait état, pour motiver cette absence et ainsi dénier le grief mentionné dans la lettre de licenciement, du changement de serrures opéré par l'employeur l'empêchant d'accéder à son poste de travail, elle ne démontre pas du bien fondé de ses affirmations, au regard des deux attestations soumises, dont l'une ne peut être prise en compte par la cour, pour les motifs exposés précédemment. Plus globalement, elle ne produit pas d'éléments probants de nature à justifier de l'inanité des faits invoqués par l'employeur, ou à faire peser un doute suffisant sur ceux-ci. Par suite, la réalité des faits objets du second grief sera considérée comme établie.
Au vu de ce qui précède, du caractère établi de l'un des griefs invoqués dans la lettre de licenciement (ne se limitant pas à un comportement isolé ou ponctuel de la salariée), de sa nature, la cour observe que celui-ci est suffisamment sérieux pour, sans disproportion, fonder un licenciement de Madame [G] épouse [K], nonobstant l'absence de sanction disciplinaire antérieure, tandis que le fait que l'employeur ait, patiemment, attendu plusieurs semaines avant d'engager une procédure disciplinaire de licenciement n'empêche aucunement le prononcé d'une telle mesure. Le jugement entrepris sera ainsi confirmé en ce qu'il a débouté Madame [G] épouse [K] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
En revanche, l'employeur ne rapporte pas la preuve de ce que les faits établis imputables à la salariée -n'ayant en réalité pas été destinataire, comme déjà observé, de mise en demeure de reprendre son poste malgré le niveau de responsabilités attaché audit poste, et n'ayant pas subi de mise à pied conservatoire avant le licenciement, ayant d'ailleurs repris son poste de travail à compter du 13 janvier 2020-, aient constitué une violation des obligations du contrat de travail telle qu'ils aient rendu impossible le maintien de celle-ci dans l'entreprise même pendant la durée du préavis, étant observé que si l'absence de mise à pied conservatoire n'empêche pas l'employeur de licencier pour faute grave, elle ne vient pas étayer l'impossibilité de maintien de la salariée dans l'entreprise pendant le préavis.
Le licenciement de Madame [G] épouse [K] sera donc considéré comme fondé sur une cause réelle et sérieuse, mais non sur une faute grave. Le jugement entrepris, critiqué de manière justifiée en ce qu'il a conclu dans sa motivation au caractère fondé du licenciement pour faute grave, sera donc infirmé en ce qu'il a : dit et jugé que la rupture du contrat de travail de Madame [K] repose sur une faute grave.
Le licenciement n'étant pas fondé sur une faute grave et l'inexécution du préavis étant imputable à l'employeur, après infirmation du jugement en ses dispositions relatives aux indemnités de rupture et congés payés sur préavis, il sera octroyé à Madame [G] épouse [K] les sommes suivantes :
-la somme de 10.711,69 euros à titre d'indemnité légale de licenciement, au regard de l'ancienneté de la salarié, fixée contractuellement au 1er octobre 2014, des dispositions de l'article R1234-2 du code du travail et de la moyenne de salaires la plus favorable au sens de l'article R1234-4 du code du travail, Madame [G] épouse [K], qui doit apporter les éléments de fait et de droit nécessaires au succès de ses prétentions, ne justifiant pas du bien fondé de son calcul au delà de la somme précitée, son calcul se fondant notamment sur une moyenne de rémunération de 12.732,89 euros, qui est erronée en l'absence de salaires dus pour la période courant du 1er décembre 2019 au 12 janvier 2020, tel qu'exposé précédemment, de sorte que la demande corrélative de fixation à cette moyenne de 12.732,89 euros ne pourra être accueillie appelant la confirmation du jugement sur ce point,
-la somme de 30.845,73 euros, somme exprimée nécessairement en brut, à titre d'indemnité compensatrice de préavis (correspondant à trois mois, au vu des dispositions conventionnelles applicables et des salaires que Madame [G] épouse [K] appartenant à la catégorie cadre, aurait perçus si elle avait effectué le préavis), outre la somme de 3.084,57 euros brut à titre de congés payés sur préavis, Madame [G] épouse [K], qui doit apporter les éléments de fait et de droit nécessaires au succès de ses prétentions, ne justifiant pas du bien fondé de son calcul au delà des sommes précitées, Madame [G] épouse [K] sera déboutée du surplus de ses demandes au titre des indemnités de rupture et les demandes en sens contraire seront rejetées.
Au regard des développements précédents, après infirmation du jugement sur ce point, il sera ordonné à la S.A.R.L. Golfo di Sogno de remettre à Madame [G] épouse [K] un dernier bulletin de paye et des documents sociaux (attestation Pôle emploi et certificat de travail) rectifiés conformément au présent arrêt, dans un délai de deux mois à compter de la signification de la présente décision, ce sans astreinte inutile en l'espèce, Madame [G] épouse [K] étant déboutée du surplus de ses demande à ces égards, non justifié. Les demandes en sens contraire seront rejetées.
La S.A.R.L. Golfo di Sogno, succombant principalement à l'instance sera condamnée aux dépens de première instance (le jugement entrepris étant infirmé en ses dispositions querellées relatives aux dépens de première instance) et aux dépens de l'instance d'appel.
Le jugement entrepris, non utilement critiqué, sera confirmé en ses dispositions querellées relatives aux frais irrépétibles de première instance.
L'équité ne commande pas de prévoir de condamnation au titre des frais irrépétibles d'appel.
Les parties seront déboutées de leurs demandes plus amples ou contraires à ces égards.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe le 3 mai 2023,
INFIRME le jugement rendu par le conseil de prud'hommes d'Ajaccio le 9 novembre 2021, tel que déféré, sauf :
-en ce qu'il constaté l'absence de lien contractuel entre Madame [Z] [G] épouse [K] et la Société Golfo di Sogno sur la période du 1er octobre 2014 au 15 juin 2019,
-en ce qu'il a constaté que la procédure de licenciement est régulière et a débouté Madame [Z] [G] épouse [K] de sa demande d'indemnité pour non respect de la procédure de licenciement,
-en ce qu'il a débouté Madame [Z] [G] épouse [K] de sa demande de fixation de rémunération à 12.732,89 euros,
-en ses dispositions querellées au titre des frais irrépétibles de première instance,
Et statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,
Réparant l'omission de statuer des premiers juges, DIT qu'ensuite du contrat de travail liant les parties à effet du 15 juin 2019, Madame [G] épouse [K] bénéficie d'une ancienneté remontant au 1er octobre 2014,
DIT que le licenciement dont Madame [Z] [G] épouse [K] a été l'objet de la part de la S.A.R.L. Golfo di Sogno est fondé sur une cause réelle et sérieuse, mais non sur une faute grave,
CONDAMNE la S.A.R.L. Golfo di Sogno, prise en la personne de son représentant légal, à verser à Madame [Z] [G] épouse [K] les sommes suivantes:
- 2.399,11 euros brut à titre de rappel de salaires pour la période courant du 13 janvier 2020 jusqu'à la rupture, outre 239,91 euros brut au titre des congés payés afférents,
- 9.959 euros au titre d'une prime de décembre 2019, non liée à l'activité de la salariée,
- 10.711,69 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,
- 30.845,73 euros brut, à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 3.084,57 euros brut à titre de congés payés sur préavis,
ORDONNE à la S.A.R.L. Golfo di Sogno, prise en la personne de son représentant légal, de remettre à Madame [Z] [G] épouse [K] un dernier bulletin de paye et des documents sociaux (attestation Pôle emploi, certificat de travail) rectifiés conformément au présent arrêt, dans un délai de deux mois à compter de la signification de la présente décision,
DEBOUTE les parties de leurs demandes de condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d'appel,
CONDAMNE la S.A.R.L. Golfo di Sogno, prise en la personne de son représentant légal, aux dépens de première instance et de l'instance d'appel,
DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT