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25/01/2023 | FRANCE | N°21/00492

France | France, Cour d'appel de Bastia, Chambre civile section 2, 25 janvier 2023, 21/00492


Chambre civile

Section 2



ARRÊT N°



du 25 JANVIER 2023



N° RG 21/00492

N° Portalis DBVE-V-B7F-CBNF

JD - C



Décision déférée à la Cour :

Jugement Au fond, origine TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'[Localité 1], décision attaquée en date du 08 Mars 2021, enregistrée sous le n° 19/00011



S.C.I. INTRA MUROS



C/



S.D.C. IMMEUBLE LE MALTE







Copies exécutoires délivrées aux avocats le











COUR D'APPEL DE BASTIA



CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU



VINGT-CINQ JANVIER

DEUX-MILLE-VINGT-TROIS







APPELANTE :



S.C.I. INTRA MUROS

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cet...

Chambre civile

Section 2

ARRÊT N°

du 25 JANVIER 2023

N° RG 21/00492

N° Portalis DBVE-V-B7F-CBNF

JD - C

Décision déférée à la Cour :

Jugement Au fond, origine TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'[Localité 1], décision attaquée en date du 08 Mars 2021, enregistrée sous le n° 19/00011

S.C.I. INTRA MUROS

C/

S.D.C. IMMEUBLE LE MALTE

Copies exécutoires délivrées aux avocats le

COUR D'APPEL DE BASTIA

CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU

VINGT-CINQ JANVIER

DEUX-MILLE-VINGT-TROIS

APPELANTE :

S.C.I. INTRA MUROS

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentée par Me Marc MAROSELLI, avocat au barreau d'[Localité 1]

INTIMÉ :

Syndicat des copropriétaires de l'IMMEUBLE LE MALTE résidences des Iles à [Localité 1]

représentée par la SARL ACTIF IMMOBILIER, prise en la personne de ses gérants en exercice domiciliés au siège social

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me Marylène CAMMILLI-BUCQUET, avocate au barreau d'[Localité 1]

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 10 novembre 2022, devant Judith DELTOUR, conseillère, chargée du rapport, les avocats ne s'y étant pas opposés.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Jean-Jacques GILLAND, président de chambre

Judith DELTOUR, conseillère

Stéphanie MOLIES, conseillère

GREFFIER LORS DES DÉBATS :

Vykhanda CHENG.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 25 janvier 2023.

ARRET :

Contradictoire,

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Jean-Jacques GILLAND, président de chambre, et par Cécile BORCKHOLZ, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

PROCÉDURE :

Alléguant l'existence d'un acte authentique dressé le 30 mai 2014 par Me [M] [V], notaire, suivant lequel la S.C.I. Intra muros, dont les seuls associés sont M. [PC] [E] et M. [RH] [VH], a acquis de Mme [T] [I] et M. [A] [I] les lots l64, 165, 166, 167, 168, 169, 184, 185, 186 et 187 constituant les caves d'un ensemble immobilier édifié sur la parcelle cadastrée [Cadastre 4] sur la commune d'[Localité 1] (Corse-du-Sud), au prix de 15 000 euros, un état descriptif de division en contradiction avec la mention dans l'acte que ces lots n'ont jamais eu la consistance de caves mais d'un appartement reçu à titre de dation en paiement par l'auteur commun des vendeurs, une assemblée générale du 16 mars 2015 lui ayant donné pouvoir pour agir et obtenir la remise en état des lieux, une proposition du 16 février 2017 de M. [RH] [VH] de modifier état descriptif de division, par acte du 18 décembre 2018, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble le Malte a assigné devant le tribunal de grande instance d'[Localité 1], la S.C.I. Intra muros pour obtenir la remise en état des lieux sous astreinte, le paiement de dommages et intérêts, des dépens et de 6 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 8 mars 2021, le tribunal judiciaire d'[Localité 1] a :

- écarté les exceptions d'irrecevabilité,

- ordonné à la S.C.I. Intra Muros de mettre les lots 160 à 169 en conformité avec l'état descriptif de division et le règlement de copropriété selon le plan de l'entrée B de l'immeuble Le Malte annexé à la présente décision sous astreinte de 1000 euros par jour de retard, qui commencera à courir dans le délai de trois mois à compter de la signification du jugement à intervenir,

- débouté le syndicat des copropriétaires de l'immeuble le Malte de sa demande de dommages et intérêts,

- ordonné l'exécution provisoire,

- condamné la S.C.I. Intra Muros au paiement des dépens,

- condamné la S.C.I. Intra Muros à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble Le Malte la somme de 3000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration reçue le 28 juin 2021, la S.C.I. Intra muros a interjeté appel de la décision.

Par dernières conclusions communiquées le 1er décembre 2021, la S.C.I. Intra muros a demandé de :

- dire l'appel recevable et bien fondé,

En conséquence

- d'infirmer le jugement en ce qu'il a ordonné à la S.C.I. Intra Muros de mettre les lots 160 à 169 en conformité avec l'état descriptif de division et le règlement de copropriété selon le plan de l'entrée B de l'immeuble Le Malte annexé à la présente décision sous astreinte de 1000 euros par jour de retard, qui commencera à courir dans le délai de trois mois à compter de la signification du jugement à intervenir, l'a condamnée au paiement des dépens et de 3000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et l'a déboutée de ses demandes tendant à déclarer irrecevable l'action, faute d'intérêt à agir en ce qui concerne les lots privatifs numéro 160 à 163, à déclarer mal fondé le syndicat des copropriétaires de l'immeuble le Malte en son action et le débouter de ses demandes de remise en état, à déclarer que la S.C.I. Intra Muros est propriétaire de tous les lots qu'elle a acquis des consorts [I] le 30 mai 2014 par application de la prescription acquisitive trentenaire,

- débouter le syndicat des copropriétaires de l'immeuble Le Malte de toutes ses demandes plus amples ou contraires,

À titre reconventionnel,

- condamner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble Le Malte au paiement d'une somme de 7000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance,

À titre reconventionnel,

- déclarer irrecevable, faute d'intérêt à agir, en ce qui concerne les lots privatifs numéros 160 à 163, l'action initiée par le syndicat des copropriétaires Le Malte et tendant à la remise en état des lieux conformément à l'état descriptif de division,

En tout état de cause,

- la déclarer mal fondée et débouter le syndicat des copropriétaires de l'immeuble le Malte de ses demandes de remise en état,

Vu l'article 2272 du Code civil,

- déclarer qu'au surplus, la S.C.I. Intra Muros est propriétaire de tous lots qu'elle a acquis des consorts [I] le 30 mai 2014, en application de la prescription acquisitive trentenaire,

- débouter le syndicat des copropriétaires de l'immeuble Le Malte de toutes ses demandes plus amples ou contraires,

À titre reconventionnel,

- le condamner au paiement de 6000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de la première instance et de l'instance d'appel.

Elle a fait valoir en substance avoir acquis dix lots, dénommés caves, qui ont toujours eu la consistance d'un appartement reçu en dation en paiement par l'auteur commun des vendeurs, qui déclaraient 'n'avoir réalisé, de leur propre chef, aucun empiétement sur les parties communes, et que l'acquéreur [déclarait] faire son affaire personnelle de toute action de la copropriété', qu'elle avait acquis par prescription l'ensemble des lots litigieux et que le raisonnement du tribunal était critiquable. Elle a exposé que la demande du syndicat des copropriétaires était mal fondée, à défaut de changement de destination, les caves prévues n'ayant jamais été réalisées, qu'il s'agissait d'un appartement loué, destination conforme à celle d'un immeuble d'habitation et que les parties communes n'avaient jamais existé. Il a ajouté qu'il avait pu prescrire les parties communes contre un titre, que sa prescription s'était jointe à celle de ses auteurs, qu'elle était continue, non interrompue, paisible, publique, non équivoque et à titre de propriétaire, que cette prescription est abrégée. Elle a soutenu qu'il n'y avait aucune obligation pour les acquéreurs de porter à la connaissance de la copropriété la différence entre le titre et le bâti ou de notifier au syndic la prescription acquisitive d'une partie commune, que les locaux étaient en très mauvais état, sombres, vétustes et mal chauffés lors de l'acquisition et qu'elle payait les taxes foncières. Elle a estimé que le syndicat des copropriétaires n'était pas capable d'identifier les propriétaire des lots 160 à 163 et qu'il se substituait à eux pour réclamer la remise en état. Elle a fait valoir la qualité de notaire d'un des associés, sa

connaissance de l'inadéquation entre état descriptif de division, règlement de copropriété et la présence d'un appartement, que l'action en justice visée dans l'acte d'acquisition ne rend pas la possession équivoque mais retient la probabilité que l'usucapion soit contestée en justice, qu'elle démontre une possession non équivoque et publique.

Par dernières conclusions communiquées le 3 octobre 2022, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble Le Malte a sollicité de :

- recevoir son appel incident et déclarer recevable et bien fondée l'action du syndicat des copropriétaires de l'immeuble Le Malte,

En conséquence,

- confirmer le jugement querellé en toutes ses dispositions, à l'exception du rejet de la demande de dommages et intérêts du syndicat des copropriétaires de l'immeuble Le Malte,

Reconventionnellement,

- condamner la S.C.I. Intra muros à payer au syndicat des copropriétaires la somme de

50 000 euros de dommages et intérêts,

- condamner la S.C.I. Intra muros à payer au syndicat des copropriétaires une somme de 6000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et au paiement des dépens.

Il a fait valoir que les lots litigieux 164, 165, 166, 167, 168, 169, 184, 185, 186, et 187 et non 194 et 195 représentaient, suivant l'attestation loi Carrez du 14 mai 2014 une superficie de partie privative des biens soumis aux dispositions de l'article 46 de la loi du 10 juillet 1965 de 42,39 m², soit un appartement comportant une entrée dégagement, une chambre, une salle d'eau, un couloir et un séjour cuisine, que les lots 164 à 169 font partie de l'entrée B (Groupe II) et les lots 184 à 187 de l'entrée C (Groupe III), qu'ils ne sont pas mitoyens, que la superficie mesurée par M. [D] correspond aux lots 160 à 169, y compris les lots 160 à 163, qui n'ont pas été acquis par la S.C.I., qu'ils ont été transformés en appartement sans autorisation de la copropriété. Il a ajouté que la S.C.I. propriétaire des lots 164 à 169 occupait également les lots 160 à 163 ainsi que des parties communes représentées par l'entrée et le couloir d'accès à ces caves qui ont été privatisés, opérant changement de destination des caves sans autorisation. Il a fait valoir que l'action n'était pas prescrite, que les attestations étaient critiquables et non probantes et que l'attestation EDF les discréditait, que la S.C.I. s'était appropriée les parties communes, sans autorisation et des parties privatives s'agissant des lots 160 à 163, que le tribunal n'a pas expressément statué sur la fin de non-recevoir, que la possession était occulte et équivoque, qu'il subissait un préjudice qui justifiait sa demande de dommages et intérêts.

Par ordonnance du 10 mai 2022, le conseiller de la mise en état saisi d'une demande de radiation en application des dispositions de l'article 524 du code de procédure civile, a

débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande, en absence de signification préalable de la décision critiquée et en considération du délai pour s'exécuter accordé par le premier juge.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 5 octobre 2022.

L'affaire a été fixée à plaider à l'audience du 10 novembre 2022. L'affaire a été mise en délibéré pour être rendu par mise à disposition au greffe le 25 janvier 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Pour statuer comme il l'a fait le tribunal a rappelé que les lots acquis étaient des caves et qu'un couloir, partie commune, avait été intégré dans l'ensemble dont la S.C.I. revendiquait la propriété, qu'il y avait toujours eu un appartement à la place des caves, que l'appropriation d'un couloir n'était pas démontrée, que la possession n'était pas publique, que la différence entre le bâti et le titre n'avait pas été portée à la connaissance du syndicat des copropriétaires, que la valeur déclarée à l'administration fiscale était celle d'une cave, que l'exception d'irrecevabilité devait donc être écartée, que le prix démontrait que les vendeurs ne souhaitaient pas se conduire en propriétaires, que la mention figurant dans le titre prouvait le caractère occulte de la possession qui n'avait pas les caractères nécessaires au bénéfice de la prescription et qu'il concernait tant l'appropriation des parties communes que le changement de destination des lieux, que la remise en état devait être ordonnée et qu'en absence de pièces la demande de dommages et intérêts devait rejetée.

À titre liminaire, nonobstant les allégations contraires de l'intimé, le tribunal a expressément écarté les exceptions d'irrecevabilité et cette décision n'est pas critiquée à ce titre, puisque l'appel incident ne porte que sur les dommages et intérêts. En statuant comme il l'a fait le tribunal a, simultanément retenu que les lots avaient toujours constitué un appartement et ordonné la remise en conformité avec le règlement de copropriété.

Le syndicat des copropriétaires a développé des demandes

- au titre du changement d'affectation des lots de copropriété,

- au titre de l'appropriation des parties communes (entrée et couloir de distribution)

- au titre de l'appropriation de parties privatives ( lots 160 à 163 dont le propriétaire n'est pas identifié) auxquelles a été opposée une prescription acquisitive.

Cependant et malgré la confusion entretenue dans les écritures à ce titre, ce moyen de défense ne peut concerner que les demandes relatives à l'appropriation de parties communes ou privatives.

Sur l'appel principal

Il est démontré et non contesté que la S.C.I. Intra muros a procédé au changement de destination des caves, elle-même ou son auteur. L'appelante ne produit d'ailleurs pas

l'acte de propriété de ses auteurs qui pourrait soutenir sa version, retenue d'ailleurs par le premier juge, selon laquelle 'il y a toujours eu un appartement à la place des caves'. Cependant cette version est contredite par le règlement de copropriété originel publié le 4 février 1965 au terme duquel les lots 160 à 163, mais également 164, 165, 166, 167, 168, 169, 184, 185, 186 et 187 sont des caves, étant relevé d'ailleurs que les lots 164 à 169 sont dans le groupe II et les lots 184 à 187 sont dans le groupe III, c'est-à-dire suivant ce même règlement de copropriété dans les deuxième bâtiment situé au centre est de l'immeuble et troisième bâtiment situé au centre ouest de l'immeuble. Toutes ces caves situées au sous-sol, d'une superficie moyenne de 4,27 m² comportent 2 ou 2,5 millièmes des parties communes construction, 3,5 ou 4 dix millièmes des parties communes générales construction et 3,5 ou 4 dix millièmes des parties communes terrain, tous éléments qui justifient l'intérêt à agir du syndicat des copropriétaires.

Le plan d'origine non critiqué (pièce 3) met en évidence que les lots 160 à 169 forment des boxes desservis par une entrée et deux couloirs perpendiculaires à l'entrée qui, d'une part ne sont pas repris à l'acte de vente du 30 mai 2014 et d'autre part, s'agissant de l'entrée et des couloirs, constituent nécessairement des parties communes.

Alors que la S.C.I. intra muros n'a pas acquis les lots 160 à 163, ni d'ailleurs les couloirs, elle revendique la propriété de l'ensemble constitué par la réunion des lots 160 à 169, transformés en appartement.

L'acte d'acquisition reçu par Me [V] notaire, du 30 mai 2014 comporte d'ailleurs une erreur puisqu'à la rubrique 'surface des parties privatives', il vise les lots l64, 165, 166, 167, 168, 169, 194,195,186 et 187.

Il résulte de cet exposé que les demandes du syndicat des copropriétaires sont fondées :

- au titre du changement d'affectation et non de destination, des lots de copropriété l64, 165, 166, 167, 168 et 169, acquis le 30 mai 2014, s'agissant de caves transformées en un appartement,

- au titre de l'appropriation des parties communes puisqu'en constituant un appartement avec les caves 160 à 169, la S.C.I. Intra muros occupe l'entrée et les couloirs de distribution des boxes,

- au titre de l'appropriation de parties privatives puisqu'elle n'est pas propriétaire des lots 160 à 163 qu'elle occupe et a annexés.

Pour s'opposer la S.C.I. Intra muros soutient qu'elle n'a pas réalisé la transformation et que ces lots ont toujours constitué un appartement.

Or, outre les éléments précédemment rappelés, l'acte d'acquisition reçu par Me [V] notaire, relate au titre 'origine de propriété' que le bien cédé, c'est-à-dire les lots l64, 165, 166, 167, 168, 169, 184, 185, 186 et 187 sont la propriété de M. [A] [I]

et Mme [T] [I] pour l'avoir recueilli dans la succession de [O] [I], époux de [CI] [TC], veuf de [C] [H], Me [VH] ayant établi l'attestation de propriété suite à la délivrance d'un legs particulier du défunt à [CI] [TC], épouse [I], que le bien a été évalué 15 000 euros par l'acte notarié du 3 mars 2009. Il ajoute que le bien appartenait en propre à [O] [I] pour l'avoir acquis, avec d'autres biens immeubles, de M. [Y] [K] et M. [N] [S] par acte reçu le 26 novembre 1985 moyennant paiement de 485 792 francs français. Or, ces derniers étaient les rédacteurs du règlement de copropriété, ce qui, là encore, exclut la thèse selon laquelle ces lots 'n'ont jamais eu la consistance de caves mais d'un appartement'et remet en cause l'assertion, figurant dans l'acte notarié, suivant laquelle ces biens ont été ' reçu à titre de dation en paiement par l'auteur commun des vendeurs'.

Si l'attestation difficilement lisible, de M. [I], établie 'à la demande de la S.C.I. Intra muros' du 3 avril 2019, indique que les lots n'ont jamais eu la consistance de caves, ayant été aménagés en appartement T2 depuis l'origine, il découle de sa forme qu'elle a été dressée pour les besoins de la cause. Elle est contredite par la mention portée par les acquéreurs dans l'acte de vente selon laquelle ils n'ont réalisé aucun empiétement sur les parties communes.

Les vendeurs ne peuvent aux termes d'un même acte notarié vendre des caves et indiquer dans ce même acte, qu'il ne s'agit pas de caves pour finalement attester en justice qu'ils ont vendu un appartement.

Cette attestation met en évidence l'accord des parties pour tromper les autres copropriétaires sur le calcul de charges, le syndicat des copropriétaires pour les appels de fonds et accessoirement l'administration fiscale. En outre, la transformation d'une dépendance privative, que constitue une cave, en pièce habitable doit être autorisée préalablement par l'assemblée générale et l'acquéreur d'un lot de copropriété est responsable à l'égard du syndicat des copropriétaires des travaux irréguliers réalisés par son auteur. Autrement dit, à supposer que les travaux aient été réalisés par les auteurs de la S.C.I., elle serait quand même tenue responsable à l'égard du syndicat des copropriétaires de cette transformation.

L'attestation de M. [W] qui aurait profité d'un appartement familial résidence Le malte 'depuis la fin des années soixante jusqu'au décès de [sa] mère en 2016 déclare avoir toujours connu au rez-de-chaussée de l'entrée B de l'immeuble Le Malte, un appartement anciennement occupé par une personne travaillant pour M. [I]'. Cette attestation contient ses propres limites puisque le rédacteur n'habitait pas sur place et que les caves litigieuses sont aux termes de l'acte et du règlement de copropriété en sous-sol. Il en va de même de la sommation interpellative délivrée à M. [P] [B]. Également, l'attestation de Mme [J] [F] établie pendant la procédure d'appel n'est pas conforme aux dispositions du code de procédure civile ; elle indique avoir été la gardienne de l'immeuble de 2006 à 2018 et avoir toujours connu un appartement au rez-de-chaussée.

Celle de Mme [L] [G] qui se présente comme ancienne gérante de la société Organigram, syndic de l'immeuble, confirme que M. [A] [I] et Mme [T] [I] étaient propriétaires des lots l64, 165, 166, 167, 168, 169, 184, 185, 186 et 187, elle indique que le promoteur n'a pas réalisé les caves, que l'espace a été aménagé en appartement, que l'autorisation des propriétaires a été sollicitée pour réaliser des travaux. La qualité de propriétaire des auteurs de la S.C.I. Intra muros n'est pas discutée pas plus que la nature privative des caves. Cependant l'affirmation selon laquelle les caves n'ont pas été réalisées est en contradiction avec le règlement de copropriété publié, elle est contredite par la valeur de cession du bien et, surabondamment, par l'absence de mention par le syndic et de preuve du paiement de charges de copropriété pour un appartement et non pour des caves.

S'agissant des lots 160 à 163 dans l'immeuble Le malte, il résulte des pièces de l'appelante (pièce N°4 acte de vente) qu'ils sont la propriété de M. [M] [R] et Mme [Z] [PX] pour les avoir acquis de M. [X] [PX] et Mme [U] [XM]. En effet, par acte du 22 janvier 2007, ces derniers ont cédé un appartement lot 232, les caves 'au sous-sol de l'immeuble' lots 160 à 163 et un box voiture dans le bâtiment E lot 267.

S'agissant des lots litigieux, il est précisé qu'ils ont été acquis antérieurement de M. [M] [I] moyennant paiement de 130 000 francs français (19 818,37 euros), le vendeur a déclaré que leur destination, leur aspect extérieur, leur consistance n'avaient pas été modifiés, qu'ils ne faisaient l'objet ni d'une servitude ni d'une location ni d'une occupation à quel que titre que ce soit. Le contenu de cet acte confirme d'une part que l'appartement constitué par la réunion des lots 160 à 169 n'existait pas non plus en 2007, puisque le vendeur a déclaré qu'il étaient libres de toute occupation ou location, ce que l'acquéreur a pu constater en les visitant. Il établit d'autre part que la S.C.I. Intra muros occupe bien des parties privatives appartenant à des tiers, à savoir M. [R] et Mme [PX], encore propriétaires au vu des procès-verbaux d'assemblées générales des 16 mars 2015 et 20 novembre 2019.

Une attestation qui précise avoir été dressée à la demande de la S.C.I. Intra muros, de M. [R] indique en substance que ses caves sont dans l'autre bâtiment, qu'il y a eu une inversion, qu'il s'agit d'une seule pièce éclairée par un vasistas. Effectivement les lots 184 à 187 sont des caves mais dans l'immeuble voisin (pièce 4), pour autant les actes sont contraires, il n'est pas démontré qu'une rectification a été opérée sur les actes, le règlement de copropriété, ou l'état descriptif de division, alors que la situation décrite aboutit à lui attribuer des lots dans deux immeubles distincts, contrairement à son titre.

À l'inverse des prétentions de l'appelante, le syndicat a qualité pour agir en justice, tant en demandant qu'en défendant, même contre certains des copropriétaires ; il peut notamment agir, conjointement ou non avec un ou plusieurs de ces derniers, en vue de la sauvegarde des droits afférents à l'immeuble ; il a qualité pour réclamer la libération des lots 160 à 163 que la S.C.I. occupe sans droit ni titre, même si M. [R] a renoncé à ses droits sur ces caves étant entré en possession d'un autre local dans un autre bâtiment. Cependant il n'a pas qualité pour solliciter la remise en état.

La S.C.I. Intra muros, bénéficie d'un titre pour les lots 164, 165, 166, 167, 168, 169, 184, 185, 186 et 187 mais elle ne justifie pas d'une prescription publique, paisible, non équivoque et à titre de propriétaire trentenaire pour les parties communes d'une part et pour les lots 160 à 163 d'autre part, d'autant que l'identification et la visite des lots 160 à 163 en 2007 nécessitait le passage dans les parties communes, l'entrée et le couloir de desserte. De plus, le compteur électrique pour l'appartement a été installé le 23 mai 2016, l'appartement a été offert à la location le 28 mai 2020. Enfin, le caractère équivoque de sa possession des lots 160 à 163 et des parties communes ressort également de la mention figurant à l'acte notarié selon laquelle l'acquéreur fait son affaire personnelle de toute action de la copropriété.

Surabondamment, la S.C.I. Intra muros est gérée par Me [RH] [VH], notaire, professionnel du droit, ce qui exclut une incompréhension sur l'étendue des droits et sur l'impossibilité de prescrire dans de telles conditions, alors qu'au terme de ses écritures et des attestations qu'elle produit, la S.C.I. Intra muros prétend contredire non seulement un règlement de copropriété mais encore des actes notariés.

Le jugement est confirmé en ce qu'il a condamné la S.C.I. Intra muros à mettre les lots 164 à 169 en conformité avec l'état descriptif de division et le règlement de copropriété selon le plan de l'entrée B de l'immeuble Le Malte, annexé à la décision, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, qui commencera à courir dans le délai de trois mois à compter de la signification du jugement. Le jugement n'est pas expressément contesté s'agissant de l'astreinte.

S'agissant des lots 160 à 163, le syndicat des copropriétaires doit être débouté de sa demande tendant à la remise en état. Le jugement doit être réformé à ce titre.

Sur l'appel incident

La demande de dommages et intérêts a été rejetée en considération de l'absence de tout décompte permettant d'évaluer l'incidence du changement occulte de destination sur la répartition des charges. Aucune pièce complémentaire n'est produite en cause d'appel mais le syndicat des copropriétaires fait valoir le coût exorbitant d'une simulation, l'impossibilité de connaître 'jusqu'où il peut remonter', qu'une perte relative aux charges de copropriété de 1 000 euros par an pendant trente ans est un minimum.

À défaut pour le syndicat des copropriétaires d'avoir fourni des éléments comptables, le jugement est confirmé en ce qu'il l'a débouté de sa demande.

Le jugement est confirmé en ce qu'il a statué sur les dépens et les demandes en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile . La S.C.I. Intra muros qui succombe au principal, est condamnée au paiement des dépens et d'une somme de 6 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR :

- Confirme le jugement en ses dispositions déférées à la cour, sauf en ce qu'il a ordonné à la S.C.I. Intra muros de mettre les lots 160 à 169 en conformité avec l'état descriptif de division et le règlement de copropriété selon le plan de l'entrée B de l'immeuble Le Malte annexé à la présente décision sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, qui commencera à courir dans le délai de trois mois à compter de la signification du jugement à intervenir,

- Réforme et statue à nouveau de ce seul chef,

- Ordonne à la S.C.I. Intra muros de mettre les lots 164 à 169 en conformité avec l'état descriptif de division et le règlement de copropriété selon le plan de l'entrée B de l'immeuble Le Malte annexé à la présente décision sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, qui commencera à courir dans le délai de trois mois à compter de la signification de la décision,

- Déboute le syndicat des copropriétaires de l'immeuble Le Malte de sa demande de mise en conformité des lots 160, 161, 162, 163,

Y ajoutant,

- Déboute la S.C.I. Intra muros de ses demandes contraires,

- Condamne la S.C.I. Intra muros au paiement des dépens,

- Condamne la S.C.I. Intra muros à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble Le Malte la somme de 6 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Formation : Chambre civile section 2
Numéro d'arrêt : 21/00492
Date de la décision : 25/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-25;21.00492 ?
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