Chambre civile
Section 2
ARRÊT N°
du 25 JANVIER 2023
N° RG 20/00629
N° Portalis DBVE-V-B7E-B7UP
JD - C
Décision déférée à la Cour :
Jugement Au fond, origine TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de BASTIA, décision attaquée en date du 17 Novembre 2020, enregistrée sous le n° 19/00917
Caisse CAISSE REGIONALE DU CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA C ORSE
C/
S.C.I. U GRIGALE
SDC Immeuble [Adresse 2]
Copies exécutoires délivrées aux avocats le
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU
VINGT-CINQ JANVIER
DEUX-MILLE-VINGT-TROIS
APPELANTE :
CAISSE RÉGIONALE DU CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA CORSE
prise en la personne de son représentant légal domicilié audit siège
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Antoine GIOVANNANGELI de la SCP MORELLI MAUREL ET ASSOCIES, avocat au barreau d'AJACCIO plaidant en visioconférence
INTIMÉS :
S.C.I. U GRIGALE
prise en la personne de son représantant légal, domicilié au dit siège
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Me Maud SANTINI GIOVANNANGELI, avocate au barreau de BASTIA, Me Paul, Philippe MASSONI, avocat au barreau de PARIS, Me Emmanuel STENE, avocat au barreau de PARIS
Syndicat des copropriétaire de l' IMMEUBLE [Adresse 2] représenté par son syndic la SARL [Localité 4] IMMOBILIER, elle-même prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié ès qualités au siège social
[Adresse 5]
[Localité 4]
Représenté par Me Jean-Benoit FILIPPINI, avocat au barreau de BASTIA
COMPOSITION DE LA COURÂ :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 10 novembre 2022, devant Judith DELTOUR, conseillère, chargée du rapport, les avocats ne s'y étant pas opposés.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Jean-Jacques GILLAND, président de chambre
Judith DELTOUR, conseillère
Stéphanie MOLIES, conseillère
GREFFIER LORS DES DÉBATS :
Vykhanda CHENG.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 25 janvier 2023
ARRÊT :
Contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Jean-Jacques GILLAND, président de chambre, et par Cécile BORCKHOLZ, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
PROCÉDURE
Alléguant l'occupation sans droit d'une terrasse par des installations de climatisation, par acte du 3 juillet 2019, la S.C.I. U Grigale a assigné la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Corse et le syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 2] à [Localité 4] (Haute-Corse) devant le tribunal de grande instance de Bastia pour obtenir l'évacuation, sous astreinte, de tout objet se trouvant sur la terrasse, la remise en état et sa condamnation au paiement des dépens et de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 17 novembre 2020, le tribunal judiciaire de Bastia a :
- ordonné l'évacuation de tout objet se trouvant sur la terrasse sise au 6ème étage de l'immeuble du [Adresse 2] à [Localité 4] et sa remise en état aux frais du Crédit Agricole dans les trois mois de la signification du présent jugement sous astreinte, à l'expiration de ce délai, de 500 euros par jour pendant quatre mois,
- condamné in solidum le syndicat des copropriétaires et Crédit agricole à payer à la S.C.I. U Grigale la somme de 3000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,
- condamné in solidum le syndicat des copropriétaires et le Crédit agricole aux dépens dont distraction au profit de Me Jean-André Albertini, avocat.
Par déclaration reçue le 9 décembre 2020, la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Corse a interjeté appel de la décision.
Par conclusions communiquées le 4 mars 2021, la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Corse a réclamé de :
- débouter la S.C.I. U Grigale de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,
Subsidiairement et reconventionnellement, de
- condamner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 2] à relever et garantir le Crédit agricole de toutes condamnations prononcées à son encontre,
En tout état de cause,
- condamner la S.C.I. U Grigale à payer à la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Corse la somme de 2500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.
Elle a fait valoir avoir obtenu l'autorisation d'installer les machineries sur le toit-terrasse, qui est une partie commune, dont la S.C.I. U Grigale ne justifiait pas être propriétaire par titre, qu'à supposer que les consorts [M] aient prescrit la propriété du toit-terrasse depuis 1953, ils ne l'ont ni apporté ni cédé à la S.C.I. U Grigale. Elle a soutenu n'avoir commis aucune voie de fait, ayant été autorisée par l'unanimité des copropriétaires y compris Mme [M] à occuper ce toit-terrasse et que la S.C.I. U Grigale ne pouvait lui retirer unilatéralement l'autorisation d'occupation à laquelle elle était tiers.
Par dernières conclusions communiquées le 24 novembre 2021, la S.C.I. U Grigale a demandé de :
- juger l'appel mal fondé,
- confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Bastia du 17 novembre 2020,
- condamner le Crédit agricole à verser à la S.C.I. U Grigale la somme de 5000 euros au visa de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner le syndicat des copropriétaires à verser à la S.C.I. U Grigale la somme de 2000 euros au visa de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner le syndicat des copropriétaires à verser à la S.C.I. U Grigale la somme de 1500 euros au visa de l'article 700 du code de procédure civile, au titre de l'incident ayant donné lieu à l'ordonnance disant n'y avoir lieu à jonction,
- condamner solidairement le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 2] et la Caisse régionale du crédit agricole de la Corse aux entiers dépens, au visa de l'article 699 du code de procédure civile, dont distraction au profit de Me Maud Santini.
Elle a fait valoir être propriétaire d'un appartement au 5ème étage de l'immeuble litigieux, dépendant initialement de la communauté ayant existé entre Mme [W] [U] et M. [R] [M] pour l'avoir acquise par acte du 10 décembre 1953, appartement apporté à la S.C.I. U Grigale par Mme [W] [U], propriétaire par acte du 24 juin 1985, suite au partage de la communauté, que la terrasse n'a jamais été cédée, étant utilisée par les propriétaires de l'appartement mais qu'elle est occupée par des installations qui appartiennent à la Caisse régionale de crédit agricole mutuel, que des mises en demeure de les ôter ont été adressées à cette dernière et au syndicat des copropriétaires.
Par conclusions notifiées le 25 mai 2021, le syndicat des copropriétaires a sollicité de :
- joindre les procédures 20-620 et 21-108,
- dire l'appel du syndicat des copropriétaires interjeté le 11 février 2021 recevable et fondé,
- infirmer le jugement déféré en sa totalité et
statuant à nouveau,
- débouter la S.C.I. U Grigale de son action en revendication immobilière et de sa demande de retrait sous astreinte des climatiseurs installés en 1990 par la Caisse régionale de crédit agricole mutuel l'appel de la Corse,
- condamner la S.C.I. U Grigale au paiement des entiers dépens et de 4000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Il a fait valoir que la S.C.I. poursuivait la remise en état d'une terrasse de toit au sixième étage de l'immeuble, que l'appartement au cinquième étage a été cédé à M. [M] et Mme
[U], mais non la terrasse, que les attestations ne permettent pas de prouver une prescription acquisitive sur la terrasse, qui était accessible à tous les copropriétaires, qu'elle a été occupée depuis l'assemblée générale du 6 juin 1990 par l'appelante pour y installer des moteurs de climatisations, ce qui implique qu'il s'agissait d'une partie commune, que c'est à l'occasion de travaux de toiture que M. [M] a mentionné qu'il avait fermé cette terrasse et fait valoir sa revendication.
Par déclaration reçue le 11 février 2021, le syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 2] a également interjeté appel de la décision. L'avis portant désignation du conseiller de la mise en état a été délivré le 19 février 2021. La procédure a été enregistrée sous le n°21-108.
Par dernières conclusions d'intimé sur incident communiquées le 26 août 2021, le syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 2], représenté par son syndic, a sollicité de :
- déclarer recevable l'appel du syndicat des copropriétaires enrôlé le 11 février 2021 et ordonner la jonction.
Par ordonnance du 1er septembre 2021, le conseiller de la mise en état, après avoir sollicité les observations écrites des parties, suivant ordonnance du 15 juillet 2021, a :
- dit n'y avoir lieu à jonction,
- déclaré l'appel enregistré sous le n°21-108 irrecevable,
- condamné le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 2] décembre 2021 au paiement des dépens avec distraction au profit de Me Jean-André Albertini, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
- débouté la S.C.I. U Grigale de sa demande en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. Cette ordonnance n'a pas été déférée à la cour.
Suivant ordonnance du 6 avril 2022, la clôture est intervenue le 27 avril 2022 et l'affaire a été fixée à plaider à l'audience du 12 mai 2022.
Par arrêt avant-dire droit, rendu le 7 septembre 2022, la cour a :
- ordonné la réouverture des débats à l'audience du 10 novembre 2022 à 8 heures 30 pour observations des parties sur l'absence de demande d'infirmation du jugement par l'appelant principal et pour production de l'état descriptif de division et du règlement de copropriété,
- réservé les dépens et les demandes en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Le 11 octobre 2022, la Caisse régionale de crédit agricole mutuel a fait valoir que la cour était saisie par l'appel incident ayant sollicité l'infirmation du jugement et déféré les chefs du jugement, que le litige était indivisible, que la réouverture des débats ne permettait pas de présenter une demande nouvelle notamment celle tendant à la caducité, qui n'a pas été sollicitée du conseiller de la mise en état, que le toit-terrasse est une partie commune, ou réputée telle, que l'authenticité de l'acte de partage n'est pas démontrée et qu'il est en contradiction avec l'état descriptif de division et l'acte de propriété de la S.C.I. U Grigale.
Le 7 novembre 2022, le syndicat des copropriétaires a fait valoir qu'il avait interjeté un appel principal et un appel incident, que ce dernier appel avait valablement saisi la cour, que la S.C.I. avait seulement demandé l'enlèvement des objets encombrant la terrasse et non d'être déclarée propriétaire de la terrasse, que les dispositions de l'article 6-1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés et de l'article 14 du code de procédure civile devaient être respectées.
Par conclusions communiquées le 13 octobre 2022, la S.C.I. U Grigale a demandé de :
- la recevoir en ses observations,
- prononcer la caducité de la déclaration d'appel déposée par la Caisse régionale de crédit agricole mutuel par application de l'article 914 du code de procédure civile,
- juger irrecevable l'appel incident formé par le syndicat des copropriétaires,
- condamner la Caisse régionale de crédit agricole mutuel à verser à la S.C.I. U Grigale la somme de 5000 au visa de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner le 'syndicat des copropriétaires de la Corse' à verser à la S.C.I. U Grigale la somme de 2000 au visa de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner le 'syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 2] au paiement de la somme de 1500 au visa de l'article 700 du code de procédure civile, au titre de l'incident ayant donné lieu à l'ordonnance disant n'y avoir lieu à jonction,
- condamner solidairement le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 2] et la Caisse régionale du Crédit Agricole de la Corse aux entiers dépens, au visa de l'article 699 du code de procédure civile, dont distraction au profit de Me Maud Santini.
Elle a fait valoir la caducité de l'appel, l'irrecevabilité consécutive de l'appel incident, qu'il n'existait pas de règlement de copropriété et que le partage de 1885 dont ses droits sont issus puisqu'il a créé la copropriété, a inclus dans son lot la terrasse.
A l'audience du 10 novembre 2022, l'affaire a été mise en délibéré pour être rendu par mise à disposition au greffe le 25 janvier 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Pour statuer comme il l'a fait le tribunal a considéré que les époux [M]/[U], auteurs de la S.C.I. U Grigale, avaient utilisé la terrasse, que le syndicat des copropriétaires avait de son côté autorisé depuis plus de trente ans l'occupation de la terrasse pour l'installation des climatisations, mais que les propriétaires n'avaient pas renoncé à leurs droits et que les époux [M]/[U] avaient exercé une possession continue, non interrompue, paisible et publique, non équivoque et à titre de propriétaire.
Comme déjà indiqué la Caisse régionale de crédit agricole mutuel n'a pas demandé l'infirmation du jugement bien qu'elle ait interjeté appel du jugement. Pour autant et sans qu'il soit besoin de suivre plus avant le raisonnement de la S.C.I. U Grigale, d'une part, en application des dispositions de l'article 914 du code de procédure civile, les parties ne sont plus recevables à invoquer devant la cour d'appel la caducité ou l'irrecevabilité après la clôture de l'instruction, à moins que leur cause ne survienne ou ne soit révélée postérieurement, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, d'autre part, la cour n'a pas soulevé la caducité, mieux, elle a expressément relevé qu'elle était saisie par l'appel incident. Surabondamment, le litige n'est pas indivisible. Cette demande est irrecevable.
Saisi d'une demande de désencombrement d'une terrasse d'un immeuble, le tribunal y a fait droit en se fondant sur la possession alors que la S.C.I. U Grigale revendiquait être propriétaire par titre, sa qualité de propriétaire de la terrasse litigieuse étant contestée notamment par le syndicat des copropriétaires. Conformément à la demande qui avait été faite, le jugement a ordonné l'évacuation des objets se trouvant sur la terrasse aux frais de la Caisse régionale de crédit agricole mutuel sans préciser à qui incombait cette obligation de faire, sans déterminer le débiteur de l'astreinte.
S'agissant de l'état descriptif de division, il a été modifié à vingt quatre reprises entre le 10 juin 1960 et le 28 novembre 2012 par onze notaires différents, sans compter les actes notariés des 27 janvier 1885 et 10 décembre 1953 sur lesquels la S.C.I. U Grigale se fonde.
Quoiqu'il en soit :
- Mme [W] [U], née le 26 mai 1927, et M. [R] [M], né le 17 septembre 1927,
ont acquis par acte publié le 29 décembre 1953 de [A] [G] et [C] [I] un appartement 'formant la moitié du cinquième étage d'un immeuble...actuellement occupé par M. [DD] [E]', cet acte fait état d'une donation partage antérieure, il ne mentionne ni terrasse ni mansarde. À cet acte est joint un acte enregistré le 27 janvier 1885 portant division et répartition entre les associés d'une 'grande maison édifiée à [Localité 4] par association en participation' précisant que le 'sixième lot attribué à [P] [H] [G], et accepté. Le lot comprenant : un appartement composé de dix pièces, vers le Nord, au cinquième étage, du côté Est, prenant son entrée par le vestibule de la [Adresse 6], ensemble la terrasse Est ou vers la [Adresse 6], surmontant la cage d'escalier et les mansardes ayant deux portes, sises au-dessus de son appartement', que
'les propriétaires des deux terrasses seront exclusivement tenus à leur entretien et réparations, qu'ils doivent au surplus en tenir les clefs à la disposition de tout propriétaire ou locataire de la maison quand il y aura nécessité de rendre sur le toit';
- l'état descriptif de division du 10 juin 1960 mentionne
- le lot 5 un appartement appartenant à M. [U] et Mme [N] [D], composé de sept pièces, cuisine et salle de bains, formant la moitié sud du cinquième étage
- le lot 6 un appartement appartenant à M. [M] et Mme [U], composé de huit pièces, cuisine et salle de bains, formant la moitié nord du cinquième étage ;
- l'état descriptif de division du 19 octobre 1970 requis par M. [F] et Mme [Z] fait état d'un appartement lot 19 avec un grenier lot 20,sis au cinquième étage porte de droite composé de sept pièces principales, deux cuisines et un WC sur terrasse commun avec M. [B] ;
- l'état descriptif de division du 19 février 1983 mentionne au cinquième étage, sans plus de précision quant aux identités, hormis des dates de naissance :
- un appartement lot 38 composé de cinq pièces, une cuisine et une salle de bains, cinquième étage côté gauche ayant un hall commun avec un tiers appartenant à [O] et [T],
- un appartement lot 39 ex n°5 composé de sept pièces, cuisine et salle de bains, situé au cinquième étage formant la moitié sud dudit étage, appartenant à [M] né le 13 février 1948 et [S] née le 27 septembre 1949,
- un appartement lot 41 ex n°6 composé de huit pièces, cuisine, salle de bains, situé au cinquième étage formant la moitié nord dudit étage appartenant à [U] née en 1927 et [M] né en 1922,
- un appartement lot 48 ex n°9 de quatre pièces et un grenier au dessus sis côté nord du cinquième étage appartenant à [F] et [Z],
- un appartement lot 58 ex n°19 de sept pièces appartenant à [F] né le 27 février 1907 et un grenier lot 59 ex-n°20 appartenant à [F] né le 27 février 1907.
Ainsi, le tableau récapitulatif mentionne au cinquième étage la présence de quatre appartements, dont un seul appartenant à '[U]' mais curieusement il fait état non seulement de deux moitiés mais encore de deux autres appartements (supplémentaires), il ne fait pas mention d'une terrasse, mais seulement de greniers. La seule terrasse identifiée correspond à celle de l'appartement [F] qui supportait un WC commun. Ni l'acte d'acquisition de 1953, ni les états descriptifs de division de 1960 et de 1983 ne mentionnent la terrasse litigieuse.
L'acte intermédiaire portant donation partage du 9 juillet 1946 entre la vente le 29 décembre 1953 par [A] [G] et [C] [I] à M. [R] [M] et Mme [U] et l'acte de partage enregistré le 27 janvier 1885, ne sont pas produits.
S'agissant du procès-verbal d'assemblée générale du 6 juin 1990, il relate une demande d'autorisation du représentant de la Caisse régionale de crédit agricole mutuel 'pour
entreprendre certains aménagements côté cour sous la terrasse' en donnant toutes assurances sur l'absence de nuisances et de gêne aux copropriétaires. Cette autorisation a été donnée à l'unanimité en présence de Mme [W] [M].
Il s'en déduit que :
- les travaux concernaient des parties communes,
- ils devaient être réalisés sous une terrasse et non sur une terrasse, côté cour et non côté [Adresse 6]
- Mme [M], dont la S.C.I. U Grigale tient ses droits, a donné son accord.
Suivant le procès-verbal du 29 octobre 1990, l'assemblée générale a autorisé l'utilisation de la terrasse de la copropriété (sans autre précision) pour les installations techniques de climatisation de la Caisse régionale de crédit agricole mutuel, la propriété n'étant ni cédée ni transférée, 'toutes les conditions d'accès à la toiture liées aux besoins de la copropriété [étant] conservées', M. [M] [L] et M. [M] [J] (sans autre précision) ayant voté contre.
Les attestations produites de Mme [U] suivant laquelle les clefs de la terrasse étaient détenues par Mme [M], de M. [X] qui indique avoir réalisé des travaux dans les années soixante dans l'appartement de M. [M] et avoir utilisé la terrasse pour gâcher du ciment et le grenier pour stocker les matériaux, ou de M. [K] qui mentionne avoir dans les années 1960-70, réparé les menuiseries de l'appartement 5ème gauche au dessus de la cage d'escalier sur le toit, ne seraient pas de nature à attester de la qualité de propriétaire puisque
- celle de M. [K] n'est pas conforme aux exigences du code de procédure civile,
- celles de M. [X] et de Mme [U] ne valent pas preuve d'une possession continue et à titre de propriétaire.
Nonobstant les multiples états descriptifs et modificatifs de division, il n'est pas allégué que l'immeuble a été surélevé et il n'est pas démontré qu'il existe un '6ème étage de l'immeuble du [Adresse 2] à [Localité 4]', de sorte que la terrasse est en réalité la toiture.
Si l'acte initial portant division de l'immeuble mentionne deux terrasses (l'une appartenant à [V] [Y], l'autre à [P] [H] [G]), les actes suivants n'en font plus état, ni l'acte de vente par lequel Mme [W] [U] et M. [R] [M] ont acquis par acte publié le 29 décembre 1953 un appartement 'formant la moitié du cinquième étage d'un immeuble', ni l'acte par lequel la S.C.I. U Grigale est devenue propriétaire de l'appartement.
En outre, si cette terrasse constitue une partie privative, son propriétaire doit en supporter les charges de copropriété mais également le coût d'entretien et de remise en état. Ni la S.C.I. U Grigale ni ses auteurs ne prouvent avoir supporté le coût des travaux d'entretien de la toiture de l'immeuble. À l'inverse, le syndicat des copropriétaires a produit une facture portant sur la réfection de la toiture de 130 107,34 euros toutes taxes comprises du 18 mars 2015.
La détention des clefs pour accéder à la toiture ne constitue pas à elle seule une preuve de propriété, alors qu'un gardien ou une concierge sont susceptibles d'en disposer. En outre, s'il ne s'agit pas de parties communes ni la Caisse régionale de crédit agricole mutuel, ni le syndicat des copropriétaires ne peuvent intervenir sur cette terrasse. Réciproquement, si la S.C.I. U Grigale estime qu'elle est propriétaire de la terrasse et qu'il s'agit d'une partie privative, elle peut la débarrasser de ce qui l'encombre.
Il résulte de l'ensemble de ces éléments que le jugement doit être infirmé, que la S.C.I. U Grigale doit être déboutée de ses demandes tendant au retrait des objets et à la remise en état sous astreinte. Il est infirmé également en ce qu'il a statué sur les dépens et les demandes en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
La S.C.I. U Grigale qui succombe est condamnée au paiement des dépens d'appel et déboutée de ses demandes en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, au fond et considérant que la mention du 'syndicat des copropriétaires de la Corse' constitue une erreur de plume. S'agissant de la demande formée au titre de la procédure d'incident, le conseiller de la mise en état a débouté la S.C.I. U Grigale à ce titre. En considération de l'équité, la Caisse régionale de crédit agricole mutuel est déboutée de sa demande en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. La S.C.I. U Grigale est condamnée à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
- Relève l'irrecevabilité de la demande de caducité de l'appel interjeté par la Caisse régionale de crédit agricole mutuel,
- Infirme le jugement en ses dispositions déférées à la cour,
Statuant de nouveau,
- Déboute la S.C.I. U Grigale de ses demandes, y compris au titre des dépens et des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Y ajoutant
- Déboute la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de sa demande en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamne la S.C.I. U Grigale au paiement des dépens de première instance et d'appel,
- Condamne la S.C.I. U Grigale à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 2] la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT