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05/10/2022 | FRANCE | N°20/00038

France | France, Cour d'appel de Bastia, Chambre civile section 2, 05 octobre 2022, 20/00038


Chambre civile

Section 2



ARRÊT N°



du 5 OCTOBRE 2022



N° RG 20/00038

N° Portalis DBVE-V-B7E-B52I

JJG - C



Décision déférée à la Cour :

Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance d'Ajaccio, décision attaquée en date du 12 Décembre 2019, enregistrée sous le n° 18/01077



[C]



C/



[DN]



[A]







Copies exécutoires délivrées aux avocats le















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COUR D'APPEL DE BASTIA



CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU



CINQ OCTOBRE DEUX-MILLE-VINGT-DEUX







APPELANTE :



Mme [L], [K], [I] [C] épouse [WA]

née le 28 Décembre 1955 à [Localité 17]

Chez Mme [F] [YM]

[Adresse 8]

[Localité 10]


...

Chambre civile

Section 2

ARRÊT N°

du 5 OCTOBRE 2022

N° RG 20/00038

N° Portalis DBVE-V-B7E-B52I

JJG - C

Décision déférée à la Cour :

Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance d'Ajaccio, décision attaquée en date du 12 Décembre 2019, enregistrée sous le n° 18/01077

[C]

C/

[DN]

[A]

Copies exécutoires délivrées aux avocats le

COUR D'APPEL DE BASTIA

CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU

CINQ OCTOBRE DEUX-MILLE-VINGT-DEUX

APPELANTE :

Mme [L], [K], [I] [C] épouse [WA]

née le 28 Décembre 1955 à [Localité 17]

Chez Mme [F] [YM]

[Adresse 8]

[Localité 10]

Représentée par Me Jean-André ALBERTINI, avocat au barreau de BASTIA

INTIMÉ :

M. [U], [P] [DN]

né le 17 Avril 1942 à [Localité 14]

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représenté par Me Anne-Marie LEANDRI de la SCP LEANDRI LEANDRI, avocat au barreau D'AJACCIO

INTERVENANT VOLONTAIRE :

Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 15] pris en la personne de son administrateur provisoire désigné M. [Y] [A]

[Adresse 19]

[Localité 2]

Représenté par Me Sébastien LOVICHI, avocat au barreau d'AJACCIO

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 9 juin 2022, devant la cour composée de :

Jean-Jacques GILLAND, président de chambre

Judith DELTOUR, conseillère

Stéphanie MOLIES, conseillère

qui en ont délibéré.

GREFFIER LORS DES DÉBATS :

Françoise COAT.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 5 octobre 2022.

ARRÊT :

Contradictoire,

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Jean-Jacques GILLAND, président de chambre, et par Françoise COAT, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DES FAITS

Par arrêt avant-dire droit du 9 février 2022, auquel il convient de se reporter pour l'exposé des faits et des prétentions des parties, la 2° section de la chambre civile de la cour d'appel de Bastia a :

'Vu l'intervention volontaire du Syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 15]),

Révoqué l'ordonnance du 6 octobre 2021 portant clôture différée au 1er décembre 2021,

Reçoit les écritures déposées par les parties postérieurement à cette date et jusqu'au 31 mai 2022 inclus,

Clôturé la procédure au 1er juin 2022,

Renvoyé la présente procédure à l'audience collégiale du 9 juin 2022 à 8 heures 30 pour y être plaidée,

Réservé les dépens.'

Par conclusions déposées au greffe le 24 mai 2022, le syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 15] a demandé à la cour de :

'Vu la procédure enrôlée sous le numéro 20/00038,

Vu l'article 554 du Code de procédure civile,

Vu l'article 803 du Code de procédure civile,

Vu les pièces,

DÉCLARER recevable l'intervention volontaire à l'instance de Monsieur [Y] [A] es qualité d'administrateur provisoire du Syndicat des copropriétaires de [Adresse 15],

INFIRMER les motivations du jugement rendu le 12 décembre 2019 par le Tribunal judiciaire d'AJACCIO en ce qu'il a considéré que le « grottone » situé à l'arrière de la copropriété [Adresse 15] sise à [Adresse 15]) était la propriété de Monsieur [DN],

JUGER que l'assise foncière de la copropriété [Adresse 15] sise à [Adresse 15]) s'étend jusqu'à la falaise située sur le domaine public de la commune de BONIFACIO,

JUGER que Monsieur [DN] ne justifie aucunement être propriétaire de l'arrière cour de la copropriété [Adresse 15] sise à [Adresse 15],

Et statuant à nouveau,

JUGER que la cour située à l'arrière de la copropriété [Adresse 15] sise à [Adresse 15]) est une partie commune de l'immeuble,

DÉBOUTER Monsieur [DN] de toutes demandes, fins et conclusions contraires sur ce point,

CONDAMNER la partie succombante au paiement de la somme de 3.000,00 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

SOUS TOUTES RÉSERVES'

Par conclusions déposées au greffe le 25 mai 2022, M. [U] [DN] a demandé à la cour de :

'Faire application des dispositions de l'article 544 du Code Civil,

JUGER que Monsieur [U] [P] [DN] est propriétaire tant par succession que par prescription acquisitive trentenaire de l'espace situé dans le prolongement, au Sud du local situé au rez-de-chaussée de l'immeuble, figurant au cadastre de la commune de [Localité 13] sous le numéro [Cadastre 7] de la section AC, acquis par [P] [DN] suivant

acte reçu par Maître [D] [FW] [IE], Notaire à [Localité 13], le 26 février 1877

et dénommé « [W] » dans cet acte ;

JUGER que Monsieur [U] [P] [DN] a qualité et intérêt à agir ;

En conséquence,

CONFIRMER dans toutes ses dispositions le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance d'AJACCIO le 12 décembre 2019 ;

DÉBOUTER Madame [L] [C]-[WA] de toutes ses demandes, fins et

conclusions ;

DÉCLARER recevable l'intervention volontaire du syndicat des copropriétaires de

l'immeuble [Adresse 15] pris en la personne de son

administrateur provisoire ;

LA DÉCLARER mal fondée ;

DÉBOUTER ce syndicat des copropriétaires de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

CONDAMNER Madame [C]-[WA] à payer à Monsieur [U] [P]

[DN] la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure

Civile ;

LA CONDAMNER aux dépens d'appel.

SOUS TOUTES RÉSERVES'

Par conclusions déposées au greffe le 30 mai 2022, Mme [L] [C] a demandé à la cour de :

'Vu les articles 552 et suivants du Code civil ;

Vu les articles 143 et 144 du Code de procédure civile ;

Vu les dispositions de la loi du 10 juillet 1965 et du décret du 17 mars 1967,

Vu les pièces produites,

DÉCLARER recevable et bien-fondée l'intervention volontaire du syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 15]

INFIRMER le jugement du Tribunal de grande instance d'AJACCIO du 12 décembre 2019 en ce qu'il a :

« REJETÉ la demande d'expertise de Madame [C]-[WA]

ORDONNÉ à Madame [L] [C]-[WA] de démolir la dalle qu'elle a fait construire dans le « [W] » appartenant à Monsieur [U] [P] [DN] au niveau du sol du 2 ème étage de l'immeuble bâti sis à [Adresse 15] cadastré AC n°[Cadastre 7] et ce, dans les trois mois de la signification du jugement à intervenir et passé ce délai sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

CONDAMNÉ Madame [L] [C]-[WA] à payer à Monsieur [U] [P] [DN] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

CONDAMNÉ Madame [C]-[WA] aux dépens ;

ORDONNÉ l'exécution provisoire de la présente décision ;

REJETÉ toutes les autres demandes plus amples ou contraires des parties. »

Statuant à nouveau :

Si la cour ne s'estime pas suffisamment éclairée, DESIGNER tel expert qu'il plaira à la juridiction et lui impartir la mission suivante :

- se rendre sur les lieux ;

- se faire communiquer toutes pièces utiles à l'accomplissement de sa mission ;

- donner à la présente juridiction toutes les informations utiles permettant de déterminer

précisément les limites de chaque lot situé sur la parcelle AC [Cadastre 7] sise la commune de [Adresse 15] ;

- identifier, au vu des actes de mutation qui lui seront communiqués et de la configuration

des lieux, le grottone mentionné dans l'acte du 26 février 1877 en indiquant la parcelle

sur laquelle il est situé ;

- identifier le propriétaire de la cour arrière de la parcelle AC [Cadastre 7] et de la grotte troglodyte

située dans le prolongement ou de donner toute précision permettant à la juridiction de

l'identifier ;

- donner à la présente juridiction toutes les informations utiles permettant de déterminer

précisément les dimensions et limites du « grottone » litigieux afin notamment de

déterminer s'il est situé sur la parcelle AC [Cadastre 7] à [Adresse 15] et s'il se prolonge sous de la

parcelle AC [Cadastre 1] et plus généralement sous la propriété de la commune de [Localité 12] ;

- plus généralement consigner dans son rapport d'expertise tout élément permettant au

Juge d'identifier les propriétaires du « grottone » ;

- rédiger un pré-rapport et impartir un délai aux parties afin de leur permettre de présenter

leurs observations ;

- consigner le tout dans un rapport adressé aux parties et à la juridiction

En tout état de cause :

REJETER la demande de confirmation du jugement formulée par Monsieur [U] [DN] faute notamment de qualité et d'intérêt à agir

DÉBOUTER M. [U] [DN] de ses demandes

DÉCLARER IRRECEVABLE l'action de Monsieur [U] [DN]

CONDAMNER Monsieur [U] [DN] au paiement de la somme de 20 000 € de dommages-intérêts au profit de Madame [C] en réparation de son préjudice financier et moral. (frais de démolition)

CONDAMNER Monsieur [U] [DN] au paiement de la somme de 9 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

CONDAMNER Monsieur [U] [DN] aux entiers dépens de la présente instance, et aux dépens de première instance.

SOUS TOUTES RÉSERVES.'

Le 9 juin 2022, la présente procédure a été mise en délibéré pour être rendue par mise à disposition au greffe le 5 octobre 2022.

La cour, pour plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, fait, en application de l'article 455 du code de procédure civile, expressément référence à la décision entreprise ainsi qu'aux dernières conclusions notifiées par les parties.

SUR CE

Pour statuer comme il l'a fait le premier juge a considéré que la propriété de M. [U] [DN] sur l'immeuble incluant le grottone n'étant pas l'objet de la présente instance et que cela avait déjà été tranché par la cour d'appel dans un arrêt du 3 avril 2013, qu'il est en application de l'article 552 du code civil propriétaire de l'espace situé au-dessus de son fonds dans lequel l'intimée à construit une dalle, sans rapporter la preuve de l'accord du propriétaire dont elle se prévaut et que ce dernier conteste.

* Sur la consistance du fonds de M. [U] [DN]

Dans ses écritures, le Syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 15], fait valoir que le grottone ne serait pas un partie privative du lot de

copropriété de M. [U] [DN], pas plus qu'une partie commune à jouissance privative, mais qu'il s'agirait d'un espace scindé en deux parties une cour arrière de la copropriété, partie commune de celle-ci, supportant la construction litigieuse de Mme [L] [C] et le grottone strictement défini appartenant à M. [U] [DN] ou à la commune de [Localité 12], propriétaire du surplomb.

M. [U] [DN], quant à lui, estime que le grottone lui appartient en pleine propriété, qu'il n'est pas scindé en une cour intérieure et le grottone proprement dit et constitue un fonds unique lui appartenant en pleine propriété et n'étant pas inclus dans la copropriété du [Adresse 15] dont il est, selon lui, totalement indépendant.

Mme [L] [C], après avoir fait valoir que la grottone ne correspondrait qu'à la partie située sous la parcelle AC [Cadastre 1] appartenant au domaine privé de la commune de [Localité 12], que l'actuelle parcelle cadastrée AC [Cadastre 7], objet du présent litige, n'est pas celle dont M. [U] [DN] est propriétaire, et ce, compte tenu de l'acte de vente établi le 16 octobre 1959 qui permet de fixer cette propriété sur la parcelle AC [Cadastre 6], la seule sur laquelle un pressoir à olives était installé, faisant notamment remarquer qu'il n'y avait aucun lien entre le grottone de l'acte originel de 1877 et le grottone revendiqué par l'intimé.

Aux termes de l'acte de vente du 26 février 1877, il est indiqué que l'arrière grand-père de M. [U] [DN], [P] [DN] est le propriétaire de biens formant un groupe «comprenant tout ce qui appartient à la Dame [UY] et qui aboutissent au Nord le chemin public de ce faubourg où lesdits immeubles sont situés, au Sud terrains de Longone, à l'Est maison de l'acquéreur et à l'Ouest avec escalier qui conduit à l'une des maisons dont est vente et à la maison [ZO], et autres et au surplus tel que tout est ventes se poursuit et comporte, ses attenances, dépendances, rien excepté, ni réservé et sauf sans préjudice d'autres aboutissants si des plus vrais il en est :

- 1°) un grand magasin avec grottone,

- 2°) un étage de maison au-dessus actuellement habité par la veuve [H],

- 3°) un étage de maison au-dessus actuellement habitée par Giovannella, - 4°) un magasin tenu par [OB]

- 5°) une maison au-dessus,

- 6°) une maisonnette à l'Ouest de la maison ci-dessus habitée par [KM] [RJ],

- 7°) un magasin tenu par Lucurcio».

Il est ainsi certain que si ce groupement foncier comprenait trois magasins, l'un d'entre eux était plus grand que les deux autres et était le seul à inclure un grottone, particularité mentionnée dans cet acte avec la précision «grand magasin avec grottone», l'emploi de cette préposition marquant la possession comme complément du magasin à la place de la conjonction de coordination «et», emploi tout sauf anodin dans un acte notarié du XIXème siècle, démontrant l'existence d'un seul lot -magasin incluant le grottone- et non de deux entités divisées et sécables.

Par la suite, cet l'ensemble de la parcelle AC, hors local commercial a été divisé au gré des successions pour finalement, le 3 janvier 1947, être soit attribué, hors local commercial à [V] [DN], qui vendra son bien à [O] [CJ] et [R] [N], auteurs

de Mme [R] [CJ], venderesse, au final, de Mme [L] [C] pour les lots 3 et 4 de l'immeuble devenu la copropriété du [Adresse 15].

Mme [L] [C] fait valoir que, dans les différents actes produits, est indiqué la présence d'un pressoir qu'elle situe sur la propriété voisine cadastrée AC [Cadastre 6] et non sur l'emprise actuelle de la copropriété dans laquelle elle est propriétaire.

Pour justifier ce positionnement, elle se réfère aux pièces n°3, 3 bis et 4 de son bordereau, et sur la description qui en est faite des deux maisons propriétés des époux [CJ]/[N], auteurs de la venderesse de Mme [L] [C].

Dans ces trois documents notariés, il est indiqué que les immeubles vendus sont constitués d'«une maison effondrée, de deux étages, sise à [Adresse 16], figurant à l'ancien cadastre de la dite commune, à la section H, N°[Cadastre 5], et au nouveau cadastre à la section AC, N°[Cadastre 9] d'une superficie de Ia,35ca lieu dit '[Localité 18]'. La dire bâtisse est située au-dessus d'un pressoir appartenant à Mr [DN] [Z], frère de Mme [V] [DN] épouse [M], venderesse, limité au Nord par les quais, à l'EST à la maison de Mr [DN] [Z], à l'Ouest à bâtisse effondrée acquise par Mr et Mme [CJ]. Une deuxième maison effondrée, attenante à la première composée d'un étage et d'un rez-de-chaussée, figurant à l'ancien cadastre de la dite commune à la section H, N°[Cadastre 5], et au nouveau cadastre à la section AC, N°[Cadastre 9], lieu dit '[Localité 18]'. Cette bâtisse limite à l'Est, au pressoir appartenant à Mr [DN] [Z], frère de la venderesse, et à la maison, effondrée acquise par Mr et Mme [CJ], au Nord par les quais, à l'Ouest maison effondrée appartenant aux familles [HC] [Z], héritiers [IE]-[TS] et [ZO]. Tel en outre que le tout existe se poursuit et se comporte avec toutes ses aisances et dépendances sans exception ni réserve et que les acquéreurs déclarent parfaitement connaître».

Cette description, si on retient les limites précisées, situe l'actuel fonds cadastré AC [Cadastre 7] comme étant la première maison effondrée, avec pressoir et, en conséquence, le grottone actuel ne peut être que celui mentionné dans l'acte du 26 février 1877.

Si, par un acte rectificatif du 10 juin 1964, il a été indiqué que la première maison correspondait à la parcelle cadastrée actuellement AC [Cadastre 6] et la seconde maison à la parcelle AC [Cadastre 7], cela est en totale contradiction avec les descriptions des limites parcellaires définies dans le premier acte du 16 octobre 1959 qui ne s'est trompé que sur la numération dans le nouveau cadastre en indiquant une parcelle AC [Cadastre 9] ; la rectification n'a fait que commettre une nouvelle erreur

En effet, cette lecture de l'acte originel du 16 octobre 1959, acte auquel ni l'intimé ni ses auteurs n'ont participé, est confortée par l'analyse de son contenu et des réalités du terrain. Ainsi, en page 2 de la pièce n°3 de l'appelante, il est clairement indiqué, dans une clause particulière de l'acte de vente que «Mr et Mme [CJ] acquéreurs s'engagent à construire un toit au-dessus du pressoir appartenant à Mr [DN] [Z], frère de la venderesse, entièrement à leurs frais....».

De plus, par sa pièce n°6 l'appelante produit un acte de donation partage du 15 décembre 1984 concernant [O] [CJ], [R] [N] et leurs trois enfants, [R], [T] et [I] [CJ]. Dans cet acte, trois lots sont créés au profit des trois enfants et ces lots sont décrits dans leur contenance. Le premier lot revenant à Mme [R] [CJ] comprend le lot numéro 3 de l'immeuble situé à [Adresse 15] soit «un appartement situé au deuxième étage du dit immeuble et occupant l'entier étage». Le deuxième lot revenant à Mme [T] [CJ] comprend notamment le lot numéro 4 de l'immeuble situé à [Adresse 15] soit «un local à usage commercial situé au rez-de-chaussée dudit immeuble, à gauche». Enfin, le troisième lot revenant à Mme [I] [CJ] comprend notamment le lot numéro 3 de l'immeuble situé à [Adresse 15] soit « «un local à usage commercial situé au rez-de-chaussée dudit immeuble, à droite».

A cela s'ajoute une photographie, non contestée dans sa légende, produite en pièce n°57 par l'intimé, qui permet de visualiser, sans aucune contestation, la situation du grottone comme étant sur la parcelle AC [Cadastre 7].

Il est ainsi irréfutable que seul le local commercial situé sur la parcelle AC [Cadastre 7] est d'un seul tenant, qu'il est la propriété actuelle de M. [U] [DN] et pouvait contenir un pressoir à olives -enlevé en mai 1958 confer pièce n°24 et 24 bis de l'intimé-, l'immeuble dans lequel l'appelante situe le dit pressoir appartenait en totalité aux donateurs et comprend en son rez-de-chaussée deux locaux commerciaux, un à droite et un à gauche pour lequel il ne pouvait avoir l'obligation mise à leur charge dans l'acte de vente du 16 octobre 1959 de construire un toit au-dessus d'un bien décrit comme étant la propriété de l'auteur de l'intimé à savoir [Z] [DN], ce qui n'est en rien contradictoire avec l'accord de partage à l'amiable du 3 janvier 1947, conclu entre [Z] [DN] et [V] [DN], à la suite du décès de leur père [U] [DN], le 4 octobre 1937 dans lequel il est indiqué que [V] [DN] se voit attribuer notamment «deux maisons contigües (pressoir non compris) aboutissant à l'Ouest maison Ricardoni, à l'Est maison paternelle» ; cette sortie d'indivision successorale dans le cadre d'un partage à l'amiable ne faisant qu'illustrer la propriété antérieure d'[Z] [DN], au moins pour partie du local commercial incluant le pressoir et son exclusion du partage de 1947, rien de plus, contrairement à ce que l'appelante veut en déduire relativement à la situation du grottone.

Mme [L] [C] conteste la propriété de M. [U] [DN] sur ce bien. Or, ce dernier produit en pièce n°44 un acte de vente non daté mais conclu entre son père, [Z] [DN], et sa tante, [V] [DN], portant sur la vente de la part que cette dernière possédait sur le local commercial comprenant le pressoir à olives, vente effectuée au profit de son frère selon les termes mêmes de l'acte ; le fait qu'[Z] [DN] y soit prénommé [E] [Z] n'a que peu d'intérêts à la lecture de la pièce n°67 de l'intimé précisant que son père, lors de sa reconnaissance et sa légitimation par son grand-père paternel, se prénommait [S] -[E] en italien- [Z], étant né à [Adresse 20] en Italie.

Cet acte de vente fait état d'un acte de partage successoral à la suite du décès de [U] [DN], grand-père paternel de l'intimé. L'acte de partage du 3 janvier 1947

produit par l'intimé en sa n°24 ne peut être l'acte auquel il est fait référence dans ledit acte de vente, le local incluant le pressoir étant explicitement exclu du dit partage -le lot de [V] [DN] étant constitué «pressoir non compris».

L'acte de vente non daté a été enregistré au visa des timbres fiscaux dont il est pourvu -35 et 150 francs français-, avec une référence d'enregistrement A-63153 selon un complément au tarif de 1956, ce qui amène à penser que le dit acte est postérieur à l'année 1956 et antérieur au 16 octobre 1959, date de l'acte de vente de [V] [DN] de la première maison effondrée, située au-dessus du pressoir, vendue aux époux [CJ]/[N] -pièce n°47 de l'intimé, le pressoir à olives étant lui enlevé en mai 1958 du local commercial.

De plus, dans un arrêt du 3 avril 2013, aujourd'hui définitif, la chambre civile de la cour d'appel de Bastia a , notamment, reconnu la qualité de propriétaire de M. [U] [DN] en ces termes «Dit que les consorts [DN] qui justifient de leur qualité de propriétaires sur 'le grottone' situé dans le prolongement de l'immeuble à usage de magasin cadastré AC [Cadastre 7] Bonifacio sont recevables à agir», arrêt dans le dispositif a été publié le 18 septembre 2013 au service de la publicité foncière à [Adresse 11] et dont le dispositif est opposable à tous, à défaut de tierce opposition dûment diligentée.

En conséquence, la propriété de M. [U] [DN] sur l'intégralité du local commercial, grottone inclus, situé au 69 quoi [X] [J], parcelle cadastrée AC [Cadastre 7] est incontestable au vu des titres la fondant, et ce, sans nécessité d'examiner une éventuelle acquisition par usucapion.

Il convient de débouter Mme [L] [C] et le Syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 15] de leurs demandes sur ce point.

* Sur l'application du statut de la copropriété des immeubles bâtis au grottone

Mme [L] [C] et le Syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 15] estime que le grottone est une partie commune de la copropriété et M. [U] [DN] de son côté fait valoir que n'étant pas un immeuble bâti et n'étant affecté qu'à un usage commercial il ne fait pas partie de la copropriété qu'il ne fait que jouxter.

Or M. [U] [DN] ne conteste nullement que la partie de son local commercial située au rez-de-chaussée de la copropriété du [Adresse 15] est un lot de celle-ci et en fait partie au titre des parties privatives.

Dans tous les documents produits au débat, il est indiqué que le rez-de-chaussée de la copropriété et le grottone ne font qu'un, et ce, depuis son achat en 1877, le local commercial ayant été vendu et acheté avec le grottone.

D'ailleurs, en page 46 de ses dernières écritures M. [U] [DN] a écrit que le grottone «n'est pas divisé en lots entre diverses personnes puisqu'il n'a jamais été divisé

depuis son acquisition par [P] [DN] le 26 février 1877», absence de division du grottone lui-même, ce qui anéantit la référence à une cour intérieure inexistante, mais aussi de la différenciation du grottone par rapport au rez-de-chaussée de la copropriété, les deux faisant partie du local commercial loué de manière unitaire à plusieurs reprises depuis 1958 -confer les pièces n°27 à 39 de l'intimé-, local grevé d'une servitude de passage au niveau de la voûte d'accès à la partie haute de la ville de [Localité 12] -page 46 des dernières écritures de l'intimé.

Etat qui est d'ailleurs en totale conformité avec l'état descriptif de l'immeuble -pièce n°6 de l'intimé, tel que produit au débat et établi le 15 décembre 1984 par-devant Me [B] [G] mentionne en lot numéro 1 «un local à usage commercial situé au rez-de-chaussée dudit immeuble et occupant l'entier rez-de-chaussée», le tout se trouvant sur la parcelle cadastrée AC n°[Cadastre 7], et sans qu'il n'y ait la moindre différenciation entre le grottone, une éventuelle cour intérieure et le local situé directement sous la construction, la propriété de M. [U] [DN] constituant un tout non divisé.

Il n'est donc nullement nécessaire d'organiser une expertise, pas plus qu'un transport sur les lieux, dans le seul but de définir la situation géographique du grottone, celle-ci étant parfaitement délimitée par les différents actes et pièces produits au débat comme étant le local commercial avec grottone situé en rez-de-chaussée de la copropriété, l'éventuelle contestation de cette propriété de M. [U] [DN] par la commune de [Localité 12] n'étant qu'une hypothèse non concrétisée et développée par la seule appelante, qui oublie qu'en droit français nul ne plaide par procureur et que les références cadastrales n'ont qu'une incidence fiscale et ne peuvent à elles seules déterminer une propriété, et ce, d'autant plus, comme en l'espèce, en présence d'un titre clair même s'il date de 1877.

Cette demande d'expertise est rejeté et le jugement confirmé sur ce point.

* Sur la démolition de la dalle construite par Mme [L] [C]

A ce titre, comme le premier juge l'a clairement indiqué dans une motivation que le cour fait sienne, l'article 552 du code civil dispose notamment dans son premier alinéa que «La propriété du sol emporte la propriété du dessus et du dessous».

En conséquence, M. [U] [DN] étant propriétaire de l'espace situé au-dessus du grottone inclus dans le local commercial situé au rez-de-chaussée de la résidence [Adresse 15], c'est à bon droit que le premier juge a reçu la demande de démolition présentée à l'encontre de Mme [L] [C].

Il y a donc lieu de confirmer le jugement querellé sur ce point.

* Sur la demande de dommages et intérêts présentée par Mme [L] [C]

Madame [L] [C] étant déboutée de son appel principal, il convient aussi de rejeter sa demande de dommages et intérêts fondée sur les préjudice moral et financier et le caractère abusif de la procédure initiée par M. [U] [DN].

* Sur les demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

S'il est équitable de laisser la charge de Mme [L] [C] les frais irrépétibles qu'elle a engagés, il n'en va pas de même pour M. [U] [DN] ; en conséquence, il convient de débouter l'appelante de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et d'allouer à l'intimé une somme de 5 000 euros à ce titre.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Vu l'arrêt avant-dire droit du 9 février 2022,

Vu l'intervention volontaire du Syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 15],

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Reconnaît la propriété de M. [U] [DN] sur le grottone inclus dans le local commercial situé au rez-de-chaussée de la copropriété du [Adresse 15]), le tout constituant un seul lot et une partie privative de cette copropriété,

Déboute Mme [L] [C] de l'ensemble de ses demandes, y compris celles relatives à des dommages et intérêts et au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum Mme [L] [C] et le Syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 15] au paiement des entiers dépens,

Condamne Mme [L] [C] à payer à M. [U] [DN] une somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

LA GREFFIÈRELE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Formation : Chambre civile section 2
Numéro d'arrêt : 20/00038
Date de la décision : 05/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-05;20.00038 ?
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