ARRET N°
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06 Juillet 2022
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N° RG 20/00128 - N° Portalis DBVE-V-B7E-B66A
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[F] [C]
C/
E.U.S.R.L. GAZELEC FOOTBALL CLUB [Localité 5]
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Décision déférée à la Cour du :
31 janvier 2020
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AJACCIO
17/00355
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COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE SOCIALE
ARRET DU : SIX JUILLET DEUX MILLE VINGT DEUX
APPELANT :
Monsieur [F] [C]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représenté par Me Christelle MENAGE, avocat au barreau d'AJACCIO et par Me Jules PLANCQUE, avocat au barreau de PARIS
INTIMEE :
E.U.S.R.L. GAZELEC FOOTBALL CLUB AJACCIO prise en la personne de son représentant legal à savoir son président domicilié en sa qualité audit siège
N° SIRET : 752 317 396
[Adresse 7]
[Adresse 8]
[Localité 3]
Représentée par Me Laura Maria POLI, avocat au barreau d'AJACCIO
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 mai 2022 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame BETTELANI, Vice-présidente placée auprès Monsieur le premier président, chargée du rapport,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Monsieur JOUVE, Président de chambre,
Madame COLIN, Conseillère
Madame BETTELANI, Vice-présidente placée auprès Monsieur le premier président
GREFFIER :
Madame COAT, Greffière lors des débats.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 06 juillet 2022
ARRET
- CONTRADICTOIRE
- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe
- Signé par Madame BETTELANI,Vice-présidente placée près Monsieur le premier président pour Monsieur JOUVE, Président de chambre empêché et par Madame CARDONA, Greffière présente lors de la mise à disposition de la décision.
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EXPOSE DU LITIGE
Monsieur [F] [C] a été embauché par l'E.U.S.R.L. Gazélec Football Club [Localité 5] (G.F.C.A.), en qualité de joueur professionnel de football suivant contrat à durée déterminée à effet du 10 août 2016 pour une durée de deux saisons jusqu'au terme de la saison 2017-2018, un avenant signé entre les parties le même jour prévoyant divers avantages pour le joueur au titre des saisons 2016-2017 et 2017-2018.
Les rapports entre les parties étaient soumis à la convention collective nationale des métiers du football.
Suite à convocation à un entretien préalable fixé au 25 septembre 2017, Monsieur [C] s'est vu notifier le 10 octobre 2017 une rupture anticipée de son contrat à durée déterminée pour faute grave.
Monsieur [F] [C] a saisi le conseil de prud'hommes d'Ajaccio, par requête reçue le 11 décembre 2017, de diverses demandes.
Selon jugement du 31 janvier 2020, le conseil de prud'hommes d'Ajaccio a :
-dit et jugé n'y avoir lieu à constater la violation d'une garantie de fond issue de l'article 271 de la charte du football professionnel au profit de Monsieur [F] [C],
-constaté que les agissements de Monsieur [C] sont constitutifs d'une faute grave,
-constaté que le Gazélec Football Club [Localité 5] a versé indument et par erreur à Monsieur [F] [C] la somme de 11.748,37 euros,
en conséquence
-dit et jugé que la procédure de rupture anticipée est régulière,
-dit et jugé que la rupture anticipée du contrat de Monsieur [C] pour faute grave est fondée,
-dit que la rupture anticipée du contrat de Monsieur [F] [C], par le Gazélec Football Club [Localité 5], n'était pas abusive,
-débouté Monsieur [F] [C] de toutes ses demandes, fins et conclusions,
-condamné Monsieur [F] [C] à la somme de 11.748,37 euros à titre de l'indu perçu,
-débouté par le Gazélec Football Club [Localité 5] de toutes ses autres demandes, fins et conclusions
-condamné Monsieur [F] [C] aux entiers dépens.
Par déclaration du 11 août 2018 enregistrée au greffe, Monsieur [F] [C] a interjeté appel de ce jugement aux fins d'infirmation en ce qu'il a : dit et jugé que la procédure de rupture anticipée est régulière, dit et jugé que la rupture anticipée du contrat de Monsieur [C] pour faute grave est fondée, dit que la rupture anticipée du contrat de Monsieur [F] [C], par le Gazélec Football Club [Localité 5], n'est pas abusive, débouté Monsieur [F] [C] de toutes ses demandes, fins et conclusions, condamné Monsieur [F] [C] aux entiers dépens (et aux fins de confirmation en ce qu'il a débouté le Gazélec Football Club [Localité 5] de toutes ses autres demandes, fins et conclusions).
Aux termes des dernières écritures de son conseil transmises au greffe en date du 4 octobre 2021 auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens de la partie, Monsieur [F] [C] a sollicité :
-de déclarer son appel recevable et bien fondé,
-de confirmer partiellement le jugement rendu par le conseil de prud'hommes d'[Localité 5], section activités diverses, le 31 janvier 2020, en ce qu'il a débouté le Gazélec Football Club [Localité 5] de toutes ses autres demandes, fins et conclusions,
-pour le surplus, l'infirmer,
-statuant à nouveau:
*de dire et juger les demandes de Monsieur [C] recevables et bien fondées,
*de dire et juger que la rupture anticipée et unilatérale du contrat de travail de Monsieur [C] intervenue le 10 octobre 2017 à l'initiative du Gazélec [Localité 5] est abusive,
*de condamner le Gazélec [Localité 5] à verser à titre de dommages et intérêts (articles L.1243-1 et L. 1243-4 du Code du travail) à Monsieur [C], en plus ou en moins sauf à parfaire, les sommes suivantes : à titre de préjudice financier de base : 130.161,29 euros bruts, au titre de dommages et intérêts complémentaires et distincts : 18.000 euros, à titre de préjudice lié à la perte des avantages en nature, 2.513,88 euros de préjudice lié à la perte de chance de percevoir toute prime sportive liée à l'exécution de son contrat de travail, 50.000 euros à titre de préjudice professionnel, 24.350 euros à titre de préjudice financier complémentaire, 10.000 euros, à titre de préjudice moral, social et familial,
*de dire que les condamnations prononcées porteront intérêts au taux légal, à compter de la première contestation de Monsieur [C], avec capitalisation des intérêts conformément à l'article 1154 du code civil,
*d'ordonner la délivrance de bulletins de salaire conformes ainsi que la justification du versement des cotisations sociales aux organismes obligatoires, sous astreinte journalière de 500 euros,
*d'ordonner la délivrance d'un certificat de travail conforme, sous astreinte journalière de 500 euros,
*d'ordonner la délivrance d'une attestation Assedic, sous astreinte journalière de 500 euros,
-de condamner le Gazélec [Localité 5] à payer à Monsieur [C] la somme de 6.000 euros par application de l'article 700 C.P.C.
-d'ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir,
-de condamner le Gazélec [Localité 5] en tous les dépens.
Aux termes des dernières écritures de son conseil transmises au greffe en date du 27 septembre 2021 auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens de la partie, l'E.U.S.R.L. Gazélec Football Club [Localité 5] (G.F.C.A.) a demandé :
-à titre principal :
*de confirmer en toutes ses dispositions le jugement de première instance rendu par le conseil de prud'hommes d'[Localité 5] en date du 31 janvier 2020,
*par conséquent, de dire que la rupture du contrat de travail déterminée était fondée sur une faute grave, dire que les demandes de [F] [C] sont irrecevables et mal fondées, de rejeter l'ensemble des demandes de [F] [C], de dire que la condamnation de Monsieur [F] [C] à restituer la somme de 11.748,37 euros au Gazélec était définitive
*de condamner Monsieur [F] [C] à payer la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens
-à titre subsidiaire : de rejeter l'ensemble des dommages et intérêts complémentaires distincts sollicités par Monsieur [C] et notamment le préjudice professionnel, le préjudice complémentaire, le préjudice moral, social et familial, de minorer fortement le préjudice au titre de la perte des avantages en nature et de la perte de chance, de dire que la saison de football ligue 2 2017-2018 se terminait au mois de mai 2018 et ainsi minorer de 22.500 euros la somme réclamée par Monsieur [C] au titre des dommages et intérêts pour rupture anticipée de CDD.
La clôture de l'instruction a été ordonnée de manière différée au 5 octobre 2021, et l'affaire fixée à l'audience de plaidoirie du 9 novembre 2021.
A l'audience du 9 novembre 2021, l'affaire a été retenue, les parties entendues en leurs plaidoiries et la décision mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 19 janvier 2022.
Suivant arrêt avant dire droit du 19 janvier 2022, la cour a :
-ordonné la réouverture des débats,
-enjoint aux parties constituées de rencontrer un médiateur en la personne de Madame [S] [A], demeurant [Adresse 6] à [Localité 5] (n° tél. [XXXXXXXX01]), pour recevoir une information sur l'objet et le déroulement d'une mesure de médiation,
-dit que le médiateur aura pour mission de convoquer les parties, séparément ou ensemble, afin de les informer sur l'objet et le déroulement de la mesure de médiation,
-dit que l'information des parties sur l'objet et le déroulement de la médiation devra se faire dans un délai maximum de deux mois à compter de la réception de la présente décision,
-dit que l'affaire sera rappelée à l'audience de la chambre sociale du 10 mai 2022 à 14 heures pour recueillir l'accord des parties sur une éventuelle médiation, la présente décision valant convocation des parties à l'audience,
-dit que copie de la présente décision devra être transmise, pour information, au médiateur que les parties sont enjointes de rencontrer,
-réservé les dépens.
A l'audience du 10 mai 2022, a été constatée l'absence de volonté concordante des parties pour une médiation et l'affaire a été mise en délibéré par mise à disposition au greffe le 6 juillet 2022.
MOTIFS
La recevabilité de l'appel n'est pas discutée et les éléments du dossier ne conduisent pas la cour à le faire d'office. L'appel de Monsieur [C] sera donc déclaré recevable en la forme tel que sollicité.
A titre préalable, il convient de constater que si l'E.U.S.R.L. Gazélec Football Club [Localité 5] (G.F.C.A.) se prévaut d'une irrecevabilité des demandes de Monsieur [C], elle ne développe pas de moyen de nature à fonder l'irrecevabilité alléguée, de sorte que celle-ci ne peut être accueillie, les demandes de Monsieur [C] étant déclarées recevables en la forme.
Sur le fond, Monsieur [C] se prévaut, en premier lieu, à l'appui de sa critique du jugement, d'une violation d'une garantie de fond, dans le cadre de la procédure de rupture anticipée de son contrat de travail à durée déterminée pour faute grave.
Il est constant au dossier que l'employeur a saisi la commission juridique de la ligue professionnelle de football (L.F.P.) par courrier du 11 septembre 2017, en application des dispositions de la charte du football professionnel, en vue d'une conciliation préalable à la rupture du contrat de travail de Monsieur [C], commission qui a convoqué les parties pour le 3 octobre 2017, date à laquelle elle a constaté leur non conciliation, avant que l'employeur (qui avait convoqué le 14 septembre 2017 le salarié à entretien préalable fixé au 25 septembre 2017), n'adresse le 10 octobre 2017 au salarié une lettre de rupture anticipée du contrat de travail à durée déterminée pour faute grave.
L'appelant ne démontre pas que la saisine de la commission juridique de la L.F.P. ait à intervenir après l'entretien préalable à la rupture, ni même après la convocation à entretien préalable. Dans le même temps, la garantie de fond conventionnelle, que constitue le préalable de saisine obligatoire de la commission juridique de la L.F.P. lorsque la rupture est envisagée en raison d'un manquement de l'une des parties à ses obligations, a été respectée. Parallèlement, il ne se déduit pas des éléments soumis à l'appréciation de la cour que l'employeur avait d'ores et déjà pris sa décision au moment de la saisine de la commission -commission qui n'est pas, ici, une commission de discipline-, ni que l'entretien préalable à la rupture était vidé de sa finalité. Sa critique du jugement à cet égard n'est ainsi pas fondée.
Pour ce qui de l'absence d'énonciation des griefs par la lettre de convocation à entretien préalable, également invoquée par l'appelant au visa de l'article 615 de la charte du football professionnel, Monsieur [C] ne justifie pas d'une irrégularité commise dans le déroulement d'une procédure disciplinaire prévue par les dispositions conventionnelles, assimilée à la violation d'une garantie de fond et rendant la rupture non causée, pour avoir privé le salarié de droit de sa défense ou été susceptible d'avoir exercé une influence sur la décision finale de rupture par l'employeur. En effet, il n'est pas mis en évidence que la lettre de convocation à entretien préalable à la rupture remise en main propre au salarié n'ait pas énoncé les griefs formulés à l'encontre du salarié par son employeur, ceux-ci y figurant (étant observé que les faits afférents à une piètre prestation sportive ne constituent pas un grief mais un motif de rupture de nature non disciplinaire), permettant au salarié d'exercer son droit de défense.
Le jugement entrepris sera ainsi confirmé en ses dispositions afférentes à la régularité de la procédure de rupture, non affectée d'une violation d'une garantie de fond.
Monsieur [C] se fonde ensuite, pour quereller le jugement, sur une absence de faute grave de sa part, rendant la rupture anticipée du contrat à durée déterminée abusive.
Il sera utilement rappelé que sauf accord des parties, un contrat à durée déterminée est susceptible d'être rompu avant l'échéance du terme dans les conditions prévues par l'article L1243-1 du code du travail, en cas de faute grave, de force majeure ou d'inaptitude constatée par le médecin du travail. Il appartient aux juges du fond de qualifier les faits. Dans ce cadre, la juridiction peut être amenée à restituer leur exacte qualification aux faits invoqués par l'employeur, sans dénaturation de la lettre de rupture ; elle n'est ainsi pas liée par une qualification erronée donnée à la rupture, ni par une impropriété de termes figurant dans la lettre de rupture. Il est en outre traditionnellement admis qu'un fait tiré de la vie personnelle du salarié ne peut justifier une rupture disciplinaire ; toutefois, ce principe souffre deux exceptions : lorsque le fait tiré de la vie personnelle se rattache à la vie de l'entreprise ou lorsqu'il constitue un manquement du salarié à une obligation découlant de son contrat de travail.
La lettre de rupture anticipée du contrat de travail à durée déterminée pour faute grave du 10 octobre 2017, remise en main propre le même jour, ne sera pas reprise dans le présent arrêt compte tenu de sa longueur.
En dépit des imperfections de formulation de la lettre de rupture qui constituent clairement des maladresses rédactionnelles, il ressort de celle-ci, sans dénaturation, que l'employeur invoque, au soutien de la rupture anticipée pour faute grave prononcée :
-un manquement grave du salarié à son obligation de loyauté le 8 septembre 2017, jour de match à domicile pour lequel sa titularisation était prévue, au travers de faits d'absence à la séance vidéo, élément déterminant dans le cadre de la préparation d'avant match, à laquelle le salarié était convoqué, absence ayant désorganisé ses partenaires et ayant eu un impact sur sa prestation sportive ultérieure, mais également au travers d'explications fournies par le salarié pour justifier de son absence (le fait qu'il s'était 'vomi dessus' alors qu'il se rendait au stade le contraignant à retourner à domicile pour se changer), non étayées par une preuve médicale, amenant l'employeur à considérer les problèmes de santé évoqués comme relevant davantage d'une hygiène insatisfaisante que d'un mal de ventre,
-un nombre important de témoignages verbaux et écrits de dirigeants, joueurs et supporters sur la piètre prestation sportive du salarié le soir du match.
A titre liminaire, il convient d'observer que Monsieur [C] ne produit pas de pièces à même de démontrer que les faits invoqués ne correspondent pas aux motifs réels de la rupture et que la rupture anticipée a en réalité une cause distincte.
A l'appui des faits invoqués dans la lettre de rupture, l'employeur se réfère à diverses pièces (notamment un courriel du 7 septembre 2017 adressé aux salariés concernés, dont Monsieur [C], afférent à la préparation du match du 8 septembre 2017, avec mention de la séance vidéo prévue à 16h ; attestations de Messieurs [M], [Z], [K], [N], [H], [D], [V], et du Docteur [U], dont le fait qu'elles ne répondent pas intégralement au formalisme exigé par l'article 202 du code de procédure civile n'empêche pas toutefois qu'en soit apprécié le contenu ; des articles de presse; un message texto du 10 septembre 2017 adressé par Monsieur [C] à Monsieur [D], directeur sportif du club, message produit par Monsieur [C]). Celles-ci viennent confirmer la réalité des faits énoncés dans la lettre de rupture liés à un manquement à l'obligation de loyauté au travers de l'absence de Monsieur [C], devant être joueur titulaire, à la séance vidéo d'avant match à laquelle il avait préalablement convoqué (absence d'ailleurs non contestée par le salarié dans ses écritures, pas davantage qu'il ne conteste n'en avoir pas justifié médicalement), ainsi qu'au travers d'explications fournies par le salarié pour justifier de son absence (le fait qu'il s'était 'vomi dessus' alors qu'il se rendait au stade le contraignant à retourner à domicile pour se changer), non étayées par une preuve médicale, amenant l'employeur à considérer les problèmes de santé évoqués comme relevant davantage d'une hygiène insatisfaisante que d'un mal de ventre, ce de manière fondée, le Docteur [U] attestant ainsi que 'Le 8 septembre 2017, après son absence à la séance vidéo préparatrice à la rencontre GFCA/ SOCHAUX (0-1), et suite aux propos qu'il avait tenu au capitaine de l'équipe [J] [P] ('je me suis vomi dessus'), à son arrivée au stade, il m'a précisé qu'il s'était endormi après avoir fait la fête toute la nuit'. En revanche, les pièces produites sont insuffisantes pour permettre à la cour de caractériser les faits, non reconnus par le salarié (le message texto du 10 septembre 2017 de Monsieur [C] susvisé n'émettant pas une telle reconnaissance à ces égards), de désorganisation de ses partenaires et d'impact sur sa prestation sportive ultérieure générée par cette absence à la séance vidéo d'avant match, ainsi que l'existence d'un nombre important de témoignages verbaux et écrits de dirigeants, joueurs et supporters sur la piètre prestation sportive du salarié le soir du match.
Parallèlement, les éléments visés essentiellement par Monsieur [C] (relevé de casier judiciaire; attestations de Messieurs [P], [X], [B], dont deux d'entre elles, émanant de Messieurs [P] et [B] ont fait l'objet de demande écrite de retrait par leurs auteurs ; groupe retenu et feuille de match détaillée du 8 septembre 2017 ; montage vidéo des actions impliquant Monsieur [C] lors dudit match ; extrait de compte twitter), ne sont pas de nature à justifier de l'inanité des faits invoqués par l'employeur, subsistants au terme de l'examen de la cour, ou à faire peser un doute suffisant sur ceux-ci.
L'employeur, auquel il ne peut être reproché (conformément à une jurisprudence constante) d'avoir pris un temps nécessaire pour apprécier la gravité de la faute, souligne qu'ils ont nui à l'image de le club souhaitait donner -ce qui n'est pas démontré- et plus globalement qu'ils rendaient, par leur nature, le maintien du salarié dans l'entreprise impossible. Ce dernier moyen doit être considéré comme pertinent, au regard de la nature des faits subsistants au terme de l'examen de la cour, de surcroît commis par le salarié d'un club de football professionnel, alors que celui-ci était embauché dans le cadre d'un contrat à durée déterminée, et qui devait donc se montrer, eu égard du caractère précaire de son embauche, particulièrement vigilant sur le respect de ses obligations dans l'exécution du contrat de travail, singulièrement celle de loyauté. L'argumentation développée par Monsieur [C] afférente à la proportion entre faute et sanction au regard des dispositions conventionnelles, notamment des articles 606 et 614 de la charte du football professionnel, n'est pas opérante, dans la mesure où les faits retenus par la cour excèdent le seul cadre d'absence ou retard injustifié, et constituent un manquement répété du salarié à son obligation de loyauté, obligation essentielle dans le cadre de l'exécution d'un contrat de travail. Dans le même temps, le fait que Monsieur [C] ait finalement joué le match du 8 septembre 2017 n'empêche pas l'employeur de poursuivre une rupture pour faute grave du contrat de travail et d'exposer que ces faits rendaient, par leur nature, le maintien du salarié dans l'entreprise impossible.
Dans ces conditions, la rupture pour faute grave du contrat de travail liant Monsieur [C] à l'E.U.S.R.L. Gazélec Football Club [Localité 5] (G.F.C.A.) est fondée et le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté Monsieur [C] de sa demande tendant à dire et juger que la rupture anticipée et unilatérale du contrat de travail de Monsieur [C] intervenue le 10 octobre 2017 à l'initiative du Gazélec [Localité 5] est abusive, et de ses demandes subséquentes, tendant, en réparation des préjudices causés par la rupture abusive, à condamner le Gazélec [Localité 5] à verser à titre de dommages et intérêts (articles L.1243-1 et L. 1243-4 du Code du travail) à Monsieur [C], en plus ou en moins sauf à parfaire, les sommes suivantes : à titre de préjudice financier de base : 130.161,29 euros bruts, au titre de dommages et intérêts complémentaires et distincts : 18.000 euros, à titre de préjudice lié à la perte des avantages en nature, 2.513,88 euros de préjudice lié à la perte de chance de percevoir toute prime sportive liée à l'exécution de son contrat de travail, 50.000 euros à titre de préjudice professionnel, 24.350 euros à titre de préjudice financier complémentaire, 10.000 euros, à titre de préjudice moral, social et familial, dire que les condamnations prononcées porteront intérêts au taux légal, à compter de la première contestation de Monsieur [C], avec capitalisation des intérêts conformément à l'article 1154 du code civil, ordonner la délivrance de bulletins de salaire conformes ainsi que la justification du versement des cotisations sociales aux organismes obligatoires, sous astreinte journalière de 500 euros, ordonner la délivrance d'un certificat de travail conforme, sous astreinte journalière de 500 euros, d'ordonner la délivrance d'une attestation Assedic, sous astreinte journalière de 500 euros, avec exécution provisoire. Les demandes en sens contraire seront rejetées.
Les chefs du jugement rendu par le conseil de prud'hommes afférents à la condamnation de Monsieur [F] [C] à la somme de 11.748,37 euros à titre de l'indu perçu et au débouté du Gazélec Football Club [Localité 5] de toutes ses autres demandes, fins et conclusions n'ont pas été déférés à la cour, en l'absence d'appel principal ou incident sur ce point, étant observé qu'une annulation du jugement n'a pas été demandée et qu'il n'est pas argué d'une indivisibilité du litige, ni de ce que ces chefs dépendent de ceux expressément critiqués. Dès lors, il y a lieu, non stricto sensu de dire que la condamnation de Monsieur [F] [C] à restituer la somme de 11.748,37 euros au Gazélec était définitive, mais de dire que ces chefs du jugement sont devenus irrévocables et qu'il n'y a pas lieu à statuer les concernant.
Monsieur [C], partie succombante, sera condamné aux dépens de première instance (le jugement entrepris étant confirmé à cet égard) et de l'instance d'appel.
Le jugement entrepris sera confirmé en ses dispositions querellées relatives aux frais irrépétibles de première instance.
L'équité ne commande pas de prévoir de condamnation sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles d'appel.
Les parties seront déboutées de leurs demandes plus amples ou contraires à ces égards.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe le 6 juillet 2022,
DECLARE recevable en la forme l'appel de Monsieur [F] [C],
CONFIRME, le jugement rendu par le conseil de prud'hommes d'Ajaccio le 31 janvier 2020, tel que dévolu à la cour,
Et y ajoutant,
REJETTE la demande de l'E.U.S.R.L. Gazélec Football Club [Localité 5] (G.F.C.A.) tendant à dire que les demandes de Monsieur [C] sont irrecevables et DECLARE recevables en la forme les demandes de Monsieur [F] [C],
DIT que les chefs du jugement rendu par le conseil de prud'hommes afférents à la condamnation de Monsieur [F] [C] à la somme de 11.748,37 euros à titre de l'indu perçu et au débouté du Gazélec Football Club [Localité 5] de toutes ses autres demandes, fins et conclusions qui n'ont pas été déférés à la cour par l'appel, sont devenus irrévocables et qu'il n'y a pas lieu à statuer les concernant,
DÉBOUTE les parties de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles d'appel,
CONDAMNE Monsieur [F] [C] aux dépens d'appel,
DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
LA GREFFIÈRE P/ LE PRÉSIDENT EMPECHE