Chambre civile
Section 2
ARRÊT N°
du 15 JUIN 2022
N° RG 21/00544 N° Portalis DBVE-V-B7F-CBSV
JD - C
Décision déférée à la Cour :
Jugement Au fond, origine Tribunal d'Instance d'AJACCIO, décision attaquée en date du 28 Juillet 2021, enregistrée sous le n° 20/00625
Société KARLSBRAU CHR
C/
[Y]
Copies exécutoires délivrées aux avocats le
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU
QUINZE JUIN DEUX-MILLE-VINGT-DEUX
APPELANTE :
Société KARLSBRAU CHR
prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié ès qualités au siège social
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par Me Claudia LUISI de l'AARPI TOMASI VACCAREZZA BRONZINI DE CARAFFA TABOUREAU GENUINI LUISI BENARD-BATTESTI, avocate au barreau de BASTIA, Me SELARL GUMUSCHIAN ROGUET BONZY de la SELARL GUMUSCHIAN-ROGUET-BONZY, avocat au barreau de GRENOBLE
INTIMÉ :
M. [K] [Y]
né le [Date naissance 3] 1972 à [Localité 4]
[Adresse 6]
[Localité 4]
défaillant
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 14 avril 2022, devant Judith DELTOUR, conseillère, chargée du rapport, les avocats ne s'y étant pas opposés.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Jean-Jacques GILLAND, président de chambre
Judith DELTOUR, conseillère
Stéphanie MOLIES, conseillère
GREFFIER LORS DES DÉBATS :
Françoise COAT.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 15 juin 2022.
ARRÊT :
Rendu par défaut,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Jean-Jacques GILLAND, président de chambre, et par Françoise COAT, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
PROCÉDURE
Alléguant un contrat de débitant de boissons, un prêt bancaire et son cautionnement solidaire, l'ouverture d'une procédure collective par jugement du tribunal de commerce de Perpignan (Pyrénées-Orientales) du 9 septembre 2015 et une clôture pour insuffisance d'actifs le 28 septembre 2016, des mises en demeure du débiteur et une quittance subrogative, par acte 20 février 2020, la S.A.S. Karlsbräu CHR a assigné M. [K] [Y] devant le tribunal d'instance d'Ajaccio pour obtenir sa condamnation avec exécution provisoire, au paiement des dépens et de 8 949,77 euros au titre de son engagement de sous-caution, outre avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure, avec capitalisation des intérêts et de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 28 juin 2021, le tribunal d'instance d'Ajaccio a :
- constaté la prescription de l'action en recouvrement de la société Karlsbräu CHR,
- déclaré la demande de la société Karlsbräu CHR irrecevable,
- rejeté la demande de dommages et intérêts de M. [K] [Y]
- rejeté la demande de M. [K] [Y] au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société Karlsbräu au paiement des dépens.
Par déclaration reçue le 16 juillet 2021, la S.A.S. Karlsbräu CHR a interjeté appel de la décision. La déclaration d'appel a été signifiée le 9 septembre 2021 par remise à l'étude après vérification de l'adresse suivant avis de non constitution du 23 août 2021.
Par conclusions communiquées le 7 octobre 2021 et signifiées le 13 octobre 2021 par remise à l'étude après vérification de l'adresse, la S.A.S. Karlsbräu a :
- sollicité d'infirmer le jugement en ce qu'il a constaté la prescription de l'action en recouvrement de la société Karlsbräu, déclaré la demande irrecevable et la condamnée au paiement des dépens,
Statuant à nouveau, de
- dire et juger recevable et bien fondé l'appel,
- condamner M. [K] [Y] au paiement de la somme 8 949,77 euros au titre de son engagement de sous-caution, outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure en date du 24 mars 2016,
- débouter M. [K] [Y] de ses demandes, fins et conclusions,
- ordonner la capitalisation des intérêts dus en application des dispositions de l'article 1154 du Code civil,
- condamner M. [K] [Y] au paiement des dépens de première instance et d'appel et de 2500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 2 mars 2022.
L'affaire a été fixée à plaider à l'audience du 14 avril 2022. L'affaire a été mise en délibéré pour être rendu par mise à disposition au greffe le 15 juin 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Le tribunal a considéré que l'action était prescrite en application des dispositions de l'article L218-2 du code de la consommation relatif à la prescription de deux ans des actions des professionnels contre les consommateurs et que la quittance subrogative émise par la Banque CIC était une preuve que la S.A.S. Karlsbräu CHR se constituait à elle-même.
Or, par définition, la quittance émise par la S.A. Banque CIC Est n'a pas été établie par la S.A.S. Karlsbräu CHR et, dès lors, qu'elle indique expressément qu'elle a reçu de cette dernière des échéances "en règlement des sommes restant dues au titre du prêt d'un montant initial de 50 465 euros", il ne pouvait en être déduit d'une part qu'il s'agissait d'une preuve constituée à soi-même et d'autre part qu'aucun document ne permettait de retenir que la dette avait été soldée dans son intégralité à la date de la quittance subrogative.
En effet en premier lieu, la subrogation a lieu par le seul effet de la loi et en second lieu, la subrogation conventionnelle qui doit être expresse s'opère à l'initiative du créancier lorsque celui-ci, recevant son paiement d'une tierce personne, la subroge dans ses droits contre le débiteur. Tel est précisément le cas en l'espèce, alors que la quittance constate la libération totale ou partielle du débiteur. Enfin l'addition des montants figurant sur la quittance donne un total de 8 874,77 euros, montant exact de la quittance subrogative.
Le contrat de prêt a été signé par la Banque CIC Est -la banque-, la S.A.S. Karlsbräu -la brasserie- et la S.A.R.L. TDF [Localité 5] Saint Charles- l'emprunteur représentée par M. [Y] son gérant, il prévoyait l'exigibilité immédiate notamment en cas de liquidation judiciaire de l'emprunteur, en cas de paiement d'une des échéances par la brasserie. Un nantissement de fonds de commerce a été prévu. La brasserie s'est portée caution solidaire de ce prêt, en renonçant au bénéfice de division. La créance a été déclarée à la liquidation judiciaire le 10 novembre 2015 ; elle a interrompu la prescription de l'action en paiement du créancier jusqu'à la clôture de la procédure collective, également à l'égard de la caution de la société bénéficiant de la procédure collective.
À supposer que la caution, qui y a intérêt, puisse se prévaloir, de la prescription biennale de l'article L218-2 du code de la consommation qui procède de la qualité de consommateur, s'agissant d'une exception inhérente à la dette, en l'espèce, M. [Y] s'est engagé en qualité d'associé de la société cautionnée, il avait un intérêt patrimonial personnel à garantir la dette commerciale. Il ne pouvait pas bénéficier de la prescription abrégée, qui n'est pas non plus applicable à l'action directe de la S.A.S. Karlsbräu CHR.
M. [Y] a été mis en demeure par la S.A.S. Karlsbräu CHR par lettres recommandées avec accusés de réception d'abord le 24 mars 2016, puis le 27 août 2018 et le 13 mars 2019, donc dans les deux ans de la clôture pour insuffisance d'actif du 26 septembre 2016. Ces mises en demeure restées sans effet, c'est la S.A.S. Karlsbräu CHR qui a payé donnant lieu à la quittance subrogative litigieuse du 10 décembre 2019 et à l'assignation du 20 février 2020.
La créance a été déclarée le 15 novembre 2015 pour 8 783,36 euros. La S.A.S. Karlsbräu CHR n'est ni un établissement de crédit ni une créancière professionnelle relevant des dispositions de l'article L313-22 du code monétaire et financier.
Il résulte de ces éléments que le jugement doit être infirmé, statuant de nouveau, compte tenu du montant de la quittance subrogative, M. [Y] est condamné à payer à la S.A.S. Karlsbräu CHR la somme 8 874,77 euros avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 20 février 2020 et capitalisation des intérêts dus pour une année entière.
La S.A.S. Karlsbräu CHR est déboutée du surplus de ses demandes qui ne sont pas fondées sur la quittance subrogative qui justifie ses prétentions.
M. [Y] est condamné au paiement des dépens de première instance et d'appel. L'équité n'exige pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR, statuant publiquement par mise à disposition au greffe par défaut, en dernier ressort,
- Infirme le jugement,
Statuant de nouveau,
- Condamne M. [K] [Y] à payer à la S.A.S. Karlsbräu CHR la somme 8 874,77 euros avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 20 février 2020 et capitalisation des intérêts dus pour une année entière,
- Déboute la S.A.S. Karlsbräu CHR du surplus de ses demandes y compris en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamne M. [K] [Y] au paiement des dépens de première instance et d'appel.
LA GREFFIÈRELE PRÉSIDENT