Chambre civile
Section 2
ARRÊT N°
du 25 MAI 2022
N° RG 21/00079
N° Portalis DBVE-V-B7F-CABH SM - C
Décision déférée à la Cour :
Jugement Au fond, origine TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'AJACCIO, décision attaquée en date du 17 Décembre 2020, enregistrée sous le n° 19/00671
[LR]
[F]
C/
Consorts [LR]
Copies exécutoires délivrées aux avocats le
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU
VINGT-CINQ MAI DEUX-MILLE-VINGT-DEUX
APPELANTS :
M. [S] [LR]
né le 15 Mars 1946 à [Localité 1]
lieu-dit Podingo
[Localité 3]
Représenté par Me Sarah SENTENAC, avocate au barreau d'AJACCIO
Mme [P], [J] [F] épouse [LR]
née le 4 Janvier 1950 à [Localité 16]
lieu-dit Podingo
[Localité 3]
Représentée par Me Sarah SENTENAC, avocate au barreau d'AJACCIO
INTIMÉES :
Mme [A] [LR] épouse [D]
née le 20 Juin 1948 à [Localité 1]
[Adresse 14]
[Localité 1]
Représentée par Me Hélène NASSIBIAN-GIOVANNUCCI, avocate au barreau d'AJACCIO
Mme [V] [LR] épouse [I]
née le 20 Février 1956 à [Localité 3]
[Adresse 5]
[Localité 7]
Représentée par Me Hélène NASSIBIAN-GIOVANNUCCI, avocate au barreau d'AJACCIO
Mme [R] [LR]
née le 18 Juillet 1942 à [Localité 3]
[Adresse 11]
[Localité 1]
Représentée par Me Hélène NASSIBIAN-GIOVANNUCCI, avocate au barreau d'AJACCIO
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/1226 du 20/05/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BASTIA)
Mme [W] [LR] épouse [Z]
née le 21 Juillet 1951 à [Localité 3]
[Adresse 13]
[Localité 8]
Représentée par Me Hélène NASSIBIAN-GIOVANNUCCI, avocate au barreau d'AJACCIO
Mme [M] [LR] épouse [U]
née le 29 Février 1944 à [Localité 1]
[Adresse 15]
[Localité 2]
défaillante
Mme [N] [LR] épouse [Y]
née le 29 Décembre 1949 à [Localité 3]
[Adresse 10]
[Localité 1]
défaillante
Mme [B] [LR]
née le 29 Décembre 1949 à [Localité 3]
[Adresse 9]
[Localité 1]
défaillante
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 17 mars 2022, devant Stéphanie MOLIES, conseillère, chargée du rapport, les avocats ne s'y étant pas opposés.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Jean-Jacques GILLAND, président de chambre
Judith DELTOUR, conseillère
Stéphanie MOLIES, conseillère
GREFFIER LORS DES DÉBATS :
[E] [T].
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 25 mai 2022.
ARRÊT :
Rendu par défaut,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Jean-Jacques GILLAND, président de chambre, et par Françoise COAT, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS CONSTANTS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS :
Suivant actes d'huissier des 6, 14, 25 et 26 juin 2020, M. [S] [LR] et Mme [P] [F], son épouse, ont fait citer Mme [R] [LR], Mme [A] [LR], épouse [D], Mme [W] [LR], épouse [Z], Mme [V] [LR], épouse [I], Mme [M] [LR], épouse [U], Mme [N] [LR], épouse [Y] et Mme [B] [LR] devant le tribunal de grande instance d'Ajaccio aux fins de voir reconnaître leur qualité de propriétaire du lot n°5 situé dans l'ensemble immobilier cadastré section B n°[Cadastre 4] [Adresse 12] (Corse-du-Sud) sur le fondement de la prescription acquisitive, et obtenir une expertise pour évaluer les améliorations apportées au fond.
Par décision du 17 décembre 2020, le tribunal judiciaire d'Ajaccio a :
- déclaré recevable l'action de M. [S] [LR] et Mme [P], [J] [F] épouse [LR],
- débouté M. [S] [LR] et Mme [P], [J] [F] épouse [LR] de leur demande de prescription acquisitive du lot n°5 de l'ensemble immobilier édifié sur la parcelle B[Cadastre 4] de la commune de [Localité 3],
- débouté M. [S] [LR] et Mme [P], [J] [F] épouse [LR] de leur demande d'expertise,
- débouté Mme [R] [LR], Mme [A] [LR] épouse [D], Mme [W] [LR] épouse [Z], Mme [V] [LR] épouse [I] de leurs demandes,
- dit n'y avoir lieu à indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. [S] [LR] et Mme [P], [J] [F] épouse [LR] aux dépens de l'instance,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,
- rejeté toutes les autres demandes plus amples ou contraires formées par les parties.
Suivant déclaration enregistrée le 2 février 2021, M. [S] [LR] et Mme [P] [F] ont interjeté appel de la décision susvisée en ce qu'elle a :
- débouté Monsieur et Madame [S] [LR] de leurs demandes tendant à voir juger que la prescription acquisitive du lot n°5 de l'ensemble immobilier édifié sur la parcelle B[Cadastre 4] de la commune de [Localité 3] leur est acquise et qu'ils sont seuls propriétaires dudit lot et des constructions et aménagements qui y sont situés,
- rejeté la demande subsidiaire des époux [LR] tendant à voir ordonner une mesure d'expertise si par extraordinaire la Juridiction retenait que la prescription n'est pas acquise et ce afin de chiffrer la plus-value apportée à l'indivision par la construction réalisée et financée par les époux [LR].
Par dernières conclusions régulièrement notifiées le 31 janvier 2022, M. [S] [LR] et Mme [P] [F] ont demandé à la cour de :
DÉBOUTER les intimées de leurs contestations relatives à l'irrecevabilité de la déclaration d'appel et des conclusions des appelants.
STATUER ce que de droit sur le caractère abusif de la contestation et faire application de l'article 32-1 du code de procédure civile.
RÉFORMER le Jugement entrepris en ce qu'il a rejeté la demande d'usucapion formée par Monsieur et Madame [LR] concernant la possession paisible et continue du lot n°5.
Statuant à nouveau,
Vu les articles 2258, 2261 et 2272 du code civil
JUGER que Monsieur et Madame [LR] ont possédé de façon publique continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque, et à titre de propriétaire, le lot n°5 de l'ensemble immobilier édifié sur la parcelle B[Cadastre 4] de la commune de [Localité 3].
JUGER que cette possession s'est exercée depuis 1979 et qu'en 2019, la prescription acquisitive trentenaire est largement acquise.
JUGER que la prescription acquisitive est établie au bénéfice de Monsieur et Madame [LR].
JUGER que Monsieur et Madame [LR] sont les seuls propriétaires du lot n° 5 de la parcelle B[Cadastre 4] de la commune de [Localité 3] et des constructions et aménagements qui y sont situés.
JUGER que sera dressé l'acte de propriété et accompli l'ensemble des formalités de publicité foncière nécessaires, par tel notaire qu'il plaira à Monsieur et Madame [LR] de désigner.
CONFIRMER le Jugement entrepris en ce qu'il a déclaré Monsieur et Madame [LR] recevables dans leurs demandes et débouté les intimées de leur demande formée au titre de l'indemnité d'occupation.
CONDAMNER Mesdames [A] [D], [V] [I], [W] [Z] et [R] [O] in solidum à payer à Monsieur et Madame [LR] la somme de 6.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de première instance et d'appel.
Par dernières conclusions régulièrement notifiées le 31 janvier 2022, Mme [R] [LR] veuve [O], Mme [A] [LR], épouse [D], Mme [W] [LR], épouse [Z], et Mme [V] [LR], épouse [I], ont demandé à la juridiction d'appel de :
IN LIMINE LITIS :
- ANNULER la déclaration d'appel formée par Monsieur [S] [LR] et Madame [P] [F] épouse [LR] ;
- DÉCLARER irrecevables les conclusions d'appelants sur le fondement des articles 960 et 961 du code de procédure civile ;
À TITRE LIMINAIRE :
- ORDONNER une expertise en vérification d'écriture du document du 15 mai 1979 comparée avec la lettre manuscrite de Monsieur [S] [LR] du 21 mars 2018 ;
À TITRE PRINCIPAL DE :
- CONFIRMER le jugement du tribunal judiciaire d'Ajaccio du 17 décembre 2020 en ce qu'il a débouté Monsieur [S] [LR] et Madame [P] [F] épouse [LR] de leur demande de prescription acquisitive du lot n° 5 de l'ensemble immobilier édifié sur la parcelle B[Cadastre 4] de la commune de [Localité 3] ;
- DÉBOUTER Monsieur [LR] et Madame [P] [F] épouse [LR] de toutes leurs demandes, fins et prétentions.
PAR CONSÉQUENT :
- CONDAMNER solidairement Monsieur [S] [LR] et Madame [P] [F] épouse [LR] à verser à chacune des concluantes la somme de 1 500,00 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- CONDAMNER solidairement Monsieur [S] [LR] et Madame [P] [F] épouse [LR] au paiement des dépens de l'instance.
Bien que régulièrement avisées de la déclaration d'appel suivant actes d'huissier délivré le 19 mars 2021 à personne, Mme [M] [LR], épouse [U], et Mme [B] [LR] n'ont pas constitué avocat.
Bien que régulièrement avisée de la déclaration d'appel suivant acte d'huissier délivré le 19 mars 2021 à domicile, Mme [N] [LR], épouse [Y], n'a pas constitué avocat.
Suivant ordonnance du 9 novembre 2021, le conseiller chargé de la mise en état a :
- débouté Mme [R] [LR], Mme [A] [LR] épouse [D], Mme [W] [LR] épouse [Z], Mme [V] [LR] épouse [I] de leurs demandes en incident,
- ordonné le renvoi de l'affaire à la mise en état du 2 février 2022 pour clôture éventuelle,
- dit que les dépens de l'incident suivront ceux du fond,
- débouté les parties de leurs demandes en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ordonnance du 23 février 2022, le conseiller chargé de la mise en état a ordonné la clôture de la procédure et fixé l'affaire à plaider devant le conseiller rapporteur au 17 mars 2022 à 8 heures 30.
Le 17 mars 2022, la présente procédure a été mise en délibéré pour être rendue par mise à disposition au greffe le 25 mai 2022 ; il convient de statuer par décision rendue par défaut en dernier ressort.
La cour, pour plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, fait expressément référence à la décision entreprise ainsi qu'aux dernières conclusions notifiées par les parties.
SUR CE
Sur la nullité de la déclaration d'appel
Les parties intimées se fondent sur les articles 58 et 901 du code de procédure civile pour solliciter la nullité de la déclaration d'appel au motif qu'elle ne comporterait pas l'indication de la profession des appelants.
En réponse, les époux [LR]/[F] estiment que la contestation élevée par les parties intimées n'est pas recevable pour avoir déjà été tranchée par le conseiller chargé de la mise en état au terme d'une ordonnance du 9 novembre 2021.
Ils ajoutent que la profession de Mme [F] a été précisée par les conclusions n°2 communiquées le 7 octobre 2021.
L'article 901 du code de procédure civile prévoit que la déclaration d'appel est faite par acte contenant, outre les mentions prescrites par les 2° et 3° de l'article 54 et par le troisième alinéa de l'article 57, et à peine de nullité :
1° la constitution de l'avocat de l'appelant ;
2° l'indication de la décision attaquée ;
3° l'indication de la cour devant laquelle l'appel est porté ;
4° les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.
Elle est signé par avocat constitué. Elle est accompagnée d'une copie de la décision. Elle est remise au greffe et vaut demande d'inscription au rôle.
Au terme de l'article 54-3-a) du même code, la demande initiale mentionne, à peine de nullité, pour les personnes physiques, les nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance de chacun des demandeurs.
En premier lieu, il sera observé qu'au terme de l'ordonnance du 9 novembre 2021, le conseiller chargé de la mise en état a précisé : 'S'agissant de l'irrecevabilité des conclusions en absence de mention de la profession de celle-ci peut être régularisée jusqu'à la clôture. La fin de non-recevoir ne peut être prononcée en l'état de la procédure'.
Aucune fin de non-recevoir ne saurait dès lors être tirée de cette décision, puisque la contestation n'a pas été définitivement tranchée par le conseiller chargé de la mise en état.
D'autre part, les appelants ont, dès les conclusions notifiées le 7 octobre 2021, précisé que Mme [F] était retraitée, cette mention étant déjà présente dès les premières écritures s'agissant de M. [LR].
Eu égard à la régularisation intervenue et ne laissant subsister aucun grief, aucune nullité n'est encourue, et les parties intimées seront déboutées de leur demande à ce titre.
Sur l'irrecevabilité des conclusions des appelants
Les parties intimées soutiennent que les conclusions des appelants ne sont pas conformes à l'article 960 du code de procédure civile dans la mesure où elles n'indiquent pas la profession de Mme [F].
Elles ajoutent que cette omission leur porte grief dans la mesure où les pièces versées en procédure pour étayer les arguments des appelants laissent planer le doute sur chaque affirmation des époux [LR]/[F], dès lors que ces derniers se prévalent d'une prescription trentenaire sans préciser la nature de leur profession dans le hameau.
En réponse, les époux [LR]/[F] font valoir les mêmes arguments que précédemment.
Ainsi qu'il a été vu ci-dessus, les dernières conclusions des parties appelantes mentionnent la situation professionnelle de Mme [F] qui est retraitée.
Aucune irrecevabilité ne pourra dès lors être retenue de ce chef.
Sur la demande de vérification d'écriture
Les parties intimées indiquent ne pas reconnaître la donation du 15 mai 1979. Elles précisent que l'attestation immobilière dressée par Me [L] ne fait état d'aucune disposition de dernières volontés de leurs parents, ni d'aucune donation du lot n°5.
Elles estiment inconcevable qu'une telle donation ait pu exister sans qu'elles n'en soient informées.
Elles relèvent que le document litigieux n'a pas été enregistré et soutiennent que leurs parents n'avaient pas pour habitude de signer 'signature des parents', 'le père', 'la mère'.
Elles affirment que le document litigieux a été rédigé par M. [S] [LR], ainsi que cela ressortirait de la confrontation avec la lettre manuscrite du 21 mars 2018.
Enfin, elles font valoir que leurs parents connaissaient la portée d'une donation et la nécessité de faire dresser un tel acte devant notaire, ainsi qu'ils l'avaient fait précédemment lors de la donation en avancement d'hoirie faite à M. [S] [LR] pour la parcelle B [Cadastre 6] en l'étude de Me [C].
Les parties appelantes ne formulent aucune observation sur ce point.
En premier lieu, il convient de préciser qu'eu égard à la date de la donation invoquée, il sera fait application des dispositions applicables au 15 mai 1979.
L'article 1323 du code civil, dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce, dispose que celui auquel on oppose un acte sous seing privé, est obligé d'avouer ou de désavouer formellement son écriture ou sa signature.
Ses héritiers ou ayants cause peuvent se contenter de déclarer qu'ils ne connaissent point l'écriture ou la signature de leur auteur.
L'article 1324 prévoit pour sa part que dans le cas où la partie désavoue son écriture ou sa signature, et dans le cas où les héritiers ou ayants cause déclarent ne les point connaître, la vérification en est ordonnée en justice.
Au terme de l'article 287 du code de procédure civile, si l'une des partie dénie l'écriture qui lui est attribuée ou déclare ne pas reconnaître celle qui est attribuée à son auteur, le juge vérifie l'écrit contesté à moins qu'il ne puisse statuer sans en tenir compte. Si l'écrit contesté n'est relatif qu'à certains chefs de la demande, il peut être statué sur les autres.
En vertu de l'article 288 du même code, il appartient au juge de procéder à la vérification d'écriture au vu des éléments dont il dispose après avoir, s'il y a lieu, enjoint aux parties de produire tous documents à lui comparer et fait composer, sous sa dictée, des échantillons d'écriture.
En l'espèce, les parties versent au débat l'acte de donation du 15 mai 1979 attribué à [H] [LR] et [K] [X], un courrier du 21 mars 2018 rédigé par M. [S] [LR] et un acte authentique reçu le 3 janvier 1972 par Me [G] portant la signature de [H] [LR].
S'il est regrettable que les parties n'aient pas produit d'écrit émanant de [H] [LR] et [K] [X], il appartient au juge de procéder à la vérification d'écriture au vu des éléments dont il dispose.
En premier lieu, il sera observé que la signature de [H] [LR] apposée sur l'acte authentique du 3 janvier 1972 comporte systématiquement un point sur le 'i', quelle que soit la page de l'acte concernée.
Or ce point n'est pas présent sur la signature attribuée à [H] [LR] sur l'acte sous seing privé du 15 mai 1979 ; plus largement, aucun 'i' n'est visible sur la signature, le 'V' étant suivi directement de ce qui ressemble à un 'l'.
Par ailleurs, de nombreuses similitudes existent entre l'écriture de M. [S] [LR] sur le courrier du 21 mars 2018 et l'écriture attribuée à l'un de ses parents sur l'acte sous seing privé du 15 mai 1979.
Ainsi, les lettres composant les mots sont espacées, à l'exception de quelques groupes de lettres liés par une boucle.
Les lettres 'V' majuscules sont strictement identiques et espacées de la lettre suivante.
Les 'M' majuscules' sont strictement identiques, réalisés à la manière de 'm' minuscules comportant trois 'jambes'.
Les 'b' et 'y' figurent en écriture scripte alors que le reste des lettres est en cursive.
Dans les deux écrits, les 'l' et les 't' ne sont pas liés aux lettres précédente et suivante par une boucle.
En l'état de ces très nombreuses similitudes, l'authenticité de l'acte sous seing privé du 15 mai 1979 n'est pas établie.
L'acte -qui n'a jamais été déposé devant notaire- est donc dénué de toute force probante, de sorte qu'il n'en sera pas tenu compte.
Au surplus, il sera observé que l'ensemble des héritiers, dont M. [S] [LR] ont signé l'attestation immobilière établie le 2 juillet 2013 par Me [L], notaire à [Localité 1], suite au décès de [K] [X] et qui comporte un paragraphe 'Dispositions de dernières volontés' rédigé comme suit :
'On ne connaît au défunt aucune disposition de dernières volontés ainsi qu'il résulte d'un compte rendu d'interrogation du fichier central des dispositions de dernières volontés en date du 15 février 2012".
L'état descriptif de division du 2 juillet 2013, rectifié par acte du 11 février 2015 et signé par M. [S] [LR], vise par ailleurs le lot n°5 comme relevant de l'actif successoral.
Sur la prescription acquisitive
Les époux [LR]/[F] indiquent avoir acquis leur résidence principale en propre suivant acte notarié du 9 avril 1972. Or le lot n°5 de la parcelle B[Cadastre 4] serait incorporé à leur résidence principale, de sorte qu'ils posséderaient paisiblement le lot n°5 depuis l'obtention du permis de construire de leur résidence principale et le certificat du 3 février 1981. Ils ajoutent avoir financé intégralement la construction édifiée et soulignent à ce propos qu'il résulte du contrat de prêt de 1979 que les travaux financés par le crédit agricole concernent précisément l'édification, sur le lot n°5, d'une extension accolée à leur maison édifiée sur la parcelle B [Cadastre 4].
La possession aurait débuté en 1978 et serait toujours d'actualité, soit une durée de plus de 41 années.
Ils indiquent produire de nouvelles pièces en cause d'appel, pour établir le caractère continu de leur possession.
Enfin, ils rappellent que l'usucapion est possible dans le cadre d'une indivision et précisent que la proposition faite à l'ensemble des s'urs de M. [LR] d'acquérir le droit de surélévation est intervenue après l'acquisition du délai de prescription trentenaire.
En réponse, les parties intimées font valoir qu'en vertu de l'état descriptif de division des lots réalisé par Me [L] les 2 juillet 2013 et 11 février 2015, M. [S] [LR] est coïndivisaire des biens de la succession de ses parents et ne possède à ce titre qu'un huitième en pleine propriété de l'ensemble immobilier sis sur la parcelle B[Cadastre 4].
Elles ajoutent que M. [LR] a entrepris des démarches d'achat du lot n°5 auprès de ses sept s'urs.
Elles soutiennent que les pièces produites par les appelants pour justifier leur demande d'usucapion ne concernent que le bien propre appartenant aux époux [LR]/[F] et non le lot n°5, tout en rappelant que la résidence principale des époux [LR]/[F] jouxte la propriété revendiquée.
Elles indiquent produire des éléments matériels rapportant la preuve de leur propre occupation effective du bien revendiqué, puisque l'indivision partagerait les frais relatifs aux taxes foncières, taxes d'habitation et charges de l'ensemble immobilier depuis le décès de leurs parents ; leur frère se serait toutefois toujours refusé à participer à ces charges communes.
L'article 2261 du code civil dispose que pour pouvoir prescrire, il faut une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque, et à titre de propriétaire.
Au terme de l'article 2272 alinéa 1, le délai de prescription requis pour acquérir la propriété immobilière est de trente ans.
En l'espèce, il convient de relever que par courrier du 21 mars 2018, M. [S] [LR] a écrit à ses s'urs en ces termes : 'En tant qu'héritières, il vous appartient de renouveler votre accord par écrit à votre notaire mentionnant la valeur de vente fixée à 750 € pour 25 m² d'emprise sur le séchoir (voir attestation de valeur établie par l'expertise Nord-Sud).
Vous avez 1 mois pour y réfléchir et prendre une décision qui va dans le bon sens'.
Ce faisant, il a reconnu l'équivocité de sa possession et les droits de ses s'urs sur le bien en cause.
Il sera relevé que M. [LR] a débuté son courrier en indiquant qu'il s'adressait à elles 'une dernière fois', ce qui démontre qu'il avait entamé cette démarche antérieurement.
Il sera d'ailleurs observé que l'attestation de valeur dont il se prévaut a été réalisée le 28 juin 2012, dans la seule fin de voir fixer la valeur du droit de surélévation de la parcelle B[Cadastre 4].
Les courriers en réponse -envoyés entre le 27 juillet 2017 et le 7 novembre 2019- sont versés au débat, les s'urs de M. [LR] acceptant que ce dernier 'puisse acheter son droit de surélévation pour la somme de 750 euros' (courrier de Mme [A] [D] du 4 juin 2019).
Mme [V] [LR], épouse [I], a pour sa part indiqué renouveler son 'accord pour te vendre ma part s'agissant des 25 m² de surélévation, dont la valeur est de 750 €'.
Il a, par ailleurs, été relevé ci-dessus que le lot n°5, qu'il s'agisse du droit de surélévation ou des pièces édifiées par M. [LR], a été intégré dans l'actif successoral au terme des actes authentiques des 2 juillet 2013 et 11 février 2015.
Il ressort de ces éléments que tant dans l'esprit de M. [S] [LR] que de ses s'urs, ce dernier occupait les lieux en qualité de coïndivisaire et non en qualité de propriétaire.
M. [LR] ne saurait se prévaloir du fait que ces discussions sont intervenues après l'expiration d'un délai de trente années à compter de sa prise de possession des lieux, qu'il situe en 1978, dès lors qu'aucun élément objectif ne permet de démontrer qu'il a possédé 'à titre de propriétaire' dès l'origine.
Il sera observé à ce propos que M. [LR] ne fait état d'aucune contestation de ses s'urs qui l'aurait conduit à proposer de racheter leurs parts.
Il a donc spontanément sollicité l'attestation de valeur du 28 juin 2012 -réalisée avant l'état descriptif de division- et demandé à ses soeurs de racheter leurs parts, ce qui permet au contraire de considérer qu'il a toujours eu conscience de l'existence des droits indivis de ses soeurs sur le lot litigieux, et qu'il n'a pu, dans ces conditions, prescrire à titre de propriétaire.
Il sera relevé au surplus que les taxes foncières versées au débat par ses soins ne permettent pas d'établir que l'assiette fiscale comprenait le lot n°5 litigieux dès lors que la maison principale des époux [LR]/[F] est également située lieu-dit Podingo et que les parties intimées produisent elles-mêmes des taxes foncières pour des biens immobiliers situés à cette adresse.
Au regard de l'ensemble de ces éléments, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande des époux [LR]/[F] présentée sur le fondement de la prescription acquisitive.
Sur la demande au titre de la procédure abusive
L'article 32-1 du code de procédure civile dispose que celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10 000 €, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés.
En l'espèce, dès lors que les époux [LR]/[F] ont uniquement demandé à la cour de 'statuer ce que de droit' sur le fondement de l'article susvisé, il convient de constater qu'ils n'ont présenté aucune demande de dommages et intérêts sur ce fondement ; par ailleurs, la cour n'entend pas soulever d'office le caractère abusif des contestations présentées par les parties intimées.
Sur les autres demandes
Il n'est pas équitable de laisser aux parties intimées les frais irrépétibles non compris dans les dépens ; les époux [LR]/[F] seront par conséquent condamnés in solidum à payer à chacune d'entre elles la somme de 1 000 euros.
En revanche, les époux [LR]/[F] seront déboutés de la demande présentée sur ce fondement.
Enfin, les époux [LR]/[F], qui succombent, seront condamnés in solidum au paiement des dépens.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Déboute Mme [R] [LR], épouse [O], Mme [A] [LR], épouse [D], Mme [W] [LR], épouse [Z], et Mme [V] [LR], épouse [I], de leur demande tendant à l'annulation de la déclaration d'appel formée par M. [S] [LR] et Mme [P] [F],
Déboute Mme [R] [LR], épouse [O], Mme [A] [LR], épouse [D], Mme [W] [LR], épouse [Z], et Mme [V] [LR], épouse [I], de leur demande tendant à l'irrecevabilité des conclusions d'appelants sur le fondement des articles 960 et 961 du code de procédure civile,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions soumises à la cour,
Relève que M. [S] [LR] et Mme [P] [F] n'ont présenté aucune demande de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile,
Condamne in solidum M. [S] [LR] et Mme [P] [F] à payer à Mme [R] [LR], épouse [O], Mme [A] [LR], épouse [D], Mme [W] [LR], épouse [Z], et Mme [V] [LR], épouse [I], la somme de 1 000 euros chacune sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Déboute les parties du surplus de leurs demandes,
Condamne in solidum M. [S] [LR] et Mme [P] [F] au paiement des dépens.
LA GREFFIÈRELE PRÉSIDENT