Chambre civile Section 1
ARRET N°
du 25 MAI 2022
N° RG 20/00298 - N° Portalis DBVE-V-B7E-B6T5
Décision déférée à la Cour :
Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance de BASTIA, décision attaquée en date du 20 Mars 2018, enregistrée sous le n° 16/01129
[UW]
[UW]
[Y] [UW]
C/
[UW]
[UW]
[HV] [UW]
Copies exécutoires délivrées aux avocats le
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
VINGT CINQ MAI DEUX MILLE VINGT DEUX
APPELANTS :
M. [EN] [UW]
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représenté par Me Gilles ANTOMARCHI, avocat au barreau de BASTIA
M. [LC] [UW]
[Adresse 17]
[Localité 4]
Représenté par Me Jean pierre POLETTI, avocat au barreau de BASTIA
Mme [S] [Y] veuve [UW]
née le 06 Septembre 1961 à [Localité 10]
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représentée par Me Antoine ALESSANDRI, avocat au barreau de BASTIA
INTIMEES :
Mme [M] [UW] épouse [L]
née le 20 Octobre 1949 à
[Adresse 15]
[Localité 6]
Représentée par Me Benoît BRONZINI DE CARAFFA de l'AARPI TOMASI VACCAREZZA BRONZINI DE CARAFFA TABOUREAU GENUINI LUIS I BENARD-BATTESTI, avocat au barreau de BASTIA
Mme [MT] [UW] épouse [W] représentée par son époux Monsieur [W] [F] en qualité de tuteur désigné par jugement du 12 septembre 2019
née le 07 Juin 1948 à [Localité 14]
[Adresse 16]
[Localité 4]
Représentée par Me Benoît BRONZINI DE CARAFFA de l'AARPI TOMASI VACCAREZZA BRONZINI DE CARAFFA TABOUREAU GENUINI LUIS I BENARD-BATTESTI, avocat au barreau de BASTIA
Mme [U] [HV] [UW]
née le 23 Septembre 1952 à [Localité 8]
[Adresse 7]
[Localité 4]
Représentée par Me Jean pierre POLETTI, avocat au barreau de BASTIA
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 07 mars 2022, devant la Cour composée de :
François RACHOU, Premier président
Françoise LUCIANI, Conseillère
Micheline BENJAMIN, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles
qui en ont délibéré.
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Cécile BORCKHOLZ.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 25 mai 2022
ARRET :
Contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par François RACHOU, Premier président, et par Françoise COAT, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
M. [OJ] [UW] et Mme [T] [X] se sont mariés le 23 juillet 1947, sous l'ancien régime de la communauté de biens meubles et acquêts, à défaut de contrat de mariage préalable à leur union et de changement de régime au cours de leur mariage.
De leur union sont issus quatre enfants :
- Mme [MT] [UW] épouse [W],
- Mme [R] [UW] épouse [L],
- M. [E] [UW] (époux de Mme [HV]),
- M. [H] [UW].
Par actes notariés du 10 décembre 1983, M. [UW] a consenti des donations en avancement d'hoirie à chacun de ses quatre enfants sus-nommés.
Par actes notariés du 2 juin 1992, les époux [UW] ont consenti à chacun de leurs fils, [H] et [E] [UW], une donation en avancement d'hoirie.
M. [OJ] [UW] est décédé à [Localité 9] le 18 avril 2001 sans dispositions testamentaires, en laissant pour recueillir sa succession.
- son épouse, Mme [N] [X],
- et ses quatre enfants sus-nommés,
Il résulte d'un acte de notoriété reçu, le 7 septembre 2012, par Me [K] [BR], notaire, que M. [H] [UW] est décédé le 30 mai 2012, en laissant pour recueillir sa succession :
- son épouse Mme [S] [Y], qui a opté pour la pleine propriété du quart des biens dépendant de la succession de son époux,
- son enfant unique, M. [EN] [UW].
M. [E] [UW] est décédé le 24 décembre 2014, en laissant pour recueillir sa succession :
- Mme [U] [HV], son conjoint survivant,
- M. [OJ] [UW], son fils
Par actes d'huissier du 06 septembre Mmes [MT] [UW] épouse [W] et [R] [UW] épouse [L] ont assigné, Mme [X] veuve [UW], Mme [S] [Y], veuve de [H] [UW], M. [EN] [UW], M. [OJ] [UW] et Mme [HV] veuve de [E] [UW], devant le tribunal de grande instance de Bastia, en vue d'obtenir, notamment :
- la liquidation de la communauté ayant existé entre les époux [OJ] et [T] [UW], l'épouse née [X],
- l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de M. [OJ] [UW], avec la désignation d'un notaire à cet effet,
- le rapport à la succession des donations des immeubles dont ont bénéficié les quatre enfants,
- la qualification de donation déguisée des sommes versées au titre d'une assurance-vie au profit de MM. [E] et [H] [UW] et leur imputation sur la quotité disponible,
- la recevabilité de leur action en réduction,
Par jugement réputé contradictoire du 20 mars 2018, le tribunal a :
- ordonné le partage judiciaire de la communauté ayant existé entre M. [LC] [K] [UW] décédé le 18/04/2001 à [Localité 9] et Mme [T] [X] puis de la succession de M. [OJ] [E] [UW]
- dit l'action en réduction des donations excédant la quotité disponible recevable ;
- dit que qu'il est dû récompenses à la communauté des sommes versées au titre des assurances vie, Natio-vie et Prédica ;
- dit qu'il est dû récompenses à la communauté pour le coût des constructions édifiées sur les parcelles sises à [Localité 13] cadastrées section A n°[Cadastre 1] et [Cadastre 2] ;
- dit que les donations dont ont bénéficié Mme [MT] [B] [UW] épouse [W], Mme [R] [ZU] [UW] épouse [L], M. [J] [UW], décédé le 24/09/2014 à [Localité 9] laissant pour héritiers son épouse Mme [HV], son fils [LC], M. [C] [UW], décédé le 30/05/2012 à [Localité 12], laissant pour héritiers son épouse [S] [Y] et son fils [EN] né à [Localité 9] le 06/04/1998 seront rapportées à la masse successorale ;
- dit que le montant des donations déguisées dont ont bénéficié [E] [UW] et [H] [UW] sous forme de contrats d'assurance-vie Natio-Vie et Prédica sera rapporté à la masse successorale ;
- dit que les donations précitées s'imputeront sur la quotité disponible et seront réduites à concurrence de la dite quotité en commençant par la plus récente
- désigné, pour procéder aux opérations de compte, liquidation et partage de la communauté ayant existé entre Monsieur [LC] [K] [UW] et Madame [T] [X] puis de la succession de Monsieur [LC] [UW], Maître [K] [O], notaire à [Localité 9] ;
- dit que les demandeurs devront verser directement entre les mains du notaire liquidateur une provision de 650 euros et cela dans le délai d'un mois suivant sa désignation à charge pour le notaire d'informer immédiatement le juge commis de tout retard dans le versement ;
- rejeté toute autre demande ;
- ordonné l'emploi des dépens en frais généraux de partage et privilégiés de licitation ;
- dit qu'ils seront supportés par les copartageants dans la proportion de leurs parts dans l'indivision.
Par déclaration reçue le 6 avril 2018, M. [LC] [UW] a interjeté appel contre ce jugement, puis par déclaration reçue le 25 avril 2018, Mme [S] et M. [EN] [UW] ont interjeté appel de la décision.
Ces deux procédures ont été jointes par ordonnance du conseiller de la mise en état du 13 novembre 2018.
Le 17 juin 2019, M. [LC] [UW] a notifié le décès de Mme [T] [X] veuve [UW], en joignant une copie de l'acte de décès de cette dernière décédée le 02 juin 2019 et sollicité la radiation de l'affaire.
Le conseiller de la mise en état a, notamment :
- par ordonnance du 28 juin 2019, ordonné le renvoi à l'audience du conseiller de la mise en état du 4 septembre 2019 pour régularisation de la procédure,
- par ordonnance du 4 septembre 2019, ordonné l'interruption de l'instance,
- par ordonnance du 20 novembre 2019, ordonné la radiation de l'affaire.
Puis par des conclusions de réinscription, reçues le 19 juin 2020, Mmes [UW] épouse [L] et [UW] épouse [W] demandent à la cour :
- de constater au vu de l'acte de notoriété du 24 septembre 2019 qu'elles sont héritières de leur mère, feue Mme [X] [T] veuve [UW], décédée le 2 juin 2019 à [Localité 11],
Au visa des articles 373 et 374 du code de procédure civile,
- d'ordonner la réinscription au rôle de l'instance radiée RG 18/00271,
- de constater l'intervention volontaire de celles-ci en leur qualité d'héritières aux fins de reprise d'instance sans néanmoins aucune approbation des demandes des appelantes mais au contraire sous réserves de leurs droits, fin de non recevoir, moyens de nullité et autres de fait et de droit,
- de dire n'y avoir lieu à dépens.
L'affaire a été réinscrite au rôle de la cour, le 19 juin 2020.
Par des conclusions reçues le 18 février 2021, M. [OJ] [UW] et Mme [U] [HV] veuve [UW], indiqués appelants, demandent à la
cour :
SUR LA COMMUNAUTÉ
- d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a fait droit aux demandes de Mmes [W] et [L] tendant à la constatation de récompenses au passif de la succession au bénéfice de Mme [X] épouse [UW] et les débouter sur ce point,
En conséquence,
- de déclarer Mmes [W] et [L] irrecevables en leurs demandes par application de l'article 122 du CPC quant aux récompenses dues à la communauté,
- de réformer et débouter sur ce point les intimées en l'état de l'acte du 26 juin 2002 par lequel Mme [X] a déclaré qu'il n'existait pas de récompense due et qu'elle entendait y renoncer par acte notarié,
- de réformer en conséquence le jugement entrepris en ce qu'il a dit et jugé que la valeur des constructions ayant fait l'objet de donations par feu M. [UW], ainsi que le montant des sommes placées au titre des assurances vies souscrites par ce dernier donneront lieu à récompense dans le cadre de la liquidation de la communauté,
- de débouter les intimées de leur prétention à confirmation sur ce point,
A titre subsidiaire si le jugement entrepris devait être confirmé s'agissant des récompenses à la communauté,
- de réformer le jugement entrepris en ce qu'il a dit et jugé que la communauté bénéficiait d'un droit à récompense au titre des constructions objet de la donation du 2 juin 1992,
- de réformer le jugement et condamner les ayant droits de feue Mme [X] épouse [UW] à récompense à la communauté au titre du contrat qu'elle détient dans les livres de la BNP sous le n°00616194,
SUR LA SUCCESSION
- de réformer le jugement dont s'agit et retenir la prescription de l'action en réintégration des donations et assurances vie,
- de débouter les intimées de leur demande de réintégration des donations et assurances vies et infirmer le jugement en conséquence sur ce point,
A défaut,
- de débouter les intimées de leurs prétentions tendant au rapport à la masse des assurances vie souscrites par M. [UW] au bénéfice de ses deux fils, eux-mêmes défunts,
- de réformer le jugement entrepris et statuant à nouveau dire l'action en réduction de Mmes [L] et [W] prescrite par application des dispositions des articles 930 et 2224 du code civil,
- d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit et jugé que les contrats d'assurance vie s'analysaient en des contrats de capitalisation constitutifs de donations et ordonné le rapport à la succession des primes versées au titre des assurances vie Natio Vie et Predica,
Subsidiairement,
- de surseoir à statuer sur ce point dans l'attente de l'évaluation de la totalité du patrimoine de M. [OJ] [V] [UW] et de la liquidation de la communauté,
- d'ordonner, dans l'hypothèse où serait retenu, au cas d'espèce et à défaut de prescription, le principe du rapport à la masse de l'ensemble des donations, qu'il conviendrait de faire application de l'article 860 du code civil et d'ordonner une expertise afin que la valeur du rapport soit déterminée, non en l'état des biens à l'époque du partage, mais au regard de l'état des biens à la date de la donation,
- d'ordonner à l'expert de tenir compte des descriptions et des évaluations retenues à la date desdites donations, les biens étant notamment donnés à l'état brut et sans réalisation des équipements et second 'uvre,
- de condamner les intimées aux entiers frais et dépens, outre 7.000,00 € par application de l'article 700 CPC.
Par leurs conclusions reçues le 05 janvier 2021, Mme [S] [Y] veuve [UW] et M. [EN] [UW], appelants, demandent à la cour de :
SUR LA COMMUNAUTÉ
- retenir que le jugement entrepris ne pouvait faire droit aux demandes de Mmes [W] et [L] tendant à la constatation de récompenses au passif de la succession au bénéfice de Mme [X] épouse [UW]
- En conséquence, la Cour déclarera Mesdames [W] et [L] irrecevables en leurs demandes par application de l'article 122 du CPC
- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a dit et jugé que la valeur des constructions ayant fait l'objet de donations par feu Monsieur [UW] ainsi que le montant des sommes placées au titre des assurances vies souscrites par ce dernier, donneront lieu à récompense dans le cadre de la liquidation de la communauté,
A titre subsidiaire si le jugement entrepris devait être confirmé s'agissant des récompenses à la communauté
- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a dit et jugé que la Communauté bénéficiait d'un droit à récompense au titre des constructions, objet de la donation du 2 juin 1992
- retenir que Mme [X] épouse [UW] et par suite de son décès, ses héritiers sont redevables au titre du contrat qu'elle détenait dans les livres de la BNP sous le n° 00616194, d'une récompense à la communauté
SUR LA SUCCESSION
- réformer le jugement entrepris et statuant à nouveau, dire l'action en réduction de Mmes [L] et [W] prescrite par application des dispositions des articles 903 et 2224 du code civil
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il dit et jugé que les contrats d'assurance vie s'analysaient en des contrats de capitalisation constitutifs de donations et ordonné le rapport à la succession des primes versées au titre des assurances vie NATIO VIE et PREDICA
- condamner Mmes [L] et [W] au paiement de la somme de 10.000 € par application des dispositions de l'article 700 du CPC, ainsi qu'aux entiers dépens.
Par des conclusions reçues le 25 février 2021, Mmes [L] et [W], intimées demandent à la cour :
- de confirmer le jugement en toutes ses dispositions.
- d'ordonner la liquidation de la communauté ayant existé entre feu M. [UW] [LC] [K], décédé le 18 avril 2001, et son épouse Mme [G] [D], décédée le 2 juin 2019.
- d'enjoindre au notaire liquidateur de calculer les récompenses dues à la communauté, tant en ce qui concerne la valeur des prétendues assurances-vie Natio-vie et Predica que les donations résultant des actes de 1983, que pour les immeubles donnés aux deux fils en 1992, en application des dispositions des articles 1401, 1437 et 1441 du code civil,
- de dire que celui-ci devra également inclure au titre des récompenses dues à la communauté, le montant des contrats d'assurances-vie Natio-vie et Predica, et ce, en application des dispositions des articles 1401, 1437, 1441 du code civil,
- d'ordonner l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage des biens composant la succession de [A] M. [UW],
- de commettre pour y procéder le Président de la chambre des Notaires avec faculté de délégation et renvoyer les parties devant ledit notaire,
- d'ordonner qu'en application des dispositions des articles 919, 919-1, 920, 921, 922 et suivants du code civil, les donations de biens immeubles dont ont bénéficié les quatre enfants seront rapportées à la masse,
- d'ordonner que les sommes versées au titre des prétendues assurances vie au profit de MM. [E] et [H] [I] [UW] constituent des donations déguisées et devront être rapportées à la masse,
- de juger que ces montants s'imputeront sur la quotité disponible dont le défunt pouvait disposer,
- de juger recevable et non prescrite l'action en réduction de ces donations de biens immeubles et d'assurances-vie dont ont bénéficié MM. [UW] [E] et [H] [I] en application des dispositions des articles 912 et suivants du code civil,
Par conséquent,
- de débouter les défendeurs de leur demande de reconnaissance de prescription de l'action en réduction des libéralités.
- de débouter M. [LC] [UW] et Mme [U] [HV] veuve [UW] de leur demande subsidiaire de sursis à statuer,
- de débouter les parties adverses de l'intégralité de leurs demandes,
A TITRE SUBSIDIAIRE :
- d'autoriser le notaire commis à s'adjoindre les services d'un expert immobilier pour, sur la base du rapport [WM], établir des lots portant sur les biens indivis en proposant des lots conformes à ce qui est matériellement possible et aux droits des parties,
- d'enjoindre au notaire de procéder aux opérations de partage et à cette fin dresser un état liquidatif établissant les comptes entre les copartageants, la masse partageable, les droits des parties et la composition des lots,
- de commettre le vice président en charge des successions partage ou son suppléant avec mission de faire rapport en cas de difficultés,
- d'ordonner qu'à réception du rapport d'expertise, s'il en était ordonné une, le notaire liquidateur devra poursuivre ses opérations de partage en invitant les parties à trouver un accord sur la base des observations, analyses et conclusions de l'expert,
- d'ordonner qu'en cas de désaccord sur le projet d'état liquidatif, le Notaire devra dresser procès-verbal de difficultés qui sera soumis au juge commissaire par la partie la plus diligente,
- d'ordonner qu'en cas d'empêchement des notaire, juge, expert commis ils seront remplacés par simple ordonnance sur requête à la demande de la partie la plus diligente,
- de juger que le dossier sera rappelé à la première audience du juge commissaire à l'expiration d'un an suivant le dépôt du rapport d'expertise entre les mains du notaire,
- de juger que les dépens d'appel seront à la charge exclusive des appelants.
- de condamner les appelants au paiement de la somme de 4.500 €, en application de l'article 700 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 06 janvier 2021.
Par arrêt avant dire droit du 30 juin 2021, la cour d'appel de Bastia a :
- dit que Mme [U] [HV] veuve [UW] n'a pas la qualité d'appelante, mais celle d'intimée ;
- prononcé la révocation de l'ordonnance de clôture rendue le 06 janvier 2021 ;
- invité les parties à conclure sur l'irrecevabilité des prétentions de Mme [U] [HV] veuve [UW] aux termes des conclusions récapitulatives d'appelants reçues le 18 février 2021 aux noms de M. [OJ] [UW] et Mme [U] [HV] veuve [UW] 'APPELANTS'
- renvoyé l'affaire à l'audience de la mise en état du mercredi 6 octobre 2021 afin de permettre aux parties de conclure sur difficulté de qualité procédurale concernant Mme [U] [HV] veuve [UW], dans les conclusions susvisées ;
- sursis à statuer sur l'ensemble des demandes des parties.
Par des conclusions notifiées le 04 janvier 2022, M. [OJ] [UW], appelant et Mme [HV] veuve [UW], intimée appelant incident, demandent textuellement à la cour :
'SUR LA COMMUNAUTE
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a fait droit aux demandes de Mesdames [W] et [L] tendant à la constatation de récompenses au passif de la succession au bénéfice de Madame [X] épouse [UW] et les débouter sur ce point
- En conséquence la Cour déclarera Mesdames [W] et [L] irrecevables en leurs demandes par application de l'article
122 du CPC quant aux récompenses dues à la communauté et
statuant à nouveau les déboutera de leurs prétentions sur ce point
Réformer et débouter sur ce point les intimées en l'état de l'acte du
26 juin 2002 par lequel Mme [X] a déclaré qu'il n'existait
pas de récompense due et qu'elle entendait y renoncer par acte
notarié
Réformer en conséquence le jugement entrepris en ce qu'il a dit et jugé que la valeur des constructions ayant fait l'objet de donations
par feu Monsieur [UW], ainsi que le montant des sommes
placées au titre des assurances vies souscrites par ce dernier
donneront lieu à récompense dans le cadre de la liquidation de la
communauté.
Débouter les intimées de leur prétention à confirmation sur ce point
A titre subsidiaire si le jugement entrepris devait être confirmé
s'agissant des récompenses à la communauté.
- Réformer le jugement entrepris en ce qu'il a dit et jugé que la communauté bénéficiait d'un droit à récompense au titre des
constructions objet de la donation du 2 juin 1992.
- Réformer le jugement et Condamner les ayant droits de feue Mme [X] épouse [UW] à récompense à la communauté au titre du contrat qu'elle détenait dans les livres de la BNP sous le n°00616194,
SUR LA SUCCESSION
Réformer le jugement dont s'agit et retenir la prescription de l'action en réintégration des donations et assurances vie.
Débouter les intimées de leur demande de réintégration des donations et assurances vies et infirmer le jugement en conséquence sur ce point
- A défaut Débouter les intimées de leurs prétentions tendant au rapport à la masse des assurances vie souscrites par Monsieur [UW] au bénéfice de ses deux fils, eux-mêmes défunts.
- Réformer le jugement entrepris et statuant à nouveau dire l'action en réduction de Mesdames [L] et [W] prescrite par application des dispositions des articles 930 et 2224 du code civil.
- Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit et jugé que les contrats d'assurance vie s'analysaient en des contrats de
capitalisation constitutifs de donations et ordonné le rapport à la succession des primes versées au titre des assurances vie Natio Vie
et Predica.
Subsidiairement,
- Surseoir à statuer sur ce point dans l'attente de l'évaluation de la totalité du patrimoine de Monsieur [OJ] [V] [UW] et de la liquidation de la communauté
- Ordonner, dans l'hypothèse où serait retenue, au cas d'espèce et à défaut de prescription, le principe du rapport à la masse de l'ensemble des donations, qu'il conviendrait de faire application de l'article 860 du Code Civil
- Ordonner une expertise afin que la valeur du rapport soit déterminée, non en l'état des biens à l'époque du partage, mais au regard de l'état des biens à la date de la donation.
- Ordonner à l'expert de tenir compte des descriptions et des évaluations retenues à la date desdites donations, les biens étant notamment donnés à l'état brut et sans réalisation des équipements et second 'uvre.
- Condamner les intimées aux entiers frais et dépens, outre 7.000,00 € par application de l'Article 700 CPC.'
Par leurs dernières conclusions notifiées le 29 septembre 2021, Mmes [L]
et [W], nées [UW], demandent textuellement à la cour :
'Vu l'Arrêt de la Cour de Céans du 30 juin 2021
Confirmer le jugement en toutes ses dispositions.
Vu les articles 815 et suivants du Code Civil, l'article 843 du même Code,
Vu l'article 930 du Code civil dans sa rédaction antérieure à la Loi n° 2006-728 du 23 juin 2006 portant réforme des successions et des libéralités,
Vu les articles 1433, 1436, 1437, 1468, 1475 et 1477 du Code Civil,
Vu les articles 909 - 910-4 al le et 1359 et suivants du Code de Procédure Civile,
Vu les articles 1404 et suivants du Code Civil,
Vu les articles 74 et 907 du Code de procédure civile,
- Déclarer irrecevables les demandes figurant dans les conclusions de Monsieur [LC] [UW] signifiées les 26 février 2019, 18 février 2021 et 14 septembre 2021 en ce que les demandes figurant telles que reproduites dans les présentes écritures sont différentes des demandes figurant au dispositif des conclusions signifiées le 2 juillet 2018 et ne constituent pas une réplique aux conclusions adverses mais constituent une critique du jugement querellé,
- Déclarer irrecevable la demande de sursis à statuer, celle ce relevant exclusivement de la compétence du conseiller de la mise en état s'agissant d'une exception de procédure devant être soulevée in limine litis,
- Déclarer irrecevables les demandes de reformation du jugement formulées par Madame [U] [HV] veuve [UW], celle-ci n'ayant pas formé un appel incident dans le délai de 3 mois en application de l'article 909 du Code de procédure civile,
- Ordonner la liquidation de la communauté ayant existé entre feu Monsieur [UW] [OJ], [V], décédé le 18 avril 2001, et son épouse Madame [X] [N] [D], décédée le 2 juin 2019,
- Enjoindre au notaire liquidateur de calculer les récompenses dues à la communauté, tant en ce qui concerne la valeur des prétendues assurances-vie Natio-vie et Predica que les donations résultant des actes de 1983, que pour les immeubles donnés aux deux fils en 1992, en application des dispositions des articles 1401, 1437 et 1441 du Code civil,
- Dire que celui-ci devra également inclure au titre des récompenses dues à la communauté, le montant des contrats d'assurances-vie Natio-Vie et Predica, et ce, en application des dispositions des articles 1401, 1437, 1441 du Code Civil.
- Ordonner l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage des biens composant la succession de [A] Monsieur [UW].
- Commettre pour y procéder le Président de la chambre des Notaires avec faculté de délégation et renvoyer les parties devant ledit notaire.
- Ordonner qu'en application des dispositions des articles 919, 919-1, 920, 921, 922 et suivants du Code Civil, les donations de biens immeubles dont ont bénéficié les quatre enfants seront rapportées à la masse, les demandes n'étaient pas prescrites,
- Ordonner que les sommes versées au titre des prétendues assurances vie au profit de Messieurs [E] et [H] [I] [UW] constituent des donations déguisées et devront être rapportées à la masse.
- Juger que ces montants s'imputeront sur la quotité disponible dont le défunt pouvait disposer.
- Juger recevable et non prescrite l'action en réduction de ces donations de biens immeubles et d'assurances-vie dont ont bénéficié Messieurs [UW] [E] et [H] [I] en application des dispositions des articles 912 et suivants du Code Civil.
- Par conséquent, débouter les défendeurs de leur demande de
reconnaissance de prescription de l'action en réduction des libéralités.
- Débouter Monsieur [LC] [UW] et Madame [U] [HV] veuve [UW] de leur demande subsidiaire de sursis à statuer.
- Débouter les parties adverses de l'intégralité de leurs demandes.
A TITRE SUBSIDIAIRE :
-Autoriser le notaire commis à s'adjoindre les services d'un expert immobilier pour, sur la base du rapport [WM], établir des lots portant sur les biens indivis en proposant des lots conformes à ce qui est matériellement possible et aux droits des parties.
- Enjoindre au notaire de procéder aux opérations de partage et à cette fin dresser un état liquidatif établissant les comptes entre les copartageants, la masse partageable, les droits des parties et la composition des lots.
- Commettre le vice président en charge des successions partage ou son suppléant avec mission de faire rapport en cas de difficultés.
- Ordonner qu'à réception du rapport d'expertise, s'il en était ordonné une, le notaire liquidateur devra poursuivre ses opérations de partage en invitant les parties à trouver un accord sur la base des observations, analyses et conclusions de I'expert.
- Ordonner qu'en cas de désaccord sur le projet d'état liquidatif, le Notaire devra dresser procès verbal de difficultés qui sera soumis au juge commissaire par la partie la plus diligente.
- Ordonner qu'en cas d'empêchement des notaire, juge, expert commis ils seront remplacés par simple ordonnance sur requête à la demande de la partie la plus diligente.
- Juger que le dossier sera rappelé à la première audience du juge commissaire à l'expiration d'un an suivant le dépôt du rapport d'expertise entre les mains du notaire.
- Juger que les dépens d'appel seront à la charge exclusive des appelants.
- Condamner les appelants au paiement de la somme de 4.500 €, en application de l'article 700 du Code de procédure civile.'
Mme [Y] veuve [UW] et M. [EN] [UW], appelants, n'ont pas conclu à nouveau après l'arrêt avant dire droit du 30 juin 2021, sus-visé, il convient donc de se référer à leurs dernières conclusions notifiées le 05 janvier 2021, dont le dispositif est rapporté ci-dessus.
Par ordonnance du 05 janvier 2022, le conseiller de la mise en état a ordonné la clôture différée de l'instruction de cette affaire au 24 février 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur l'irrecevabilité des demandes de M. [LC] [UW] au titre de l'article 910-4 du code de procédure civile
Mmes [L] et [W] soulèvent l'irrecevabilité des demandes de l'appelant autres que celles figurant dans ses premières écritures du 2 juillet 2018, sur le fondement de l'article 910-4 du code de procédure civile et soutiennent que la cour n'est donc saisie que par le dispositif des conclusions signifiées le 2 juillet 2018 en vertu du principe de concentration des moyens.
Elles font valoir que le dispositif les conclusions signifiées par l'appelant le 2 juillet 2018 et le dispositif des conclusions signifiées par lui et sa mère le 26 février 2019 sont totalement différents et affirment qu'en vertu de l'article 910-4 susvisé, seules les demandes présentées dans les premières conclusions saisissent la cour.
Elles ajoutent qu'en aucun cas, il ne peut être considéré que les conclusions du 26 février 2019 constituent une réplique aux conclusions et pièces adverses et le dispositif de ces conclusions ne pouvant être considéré comme répondant aux conclusions des intimés, car les demandes qui figurent dans ce dispositif se rapportent uniquement aux chefs de jugement critiqués dont l'appelant avait connaissance dès le jugement et qu'il aurait dû mentionner dès ses premières conclusions.
Au vu de leurs écritures, M. [LC] [UW] et Mme [HV] veuve [UW], ne concluent par sur ce point, de même que Mme [Y] veuve [UW] et M. [EN] [UW].
La cour relève que l'article 910-4 du code de procédure civile dans sa version applicable en l'espèce, issue de l'article 22 du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, entrée en vigueur le 1er septembre 2017, prévoit 'A peine d'irrecevabilité, relevée d'office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond. L'irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures.
Néanmoins, et sans préjudice de l'alinéa 2 de l'article 783, demeurent recevables, dans les limites des chefs du jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.'
En l'espèce, il convient de relever que le dispositif des premières conclusions signifiées par l'appelant, le 2 juillet 2018 formule les demandes suivantes, textuellement rapportées :
'Réformer le jugement dont s'agit et retenir la prescription de l'action en réintégration des donations et assurance vie
- A défaut Débouter les requérants de leurs prétentions tendant au rapport à la masse des assurances vie souscrites par Monsieur [UW] au bénéfice de ses deux fils, eux-mêmes défunts.
Subsidiairement,
- Surseoir à statuer sur ce point dans l'attente de l'évaluation de la totalité du patrimoine de Monsieur [OJ] [V] [UW] et de la liquidation de la communauté
Dire et Juger que dans l'hypothèse où serait retenue, au cas d'espèce et à défaut de prescription, le principe du rapport à la masse de l'ensemble des donations, il conviendrait de faire application de l'article 860 du code civil et ordonner en conséquence une expertise afin que la valeur du rapport soit déterminée à l'époque du partage mais au regard de l'état des biens à la date de la donation.
Dire et juger que l'Expert devra tenir compte des descriptions et des évaluations retenues à la date desdites donations, les biens étant notamment donnés à l'état brut et sans réalisation des équipements et second oeuvre.
Condamner les requérantes initiales aux entiers frais et dépens, outre 7.000,00 € par application de l'article 700 CPC.'
Or, comme le relèvent à juste titre Mmes [L] et [W], postérieurement à ces premières conclusions sus-visées du 2 juillet 2018, des demandes nouvelles ont été formulées par M. [LC] [UW] et Mme [HV] veuve [UW], ainsi qu'il ressort de l'examen des conclusions signifiées le 26 février 2019, puis le 18 février 2021, visées par Mmes [L] et [W] dans leurs dernières écritures notifiées le 29 février 2021, mais aussi des dernières conclusions notifiées le 04 janvier 2022, par M. [OJ] [UW] et Mme [HV] veuve [UW], dont le dispositif est textuellement rapporté ci-dessus.
En outre, au vu l'examen des conclusions des intimées dont les demandes figurant dans le dispositif de leurs écritures, se rapportent uniquement aux chefs de jugement critiqués, les conclusions de M. [LC] [UW] et Mme [HV] veuve [UW] postérieures aux premières conclusions de M. [LC] [UW] notifiées le 2 juillet 2018, ne peuvent être considéré comme une réplique aux conclusions des intimés.
Au vu de ces éléments et au regard des dispositions de l'article 910-4 du code de procédure civile, il y a lieu de déclarer irrecevables les demandes ne figurant pas au dispositif des premières conclusions de M. [LC] [UW], notifiées le 2 juillet 2018.
En conséquence, conformément au texte précité, s'agissant des demandes de M. [LC] [UW] la cour sera saisie par le dispositif de ses conclusions notifiées le 2 juillet 2018.
Sur l'irrecevabilité de l'appel incident de Mme [HV] veuve [UW]
Mmes [L] et [W] soulèvent, sur le fondement de l'article 909 du code de procédure civile, l'irrecevabilité de l'appel incident formé par Mme [HV] veuve [UW], par les différentes conclusions notifiées respectivement :
- le 26 février 2019 à la requête de M. [LC] [UW] et de Mme [HV] avec l'intitulé 'Appelants',
- le 18/02/2021 en prenant la qualité d'appelante,
- le 14 septembre 2021 dans lesquelles Madame [P] [HV] est qualifiée 'Intimée-Appelant incident'.
Les intimées relèvent qu'en application des dispositions de l'article 909 précité, Mme [HV] disposait d'un délai de 3 mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant pour former un appel incident soit jusqu'au 3 octobre 2018 et font valoir que celle-ci n'a pas notifié des conclusions d'appel incident avant l'expiration de ce délai de 3 mois.
Elles précisent qu'il y a eu 2 appels dans cette instance, contre le jugement du 20 mars
2018 :
- l'un en date du 06 avril effectué à la requête de M. [LC] [UW] par son conseil Me [JL] aux termes duquel sont intimées Mmes [W], [L], [X] veuve [UW], [S] [Y] veuve [UW], [HV] veuve [UW] et M. [EN] [UW],
- l'autre en date du 25 avril effectué à la requête de Mme [S] [UW] et M. [EN] [UW] aux termes duquel sont intimés, Mmes [W], [L], [X] veuve [UW], [U] [UW] et M. [LC] [UW].
Elles ajoutent que M. [LC] [UW] a, d'une part, par acte du 29 mai 2021, notifié sa déclaration d'appel par exploit de Me [RO] [Z] à Mme [U] [HV] (pièce N°52), d'autre part, par acte du 02 juillet 2018, signifié des conclusions d'appelant à la seule à sa requête, par son conseil, à cette dernière.
Au vu de leurs écritures, M. [LC] [UW] et Mme [HV] veuve [UW], ne concluent par sur ce moyen, de même que Mme [Y] veuve [UW] et M. [EN] [UW].
La cour relève qu'aux termes de l'article 909 du code de procédure civile, 'L'intimé dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, d'un délai de trois mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant prévues à l'article 908 pour remettre ses conclusions au greffe et former, le cas échéant, appel incident ou appel provoqué'.
En l'espèce, il résulte des éléments transmis à la cour par RPVA et des pièces versées aux débats que :
- d'une part, Mme [HV] veuve [UW], a, au vu de la déclaration de M. [LC] [UW], la qualité d'intimée à la présente procédure d'appel,
- d'autre part, les conclusions d'appelant de M. [LC] [UW] ont été signifiées à Mme [HV] veuve [UW], le 02 juillet 2018.
Conformément à l'article 909 précité, Mme [HV] veuve [UW] disposait donc d'un délai légal de 3 mois à compter de la signification des conclusions de l'appelant pour former un appel incident, soit jusqu'au 3 octobre 2018.
Or, Mme [HV] veuve [UW] a formulé un appel par des conclusions conjointes avec M. [LC] [UW], en qualité d'appelante, notifiées le 26 février 2019, puis par des conclusions notifiées le 20 mars 2018, tant en qualité 'd'intimée-Appelant incident', ainsi que par des conclusions notifiées le 14 septembre 2021 et des dernières conclusions notifiées le 04 janvier 2022, avec la qualité intimée 'appelant incident'.
Ces conclusions étant tardives, car postérieures au 3 octobre 2018, l'appel incident de Mme [HV] veuve [UW] est donc irrecevable.
Sur l'irrecevabilité de la demande de M. [LC] [UW] de sursis à statuer
Mmes [L] et [W] soulèvent l'irrecevabilité de la demande de sursis à statuer sollicitée par M. [LC] [UW] en faisant valoir que cette demande, d'une part, n'a pas été présentée in limine litis, alors qu'il s'agit d'une exception de procédure, d'autre part, n'a pas été soumise au conseiller de la mise en état, exclusivement compétent.
Au vu de leurs écritures, M. [LC] [UW] et Mme [HV] veuve [UW], ne concluent par sur ce moyen tiré de l'irrecevabilité de la demande de sursis soulevé par les intimées sus-nommées, de même que Mme [Y] veuve [UW] et M. [EN] [UW].
La cour relève qu'il résulte de la combinaison des articles 73 et 74 du code de procédure civile que l'exception de procédure tendant à faire suspendre le cours de l'instance, doit, à peine d'irrecevabilité, être soulevée avant toute défense au fond.
En outre, par la combinaison des articles 907 et 771 du code de procédure civile, dans la procédure d'appel, la demande de sursis à statuer doit, sous peine d'irrecevabilité, être soumise avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir, au conseiller de la mise en état seul compétent à l'exclusion de toute autre formation, pour statuer, notamment, sur les exceptions de procédure.
En l'espèce, il résulte des éléments de la procédure, non contestable et au demeurant, non contesté, que M. [LC] n'a pas formalisé sa demande de sursis à statuer auprès du conseiller de la mise en état, mais par ses conclusions au fond devant la cour.
Dans ces conditions, en application des dispositions légales rappelées ci-dessus, l'exception de procédure au titre d'un sursis à statuer présentée par M. [LC] [UW] est irrecevable.
Sur l'irrecevabilité des demandes de récompense à la communauté par Mmes [W] et [L], pour défaut de qualité à agir
Devant la cour, Mme [Y] veuve [UW] et M. [EN] [UW] soutiennent que le jugement entrepris ne pouvait faire droit aux demandes de Mmes [W] et [L] tendant à la constatation de récompense à la communauté, au passif de la succession et que leurs demandes sont irrecevables par application de l'article, article 122 du code de procédure civile.
Ils précisent que dans le cadre de la première instance, Mme [X] épouse [UW] aujourd'hui décédée, n'était ni présente, ni représentée.
Ils invoquent le défaut de qualité à agir de Mmes [W] et [L] en faisant valoir que le droit à récompense est personnel à l'époux in fine bénéficiaire de la récompense et que nul ne peut plaider par Procureur, au visa de l'article 30 du code de procédure civile.
Mmes [W] et [L] répliquent que les demandes de récompenses constituent un droit absolu de tout héritier et n'est pas réservé au seul conjoint survivant et que les arguments des appelants sont manifestement infondés.
Elles soulignent que les parties détiennent des droits dans la part de communauté revenant au défunt et se réfèrent à tous les articles du code civil faisant référence à la nécessité de calculer les récompenses dues par ou à la communauté (articles 1404, 1405, 1406, 1408, 1409, 1412, 1433, 1436, 1437 ...).
Elles ajoutent, notamment, que celles-ci en leur qualité d'héritière de leur père, sont copartageants, comme les autres héritiers, avec leur mère de ladite communauté et invoquent le recel de communauté prévu par l'article 1477 du code civil.
M. [LC] [UW], au vu des ses conclusions notifiées le 2 juillet 2018, dont il convient de tenir compte par application de l'article 910-4 du code de procédure civile, comme il est dit ci-dessus, n'a pas conclu sur ce point.
La cour relève qu'il ne résulte ni des dispositions de l'article 1437 du code civil prévoyant un droit à récompense à la communauté, ni d'aucune autre disposition légale que ce droit est personnel au conjoint bénéficiaire de cette récompense, comme l'allèguent Mme [Y] veuve [UW] et M. M. [EN] [UW].
En outre, au regard des dispositions des articles 30 et 32 du code de procédure civile, tous les héritiers justifient en cette qualité de leur droit à faire valoir l'existence d'une récompense au profit de la communauté de biens ayant existe entre leurs parents, dans le cadre de la liquidation du régime matrimonial de leurs parents, opération antérieure et liée au règlement de leurs successions.
Mme [Y] veuve [UW] et M. [EN] [UW] ne peuvent donc valablement se prévaloir de leur fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir Mmes [W] et [L] au titre des récompenses dues à la communauté.
Il convient donc, au vu dispositif de leurs conclusions, de les débouter de leurs demandes principales tendant à
'- retenir que le jugement entrepris ne pouvait faire droit aux demandes de Mmes [W] et [L] tendant à la constatation de récompenses au passif de la succession au bénéfice de Mme [X] épouse [UW]
- En conséquence, la Cour déclarera Mesdames [W] et [L] irrecevables en leurs demandes par application de l'article 122 du CPC'.
Sur le droit a récompense de la communauté au titre des constructions objet des donations
Le tribunal a relevé les différentes donations de biens immobiliers faites en avancement d'hoiries par M. [OJ] [UW] à ses enfants de divers biens dépendant d'un ensemble immobilier situé à Monte sur une parcelle de terre aujourd'hui cadastrée n° [Cadastre 1] et [Cadastre 2].
Devant la cour, Mme [Y] veuve [UW] et M. [EN] [UW] contestent le droit à récompense au titre des constructions, objet de la donation du 2 juin 1992, en se prévalant de la déclaration de succession en date du 26 juin 2002, établie par Me [GE], notaire et soutiennent qu'il n'existe aucune récompense due à la communauté par le défunt.
Ils invoquent les effets de cette déclaration de succession et font valoir que cet acte signé par tous les héritiers, précise page 4 au titre 'des liquidations et reprises des récompenses' dues à la communauté par les conjoints et par la communauté à ces derniers, qu'il n'existe nulle récompense.
Ils soutiennent que Mme [X] épouse [UW] a expressément déclaré qu'il n'existait aucune récompense et entendu y renoncer, en se prévalant du paragraphe spécialement signé de tous les héritiers, y compris par l'épouse du défunt.
Mmes [W] et [L] répliquent que la déclaration de succession est une déclaration fiscale découlant d'une obligation fiscale et n'a aucun effet sur la liquidation de la communauté ou d'une succession.
Elles affirment que la déclaration de succession du 2 juin 2002, n'a pas été établie par le notaire mais par les héritiers eux-mêmes et dont valoir que celle-ci est plus que 'partielle', en soulignant l'absence de mention d'un fonds de commerce comme actif de communauté ou des parts sociales de la SARL [UW] et Fils.
Elles ajoutent, notamment, que la portée juridique de la déclaration de succession se limite à une déclaration d'évaluation de l'actif à la date du décès, sans conférer une quelconque valeur testimoniale et se référent à un arrêt de la cour d'appel de Paris du 14 janvier 2015.
Les intimées affirment que le droit à récompense ne peut être éliminé et que peu importe donc que la déclaration de succession ne mentionne pas les récompenses dues à la communauté ou par la communauté à la succession de l'un des défunts.
La cour rappelle que la renonciation expresse ou tacite du droit à récompense de la communauté est légalement possible, toutefois il appartient à celui qui l'invoque de rapporter la preuve d'une renonciation non équivoque à ce droit à récompense.
En outre, il est relevé qu'une déclaration de succession est un formulaire administratif de la Direction Générale des Impôts (imprimés 2705 et 2705-S), destiné à chiffrer la consistance active et passive d'une succession en vue de déterminer le montant des droits de succession, cette déclaration doit être souscrite par les héritiers, légataires ou donataires qui n'ont pas expressément renoncé à la succession.
En l'espèce, la déclaration de succession versée aux débats, a été établie le 18 avril 2001, par Me [RA] [GE], notaire, au vu du cachet de son étude, apposé à cet emplacement à la 1ère page et au surplus à sa formulation et cette déclaration, comme il est exigé par les textes, a été signée par tous les héritiers.
Toutefois, l'absence de mention de l'existence de récompenses dues par le défaut à la communauté sur cette déclaration de succession, laquelle n'a aucune portée d'ordre juridique, ne peut suffire à établir une renonciation non équivoque de la part de Mme [X] épouse [UW], ni, au surplus d'aucun des héritiers du défunt, à leur droit à récompense due à la communauté.
Dès lors, Mme [Y] veuve [UW] et M. M. [EN] [UW], qui ne se prévalent que la déclaration de succession et ne s'appuient sur aucune pièce, n'apportent pas la preuve que Mme [X] épouse [UW] avait renoncé sans équivoque au droit à récompense due à la communauté ayant existé entre celle-ci et son défunt mari.
Au surplus, il est relevé que l'acte notarié du 2 juin 1992, de donation par les époux [OJ] et [T] [UW] à M. [H] [UW], mentionne expressément en page 4 'En ce qui concerne les constructions, elles appartiennent à Monsieur et Madame [OJ] [UW] comme faisant partie de la communauté de biens existant entre eux, pour les avoir faites édifier de leurs deniers personnels sans avoir consenti aucun privilège'.
En outre, comme le relève à juste titre Mmes [L] et [W], il ne résulte ni de cet acte de donation, ni d'aucune autre pièce, que Mme [X] épouse [UW], ait fait donation de son droit à récompense au donataire, comme l'allèguent Mme [Y] veuve [UW] et M. [EN] [UW], sans en apporter la preuve.
Il y a donc lieu de confirmer le jugement entrepris en ses dispositions sur ce point.
Sur les récompenses à la communauté au titre des contrats d'assurance
Le tribunal a dans le dispositif de son jugement a 'dit que qu'il est dû récompenses à la communauté des sommes versées au titre des assurances vie, Natio-vie et Prédica'.
Dans les motifs de son jugement il indique que 'les sommes versées au titre de ces contrats doivent donc être réintégrées à l'actif à concurrence de moitié', en rappelant les dispositions des articles 1401 et 1437 du code civil.
Il relève, au vu des pièces versées aux débats :
- d'une part, un contrat d'assurance-vie 'NATIO VIE' (courrier de la CARDIF le 26 janvier 2007 indiquant un versement de la somme totale de 409.797,53 euros à hauteur de 50 à chacun des deux bénéficiaires et un courrier de NATIO-VIE du 17 février 2000 indiquant que ces contrats doivent être déclarés au titre de l'ISF et confirmant qu'il s'agit d'un placement de capitalisation, un courrier du 17 février 2000 et un bulletin d'information indiquant qu'il s'agit d'un contrat 'multiplacements option capitalisation', souscrit le 31 mars 1992, soit 9 ans avant le décès de M. [UW],
- d'autre part, un contrat FLORIGE, (courrier du Crédit Agricole de Corse du 10 octobre 2016 duquel il ressort que M. [UW] a souscrit le 19 septembre 1994, un contrat duquel ce dernier a été versé des primes pour une somme totale de 274.408,23 euros).
Le tribunal a souligné que ces deux contrats n'avaient pas été produits.
Il a relevé, au visa des articles L 132-13 du code des assurances et 1401 du code civil, que la Cour de Cassation avait jugé par un arrêt du 31 mars 1992, que la valeur d'un contrat d'assurance-vie mixte du souscripteur, dont les primes ont été payées avec des fonds communs jusqu'à la dissolution de la communauté, fait partie de l'actif de communauté.
Il a considéré qu'en l'espèce, rien ne permettait d'affirmer que ces contrats n'avaient pas été financés par des fonds communs et que les sommes versées au titre de ces deux contrats devaient être réintégrées à l'actif de la communauté à concurrence de moitié.
Mme [Y] veuve [UW] et M. [EN] [UW], au vu de la motivation du jugement entrepris reprise dans leurs écritures, concluent que se pose en l'espèce, la question de savoir si les primes versées par le défunt au titre des assurances NATIO VIE et PREDICA, ouvrent droit à récompense pour la communauté, outre la question, de la qualification de ses assurances-vie en donations rapportables à la succession.
Sur la nature du contrat NATIO-VIE, ils exposent les caractéristiques respectives d'un contrat de capitalisation et d'un contrat d'assurance-vie et soutiennent qu'en l'espèce, l'examen des pièces adverses 16 à 18, ne montre pas qu'il s'agissait initialement d'un contrat de capitalisation.
Ils soulignent que la lecture de ces documents fait apparaître que le contrat litigieux est un contrat multiplacements signé le 31 mars 1992, souscrit avec option capitalisation et qu'il ne fait aucune mention d'une quelconque modification ou transformation du contrat.
Ils font valoir, au visa des correspondances du 17 février 2000 et 26 janvier 2017 de la BNP, qu'au 1er janvier 2000, M. [OJ] [UW] était titulaire d'un contrat d'assurance-vie et non pas d'un contrat de capitalisation, en soulignant que ce dernier était titulaire d'un seul contrat d'assurance-vie à la BNP dont les bénéficiaires étaient [H] et [E] [UW], ses deux enfants.
Ils affirment qu'il appartient aux intimés de prouver que le défunt avait souscrit un contrat de capitalisation en 1992 et que ce contrat avait été transformé en 2000 en contrat d'assurance-vie.
Sur le contrat PREDICA CRCAM, ils font valoir que la correspondance de la CRCAM est claire et sans ambiguïté, M. [OJ] [UW] était titulaire d'un contrat assurance-vie souscrit le 17 septembre 1994, le montant des primes versées est de 274.408,23 euros, les bénéficiaires [H] et [E] [UW], ses deux enfants, pour 50% chacun.
Ils relèvent que les intimés n'élèvent aucune contestation sur la teneur de cette lettre.
Ils contestent l'existence d'une récompense due à la communauté au titre des primes versées en exécution de ces contrats d'assurance, faute de preuve de l'origine communautaire des fonds.
Ils exposent qu'en l'espèce, au vu des pièces produites et des actes de procédure, M. [OJ] [V] [UW] a souscrit deux contrats d'assurance-vie en désignant ses deux fils comme seuls bénéficiaires et que Mme [T] [X] veuve [UW] n'était pas bénéficiaire.
Ils concluent que la succession de M. [OJ] [V] [UW] doit donc récompense à la communauté au titre du règlement des primes de ces contrats d'assurance à condition que la partie adverse rapporte la preuve que les primes ont été versées à l'aide de fonds prélevés sur la communauté.
Ils se réfèrent à la motivation suivante du tribunal 'En l'espèce rien ne permet d'affirmer que ces contrats n'ont pas été financés par des fonds communs', mais soutiennent que la preuve n'est pas rapportée par les intimées de l'origine communautaire des fonds.
De leur côté, Mmes [L] et [W], soutiennent que le montant des deux contrats d'assurances-vie Natio-Vie et Prédica doivent être inclus au titre des récompenses dues à la communauté, en application des dispositions des articles 1401, 1437 et 1441 du code civil.
Les intimées soulignent, sur l'absence de production de ces contrats, qu'elles ont multiplié les démarches en vain pour obtenir quelques maigres renseignements et soutiennent, au vu de la pièce versée aux débats que les termes mêmes utilisés par la banque prouve qu'il s'agit d'une capitalisation.
Elles affirment que dans la mesure où ces contrats ont été faits grâce à des deniers de la communauté, ils constituent des actifs communs en application des textes sus-visés et que rien ne justifie que l'épargne accumulée durant la vie commune soit exclue de la communauté, en se référant à l'article 1401 du code civil, ainsi qu'à l'arrêt 'Praslicka' rendu le 31 mars 1992 par la Cour de Cassation.
Elles précisent que 'l'épargne accumulée' à travers ces différents contrats d'assurance-vie s'élève à 409.797,53 € pour Natio-Vie et 274.408,23 € pour Prédica CRCAM, soit un total de 684.205,76 euros et affirment que sur ces sommes, la communauté a droit à récompense pour 50%.
M. [LC] [UW], au vu des ses conclusions notifiées le 2 juillet 2018, retenues comme rappelé ci-dessus, au titre l'article 910-4 du code de procédure civile, n'a pas conclu sur ce point.
La cour relève qu'aux termes du dispositif du jugement entrepris le tribunal a retenu une récompense à la communauté au titre des deux assurances-vie dont s'agit et qu'aucune décision ne prévoit une réintégration à l'actif de la communauté des sommes versées au titre des contrats d'assurance.
Il convient donc de statuer sur la question de la récompense à la communauté
S'agissant de la nature des contrats d'assurances litigieux, il convient de rappeler que le contrat de capitalisation se transmet aux héritiers du souscripteur, alors que le contrat d'assurance-vie se dénoue au décès du souscripteur.
En l'espèce, il ressort de l'examen des pièces versées aux débats concernant le contrat NATIO-VIE souscrit par M. [OJ] [UW], qu'il s'agit d'un contrat mixte, de placement et d'assurance-vie et que les bénéficiaires de l'assurance-vie désignés par le souscripteur, à savoir, MM. [H] et [E] [UW], ont perçu un capital au titre d'une assurance-vie.
Il est relevé, notamment, que la lettre de CARDIF du 26 janvier 2007, mentionne 'Information contrats d'assurance-vie' avec en références le n° de client Natio Vie (00616192.0001) souscrit par M. [OJ] [UW] et précise que 'les contrats d'assurance vie s'analysent indépendamment de la succession'.
En ce qui concerne le contrat de la compagnie d'assurance PREDICA, contrat 'FLORIGE' n° 31026796724, souscrit le 19 septembre 1994 par M. [OJ] [UW], il résulte de la lettre du Crédit Agricole Corse du 10 octobre 2016, qu'il s'agit d'un contrat d'assurance-vie classique, précisant en outre les disposituons de l'article L 132-13 du code des assurances.
La cour estime, au vu de l'analyse de ces différentes pièces, que les sommes versées aux bénéficiaires de ces deux contrats d'assurance-vie n'ont pas à être intégrées à l'actif de communauté, comme retenu, à tort par les premiers juges.
La cour rappelle qu'aux termes de l'article 1437 du code civil
' Toutes les fois qu'il est pris sur la communauté une somme, soit pour acquitter les dettes ou charges personnelles à l'un des époux, telles que le prix ou partie du prix d'un bien à lui propre ou le rachat des services fonciers, soit pour le recouvrement, la conservation ou l'amélioration de ses biens personnels, et généralement toutes les fois que l'un des deux époux a tiré un profit personnel des biens de la communauté, il en doit la récompense'.
Il convient en outre, de rappeler la présomption de communauté résultant des l'article 1402 du code civil, aux termes duquel 'Tout bien, meuble ou immeuble, est réputé acquêt de communauté si l'on ne prouve qu'il est propre à l'un des époux par application d'une disposition de la loi.
Si le bien est de ceux qui ne portent pas en eux-mêmes preuve ou marque de leur origine, la propriété personnelle de l'époux, si elle est contestée, devra être établie par écrit. A défaut d'inventaire ou autre preuve préconstituée, le juge pourra prendre en considération tous écrits, notamment titres de famille, registres et papiers domestiques, ainsi que documents de banque et factures. Il pourra même admettre la preuve par témoignage ou présomption, s'il constate qu'un époux a été dans l'impossibilité matérielle ou morale de se procurer un écrit'.
En l'espèce, en application des dispositions légales précitées, au vu du principe de présomption de communauté, il appartient à Mme [Y] veuve [UW] et à M. [EN] [UW], qui renversent la charge de la preuve, de rapporter que M. [OJ] [V] [UW] avait versé les primes d'assurance pour ces deux contrats, avec ses fonds propres, ce que les appelants ne démontrent pas.
Dans ces conditions, conformément aux dispositions de l'article 1437 précité, la communauté a droit à une récompense pour les primes versées par le défunt pour ces deux contrats d'assurance, dénoués à son décès et pour lesquels il avait désigné des bénéficiaires, en l'occurrence ces deux fils.
Le tribunal ayant dit dans son dispositif qu'il est 'dû récompense à la communauté des sommes versées au titre des assurances vie Natio-Vie et Prédica', il convient de préciser que cette récompense porte sur les primes d'assurances, le jugement entrepris sera donc infirmé en ce sens.
Sur l'action en réduction
Le tribunal a retenu que les dispositions transitoires de la loi du 23 juin 2006 portant réforme des successions et des libéralités, prévoient que la prescription quinquennale de l'action en réduction des libéralités excessives n'est applicable qu'aux successions ouvertes à compter du 1er janvier 2007.
Il relève qu'en l'espèce, M. [UW] est décédé le 18 avril 2001 et retient que la prescription en vigueur à cette date est donc la prescription trentenaire, en se référant à différents arrêts de la Cour de Cassation, rendus le 22 février 2017, le 4 mai 2017 et 24 novembre 1987.
Il précise que cette jurisprudence, au visa de l'ancien article 2262 du code civil, n'a jamais été remise en cause.
Le tribunal a donc considéré que les dispositions de l'article 2224 du code civil invoquées les parties défenderesses n'étaient pas applicables et que l'action en réduction des libéralités excessives de l'un ou l'autre des héritiers n'était pas prescrite à la date de sa saisine par actes d'huissier des 06, 07 et 12 septembre 2016.
Devant la cour, Mme [S] [Y] veuve [UW] et M. [EN] [UW] soulèvent à nouveau la prescription de la demande en réduction opérée par exploit du 07 septembre 2016.
Ils soutiennent que le tribunal s'est mépris et a inversé la portée des arrêts cités et n'a pas tiré les conséquences de la réforme de la prescription de droit commun telle qu'issue de la loi du 17 juin 2008.
Ils affirment qu'il s'évince de ces arrêts que les actions en réduction exercées dans le cadre des successions ouvertes après le 1er janvier 2007, sont soumises au régime de l'article 921 du code civil, à savoir 5 ans après le décès ou 2 ans après révélation de l'atteinte dans un délai maximum de 10 ans à compter du décès.
Ils soulignent que l'article 2222 du code civil précise que, si en raison de l'application de la réforme des prescriptions, des délais viennent à être réduits, les nouveaux délais s'appliquent à compter de l'entrée en vigueur de la loi, soit à compter du 19 juin 2008, sans que la durée ne puisse excéder la durée totale de la prescription prévue par d'anciennes lois.
Ils font valoir que pour les actions en réduction exercées dans le cadre des successions ouvertes avant le 1er janvier 2007, le droit commun trouve à s'appliquer et que les actions en réduction s'appliquant aux successions intervenues avant l'entrée en vigueur de la loi du 23 juin 2066, soit avant le 1er janvier 2007, seront prescrites à compter du 18 juin 2013.
Ils relèvent que leur analyse est également retenue par la doctrine, en se référant au Professeur [RO] [O], commentant l'arrêt du 22 février 2007, visé par le jugement entrepris.
Ils affirment que Mmes [L] et [W] étaient informées des donations du 10 décembre 1983 et 2 juin 1992, au vu de l'assignation et des pièces versées aux débats et de la déclaration de succession de Me [GE] le 26 juin 2002 portant leur signature, laquelle mentionne ces donations.
Ils ajoutent que ces donations ont été publiées au service des hypothèques en 1983 et 1992.
S'agissant du contrat d'assurances-vie CARDIF, ils soutiennent que l'action en réduction était prescrite au 26 janvier 2012, en tout état de cause au plus tard au 18 juin 2013, les intimées exposant que celles-ci en ont eu connaissance le 26 janvier 2007.
[LC], aux termes de ses conclusions notifiées le 02 juillet 2018, adhère aux prétentions et moyens développés par ceux-ci, en se prévalant des dispositions des articles 2222 et 2224 du code civil, ainsi que de la doctrine et des certains arrêts de la Cour de Cassation.
Il soutient qu'en l'espèce, l'action en réduction est prescrite depuis le 19 juin 2013.
De leur côté, Mmes [L] et [W] répliquent que la déclaration de succession ne vise pas les donations de 1982, contrairement aux allégations des appelants et qu'en outre elles n'avaient connaissance de la teneur de celles-ci, les actes n'étant pas produits.
Elles invoquent les dispositions de l'article 47 de la loi du 23 juin et précisent que la succession a été ouverte par le décès de M. [UW], soit le 18 avril 2001.
Elles soutiennent que c'est la prescription trentenaire qui est applicable à cette date et non la nouvelle prescription, en affirmant que la Cour de Cassation a tranché de façon claire le débats par ses arrêts des 22 février et 4 mai 2017, au visa de l'article 921 alinéa 2 du code civil.
Elles ajoutent que ces arrêts n'ont pas retenu les dispositions de l'article 2224 du code civil, dont se prévalent les appelants arguant notamment, qu'il s'agit d'une action personnelle, en vertu du principe général 'lex spécialis derogat lex generalis' (la loi spéciale déroge à la loi générale) et d'autre part, que l'action en réduction appartient aux actions réelles immobilières.
La cour, à défaut d'éléments nouveaux, estime que les premiers juges ont fait une exacte appréciation des faits de la cause et du droit des parties et ont pour de justes motifs, qu'elle approuve, dit que l'action en réduction de Mmes [L] et [W] est recevable.
En effet, il convient de rappeler le principe selon lequel la loi spéciale déroge à la loi générale.
S'agissant du délai de prescription de l'action en réduction des libéralités excessives, fixé par l'alinéa 2 de l'article 921 du code civil, dans se rédaction issue de la loi du 23 juin 2006, il convient de tenir compte des dispositions relatives à l'application dans le temps de cette loi, lesquelles sont prévues à l'article 47, II de cette loi, rapportées dans le jugement entrepris, comme l'a retenu la Cour de Cassation, dans son arrêt du 22 février 2017, aux termes duquel ' Sur le moyen relevé d'office, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile :
Vu l'article 921, alinéa 2, du code civil, dans sa rédaction issue de la loi du 23 juin 2006, ensemble l'article 47, II, de cette loi
;Attendu que le premier de ces textes n'est applicable, aux termes du second, qu'aux successions ouvertes à compter de l'entrée en vigueur, le 1er janvier 2007, de la loi précitée'.
Les appelants ne peuvent donc valablement se prévaloir des dispositions de l'artiche 2224 du code civil, prévoyant le délai de droit commun de la prescription à cinq ans.
Le jugement sera donc confirmé sur ce point.
Sur le rapport à la masse successorale des contrats d'assurance-vie
Le tribunal a, dans le dispositif de son jugement dit que 'le montant des donations déguisées dont ont bénéficié [E] [UW] et [H] [UW] sous forme de contrats d'assurance-vie Natio Vie et Prédica sera rapporté à la masse successorale'.
Il a, dans sa motivation, sans faire de distinction entre les deux contrats d'assurance-vie, considéré qu'il s'agissait de donations déguisées qui devaient être réintégrées à l'actif successoral, en retenant qu'il s'agissait d'une opération de pure capitalisation et considéré que les dispositions de l'article L 132-13 du code des assurances n'étaient pas applicables, en se référant à un arrêt de la Cour de Cassation du 29 janvier 2002.
Il a ajouté, que si on exclut la qualification de contrats de capitalisation au profit de l'assurance-vie stricto sensu, ces contrats, souscrits en 1992 et 1994, concomitamment avec les donations de 1989 et 1992 au désavantage des demanderesses, 'révélant une volonté continue et persistante de répartir ses biens entre ses héritiers à l'avantage de ses fils au-delà de la quotité disponible'.
Devant la cour, Mme [S] [Y] veuve [UW] et M. [EN] [UW], font valoir que le tribunal a sans aucune motivation, qualifié ce contrat d'opération de capitalisation et dit que les dispositions de l'article L 132-13 du code des assurances ne leur était pas applicable et, en outre, en a conséquence déduit que les deux contrats constituaient des donations déguisées rapportables à la succession, sans que rien ne justifie cette décision.
Ils soutiennent, par une argumentation développée ci-dessus, sur la nature des contrats d'assurance-vie litigieux, qu'il s'agit de contrat d'assurance-vie et non de contrat de capitalisation.
Les appelants ajoutent, au vu de la motivation du tribunal faisant état que ces contrats révéleraient 'une volonté certaine et persistante de l'intéressé de répartir les biens entre les héritiers à l'avantage de ses fils...', que cette motivation n'a aucun fondement juridique, est purement hypothétique et spéculatif sur les intentions du défunt, le tribunal ne connaissant pas la valeur de la masse à partager, ni la quotité disponible.
M. [LC], aux termes de ses conclusions notifiées le 02 juillet 2018, conteste comme les appelants cette décision du tribunal, en se référant à un arrêt de la Cour de Cassation du 23 novembre 2004, relevant que 'le contrat d'assurance dont les effets dépendent de la durée de la vie humaine comporte un aléa et constitue un contrat d'assurance-vie'.
Il ajoute que le tribunal a méconnu la réalité des relations du défunt avec ses deux fils, qui par leur industrie ont valorisé le patrimoine de leur père et expose les circonstances dans lesquelles ces assurances-vie avaient été souscrites par le défunt au bénéfice des deux enfants.
Il fait valoir que pour la notion de donation déguisée, les magistrats s'attachent aux circonstances dans lesquelles l'assurance-vie a été souscrite, en se référant à la jurisprudence et qu'au surplus, pour matérialiser le caractère exorbitant d'une assurance-vie, il faut rapporter son montant à la valeur globale des biens relevant de la succession.
L'appelant soutient qu'en l'espèce, au regard de l'importance du patrimoine, les assurances-vie dont s'agit ne représentent qu'une infime partie des avoirs du défunt dans la succession et souligne que ce moyen n'a pas été explicitement développé par le premier juge dans son raisonnement.
De leur côte, Mmes [L] et [W] reprennent leurs moyens et arguments de première instance au soutien de leur demande tendant au rapport à la masse successorale des sommes reçues par leurs deux frères par en qualité de bénéficiaires des contrats d'assurances litigieux.
Elles affirment qu'il s'agit de donations déguisées, en invoquant l'intention libérale du défunt et en se référant à un arrêt de la Cour de cassation prenant également en compte l'utilité du contrat pour son souscripteur.
Les intimées ajoutent, notamment que le montant très important des sommes reçues et la transformation de l'un des contrats au moins, quelques jours avant le décès, traduit la volonté de M. [UW] de se dépouiller au profit de deux de ses enfants.
La cour relève qu'aux termes de l'article L 132-12 du code des assurances, ' Le capital ou la rente stipulés payables lors du décès de l'assuré à un bénéficiaire déterminé ou à ses héritiers ne font pas partie de la succession de l'assuré. Le bénéficiaire, quelles que soient la forme et la date de sa désignation, est réputé y avoir eu seul droit à partir du jour du contrat, même si son acceptation est postérieure à la mort de l'assuré'
Aux termes de l'article L 132-13 du même code 'Le capital ou la rente payables au décès du contractant à un bénéficiaire déterminé ne sont soumis ni aux règles du rapport à succession, ni à celles de la réduction pour atteinte à la réserve des héritiers du contractant.
Ces règles ne s'appliquent pas non plus aux sommes versées par le contractant à titre de primes, à moins que celles-ci n'aient été manifestement exagérées eu égard à ses facultés'.
Il convient, en outre de rappeler que les parents sont, d'une part, libres de disposer de la totalité de leurs biens de leur vivant comme ils l'entendent et de gratifier les personnes de leur choix, d'autre part, de vouloir favoriser certains de leurs enfants plus que d'autres, même dans le cadre de contrats d'assurance-vie régis par des dispositions spécifiques quant au règles sur le rapport successoral et la réduction des libéralités excessives, sans être tenu à une stricte égalité entre tous les héritiers.
En l'espèce, le défunt a, en désignant deux de ses quatre enfants comme bénéficiaires des ses deux contrats d'assurance-vie fait le choix, pour des raisons qui lui appartenaient de partager en 2 et non en 4 les sommes provenant de ces assurances-vie, de sorte que les intimées sont mal venues à se plaindre de l'absence d'un partage à égalité entre les quatre enfants.
Sur la nature des deux contrats d'assurance-vie litigieux, l'analyse des pièces versées aux débats concernant le contrat NATIO-VIE (références le n° de client 00616192.0001), souscrit par M. [OJ] [UW], établit qu'il s'agit d'un contrat mixte, de placement et d'assurance-vie dont les bénéficiaires de l'assurance-vie désignés par le souscripteur, ont perçu un capital au titre d'une assurance-vie.
Il est souligné, au surplus, que la lettre de CARDIF du 26 janvier 2007, indique clairement 'Information contrats d'assurance-vie' et précise que 'les contrats d'assurance vie s'analysent indépendamment de la succession'.
Il s'agit donc d'un contrat se dénouant au décès du souscripteur aux termes duquel des bénéficiaires ont été désignés par celui-ci, autre que son conjoint, au titre d'une assurance-vie.
En ce qui concerne le contrat de la compagnie d'assurance PREDICA, contrat 'FLORIGE' n° 31026796724, souscrit le 19 septembre 1994 par M. [OJ] [UW], il résulte de la lettre du Crédit Agricole Corse du 10 octobre 2016, qu'il s'agit d'un contrat d'assurance-vie classique, les disposituons de l'article L 132-13 du code des assurances étant d'ailleurs rappelées sur ce courrier.
Au vu de l'ensemble de ces éléments, il convient en l'espèce de faire application des dispositions des articles L132-12 et L 132-13 précités.
La cour ne partage pas l'analyse des premiers juges qualifiant, à tort, ces contrats d'assurances de donations déguisées et ayant décidé à tort que le montant des sommes versées au titre de ces deux contrats d'assurance seront rapportables à la masse successorale.
Le jugement entrepris sera donc infirmé en ses dispositions à ce titre et les demandes de Mmes [L] et [W] à ce titre seront rejetée.
La cour relève, au vu du dispositif du jugement entrepris et des dispositifs respectifs des conclusions des parties, limitant la saisine de la juridiction en application des dispositions de l'article 954 alinéa 3 du code de procédure civile, qu'il n'y a pas lieu à statuer sur le rapport des primes à la masse successorale, aucune décision en ce sens n'ayant pas été ordonné par le tribunal.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
L'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en l'espèce, les parties seront donc déboutées de leurs demandes respectives à ce titre.
Les parties, succombant partiellement à leurs demandes respectives, supporteront chacune leurs dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Déclare irrecevables les nouvelles prétentions formulées par M. [LC] [UW], dans ses conclusions postérieures à ses conclusions signifiées le 02 juillet 2018 ;
Déclare irrecevable l'appel incident de Mme [HV] veuve [UW] ;
Déclare irrecevable l'exception de procédure au titre d'un sursis à statuer présentée par M. [LC] [UW],
Déboute Mme [S] [Y] veuve [UW] et M. [EN] [UW] de leur fin de non-recevoir au titre du défaut de qualité à agir à l'encontre de Mme [M] [UW] épouse [L] et Mme [MT] [UW] épouse [W], en conséquence, les déboute de leurs demandes tendant à :
'- retenir que le jugement entrepris ne pouvait faire droit aux demandes de Mmes [W] et [L] tendant à la constatation de récompenses au passif de la succession au bénéfice de Mme [X] épouse [UW]
- En conséquence, la Cour déclarera Mesdames [W] et [L] irrecevables en leurs demandes par application de l'article 122 du CPC'.
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a :
- dit que qu'il est dû récompenses à la communauté des sommes versées au titre des assurances vie, Natio-vie et Prédica ;
- dit que le montant des donations déguisées dont ont bénéficié [E] [UW] et [H] [UW] sous forme de contrats d'assurance-vie Natio-Vie et Prédica sera rapporté à la masse successorale ;
Statuant à nouveau des chefs infirmés,
- dit qu'il est dû récompenses à la communauté du montant des primes payées par M. [OJ] [UW] au titre des contrats d'assurances-vie Natio-vie et Prédica, au visa de l'article 1437 du code civil ;
Déboute Mme [M] [UW] épouse [L] et Mme [MT] [UW] épouse [W] de leur demande au titre des récompenses dues à la communauté, pour les sommes versées au titre des assurances-vie au profit de MM. [E] et [H] [UW], au titre des contrats d'assurances-vie Natio-vie et Prédica ;
Déboute Mme [M] [UW] épouse [L] et Mme [MT] [UW] épouse [W] de leurs demandes tendant à dire que les sommes versées au titre des assurances-vie au profit de MM. [E] et [H] [UW] constituent des donations déguisées et devront être rapportées à la masse successorale ;
Y ajoutant,
Déboute les parties de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Déboute les parties de tous autres chefs de demandes ;
Dit que les parties supporteront chacune leurs entiers dépens d'appel.
LE GREFFIER
LE PRESIDENT