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20/02/2019 | FRANCE | N°18/000604

France | France, Cour d'appel de Bastia, 04, 20 février 2019, 18/000604


ARRET No
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20 Février 2019
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R No RG 18/00060 - No Portalis DBVE-V-B7C-BYG4
-----------------------
QV... T...
C/
SARL CREPERIE A MERENDELLA
----------------------Décision déférée à la Cour du :
15 février 2018
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AJACCIO
17/00183
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COUR D'APPEL DE BASTIA

CHAMBRE SOCIALE

ARRET DU : VINGT FEVRIER DEUX MILLE DIX NEUF

APPELANT :

Monsieur QV... T...
[...]
[...]
[...]
Représenté par Me Dominique REMITI

-LEANDRI, avocat au barreau d'AJACCIO
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2018/000813 du 29/03/2018 accordée par le b...

ARRET No
-----------------------
20 Février 2019
-----------------------
R No RG 18/00060 - No Portalis DBVE-V-B7C-BYG4
-----------------------
QV... T...
C/
SARL CREPERIE A MERENDELLA
----------------------Décision déférée à la Cour du :
15 février 2018
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AJACCIO
17/00183
------------------

COUR D'APPEL DE BASTIA

CHAMBRE SOCIALE

ARRET DU : VINGT FEVRIER DEUX MILLE DIX NEUF

APPELANT :

Monsieur QV... T...
[...]
[...]
[...]
Représenté par Me Dominique REMITI-LEANDRI, avocat au barreau d'AJACCIO
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2018/000813 du 29/03/2018 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BASTIA)

INTIMEE :

SARL CREPERIE A MERENDELLA, prise en la personne de sa Gérante domiciliée audit siège.
No SIRET : 533 177 747 00011
[...]
[...]
Représentée par Me Jean François CASALTA de la SCP CASALTA GASCHY, avocats au barreau d'AJACCIO

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 décembre 2018 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme BETTELANI, Vice-présidente placée près Monsieur le premier président, faisant fonction de président, chargée d'instruire l'affaire,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Mme LORENZINI, Présidente de chambre,
M. EMMANUELIDIS, Conseiller
Mme BETTELANI, Vice-présidente placée près Monsieur le premier président

GREFFIER :

Mme COMBET, Greffier lors des débats.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 20 février 2019

ARRET

Contradictoire
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe.
Signé par Mme LORENZINI, Présidente de chambre faisant fonction de président et par Mme COMBET, Greffier présent lors de la mise à disposition de la décision.

***
EXPOSE DU LITIGE

Monsieur QV... T... a été embauché par Madame SN... Y... exerçant sous l'enseigne Crêperie "A Merendella", en qualité d'employé qualifié - serveur, suivant contrat de travail à durée déterminée du 8 octobre 2001 au 31 décembre 2001, puis suivant contrat à durée indéterminée à effet du 1er janvier 2002. Le salarié a démissionné de son emploi le 7 mai 2005.

Il a été à nouveau embauché par Madame SN... Y... exerçant sous l'enseigne Crêperie "A Merendella", en qualité d'employé - crêpier plongeur, niveau 2, échelon 1, suivant contrat à durée indéterminée à effet du 4 juin 2008. Il a été embauché par la Société A Merendella en qualité de crêpier selon contrat à durée indéterminée du 1er juillet 2013, étant précisé que "pour les droits découlant de l'ancienneté, la date embauche rest[ait] le 04/06/08".

Les rapports entre les parties étaient soumis à la convention collective nationale des hôtels, cafés et restaurants.

Selon courrier en date du 30 septembre 2015, la S.A.R.L. A Merendella a convoqué le salarié à un entretien préalable à un licenciement fixé au 12 octobre 2015. Une mise à pied conservatoire est intervenue par courrier du 6 octobre 2015 et Monsieur QV... T... s'est vu notifier son licenciement pour faute grave par lettre recommandée avec avis de réception adressée le 15 octobre 2015.

Monsieur QV... T... a saisi le Conseil de prud'hommes d'Ajaccio, par requête, de diverses demandes.

Selon jugement du 15 février 2018, le Conseil de prud'hommes d'Ajaccio a :
- débouté Monsieur QV... T... de l'ensemble de ses demandes,
- débouté la S.A.R.L. A Merendella de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné Monsieur QV... T... aux entiers dépens.

Par déclaration enregistrée au greffe le 1er mars 2018, Monsieur QV... T... a interjeté appel aux fins de réformation de ce jugement, en ce qu'il l'a débouté de l'ensemble de ses demandes : condamnation de la S.A.R.L. A Merendella à lui verser les sommes de 13 800 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de 4 600 euros d'indemnité compensatrice de préavis, 460 euros de congés payés afférents, 4 216 euros d'indemnité conventionnelle de licenciement, 1 227 euros de paiement des jours de repos, 5 000 euros de dommages et intérêts pour préjudice moral, 3 000 euros au titre frais irrépétibles, et l'a condamné aux entiers dépens.

Aux termes des dernières écritures de son conseil transmises au greffe en date du 29 mai 2018, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens de la partie, Monsieur T... a sollicité :
- de le recevoir en son appel et d'y faire droit,
- de réformer le jugement en ses dispositions querellées,
- de condamner la S.A.R.L. A Merendella à lui verser les sommes de :
* 13 800 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
* 4 600 euros d'indemnité compensatrice de préavis,
* 460 euros congés payés sur préavis,
* 4 216 euros d'indemnité conventionnelle de licenciement,
* 1 227 euros de paiement des jours de repos,
* 5 000 euros de dommages et intérêts pour préjudice moral,
- de condamner la S.A.R.L. A Merendella à lui verser la somme de 3000 euros au titre frais irrépétibles, ainsi qu'aux entiers dépens.

Il a fait valoir :
- que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse, les motifs invoqués dans la lettre de licenciement étant infondés et l'employeur ayant en réalité la volonté de se séparer du salarié pour d'autres motifs, non objectifs, dû à un certain racisme,
- que la plupart des attestations fournies aux débats par l'employeur émanant de salariés sous lien de subordination avec l'employeur, ou de clients réguliers et amis de la direction, reposaient donc sur des éléments subjectifs et ne pouvaient étayer le licenciement,
- qu'il avait eu un comportement salarié exemplaire, comme en témoignaient diverses attestations versées aux débats, émanant d'anciens salariés de l'entreprise (pour certains ayant quitté leurs fonctions avant 2015) ou de tiers,
- que des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse étaient dus, équivalents à six mois, outre des dommages

et intérêts pour préjudice moral distinct, et diverses indemnités (de licenciement et de préavis), ainsi que le paiement de jours de repos qu'il n'avait pu prendre en juillet et août 2015, soit seize jours.

Aux termes des écritures de son conseil transmises au greffe en date du 20 mars 2018 auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens de la partie, la S.A.R.L. A Merendella a demandé :
- de confirmer le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes d'Ajaccio en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il l'a débouté de sa demande au titre des frais irrépétibles,
- de débouter Monsieur T... de l'ensemble de ses prétentions,
- subsidiairement, de débouter Monsieur T... de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions, notamment celles au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de l'indemnité conventionnelle de licenciement, de l'indemnité de jours de repos et de dommages et intérêts au titre du préjudice moral,
- de condamner Monsieur QV... T... à lui verser la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Elle a exposé :
- que le licenciement pour faute grave était fondé, compte tenu de la matérialité de faits reprochés (retards répétés désorganisant l'équipe à laquelle le salarié appartenait, menaces d'ordre physique commises sur un salarié et violences verbales envers d'autres salariés, outre des insultes notamment à caractère raciste, indiscipline et insubordination), rendant impossible le maintien du salarié dans l'entreprise,
- que les attestations produites par le salarié étaient soit totalement mensongères, soit ne révélaient d'aucun racisme de la gérante de la structure Madame WP... Y... (ce que confirmait les multiples attestations produites par l'employeur), les propos invoqués par le salarié émanant en réalité d'une personne, Monsieur Y..., à la retraite et n'ayant aucun pouvoir décisionnel dans la gestion du personnel de l'entreprise,
- que le caractère discriminatoire du licenciement n'était dès lors aucunement établi,
- que subsidiairement, le salarié n'avait qu'une ancienneté de sept ans et non de quinze ans et que les sommes réclamées à titre indemnitaire étaient erronées dans leur calcul et infondées, le salarié ne justifiant pas du préjudice allégué.

La clôture de l'instruction a été ordonnée le 12 septembre 2018, avec appel de l'affaire à l'audience de plaidoirie du 11 décembre 2018, où la décision a été mise en délibéré par mise à disposition au greffe le 20 février 2019.

MOTIFS

1) Sur la recevabilité de l'appel

Attendu que la recevabilité de l'appel n'est pas discutée ; que les éléments du dossier ne conduisent pas la Cour à le faire d'office ; que Monsieur T... sera donc déclaré recevable en son appel, tel qu'il le sollicite ;

2) Sur les demandes afférentes au licenciement

Attendu que l'article L 1232-1 du code du travail subordonne la légitimité du licenciement à une cause réelle et sérieuse ; qu'en application de l'article L 1235-1 du code du travail, lorsqu'il est saisi du bien fondé d'une mesure de licenciement, le juge se détermine au vu des éléments qui lui sont fournis par les parties, le doute devant profiter au salarié ; qu'il est néanmoins admis qu'il appartient à l'employeur d'établir de façon certaine la réalité des faits et de fournir au juge des éléments permettant de caractériser leur caractère suffisamment sérieux pour légitimer le licenciement ;

Attendu qu'il convient donc, en premier lieu, d'apprécier la réalité des faits énoncés par la lettre de licenciement fixant de manière irrévocable les limites du litige, puis le sérieux du motif invoqué ;
Que ce n'est que dans un second temps, lorsque la légitimité du licenciement est tenue pour acquise que l'employeur peut chercher à s'exonérer des indemnités de rupture en invoquant la faute grave du salarié, étant précisé que la charge de la preuve de la gravité de la faute incombe exclusivement à l'employeur ;

Que la faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis ;

Que suivant l'article L1132-1 du code du travail, dans sa version applicable aux données de l'espèce, aucune personne ne peut être licenciée, ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirectement, notamment en raison de son origine ou de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race ;

Que suivant l'article L1134-1 du code du travail dans sa version applicable aux données de l'espèce, lorsque survient un litige relatif à une discrimination, le salarié doit présenter des éléments de fait laissant supposer pris dans leur ensemble l'existence d'une discrimination, directe ou indirecte ; qu'au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de justifier que sa décision est justifiée par des éléments étrangers à toute discrimination ; que le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ;

Attendu que la lettre de licenciement datée du 15 octobre 2015 mentionne :
"Monsieur,
Vous avez été régulièrement convoqué par lettre datée du 30/09/2015 à un entretien préalable prévu le 12/10/2015, en vue d'un licenciement pour faute grave. Vous ne vous êtes pas présenté, ce qui est votre droit le plus strict.
Après une nouvelle analyse de votre situation, je vous notifie par la présente votre licenciement pour faute grave.
Cette décision repose sur les motifs suivants :
Lors de la soirée du 05/08/15, c'est à dire une des soirées les plus importantes de l'année en terme d'affluence et de chiffre d'affaires, vous avez volontairement "saboté" le service, à savoir :
1H45 d'attente en moyenne ce soir là, au lieu de 20 minutes pour une soirée identique.
Vous avez volontairement freiné le débit de votre production ; d'où un mécontentement des clients, non habitués à des attentes interminables et un stress important de vos collègues serveurs.
Ils ont eu du mal à gérer la relation avec les clients, car ils n'avaient pas d'explications objectives à leur fournir, sauf à vous mettre en cause ; ce qu'ils n'ont pas fait, faisant preuve d'un professionnalisme exemplaire.
Vous avez également invectivé vos collègues, lorsque ces derniers s'inquiétaient du quasi arrêt de votre travail.
Vous avez insulté une serveuse en lui disant "saule gauloise de merde", devant un parterre de collègues médusés.
Vous avez également dit à vos collègues : "fermez vos gueules, c'est moi qui commande".
Seul le sang froid de l'équipe et de la direction a permis d'éviter le pire.
Le lendemain, lorsque je vous ai demandé des explications, vous avez eu l'outrecuidance de me dire que vous l'aviez "fait exprès" et que si je n'étais pas contente, je n'avais "qu'à faire les crêpes moi-même".
Le 06/08/15 lors de votre prise de service, alors qu'on vous expliquait la mise en place par la direction d'une nouvelle procédure de travail, pour éviter un nouveau sabotage, vous vous êtes énervé et êtes sorti de votre comptoir pour frapper un de vos collègues.
Face à votre violence et détermination, Mme Y... AL... a été contrainte de le faire partir, pour éviter un pugilat en plain service.
Les serveurs ont dû redoubler d'efforts, pour pallier l'absence de leur collègue.
Ce soir-là, vous avez continué votre politique de sabotage, en freinant volontairement le débit de votre production ; d'où à nouveau un mécontentement des clients, non habitués à des attentes interminables et un stress important de vos collègues serveurs.
Ils ont encore eu du mal à gérer la relation avec les clients, car ils n'avaient pas d'explications objectives à leur fournir, sauf à vous mettre en cause ; ce qu'ils n'ont pas fait, faisant preuve d'un professionnalisme exemplaire.
Lors des services des 30/09/15, 03/10/15 et 04/10/15, vous avez récidivé dans le sabotage du service, en freinant volontairement le débit de votre production ; d'où à nouveau un mécontentement des clients, non habitués à des attentes interminables un stress important de vos collègues serveurs.
Ils ont eu du mal à gérer la relation avec les clients, car ils n'avaient pas d'explications objectives à leur fournir, sauf à vous mettre en cause ; ce qu'ils n'ont pas fait, faisant preuve d'un professionnalisme exemplaire.
Pire encore, certaines crêpes ont été servies "brûlées".
Le 03/10/15 au service du soir : vous avez dit à un de vos collègues en plein service : "je vous pisse tous au cul".
Le 04/10/15, vous avez pris votre service avec 1/2 heure de retard et êtes parti 1/4 [d']heure avant la fin de votre service .
Votre collègue a dû vous attendre et donc effectuer des heures supplémentaires et préparer avec retard les commandes de matières premières.
Par ailleurs, vous n'utilisez jamais les règles élémentaires de politesse et de courtoisie à savoir :
Vous ne saluez jamais vos collègues et vos employeurs, lors de vos arrivées et départs.
Vous n'effectuez jamais les tâches de nettoyage, de rangement et de préparation de commandes lorsque vous êtes de jour.
Vous exercez des menaces et de l'intimidation sur vos collègues, pour qu'ils exécutent ces travaux, à votre place.
Les commandes de matières premières que vous ne passez pas, alors qu'elles vous incombent, sont effectuées dans l'urgence par les personnes qui prennent votre place.
Vous arrivez régulièrement en retard ; votre collègue est obligé de vous attendre et d'effectuer donc des heures supplémentaires.
Lorsque vous quittez votre poste, vous ne passez aucune consigne à la personne qui vous remplace, sur l'état d'avancement du travail et sur ce qu'il reste à faire.
Le 06/09/15, vous avez voulu imposer à la direction et votre collègue, un changement de planning de dernière minute.
Devant le refus de AL... Y..., vous avez levé le ton et laisser entendre que vous ne viendriez pas.
FV... a dû intervenir pour faire stopper la discussion en disant qu'il n'y aurait aucun changement.
Votre attitude de rébellion constante, vos menaces et intimidations, vos insultes ont mis à mal l'organisation du restaurant.
Vous avez créé des risques psycho-sociaux, au sein du personnel.
Je ne peux plus accepter de telles violences physiques et psychologiques sur le personnel.
Vous avez également terni l'image de marque et de qualité de notre établissement.
Enfin, je n'autorise personne à tenir des propos racistes, au sein de mon entreprise.
Compte tenu de la gravité des faits, le licenciement prend donc effet immédiatement.
Votre solde de tout compte sera arrêté à la date de présentation de cette lettre, sans indemnité de préavis, ni de licenciement.
Des faits graves étant survenus après les 30/09/15, j'ai été contrainte de vous notifier une mise à pied conservatoire le 05/10/15, lors de votre prise de service à 17 heures. La procédure a été confirmée par courrier daté du 06/10/15.
La période non travaillée à ce titre, et nécessaire pour effectuer la procédure de licenciement, soit du 05/10/15 à la date de première présentation à votre domicile de cette lettre, sera pas rémunérée.
Dès réception du présent courrier, je vous invite à téléphoner au restaurant pour prendre rendez-vous afin de vous remettre les éventuelles sommes vous restant dues au titre des salaires, retirer votre certificat de travail et votre attestation Pôle emploi pour percevoir des allocations de retour à l'emploi [...] " ;

Attendu qu'en premier lieu, il convient de constater que le salarié invoque le fait que le licenciement est motivé, non par les griefs exposés dans la lettre de licenciement, mais par des motifs non objectifs, lié au racisme ;

Qu'à l'appui de ses énonciations, le salarié produit les pièces suivantes : attestations de Mesdames UR... J..., FU... X..., Messieurs YE... C..., PC... M... ;

Que l'attestation de Madame J... doit être écartée en l'absence de certitude sur l'impartialité de l'attestant, qui expose elle-même avoir eu maille à partir avec l'employeur dans le cadre de sa rupture conventionnelle ;

Que l'attestation de Madame X... ne relate, s'agissant du licenciement de Monsieur T..., que des propos par ouï dire et non des faits personnellement constatés ;

Que l'attestation de Monsieur C... est relative à des propos tenus par une personne qui n'est pas la gérante de l'entreprise, mais une tierce personne, dont le rôle dans la direction de l'entreprise n'est aucunement mis en évidence ;

Que l'attestation de Monsieur M... concerne une période totalement distincte (2012 à 2013) de la période concernée et ne relate aucun élément en lien direct avec le licenciement de Monsieur T... ;

Qu'il convient de constater, à l'examen des pièces versées aux débats par ses soins, que Monsieur T... n'établit pas la matérialité de faits laissant supposer, pris dans leur ensemble, l'existence d'une discrimination, directe ou indirecte, à l'origine du licenciement ;

Attendu qu'à l'appui des griefs exposés dans la lettre de licenciement, l'employeur verse aux débats diverses pièces (attestations de Mesdames NB... O..., DT... AI..., ET... Q..., JB... U..., YB... TM..., de Messieurs WS... F..., ZS... W..., SJ... I..., BR... A..., GO... L..., WI... P..., KA... B...) ; que le lien de subordination entre certains des attestants (Mesdames O..., AI..., Q..., Messieurs F..., W..., I...) et l'employeur n'est pas suffisant pour écarter leurs attestations, étant observé que les témoignages susvisés n'émanent pas de témoins indirects, mais directs, et apparaissent suffisamment détaillés pour que la réalité des faits, énoncés de manière convergente, ne soit pas remise en cause par le lien de subordination entre des attestants et la S.A.R.L. A Merendella ; qu'il en va de même des attestations de clients, pour lesquels des liens d'amitié avec l'employeur ne sont pas mis en relief ;

Qu'au regard des pièces produites par l'employeur, la réalité des faits reprochés dans la lettre de licenciement est établie, s'agissant des faits du 5 et 6 août 2015, 30 septembre et 4 octobre 2015, mais également des faits de non-exécution des tâches de préparation ; Que parallèlement, s'agissant de ces faits, Monsieur T... ne produit pas de pièce suffisante pour justifier de l'inanité de ces griefs, ou faisant peser un doute suffisant sur lesdits griefs, étant observé :
- que les attestations de Madame FU... X... et de Messieurs WH... K..., PC... M... et émanent de personnes n'ayant pas travaillé avec Monsieur T... au cours de l'été 2015, mais au cours d'autres années,
- que l'attestation de Madame J... doit être écartée pour le motif pré-exposé et la seule attestation émanant de Madame YV... est insuffisante pour remettre en cause les nombreuses attestations afférentes à la réalité des faits du 5 et 6 août 2015, 30 septembre et 4 octobre 2015, de la non-exécution des tâches de préparation ;

Que s'agissant des retards habituels dans la prise de poste du salarié, l'attestation produite par l'employeur (émanant de Madame Q...) est contredite par l'attestation de Madame PO... YV..., versée par le salarié, de sorte que les faits ne peuvent être considérés comme établis, étant rappelé que le doute doit profiter au salarié ;

Que le surplus des faits énoncés dans la lettre de licenciement n'est pas établi ou est insuffisamment établi au travers des pièces produites au dossier ;

Attendu qu'au vu de ce qui précède, du caractère établi de plusieurs griefs, de leur matérialité, il convient de considérer que licenciement de Monsieur T... par la S.A.R.L. A Merendella est fondé sur une cause réelle et sérieuse ;

Que l'employeur souligne que ces faits ne permettaient pas d'envisager le maintien du salarié dans l'entreprise, pendant la durée du préavis ; que ce moyen paraît pertinent, au regard de la nature des faits ayant fondé le licenciement ;

Que le licenciement pour faute grave de Monsieur T... par la S.A.R.L. A Merendella est ainsi justifié ;
Que Monsieur T... sera donc débouté de ses demandes tendant à condamner la S.A.R.L. A Merendella à lui verser les sommes de :
* 13 800 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
* 4 600 euros d'indemnité compensatrice de préavis,
* 460 euros congés payés sur préavis,
* 4 216 euros d'indemnité conventionnelle de licenciement ;

Que le jugement entrepris sera confirmé à ces égards ;

3) Sur la demande au titre du préjudice distinct

Attendu que Monsieur T... ne justifie pas, au soutien de sa demande de condamnation de l'employeur à lui verser 5000 euros de dommages et intérêts, des conditions vexatoires du licenciement dont il allègue l'existence, ni d'un comportement fautif de l'employeur à l'origine d'une détérioration de son état de santé ;
Qu'il sera ainsi débouté de sa demande de ce chef et le jugement entrepris sera confirmé sur ce point ;

4) Sur la demande afférente aux jours de repos

Attendu que Monsieur T... sollicite la condamnation de l'employeur à lui verser une somme de 1227 euros à titre de paiement des jours de repos, qu'il n'a pu prendre au cours des mois de juillet et août 2015, soit seize jours au total ;

Qu'au regard des éléments produits, qui ne mettent pas en évidence de manquement de l'employeur à ses obligations en matière de repos compte tenu de l'activité de l'entreprise, la demande de Monsieur T... sera rejetée ;

Que le jugement entrepris sera confirmé à cet égard ;

5) Sur les autres demandes

Attendu que Monsieur T..., succombant à l'instance, sera condamné aux dépens de première instance (le jugement entrepris étant confirmé sur ce point) et de l'instance d'appel, les dépens de l'instance d'appel étant recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle ;

Que l'équité ne commande pas de prévoir de condamnation sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile au titre des frais irréptibles de première instance (le jugement entrepris étant confirmé à cet égard) et de l'instance d'appel ;

Que les parties seront déboutées de leurs demandes plus amples ou contraires à ces égards ;

PAR CES MOTIFS

L A C O U R,

Statuant publiquement, contradictoirement, par mise à disposition au greffe,

DECLARE Monsieur QV... T... recevable en son appel,

CONFIRME le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes d'Ajaccio le 15 février 2018 en toutes ses dispositions,

Et y ajoutant,

DEBOUTE les parties de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles d'appel,

CONDAMNE Monsieur QV... T... aux dépens de l'instance d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Formation : 04
Numéro d'arrêt : 18/000604
Date de la décision : 20/02/2019
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bastia;arret;2019-02-20;18.000604 ?
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