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16/01/2019 | FRANCE | N°18/000464

France | France, Cour d'appel de Bastia, 04, 16 janvier 2019, 18/000464


ARRET No
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16 Janvier 2019
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R No RG 18/00046 - No Portalis DBVE-V-B7C-BYCX
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Etablissement CFA DE HAUTE CORSE
C/
F... R...
----------------------Décision déférée à la Cour du :
06 février 2018
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'ajaccio
F 17/00224
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COUR D'APPEL DE BASTIA

CHAMBRE SOCIALE

ARRET DU : SEIZE JANVIER DEUX MILLE DIX NEUF

APPELANTE :

CAISSE D'ALLOCATION FAMILIALES DE LA HAUTE-CORSE (CAF) pris en la personne de s

on représentant légal
[...]
Représentée par Me Marie COLOMBANI, avocat au barreau d'AJACCIO

INTIMEE :

Madame F... R...
q...

ARRET No
-----------------------
16 Janvier 2019
-----------------------
R No RG 18/00046 - No Portalis DBVE-V-B7C-BYCX
-----------------------
Etablissement CFA DE HAUTE CORSE
C/
F... R...
----------------------Décision déférée à la Cour du :
06 février 2018
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'ajaccio
F 17/00224
------------------

COUR D'APPEL DE BASTIA

CHAMBRE SOCIALE

ARRET DU : SEIZE JANVIER DEUX MILLE DIX NEUF

APPELANTE :

CAISSE D'ALLOCATION FAMILIALES DE LA HAUTE-CORSE (CAF) pris en la personne de son représentant légal
[...]
Représentée par Me Marie COLOMBANI, avocat au barreau d'AJACCIO

INTIMEE :

Madame F... R...
quartier A R...
[...]
Représentée par Me Ugo IMPERIALI, et Me Valérie VINCENTI, avocats au barreau de BASTIA

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 novembre 2018 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme BETTELANI, Vice-présidente placée près Monsieur le premier président, chargée d'instruire l'affaire,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Mme LORENZINI, Présidente de chambre,
M. EMMANUELIDIS, Conseiller
Mme BETTELANI, Vice-présidente placée près Monsieur le premier président

GREFFIER :

Mme COMBET, Greffier lors des débats.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 16 janvier 2019

ARRET

Contradictoire
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe.
Signé par Mme LORENZINI, Présidente de chambre faisant fonction de président et par Mme COMBET, Greffier présent lors de la mise à disposition de la décision.

***
EXPOSE DU LITIGE

Madame F... R... a été embauchée par le Centre de Formation des Apprentis (C.F.A.) de la Haute-Corse, suivant contrat à durée indéterminée à effet du 1er septembre 1974.

Dans le dernier état de la relation contractuelle, la salariée occupait les fonctions de responsable du service apprentissage. Elle a été placée en invalidité deuxième catégorie à compter du 1er janvier 2015 et reconnue inapte à tout poste dans l'entreprise suite à deux visites intervenues les 9 et 23 février 2015. Le 16 avril 2015, la salariée a reçu en main propre contre signature ses documents de fin de contrat, hormis le certificat de travail.

Madame F... R... a saisi le Conseil de prud'hommes d'Ajaccio, par requête du 25 juin 2015, de diverses demandes.

Selon jugement du 6 février 2018, le Conseil de prud'hommes d'Ajaccio a :
- dit et jugé nul le licenciement de Madame F... R...,
- condamné le C.F.A. de la Haute-Corse à verser à Madame F... R... les sommes suivantes :
* 3 100 euros d'indemnité pour procédure irrégulière de licenciement,
* 55 800 euros de dommages et intérêts pour licenciement nul,
* 8 762 euros de rappels de salaire,
* 876 euros de congés payés sur rappel de salaire,
* 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
- ordonné l'exécution provisoire du jugement,
- débouté Madame F... R... du surplus de ses demandes,
- condamné le C.F.A. aux dépens.

Par déclaration enregistrée au greffe le 23 février 2018, le C.F.A. de la Haute-Corse a interjeté appel de ce jugement, en chacune de ses dispositions, et en ce qu'il l'a débouté de ses propres

demandes, tandis qu'il n'a pas débouté Madame R... de l'ensemble de ses demandes.

Aux termes des dernières écritures de son conseil transmises au greffe en date du 09 mars 2018, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens de la partie, le C.F.A. de la Haute-Corse a sollicité de réformer le jugement déféré et statuant à nouveau :
- de dire et juger que le licenciement pour inaptitude était fondé et que la rupture devait être actée, à défaut du 31 mars 2015, au 16 avril suivant,
- de débouter Madame F... R... de l'ensemble de ses demandes,
- de condamner Madame F... R... à lui verser une somme de 3600 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens,
- à titre subsidiaire:
* de ramener à de plus justes proportions les demandes de dommages et intérêts formulés au titre de la violation du statut protecteur et des indemnités de licenciement en tenant compte du statut d'invalidité au 2/3 de Madame R...,
* de dire et juger que les sommes de 25441,87 euros versées à Madame R... le 16 avril 2015 au titre de son solde de tout compte devront être déduites des éventuelles condamnations pécuniaires à venir,
- de débouter Madame R... du surplus de ses demandes, infondées.

Il a fait valoir :
- qu'un licenciement pour inaptitude était intervenu le 31 mars 2015, la lettre de licenciement et les documents de fin de contrat ayant été remis en main propre le 16 avril 2015 à la salariée,
- que la salariée n'avait pas, y compris pendant la procédure de licenciement, informé l'employeur d'une poursuite de son mandat de conseiller prud'homal à compter de janvier 2014, tandis que l'employeur n'avait en parallèle perçu aucune indemnisation du greffe du Conseil de prud'hommes de Bastia depuis 2014,
- que ce comportement déloyal de la salariée lui interdisait de formuler une quelconque demande en se prévalant des dispositions du statut protecteur,
- que l'absence d'autorisation administrative ne justifiait pas à elle seule que le licenciement soit déclaré nul,
- que la lettre de licenciement avait été régulièrement notifiée et qu'en tout état de cause, une irrégularité de notification ne remettait pas en cause le caractère réel et sérieux du licenciement,
- que le licenciement pour inaptitude était causé et que l'employeur avait satisfait à son obligation de reclassement en sollicitant les propositions de la médecine du travail, en envisageant toute possibilité en interne et en sollicitant des partenaires extérieurs, étant en outre rappelé qu'il s'agissait d'un licenciement demandé par la salariée elle-même alors que celle-ci possédait les annuités nécessaires pour un départ à la retraite,
- subsidiairement, que les sommes réclamées devaient être réduites à de plus justes proportions:
* la salariée était invalide au 2/3 depuis décembre 2014, ayant perçu des sommes à ce titre à compter de décembre 2014 et à compter de mai 2017 pour la retraite,
* une indemnité pour violation du statut protecteur ne pouvait excéder vingt quatre mois de salaire selon la jurisprudence,
* que c'était à tort que les premiers juges avaient affirmé que l'employeur ne contestait pas les demandes de rappel de salaires (la demande de débouté formulée par ses soins portant également sur lesdits rappels), demandes qui n'étaient pas justifiées dans leur principe ou quantum, la salariée ayant été avisée de son licenciement au 31 mars ou au plus tard au 16 avril 2015 et ayant perçu l'intégralité de son salaire (et non le tiers) jusqu'au 31 mars 2015, puis s'étant vu verser, au titre du solde de tout compte, 3 177 euros de rappel de salaire et 3 177 euros au titre de congés payés,
* la salariée avait perçu 25 441,87 euros suite au licenciement, dont 19 830,93 euros à titre d'indemnité de licenciement, sommes qui devaient venir en compensation des sommes éventuellement prévues à titre de condamnation.

Aux termes des écritures de son conseil transmises au greffe en date du 1er juin 2018 auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens de la partie, Madame F... R... a demandé :
- de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- de condamner le C.F.A. de la Haute-Corse à lui verser une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

Elle a exposé :
- qu'elle n'avait eu aucun comportement frauduleux, ni été déloyale vis à vis de son employeur s'agissant de l'information sur son statut de salarié protégé, l'employeur ayant une parfaite connaissance de son statut de conseiller prud'homal depuis 2008, renouvelé en 2014, comme le démontraient les pièces produites au dossier, dont certaines versées par l'employeur lui-même,
- que l'employeur n'avait pas procédé à son licenciement dans les formes légales, n'ayant pas sollicité l'autorisation préalable administrative alors qu'elle bénéficiait du statut de salarié protégé, ni transmis ou remis en main propre à la salariée de lettre de licenciement, licenciement qu'elle n'avait elle-même jamais sollicité,
- qu'en l'absence de respect des règles afférentes au statut protecteur, le licenciement était nul, ouvrant droit aux indemnités afférentes (à savoir l'indemnité pour violation du statut protecteur égale à la rémunération qu'elle aurait perçue depuis le jour de son éviction dans la limite de trente mois et à des dommages et intérêts au titre de la rupture illicite du contrat au moins égaux à six mois de salaire), exactement appréciées par les premiers juges, en l'absence de réintégration sollicitée,
- que l'employeur n'avait pas satisfait à son obligation de reclassement, ne justifiant d'aucune interrogation de la médecine du travail pour obtenir des propositions de reclassement, ni plus globalement d'aucune démarche de recherche active et individualisée de reclassement,
- que des rappels de salaire et congés payés afférents restaient dus, sommes non contestées par l'employeur en première instance, mais seulement en cause d'appel,
- que compte tenu de l'inobservation de la procédure de licenciement (défaut de lettre de licenciement), le salarié qui subissait nécessairement un préjudice avait droit à l'indemnité de droit commun prévue par l'article L.1235-2 du code du travail et dont le montant était souverainement apprécié par les juges ; que si l'employeur n'avait pas fait connaître par écrit les motifs s'opposant au reclassement de la salariée, le licenciement était irrégulier et le salarié pouvait réclamer des dommages et intérêts équivalents au préjudice subi.

La clôture de l'instruction a été ordonnée le 12 septembre 2018, avec appel de l'affaire à l'audience de plaidoirie du 13 novembre 2018, où la décision a été mise en délibéré par mise à disposition au greffe le 16 janvier 2019.

MOTIFS

1) Sur la nullité du licenciement

Attendu qu'en vertu des dispositions des articles L 2411-1 et L 2411-22 du code du travail, dans leur version applicable aux données de l'espèce, le conseiller prud'homal bénéficie des règles du statut protecteur ;

Que le licenciement du conseiller prud'homme ne peut intervenir qu'après autorisation de l'Inspection du travail ; que cette autorisation est également requise pour le conseiller prud'homme ayant cessé ses fonctions depuis moins de six mois et le salarié candidat aux fonctions de conseiller dès lors que l'employeur a reçu notification de la candidature ou lorsque que le salarié fait la preuve que l'employeur a eu connaissance de l'imminence de sa candidature, et pendant une durée de six mois après la publication des candidatures par l'autorité administrative ;

Que le licenciement d'un salarié en violation du statut protecteur est nul de plein droit ;

Qu'en l'absence de réintégration demandée, le salarié protégé, conseiller prud'homal, licencié en violation du statut protecteur, est susceptible de prétendre, en sus des indemnités de rupture classiques (indemnité de licenciement, de préavis) :
- à une indemnité pour violation du statut protecteur, ne pouvant excéder trente mois de rémunération (rémunération correspondant aux salaires qui auraient été perçus si la relation de travail s'était poursuivie), ce plafonnement à trente mois de salaires ne jouant que pour autant qu'à la date du licenciement, le mandat à courir excède ce seuil,
- à une indemnité réparant l'intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement et au mois égale à celle prévue par l'article L 1235-3 du code du travail, c'est à dire six mois de salaire minimum ;

Qu'il est admis que le salarié conseiller prud'homme ne peut se prévaloir de cette protection que si, au plus tard lors de l'entretien préalable au licenciement, il a informé l'employeur de l'existence de son mandat, ou qu'il rapporte la preuve de la connaissance par l'employeur de son mandat ; que les mêmes règles s'appliquent en cas de renouvellement du mandat prud'homal ; que la preuve peut se faire par tous moyens ;

Attendu qu'en l'espèce, il est constant au dossier que l'employeur avait été informé de l'existence d'un premier mandat prud'homal exercé par Madame R... à compter de 2008 ;
Que par contre, les parties s'opposent sur la connaissance par l'employeur du renouvellement de ce mandat prud'homal à compter de 2014 ;

Qu'au regard des pièces produites au dossier, la salariée ne justifie pas avoir informé directement son employeur du renouvellement du dit mandat ; que par contre, preuve est rapportée par la salariée de la connaissance par l'employeur de ce renouvellement, celle-ci mettant en exergue la détention par l'employeur des relevés individuel des temps d'activité de Madame R... au Conseil de prud'hommes de Bastia pour les années 2014 et 2015 ;

Qu'il y a lieu de considérer que la détention de ces relevés (sur laquelle l'employeur, qui dénie avoir eu connaissance du renouvellement du mandat prud'homal de Madame R..., ne s'explique pas dans le cadre de la présente instance) permet de caractériser la connaissance par l'employeur du renouvellement des fonctions de conseiller prud'homme de Madame R..., avant l'entretien préalable au licenciement de celle-ci ;

Que l'autorisation de l'Inspection du travail n'a pas été sollicitée avant le licenciement de Madame R... ;

Que dès lors, le licenciement pour inaptitude de Madame R... est nul de plein droit ; que le C.F.A. de Haute-Corse sera donc débouté de sa demande tendant à dire et juger le licenciement fondé ;
Que le jugement entrepris sera confirmé sur ce point ;

Qu'aucune réintégration n'étant demandée, les premiers juges ont alloué à Madame R... une somme de 55800 euros au titre de dommages et intérêts pour licenciement nul ; qu'au regard des données de l'espèce et du montant alloué, le conseil a manifestement entendu indemniser de manière globale la demanderesse, en tenant compte des moyens développés par celle-ci (concernant l'indemnité pour violation du statut protecteur, plafonnée à trente mois de rémunération, et l'indemnité réparant l'intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement et au mois égale à celle prévue par l'article L 1235-3 du code du travail, six mois de salaire minimum), qui avait globalisé ses demandes indemnitaires, à ces égards, dans ses prétentions initiales;

Que la Cour est tenue de redonner leur qualification exacte aux demandes formulées et aux dommages et intérêts, dont elle confirme ou infirme l'allocation ;

Qu'il convient donc de requalifier la demande, initialement globalisée, de Madame R... au titre de l'indemnité pour violation du statut protecteur et de l'indemnité réparant l'intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement, en deux demandes l'une ayant trait à l'indemnité pour violation du statut protecteur, l'autre aux dommages et intérêts réparant l'intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement ;

Qu'aucune réintégration n'étant demandée en cause d'appel, il y a lieu d'allouer à Madame R...:
- au titre de l'indemnité pour violation du statut protecteur, une somme de 30 844,80 euros (correspondant à trente mois de la rémunération salariale qu'aurait perçue Madame R... à compter de son éviction jusqu'au terme des trente mois, soit 1028,16 euros par mois, eu égard à son classement en invalidité 2ème catégorie et à la perception d'une pension d'invalidité mensuelle de 2141,19 euros brut à compter de février 2015), étant relevé qu'à la date du licenciement, le mandat prud'homal à courir excédait le seuil de trente mois,
- au titre de l'indemnité réparant l'intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement, déclaré nul, une somme de 20000 euros, tenant compte du plafond minimum de six mois de salaire, des circonstances du licenciement, de l'ancienneté, de l'âge de la salariée, salariée qui ne justifie d'un plus ample préjudice ;

Que les demandes plus amples ou contraires des parties seront rejetées ;

Que le jugement entrepris sera infirmé à cet égard ;

2) Sur l'irrégularité du licenciement

Attendu que le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a condamné le C.F.A. de Haute-Corse à verser à Madame R... une somme de 3 100 euros à titre d'indemnité pour irrégularité de la procédure de licenciement dans la mesure où :
- d'une part, le défaut de lettre de licenciement n'est pas sanctionné par des dommages et intérêts pour procédure irrégulière, mais par le caractère sans cause réelle et sérieuse du licenciement, étant observé au surplus que, l'employeur démontre, au travers des attestations de Madame P... du 25 juillet 2016 et de Monsieur T... du 25 juillet 2016, que la lettre de licenciement (datée du 31 mars 2015) a été remise en mains propres à la salariée le 16 avril 2015, cette date de notification du licenciement constituant la date de rupture du contrat de travail liant les parties, la demande de l'employeur à cet égard étant fondée,
- d'autre part, la salariée ne démontre pas du préjudice qu'elle allègue lié à l'absence de notification par écrit de l'employeur des motifs s'opposant à son reclassement ;

3) Sur les rappels de salaire

Attendu que Madame R... sollicite des rappels de salaire de 8762 euros depuis le 16 avril 2015 jusqu'à la date du licenciement, outre 876 euros au titre des congés payés afférents, demande à laquelle s'oppose l'employeur, soulignant n'avoir jamais acquiescé à cette demande devant le Conseil de prud'hommes, ayant au contraire sollicité le débouté de Madame R... de l'ensemble de ses demandes, celle-ci incluse ;

Que le licenciement est intervenu le 16 avril 2015, jour de la notification de la rupture à la salariée, de sorte qu'un rappel de salaire postérieur à cette date n'est pas fondé; qu'en outre, l'employeur justifie, au travers des pièces produites, que la salariée a jusqu'au jour du licenciement été remplie de ses droits en matière de salaire ;

Que par suite, Madame R... sera déboutée de ses demandes de ces chefs, le jugement entrepris étant infirmé sur ces points ;

4) Sur le reclassement

Attendu qu'il y a lieu de constater que si les parties développent des moyens relatifs au respect ou à l'irrespect par l'employeur de son obligation de reclassement, aucune demande n'est émise sur ce point dans le dispositif des écritures de l'appelant, ni dans celui de l'intimée ;

Que les dispositions du jugement, ayant débouté Madame R... de sa demande de 10 000 euros de dommages et intérêts de ce chef, n'étant pas querellées, il convient ainsi de les confirmer ;

5) Sur la demande de déduction de sommes

Attendu que le C.F.A. de Haute-Corse sollicite de dire et juger que les sommes de 25441,87 euros versées à Madame R... le 16 avril 2015 au titre de son solde de tout compte devront être déduites des éventuelles condamnations pécuniaires à venir prononcées ;

Que toutefois, au regard des règles applicables au licenciement nul (pour absence d'autorisation préalable de l'Inspection du travail) d'un salarié protégé, conseiller prud'homme, dont la réintégration n'est pas demandée, il n'est aucunement justifié de déduire des condamnations prononcées (en l'occurrence indemnitaires) dans le cadre de la présente décision, les sommes perçues par la salariée au titre du solde de tout compte, à titre de salaires (indemnité de résidence comprise), prime de treizième mois, prime de transport et indemnité légale de licenciement ;

Que consécutivement, le C.F.A. de Haute-Corse sera débouté de sa demande, le jugement entrepris étant confirmé avec substitution de motifs à cet égard en ce qu'il a implicitement rejeté cette demande ;

6) Sur les autres demandes

Attendu que le C.F.A. de la Haute-Corse, succombant principalement à l'instance, sera condamné aux dépens de première instance (le jugement entrepris étant confirmé, avec substitution de motifs, à cet égard, sous la seule réserve que la condamnation concerne le C.F.A. de la Haute-Corse, pris en la personne de son représentant légal) et de l'instance d'appel ;

Que l'équité ne commande pas de prévoir de condamnation sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance (le jugement entrepris étant infirmé sur ce point) et des frais irrépétibles d'appel ;

Que les parties seront déboutées de leurs demandes plus amples ou contraires à ces égards ;

PAR CES MOTIFS

L A C O U R,

Statuant publiquement, contradictoirement, par mise à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes d'Ajaccio le 6 février 2018, tel que déféré, uniquement en ce qu'il a:
- dit et jugé le licenciement de Madame F... R... nul,

- débouté Madame F... R... de sa demande de condamnation du C.F.A. de la Haute-Corse à lui verser une somme de 10 000 euros de dommages et intérêts au titre du reclassement,
- implicitement débouté le C.F.A. de la Haute-Corse de sa demande tendant à dire et juger que les sommes de 25 441,87 euros versées à Madame R... le 16 avril 2015 au titre de son solde de tout compte devront être déduites des éventuelles condamnations pécuniaires à venir,
- condamné le C.F.A. de la Haute-Corse aux dépens, sous la seule réserve que la condamnation concerne le C.F.A. de la Haute-Corse, pris en la personne de son représentant légal,

Et statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

DIT que le 16 avril 2015, date de notification du licenciement à Madame R..., constitue la date de rupture du contrat de travail liant les parties,

CONDAMNE le C.F.A. de la Haute-Corse, pris en la personne de son représentant légal, à verser à Madame F... R... les sommes de :
30 844,80 euros au titre de l'indemnité pour violation du statut protecteur,
20 000 euros au titre de l'indemnité réparant l'intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement, déclaré nul,

DEBOUTE Madame F... R... de ses demandes de rappel de salaires et congés payés afférents et d'indemnité pour procédure irrégulière,

DEBOUTE les parties de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel,

CONDAMNE le C.F.A. de la Haute-Corse, pris en la personne de son représentant légal, aux dépens de l'instance d'appel,

DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Formation : 04
Numéro d'arrêt : 18/000464
Date de la décision : 16/01/2019
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bastia;arret;2019-01-16;18.000464 ?
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