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08/03/2017 | FRANCE | N°15/00019

France | France, Cour d'appel de Bastia, Chambre civile, 08 mars 2017, 15/00019


Ch. civile A

ARRET No
du 08 MARS 2017
R. G : 15/ 00019 EB-C
Décision déférée à la Cour :
Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance de BASTIA, décision attaquée en date du 25 Novembre 2014, enregistrée sous le no 12/ 02118

X...
Y...

C/
Z...
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
HUIT MARS DEUX MILLE DIX SEPT
APPELANTS :
Mme Sandrine X... épouse Y...
née le 02 Avril 1969 à BORDEAUX (33000)
...
20247 ROGLIANO

assistée de Me Philippe JOBIN de la SCP RENÉ JOBIN PHILIPPE JOBIN, avocat au barre

au de BASTIA

M. Diego Y...
né le 31 Août 1965 à BORDEAUX (33000)
...
20247 ROGLIANO

assisté de Me Philippe JOBIN de la SCP REN...

Ch. civile A

ARRET No
du 08 MARS 2017
R. G : 15/ 00019 EB-C
Décision déférée à la Cour :
Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance de BASTIA, décision attaquée en date du 25 Novembre 2014, enregistrée sous le no 12/ 02118

X...
Y...

C/
Z...
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
HUIT MARS DEUX MILLE DIX SEPT
APPELANTS :
Mme Sandrine X... épouse Y...
née le 02 Avril 1969 à BORDEAUX (33000)
...
20247 ROGLIANO

assistée de Me Philippe JOBIN de la SCP RENÉ JOBIN PHILIPPE JOBIN, avocat au barreau de BASTIA

M. Diego Y...
né le 31 Août 1965 à BORDEAUX (33000)
...
20247 ROGLIANO

assisté de Me Philippe JOBIN de la SCP RENÉ JOBIN PHILIPPE JOBIN, avocat au barreau de BASTIA

INTIMEE :

Mme Danielle Josée Jeannine Z... épouse A...
née le 08 Février 1948 à MARSEILLE
...
13009 MARSEILLE

assistée de Me Jean Pierre SEFFAR, avocat au barreau de BASTIA

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 09 janvier 2017,
devant M. François RACHOU, Premier président, et Micheline BENJAMIN, Conseiller, l'un de ces magistrats ayant été chargé du rapport, sans opposition des avocats.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. François RACHOU, Premier président
Mme Micheline BENJAMIN, Conseiller
Mme Emmanuelle BESSONE, Conseiller

GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme Cécile BORCKHOLZ.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 08 mars 2017.
ARRET :
Contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par M. François RACHOU, Premier président, et par Mme Cécile BORCKHOLZ, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Par acte notarié du 18 décembre 1995, M. Diego Y... et Mme Sandrine X... épouse Y... ont acquis des consorts B...les parcelles cadastrées à Rogliano section L no1452, 1453, 1460, 1464 et 1465.

Par acte notarié du 26 avril 2002, les époux Y... ont reçu de la commune de Rogliano en échange d'une parcelle 1654, les parcelles cadastrées section L no1656, 1657, 1658 et 1661.
Par acte authentique du 1er décembre 1995, Mme Danielle Z... a acquis de M. Christian C...le premier étage et un grenier de la maison sise sur la commune de Rogliano (Haute-Corse) cadastrée section L no1451.

Par acte du 23 octobre 2013, les époux Y... ont acquis de Mme D...fille de feu Pierre E...le rez-de-chaussée et le sous-sol de la maison cadastrée L1451.

Ils sont donc devenus copropriétaires avec Mme Z... épouse A... de la maison cadastrée L1451.
Contre la façade de celle-ci, Mme Z... a fait construire une terrasse surplombant la cour de la parcelle L1451.
Par acte d'huissier du 20 novembre 2013, les époux Y... ont fait assigner Mme Z... épouse A... devant le tribunal de grande instance de Bastia, afin d'entendre dire qu'elle ne bénéficie pas d'une servitude de passage sur la parcelle L1452, et de la voir condamner à supprimer sous astreinte toutes les vues droites à moins de 19 décimètres des parcelles L1452 et L1661 leur appartenant.

Par jugement du 25 novembre 2014, le tribunal de grande instance de Bastia a :

- dit prescrite l'action en démolition de la terrasse de Mme Z...,
- dit que Mme Z... était titulaire d'une servitude de passage permettant l'accès à l'appartement à l'étage et aux greniers dont elle est propriétaire dans la maison cadastrée L1451, par un escalier se prolongeant jusqu'à la terrasse dépendant des maisons édifiées sur les parcelles 1452 et 1453 voisines,
- dit mal fondée la demande de Mme Danielle Z... épouse A... d'acquisition de la copropriété du sol de la parcelle sise à Rogliano et cadastrée L1352 donnant accès à son appartement,
- désigné Me Joëlle F... huissier de justice au sein de la SELARL HJ2B afin de :
* procéder à la mesure de la distance entre les différents points (notamment les extrémités) du mur édifié sur la parcelle cadastrée L1451 par Mme Z...A...en parallèle de la parcelle sise à Rogliano cadastrée L1661 appartenant aux époux Y..., et la parcelle L1661,
* procéder à la mesure de la distance entre différents points et notamment les extrémités du mur édifié sur la parcelle L1451
en parallèle de la parcelle cadastrée L1452 appartenant aux époux Y..., et la parcelle L1452,
sous réserve d'une consignation de 500 euros à valoir sur les honoraires de l'huissier, et à verser par les époux Y...,
- réservé sa décision sur les frais irrépétibles et les dépens.

Par déclaration du 09 janvier 2015, M. Diego Y... et Mme Sandrine X... épouse Y... ont interjeté appel de cette décision.

Par conclusions récapitulatives notifiées le 25 mars 2016, M. Diego Y... et Mme Sandrine X... épouse Y... demandent à la cour :

- de réformer la décision entreprise,
- de constater que Mme Z... s'est appropriée en partie la parcelle cadastrée L1451 constituant une partie commune, en y construisant une terrasse sans autorisation du copropriétaire,
- de dire que l'action des époux Y... est une action réelle qui se prescrit par trente ans,
- d'ordonner à Mme Z... de remettre les lieux en état sous astreinte de 200 euros par jour de retard dans les trois mois de la signification de l'arrêt à intervenir,
- de dire que Mme Z... ne possède pas de titre recognitif de servitude de passage sur les parcelles 1452 et 1453,
- de confirmer la décision du tribunal en ce qu'il a dit Mme Z... mal fondée en sa demande d'acquisition de la propriété du sol de la parcelle 1452, et désigné Me F...Huissier de justice afin de procéder aux mesures enre la terrasse édifiée par Mme Z... sur la parcelle 1451 et leurs parcelles 1661 et 1452,
- de condamner Mme Z... à leur payer la somme de 2. 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Les époux Y... font valoir que les règles de la copropriété s'appliquent à la maison cadastrée L1451, même si la copropriété est actuellement inorganisée.
Ils indiquent que pour réaliser une terrasse privative contre le mur Ouest, qui surplombe la quasi-totalité de la partie non bâtie de la parcelle L1451, Mme Z... épouse A... aurait dû solliciter l'autorisation de la copropriété, ce qu'elle n'a pas fait, et que si les enfants de M. Pierre E...attestent avoir donné leur autorisation à ces travaux, une telle autorisation était de nature à modifier un droit réel immobilier dépendant du patrimoine de Pierre E...et ne pouvait être donnée pour son compte par ses enfants.
Ils considèrent que leur action échappe à la prescription décennale prévue à l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965 en ce qu'elle tend à rétablir la destination de parties communes conformément au règlement de copropriété ou à leur nature d'origine, et que Mme Z... épouse A... s'est appropriée les parties communes.
Ils précisent que leur demande de démolition de la terrasse n'est pas nouvelle, puisqu'elle tend aux mêmes fins que les demandes initiales, à savoir qu'il soit mis fin à l'appropriation.
Les époux Y... ajoutent que le tribunal a considéré à tort que le bien de Mme Z... épouse A... bénéficiait d'une servitude de passage sur la parcelle L1452, dans la mesure où la mention insérée dans son titre de propriété à la rubrique " servitude " est insuffisante et trop imprécise pour constituer le titre exigé par l'article 695 du code civil, et où la fiche hypothécaire de la parcelle L1452 ne fait aucune référence à une servitude.
Ils demandent à la cour d'écarter les attestations produites, non conformes aux dispositions de l'article 202 du code de procédure civile, et manifestement pré-rédigées.
Ils estiment que si la parcelle L1451 avait été partiellement enclavée, le passage devait d'abord être demandé à l'autre copropriétaire, et qu'il résulte des pièces du dossier qu'en 1963 une cour existait et faisait partie intégrante de cette parcelle, de sorte l'actuel accès n'existait pas.
Ils soulignent enfin qu'aucune servitude n'est mentionnée ni dans l'acte de notoriété acquisitive du 04. 08. 1976, ni dans l'acte de vente de M. I...à M. C...du 18. 12. 1984.

L'état d'enclave au sens de l'article 682 du code civil apparaît aux appelants devoir être exclu, puisque la parcelle L1451 jouxte la voie publique.

M. et Mme Y... font enfin valoir que Mme Z... épouse A... ne justifie pas d'une possession paisible, publique, continue, non équivoque et à titre de propriétaire sur leur parcelle L1452.

Par conclusions du 09. 02. 2016, notifiées par voie électronique, Mme Danielle Z... épouse A... entend voir :

- dire irrecevable la prétention nouvelle tendant à réclamer restitution de la propriété du sol,
- prendre acte de la modification de la servitude par les époux Y...,
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit qu'elle était tiulaire d'une servitude de passage permettant l'accès à son appartement à l'étage et au grenier de la parcelle L1451, par un escalier se prolongeant jusqu'à la terrasse dépendant des maisons édifiées sur les parcelles L1452 et L1453,
- constater en tout état de cause l'état d'enclave de la parcelle L1451,
- dire qu'elle est fondée à réclamer sur la parcelle L1452 un passage suffisant pour assurer la desserte complète de son fonds,
- confirmer le jugement en ce qu'il a dit prescrite l'action en démolition de la terrasse,
- de dire la demande en démolition et la demande en restitution non fondées, compte tenu de l'accord donné par les autres copropriétaires,
- rejeter la demande de suppression de vues droites sur la parcelle L1452,
- subsidiairement, dire que Mme Z... épouse A... a prescrit l'assiette et le mode de servitude de passage en cause,
- plus subsidiairement, de dire qu'elle a prescrit par possession trentenaire la copropriété du sol de la parcelle L1452 donnant accès à son fonds,

- en conséquence, de rejeter toute demande de suppression de vues droites,

- encore plus subsidiairement, ordonner une expertise afin de constater l'état d'enclave,
- condamner M. et Mme Y... à lui payer la somme de 2. 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Mme Z... née A... fait valoir que son titre de propriété sur la parcelle L1451 comme le titre de propriété des appelants mentionnent au registre " Servitudes ", que " l'accès à l'appartement s'est toujours fait depuis l'origine, par un escalier se prolongeant jusqu'à la terrasse dépendant des maisons attenantes cadastrées section L1452 et L1453 ", ce qui est confirmé par l'ancien propriétaire, l'ancien locataire de la maison, et d'autres témoins.
Elle considère que son appartement est enclavé, puisqu'il n'a pas d'issue sur la voie publique, que l'installation d'une terrasse n'a rien changé à cette situation, et qu'elle a par possession trentenaire acquis non pas une servitude de passage, mais une assiette et un mode de passage.
Il s'agit selon elle d'un titre recognitif, c'est-à-dire d'une manifestation de volonté non équivoque de reconnaître un fait de nature à produire des conséquences juridiques.
Elle conteste qu'un autre passage ait jamais existé.
Elle ajoute qu'alors que la procédure est en cours, les époux Y... ont démoli l'escalier donnant accès à la terrasse, et ont édifié un autre escalier donnant accès directement à l'appartement de Mme Z..., ce qui signifie qu'ils reconnaissent l'état d'enclave. Ce faisant, ils ont modifié d'office l'assiette de la servitude sans justifier que les conditions prévues à l'article 701 du code civil étaient remplies, et sans demander une quelconque autorisation à la propriétaire du fonds dominant.
Mme Z... épouse A... estime avoir prescrit la propriété du passage en cause.
En ce qui concerne les vues dont elle dispose, elle rappelle que l'article 678 du code civil interdit les vues droites sur le fond voisin si celui-ci est situé à moins de 19 décimètres de distance, à moins que le fonds ou la partie de fonds sur lequel s'exerce la vue, ne soit déjà grevé, au profit du fonds qui en bénéficie, d'une servitude de passage.
L'intimée considère que les appelants ne rapportent pas la preuve de ce que la distance entre la terrasse créée et la parcelle est inférieure à 19 décimètres, mais ne s'oppose pas à ce qu'un huissier de justice soit désigné afin de procéder à une mesure excate et contradictoire, aux frais avancés des époux Y....
Elle soulève la prescription décennale de l'action en démolition de la terrasse en application de l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965, au motif qu'il s'agit d'une action à caractère personnel, et non pas d'une action en revendication ou en restitution de parties communes qui présentant un caractère réel, est soumise à la prescription trentenaire.
Elle rappelle que Mme E...propriétaire de la parcelle avant les époux Y..., avait donné son autorisation à la mise en place sur sa parcelle de pilliers de soutien de la terrasse en 2003.

La clôture de l'instruction a été ordonnée le 25 mai 2016, et l'affaire fixée pour être plaidée au 09 janvier 2017.

MOTIFS

Sur la servitude de passage

L'acte notarié du 01. 12. 1995 de vente des lots 1 et 2 de la maison d'habitation implantée sur la parcelle cadastrée L1451 à Rogliano, par M. Christian C...à Mme Danielle Z... stipule au chapitre " Servitudes " :
" Il profitera des servitudes actives et supportera celles passives, conventionnelles ou légales, apparentes ou occultes, continues ou discontinues, pouvant grever l'immeuble vendu, le tout à ses risques et périls, sans recours contre le vendeur et sans que la présente clause puisse donner à qui que ce soit plus de droits qu'il n'en n'aurait en vertu de titres réguliers non prescrits ou de la loi.
A ce sujet, le vendeur déclare qu'il n'a créé, ni laissé créer aucune servitude sur l'immeuble vendu, sauf celles pouvant résulter de la situation naturelle des lieux, de la loi ou de l'urbanisme.
Il déclare en outre que l'accès à l'appartement présentement vendu s'est toujours fait, depuis l'origine, par un escalier se prolongeant jusqu'à la terrasse dépendant des maisons attenantes cadastrées section L no1452 et 1453 ".

Par ailleurs, l'acte notarié du 18. 12. 1995 publié le 05. 02. 1996 par lequel les époux Y... ont acquis les parcelles cadastrées à Rogliano section L no1452, 1453, 1460, 1464 et 1465, stipule au chapitre " Servitudes " :
" Il profitera des servitudes actives et supportera celles passives, conventionnelles ou légales, apparentes ou occultes, continues ou discontinues, pouvant grever l'immeuble vendu, le tout à ses risques et périls, sans recours contre le vendeur et sans que la présente clause puisse donner à qui que ce soit plus de droits qu'il n'en n'aurait en vertu de titres réguliers non prescrits ou de la loi.
A ce sujet, le vendeur déclare qu'il n'a créé, ni laissé créer aucune servitude sur l'immeuble vendu, sauf celles pouvant résulter de la situation naturelle des lieux, de la loi ou de l'urbanisme.
Il déclare en outre que l'accès à l'appartement dépendant de la maison 1451 s'est toujours fait, depuis l'origine, par un escalier se prolongeant jusqu'à la terrasse dépendant des maisons 1452 et 1453 présentement vendues ".

Le fait que ce droit de passage soit mentionné au registre des servitudes, à la fois dans l'acte d'achat du fonds servant et dans celui du fonds dominant, à quelques jours d'intervalle, établit que les parties ont, quelle que soit la formulation de ce droit dans les actes, entendu constituer une servitude de passage au profit des lots 1 et 2 de la parcelle 1451, à la charge de la parcelle 1452. Il s'agit d'un titre constitutif et non pas recognitif de servitude.
Le fait qu'aucune servitude n'ait été mentionnée dans l'acte de vente passé en 1984 entre M. I...et M. C...est sans importance, puisque les parties à la présente procédure ont entendu la formaliser dans leurs titres de propriété respectifs en 1995, et consacrer ainsi une tolérance de passage qui existait précédemment depuis plusieurs décennies, ainsi qu'il résulte des attestations de M. C...et de M. J....
C'est donc à juste titre que le tribunal a dit que Mme Z... épouse A... était tiulaire d'une servitude de passage.
La demande tendant à voir reconnaître l'acquisition par l'intimée de la propriété du sol de la parcelle L1452 n'est pas fondée, la possession devant être continue, ce qui n'est pas le cas d'une servitude de passage.
Le jugement sera confirmé de ces chefs.

La demande tendant à voir reconnaître l'état d'enclave devient sans objet.

Il n'y a pas lieu de prendre acte de la modification de la servitude de passage par les époux Y... dans la mesure où cette modification n'a été objectivée par aucune pièce.

Sur la demande de démolition de la terrasse

Cette demande avait bien été présentée en première instance, dans les dernières conclusions des époux Y..., comme l'indique le jugement entrepris. Elle n'est donc pas nouvelle en cause d'appel.
L'article 42 de la loi no65-557 du 10 juillet 1965 dispose que sans préjudice des textes spéciaux fixant des délais plus courts, les actions personnelles nées de l'application de la présente loi entre des copropriétaires, ou entre un copropriétaire et le syndicat, se prescrivent par un délai de dix ans.
Les époux Y... indiquent que leur action tend " à restituer aux parties communes (de la parcelle L1451) ce dont un propriétaire s'est injustement approprié, empêchant l'autre copropriétaire de jouir normalement de ces parties communes ".
Le fait que la cour de la parcelle L1451 soit une partie commune n'a jamais été contesté par Mme Z..., qui a demandé et obtenu l'autorisation d'y implanter les deux piliers soutenant sa terrasse suspendue.
L'action des époux Y... constitue donc bien une action personnelle dirigée par un copropriétaire contre un autre, au motif qu'il l'empêche de jouir normalement des parties communes, et non pas d'une action réelle en revendication de propriété au préjudice ou en faveur des parties communes.
L'action est donc soumise au délai de prescription décennale.
Or ainsi que l'a relevé le tribunal, il ressort des pièces produites que les travaux de réalisation de la terrasse suspendue ont été payés et donc achevés en août 2013, alors que l'assignation a été délivrée le 20 novembre 2013, un mois après l'acquision par M. et Mme Y... de leur parcelle.

Il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré cette action prescrite.

Sur les vues droites

L'article 678 du code civil dispose que l'on ne peut avoir de vues droites ou fenêtres d'aspect, ni balcons ou autres semblables saillies sur l'héritage clos ou non clos de son voisin, s'il n'y a 19 décimètres de distance entre le mur où on les pratique et ledit héritage, à moins que le fonds ou la partie de fonds sur lequel s'exerce la vue ne soit déjà grèvé au profit du fonds qui en bénéficie, d'une servitude de passage faisant obstacle à l'édification de constructions.
Il résulte de ces dispositions que l'existence d'une servitude de passage ne dispense du respect de ces distances minimum que lorsqu'elle fait obstacle à l'édification de construction, ce qui apparaît logique : Les vues ne pourront apporter aucune gêne dès lors qu'aucune construction ne sera possible dans leur champs.
Si Mme Z... bénéficie d'une servitude de passage sur la parcelle L1452, cette servitude n'empêche nullement les constructions sur le fonds sur lequel donne la vue depuis sa terrasse, à savoir la parcelle L1661, qui est située en hauteur au dessus de la parcelle L1452.
Elle doit donc respecter les distances prescrites par l'article 678 du code civil.
L'article 680 du même code précise que la distance se compte depuis le parement extérieur du mur où l'ouverture se fait, et, s'il y a balcons ou autres semblables saillies, depuis la ligne extérieure jusqu'à la ligne de séparation des deux propriétés.
En l'absence de mesure certaine au dossier, il convient de confirmer la mesure d'instruction ordonnée par le tribunal et confiée à un huissier de justice, sous réserve d'une consignation à charge des époux Y....
La décision devra enfin être confirmée en ce qu'elle a réservé les dépens et frais irrépétibles de première instance.
Parties succombantes en appel, M. et Mme Y... devront supporter les dépens d'appel. Il apparaît cependant équitable de ne pas faire application de l'article 700 à leur encontre.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,

- CONFIRME le jugement du tribunal de grande instance de BASTIA du 25 novembre 2014 en toutes ses dispositions ;

- DEBOUTE M. Diego Y... et Mme X... épouse Y... de leurs demandes tendant à voir démolir la terrasse de Mme Danielle Z... épouse A... sous astreinte ;
Y ajoutant :
- DECLARE sans objet la demande tendant à voir reconnaître l'état d'enclave ;
- DEBOUTE Mme Z... épouse A... Danielle de sa demande tendant à ce qu'il soit pris acte de la modification de la servitude de passage par les époux Y... ;
- DEBOUTE les parties de leurs demandes en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel ;
- CONDAMNE M. Diégo Y... et Mme Sandrine X... épouse Y... aux dépens d'appel.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 15/00019
Date de la décision : 08/03/2017
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bastia;arret;2017-03-08;15.00019 ?
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